Score historique du RN aux élections européennes, a,nnonce dans la foulée de la dissolution de l'Assemblée nationale, élections législatives à venir... Écoutez l'interview de l'ancien Premier ministre Édouard Philippe, maire du Havre et président du parti Horizon.
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 11 juin 2024
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 11 juin 2024
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 *Générique*
00:04 Il est 7h42, Armandine Bégaud, vous recevez donc ce matin l'ancien Premier ministre et maire du Havre, Édouard Philippe.
00:08 Édouard Philippe, c'est la toute première fois que vous prenez la parole depuis l'annonce de cette dissolution.
00:12 Parole attendue, puisque vous êtes l'un des hommes forts de cette majorité, président du parti Horizon.
00:18 Le président vous a prévenu par téléphone dimanche soir.
00:21 Qu'est-ce que vous vous êtes dit sincèrement quand il vous a dit "je vais dissoudre" ?
00:26 - Je me suis dit qu'on entrait dans une phase qui était une phase...
00:32 Compliquée et déterminante pour le pays.
00:36 - Vous vous êtes dit quoi ? C'est un coup de poker, Paris fou ?
00:40 - Non, je n'ai pas...
00:42 Écoutez, je vais vous dire, je pense que les causes et les motivations du président de la République pour...
00:50 Prononcer cette dissolution, il faut lui poser la question, elle lui appartiennent.
00:53 A la fin de la fin, redonner la parole aux français, c'est jamais une mauvaise idée.
00:57 Donc de ce point de vue là, je ne peux pas me...
01:00 Voilà, je suis heureux que les français puissent avoir leur destin en main
01:03 et puissent par la prochaine élection déterminer ce qu'ils veulent.
01:06 - Mais je me trompe, c'est pas tout à fait ce que vous aviez prévu.
01:09 - Personne.
01:10 Personne n'avait prévu la dissolution le soir des élections.
01:12 Il y a un effet de surprise, évidemment.
01:15 Mais encore une fois, je vais vous dire, on peut faire la discussion sans cesse sur les causes et sur les effets.
01:22 Le fait politique, c'est qu'il y a eu dissolution.
01:23 Le fait politique, c'est que dans trois semaines, il y a des élections législatives.
01:26 Le fait politique, c'est que les français doivent déterminer quelle majorité ils veulent demain.
01:30 Et ça, c'est pas une petite question.
01:32 - La question, disait Gérald Darmanin, des dimanches soirs, c'est
01:35 "Voulez-vous vraiment que le Rassemblement National gouverne la France ?"
01:37 C'est ça la question qu'il faut se poser ?
01:39 - Le Rassemblement National a gagné l'élection européenne.
01:44 Et de toute évidence, il est, parce qu'il a gagné l'élection européenne,
01:48 le favori de la prochaine élection législative.
01:51 Ça ne me réjouit pas d'avoir à le dire, mais regarder ailleurs en disant "non non, c'est pas ça".
01:57 La vérité, c'est qu'ils sont les favoris.
01:58 Donc la question, c'est pas de se dire "qu'est-ce qui va se passer"
02:02 et de commenter ce qui pourrait se passer.
02:04 - Mais qu'est-ce qu'on fait ? Et alors c'est quoi le plan justement, Édouard Philippe ?
02:06 - La question, c'est de construire une nouvelle majorité.
02:08 - Comment ?
02:09 - D'abord en commençant par les idées, parce qu'en politique, il faut toujours commencer par les idées.
02:12 Vous pouvez avoir tous les accords d'appareil que vous voulez bien, l'important, c'est les idées.
02:15 Donc, qu'est-ce qu'on fait ?
02:17 Moi, je considère que si on veut construire une nouvelle majorité,
02:21 il faut d'abord partir du principe simple
02:23 qu'aucun parti politique à lui seul
02:26 n'est en mesure de mettre en œuvre quelque chose à la hauteur des enjeux des Français.
02:30 Et donc, il faut être ouvert.
02:33 Accepter que sur un certain nombre de points, on puisse travailler avec d'autres.
02:37 - Mais alors sur quoi ?
02:38 - Ça me paraît le premier état d'esprit, et en tout cas c'est celui qu'à horizon,
02:42 on va porter avec les candidats.
02:44 La deuxième chose qui me paraît évidente, c'est qu'il faut avoir les idées claires sur ce qu'on veut faire.
02:49 D'abord, notre pays doit absolument refuser l'immobilisme.
02:53 Le monde change à toute vitesse.
02:54 On a souvent l'impression en France qu'il faut regarder à l'intérieur des frontières.
02:57 On aime regarder à l'intérieur de nos frontières.
02:59 La vérité, c'est que le monde change à toute vitesse et que si on ne change pas, on est cuit.
03:03 Donc, il faut expliquer ça.
03:05 Il faut refuser l'immobilisme.
03:07 La deuxième chose, c'est qu'il faut remettre de l'ordre dans notre maison.
03:10 De l'ordre dans nos comptes.
03:11 Nous sommes en train de nous abandonner.
03:13 Nous sommes en train de nous fragiliser.
03:15 Il faut remettre de l'ordre dans nos comptes.
03:16 Il faut remettre de l'ordre dans nos rues.
03:18 Parce que le sentiment d'insécurité, la réalité de l'insécurité,
03:22 est en train d'être un facteur corrosif pour notre société.
03:26 Je dirais même qu'il faut remettre un peu d'ordre dans nos têtes.
03:28 Je vois des tentations inouïes d'antisémitisme,
03:32 de remise en cause des fondements de la République.
03:34 Donc, on doit se battre pour nos valeurs républicaines.
03:37 - Mais pardon Edouard, je suis tout seul.
03:38 - Attendez, attendez, pardon, mais j'y vais.
03:41 Donc, on doit se battre pour nos valeurs républicaines,
03:44 pour la laïcité, pour l'égalité, pour la liberté.
03:48 Remettre de l'ordre, faire confiance aux Français.
03:52 Aujourd'hui, la classe moyenne est en train d'être écrasée,
03:57 appauvrie dans une très large mesure.
03:59 Si on ne redonne pas confiance à la classe moyenne française,
04:04 notre République et notre démocratie ne s'en remettront pas.
04:06 Comment est-ce qu'on redonne confiance à la classe moyenne française ?
04:10 D'abord en faisant fonctionner l'école.
04:12 On ne peut pas vivre avec une classe moyenne,
04:14 avec nos enfants qui pensent que leur avenir est confisqué,
04:17 qui n'ont pas de perspective de progression sociale,
04:19 que la planète va cramer et qu'on ne va pas s'en sortir.
04:22 Donc, si on veut cesser cette espèce d'idée de confiscation de l'avenir,
04:26 ce pessimisme qui est en train de détruire la société française,
04:30 on doit faire en sorte que l'école fonctionne,
04:31 on doit faire en sorte qu'on puisse s'enrichir par son travail.
04:35 J'ai l'impression de dire un truc,
04:37 quand je m'écoute j'ai l'impression de revenir au fondement...
04:38 - Mais c'est ce que j'allais vous dire, et pardon...
04:40 - On doit s'enrichir par son travail.
04:42 - Mais ce que vous nous dites ce matin, Edouard Philippe,
04:42 on l'entend depuis des mois et des mois.
04:44 - Eh bien il faut le construire ensemble.
04:45 - Ça fait 7 ans qu'Emmanuel Macron est au pouvoir.
04:47 - Et on a fait beaucoup de choses pour essayer d'être dans ce sens-là,
04:49 que ce soit à l'école, que ce soit sur le marché du travail.
04:52 Mais si vous me dites comment est-ce qu'on construit une future majorité,
04:55 je vous dis, en posant des principes clairs,
04:57 en sachant que ces principes, ils ne sont pas partagés simplement
05:00 par ceux qui sont à l'intérieur de la majorité aujourd'hui,
05:03 et à qui il faut...
05:05 Il ne faut pas dire à ceux qui sont à l'extérieur de la majorité,
05:07 "Venez puisque vous êtes d'accord avec nous."
05:09 Il faut leur dire, "Construisons ensemble quelque chose
05:12 qui va dans l'intérêt du pays."
05:13 - Et alors c'est qui, cela ?
05:14 - Il y a 3 ans avant 2027.
05:15 Il y a une élection législative dans 3 semaines,
05:17 il y a 3 ans avant 2027.
05:19 - On la construit avec qui cette coalition ?
05:20 Les Républicains ? Le Parti Socialiste ?
05:22 - Avec toutes les forces politiques à l'intérieur du Bloc central.
05:27 - Du PS aux Républicains ?
05:29 - Mais... Bien sûr !
05:32 Il faut dire qui on est, moi j'ai aucun problème à dire qui je suis,
05:34 ce à quoi je crois, et il faut accepter l'idée
05:36 qu'on va devoir travailler avec d'autres.
05:37 Et avec d'autres qui ne sont pas d'accord avec nous surtout.
05:39 Et je sais que c'est difficile de construire cet état d'esprit,
05:42 parce qu'en France, dans les partis politiques,
05:44 règne souvent une espèce de sectarisme et de méfiance insupportable.
05:49 Je sais aussi qu'à droite,
05:52 M. Ciotti a commencé les discussions en disant qu'il n'y aurait jamais...
05:56 - Il a dit jamais !
05:57 - ...jamais de coalition.
05:57 - Dimanche soir, à 20h.
05:59 - Et ensuite, on apprend quand même qu'au Rassemble national,
06:02 on discute avec un certain nombre de cadres de LR.
06:06 Vous leur dites quoi d'ailleurs à ces cadres de LR
06:08 qui seraient tentés de rejoindre le RN ce matin ?
06:10 C'est votre ancienne famille !
06:11 - Je leur dis que nous pouvons construire ensemble
06:17 des politiques qui sont indispensables pour le pays
06:20 pendant les trois ans qui viennent.
06:21 Notre pays ne peut pas attendre.
06:23 Il ne peut pas s'abandonner dans une espèce d'immobilisme
06:26 lié à un blocage complet.
06:29 C'est extrêmement dangereux pour le pays.
06:31 Ça ne servira à personne, si ce n'est les extrêmes
06:33 qui eux, sont en train de s'organiser.
06:34 - Et au PS qui a signé un accord pour se mettre d'accord
06:38 hier soir avec le reste des forces de gauche ?
06:41 - Je suis certain qu'il y a plein de gens,
06:43 je ne sais pas si c'est au PS ou dans l'électorat socialiste,
06:48 qui entendent ce que je viens de dire comme priorité,
06:52 qui peuvent s'y retrouver et qui seraient enchantés.
06:55 Pour autant qu'on ne leur demande pas
06:58 de succomber à la majorité présidentielle
07:01 telle qu'elle existe jusqu'à présent,
07:03 qui serait parfaitement partant pour essayer de trouver
07:05 les politiques publiques nécessaires pour le pays.
07:07 - Donc ça doit se faire au cas par cas, pardon Edouard ?
07:09 - Et donc je crois qu'il faut construire cette majorité.
07:12 Je crois qu'il faut ouvrir cette majorité
07:13 pour qu'elle puisse se construire.
07:15 Sinon, l'alternative, ce sera soit le Rassemblement National,
07:19 et je pense que c'est mauvais pour le pays,
07:21 soit une espèce de candidature un peu fantasmée
07:25 d'une union de la gauche qui, jusqu'à dimanche soir,
07:27 se détestait, se divisait,
07:30 n'était pas très loin de s'insulter, n'était d'accord
07:32 ni sur la politique internationale, ni sur un certain nombre de choses,
07:35 et qui, par le miracle de la dissolution,
07:37 a trouvé une organisation qui ressemble plus,
07:39 ressemble-t-il, à une étiquette et à du marketing,
07:42 qu'à un projet de gouvernement.
07:43 Bon, écoutez, si on veut éviter
07:46 le désordre de l'Assemblée Nationale que nous avons connu
07:48 entre un Rassemblement National et des LFI,
07:51 et d'une espèce de polarisation absurde,
07:53 je crois qu'il faut construire cette majorité
07:55 dans le Bloc Central.
07:56 C'est ce que je veux faire,
07:57 c'est ce que les candidats horizon veulent faire,
07:59 et c'est ce à quoi je vais m'employer
08:02 pendant les trois semaines qui viennent,
08:03 tous les jours,
08:04 pour essayer de construire cette future majorité.
08:05 - Vous serez candidat pour ces législatives ?
08:07 - Moi, je suis maire du Havre,
08:08 et pendant trois semaines, je vais faire campagne tous les jours.
08:10 J'ai libéré tout mon agenda,
08:11 je veux défendre les candidats horizon
08:13 et essayer de construire cette majorité.
08:15 Je ne peux pas vous dire mieux.
08:16 - Et si cette construction de majorité,
08:17 elle passe par un Edouard Philippe à nouveau Premier ministre,
08:20 vous pourriez être le chef de cette grande majorité ?
08:22 C'est oui ou c'est non ?
08:22 - Mais on n'en est pas là.
08:24 Mais vraiment pas, vous voyez.
08:26 Et puis, ce n'est pas mon ambition d'être Premier ministre.
08:28 - Votre ambition ?
08:28 - Personnellement, je vois ce que c'est que d'être Premier ministre.
08:32 Ce n'est pas mon ambition.
08:33 Mais mon ambition, c'est de permettre à notre pays
08:38 de ne pas perdre trois ans
08:40 et de ne pas s'abandonner pendant trois ans.
08:42 On a la possibilité, me semble-t-il,
08:44 de construire une majorité
08:45 qui permet de répondre aux inquiétudes qui sont réelles,
08:48 et parfois à la colère, qui est réelle, des Français.
08:51 Remettre de l'ordre,
08:52 refaire confiance aux Français,
08:54 faire en sorte que l'école fonctionne,
08:55 que les services publics fonctionnent,
08:57 faire en sorte de faire confiance aux Français,
08:58 de faire confiance aux élus, bien entendu, dans la décentralisation,
09:01 mais de faire confiance aux Français,
09:02 redonner un souffle de liberté dans notre pays.
09:05 C'est difficile.
09:06 On a des lois dans tous les sens.
09:07 Mais c'est indispensable.
09:08 Et je suis certain, certain,
09:11 que ces idées,
09:12 elles peuvent rassembler très au-delà de la majorité actuelle.
09:15 Très au-delà de la majorité actuelle.
09:17 Donc il y a un moment où il faut se parler,
09:18 où il faut construire quelque chose ensemble,
09:20 parce que sinon le pays va aller beaucoup plus mal.
09:22 - Edouard Philippe, vous avez été à Matignon.
09:24 Je le rappelais, est-ce que Jordan Bardella est capable d'être Premier ministre ?
09:30 - Je ne sais pas.
09:33 Ce que je sais,
09:35 c'est que je ne suis pas d'accord avec ce que le Front National propose.
09:39 Ce que je sais, c'est qu'il y a dans le programme du Front National
09:46 un certain nombre de choses
09:47 qui sont destinées à attirer et à faire plaisir aux Français,
09:54 et qui ne seront pas faites,
09:55 ou pire,
09:56 qui s'ils sont faits,
09:57 provoqueront des crises importantes.
09:59 J'en donne un exemple.
10:00 Et volontairement je donne un exemple
10:02 qui est un exemple dont je sais qu'il est populaire.
10:05 Mais qui ne se fera pas.
10:06 Dans le programme du Front National, dans les positions du Front National,
10:09 il y a l'idée ancienne,
10:11 qu'il faut revenir à l'âge de la retraite à 60 ans.
10:15 Est-ce que c'est 60, 62, ce n'est pas très clair, parce qu'ils comprennent bien.
10:19 Je dis aux Françaises et aux Français,
10:22 peut-être que c'est très beau à entendre.
10:25 Mais un, ça ne se fera pas.
10:27 Et deux, si ça se faisait, c'est la crise financière assurée.
10:32 C'est une crise qui toucherait tous les Français.
10:35 Je ne crois pas que le Front National fera du bien à la France.
10:38 Je ne crois pas et donc je me bats.
10:40 Je respecte parfaitement et la formation politique et ses électeurs,
10:44 mais je me bats pour essayer d'expliquer
10:46 que ce n'est pas le bon projet pour la France
10:48 et que nous devons construire une autre majorité pour la France.
10:51 - Et vous l'avez dit, le pays peut compter sur vous.
10:54 C'est comme ça qu'on a commencé cette interview.
10:57 Merci beaucoup, Edouard Philippe.
10:58 - On doit mettre de l'ordre dans nos comptes et dans nos rues, viennent nous dire.