Xerfi Canal a reçu Jennifer Urasadettan, professeure à l'Université Rennes 2, pour parler des différentes formes de coopération.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Génifère, vous êtes professeure à l'Université Rennes 2, article dans la revue française
00:16de gestion qui date un petit peu, mais maintenant il faut évaluer l'impact des articles et
00:19on dit que pour évaluer l'impact des articles, il faut regarder les articles publiés il
00:22y a 7 ans, au moins 7 ans.
00:24Il faut arrêter de la fuite en avant dans le prochain papier, il faut regarder l'impact
00:28de ceux qu'on a publiés quelques années auparavant, si possible 7 ans, avec Pascal
00:32Glemin et Alain Amintas, consacré à la culture et à la relation entre culture et
00:38coopération, consacré surtout à la coopération dans le cadre des projets et vous aviez traité
00:42du KMAUS international.
00:44C'est ça.
00:45Papier très intéressant, parce que c'est une de, voilà, vous avez, avec vous, moi j'aime
00:50beaucoup vos papiers, parce qu'on sort des grandes références anglo-saxonnes, on sort
00:55des revues de littérature à n'en plus finir, avec des bibliographies à n'en plus
00:59finir.
01:00Vous nous dites qu'il y a des auteurs français qui ont produit des choses dont il faut se
01:03saisir et qui peuvent nous armer pour comprendre des contextes.
01:05Vous avez fait un papier sur l'appropriation de la fonction d'employeur, vous mobilisez
01:09Amoré Griment.
01:10Dans ce papier-là, sur la coopération, vous mobilisez Stéphanie Dameron.
01:14C'est ça.
01:15Alors, quand on mobilise Stéphanie Dameron, d'abord, qu'est-ce qu'on mobilise ? C'est
01:19quoi l'apport qu'avait Stéphanie Dameron sur cette question ?
01:21L'apport de Stéphanie Dameron, c'est de battre en brèche l'idée commune selon
01:26laquelle la coopération se passerait toujours dans une concorde entre personnes, qui aboutirait
01:32au dépassement des intérêts individuels pour satisfaire un intérêt supérieur.
01:37Et en dehors de ça, pas de coopération possible.
01:40Stéphanie Dameron montre que si, c'est possible, et moi je suis sa voix.
01:45Voilà, il y a une coopération qu'elle qualifie de complémentaire, et là, pour
01:50faire simple, c'est une coopération un peu plus intéressée par les parties.
01:53Il y a une coopération communautaire, là c'est une coopération parce qu'on contribue
01:58à une offre commune.
01:59C'est ça les deux dimensions.
02:00Et évidemment, quand on s'intéresse à un projet, et c'était ça l'apport de
02:03votre article, quand on s'intéresse à un projet, selon les phases, selon les moments
02:08d'un projet, on peut coopérer différemment.
02:10C'est ça.
02:11Alors, ce que dit Stéphanie Dameron, c'est que dans un projet, la première phase, c'est
02:16la phase où on apprend à se connaître, se caractérise plutôt par une phase de coopération
02:20communautaire.
02:21Donc on cherche à avoir une identification commune, à créer une communauté.
02:26Ensuite, lorsque cette première phase est passée, lorsque le projet est concrètement
02:32débattu et puis développé, on passe à une phase de coopération complémentaire,
02:37où là les intérêts individuels prévalent, et puis l'organisation du travail est davantage
02:42distribuée et faite en fonction des compétences de chacun.
02:45Et le projet se termine par une troisième phase, la phase de cristallisation du projet.
02:51Là, par exemple, si c'est un prototype, il est terminé, et il faut essayer de faire
02:55adhérer ce projet-là, ce prototype, aux personnes externes.
03:00Et donc là, ça se caractérise par une coopération communautaire.
03:03Donc, paradoxalement, même dans le cas d'Emmaüs, là où spontanément on se dirait « c'est
03:08forcément une coopération communautaire, Emmaüs dans l'imaginaire collectif », ben
03:12non, vous, vous nous montrez qu'il y a aussi du complémentaire.
03:15C'est ça.
03:16Alors, ça dépend beaucoup du profil du projet.
03:19Le premier projet que j'ai étudié, qui est un projet d'envergure où il s'agit
03:23de livrer de l'eau potable à une population reculée d'un village du Bénin, s'appuie
03:29sur ce triptyque qu'a démontré Stéphanie Dameron.
03:33Parce que c'est un projet d'envergure qui est original, qui n'a jamais été fait
03:37auparavant et qui nécessite la composition d'une équipe ad hoc.
03:41Le deuxième projet que j'ai étudié, c'est un projet de livraison de containers qui
03:46comprend des produits de première nécessité entre la France et l'Uruguay.
03:50Ce type de projet-là est beaucoup plus habituel.
03:54Et puis, Emmaüs International a la logistique nécessaire pour d'abord avoir ces containers
04:03et puis les acheminer.
04:04Et c'est dans ce cadre-là qu'on retrouve plutôt des projets qui débutent par une
04:09coopération complémentaire au lieu qu'elles soient communautaires.
04:12Tout simplement parce que, comme l'organisation du travail a été déjà réfléchie en amont
04:18et que les objectifs sont assez clairs dès le début, la communauté de France sait ce
04:25qu'elle doit faire, collecter les objets et puis les mettre dans le container.
04:30Et c'est lorsque le container est livré que débute la deuxième phase du projet,
04:36la phase communautaire.
04:38Lorsque la communauté française et la communauté uruguayenne se rencontrent et que là, le
04:44projet est incarné.
04:46Donc là, vraiment, la communauté se fait.
04:48Et enfin, la dernière phase, qui est celle plus administrative, où on rédige à l'attention
04:55de la direction d'Emmaüs International les résultats de ce projet, est une phase
05:04complémentaire puisque là, chacun retourne dans ce qu'il sait faire.
05:08Je tire un enseignement de ces deux papiers que vous avez publiés dans la revue française
05:12gestion que j'aime beaucoup.
05:13C'est à l'heure où tout le monde ne parle que de gaps théoriques, etc., qu'il faudrait
05:18trouver pour publier.
05:19N'oublions pas que la recherche sait aussi, c'est peut-être même d'abord des auteurs
05:24qui ouvrent des portes et on peut s'inscrire dans leurs pas pour explorer aussi de nouvelles
05:30réalités empiriques.
05:31Ça, il faudrait que les doctorants, je pense notamment aux doctorants qu'on maltraite
05:35un peu avec cette obsession de la publication et cette idée, un chercheur, c'est un auteur
05:40et ça va être de plus en plus important à l'heure de l'impact.
05:42Merci à vous, Jennifer.
05:44Merci.