• il y a 5 mois
À 8h20, Caroline De Haas, co-fondatrice du groupe Egae et Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre sont les invités du Grand Entretien, au lendemain d'un rapport sur des agressions sexuelles commises par l'abbé Pierre. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-jeudi-18-juillet-2024-3551389

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00:00Avec son manteau noir, avec son béret, c'est une silhouette que reconnaissent et reconnaissent
00:04la plupart des français, un symbole à lui tout seul, de la solidarité, de la lutte
00:08contre les exclusions, mais derrière le mythe de l'abbé Pierre disparu en 2007, il y a
00:12une part d'ombre et les associations qui poursuivent son combat ont décidé aujourd'hui de la
00:17mettre en pleine lumière.
00:19Bonjour Christophe Robert.
00:20Bonjour.
00:21Merci d'avoir accepté l'invitation de France Inter ce matin, vous êtes le délégué général
00:24de la Fondation Abbé Pierre qui publie avec Emmaüs un rapport où cette femme témoigne
00:29d'agression sexuelle.
00:31L'année dernière, vous avez pris connaissance d'un premier témoignage, vous avez alors
00:34décidé de mandater un cabinet d'experts pour recueillir la parole d'éventuelles autres
00:38victimes et ce cabinet, c'est le vôtre.
00:41Bonjour Caroline Debas.
00:42Bonjour.
00:43Merci d'être avec nous également, vous allez nous raconter tout à l'heure comment vous
00:46avez procédé.
00:47Je voudrais d'abord vous demander, Christophe Robert, comment vous avez réagi, j'allais
00:53dire presque intimement, quand vous avez pris connaissance de la première accusation ?
00:57Un effet de surprise immense, un choc terrible.
01:02Ce premier témoignage, il nous a d'abord été orienté par l'église, après le mouvement
01:09Emmaüs, des personnes du mouvement Emmaüs ont rencontré la personne, elles l'ont crue,
01:14et là on s'est dit on ne peut pas en rester là, il faut qu'on creuse, il faut qu'on
01:18voit s'il y a d'autres potentielles personnes qui ont été victimes des mauvais agissements
01:23de l'abbé Pierre.
01:25Donc ça a été un choc terrible, une déflagration, ça a suscité chez nous, chez moi, beaucoup
01:32de tristesse, beaucoup de colère, parce que je lui en veux d'avoir fait souffrir ses femmes,
01:39mais on s'est dit, pour elle, en saluant le courage d'avoir témoigné, on se doit
01:46d'être transparent, on se doit d'aller au bout de cette démarche, et c'est la condition
01:53pour continuer à mener notre combat contre le mal-logement, contre la pauvreté.
01:57Est-ce que vous avez peut-être entendu tout à l'heure, dans le journal de 8h, cette
02:01paroissienne qui regrette ses accusations, qui dit ça fait 17 ans qu'il est mort, est-ce
02:05que c'est vraiment opportun ? Est-ce que ça c'est une interrogation que vous avez
02:09partagée, ou vous pouvez comprendre, Christophe Robert, vu la stature de l'abbé Pierre ?
02:14Je peux comprendre l'interrogation, mais nous condamnons toute forme de violence à
02:20la fondation Abbé Pierre, au mouvement Emmaüs, et il n'était pas possible d'en rester
02:26à ce premier témoignage, et il n'était pas possible de ne pas dire les choses, de
02:32ne pas prendre la parole.
02:33Donc, j'ai entendu ce témoignage, et nous en avons reçu d'autres qui vont dans le
02:38même sens.
02:39Je comprends de dire qu'il n'est pas là pour se défendre, il est décédé depuis
02:4317 ans.
02:44Je voudrais juste dire à ces personnes que les victimes qui ont eu le courage de témoigner,
02:52elles souffrent.
02:53Elles ont beaucoup souffert pendant longtemps, et le fait que la parole se libère est quelque
02:57chose de très important, pour elles, je pense pour nous, et je pense pour la société dans
03:01son ensemble.
03:02Rappelons peut-être les faits, cette agression sexuelle, cette cas en tout cas, cet témoignage
03:09des faits qui s'étalent des années 70 à l'année 2005, donc on est quasiment à
03:13la mort de l'abbé Pierre, toujours des femmes, toujours un peu le même scénario,
03:17des femmes qui étaient dans l'entourage de l'abbé Pierre, une salariée, une bénévole,
03:22qui font des tas de gestes déplacés, de propositions à caractère sexuel, finalement,
03:27tout ça racontait presque la même histoire.
03:29Oui, un baiser forcé, des mains posées sur la poitrine de certaines femmes, sur une durée
03:35longue, je ne sais pas ce que ça raconte comme histoire, je ne suis pas dans la tête
03:39de l'abbé Pierre, toujours est-il que c'est sur une durée qui est longue.
03:46Au fond, cette séquence, cette réalité que nous dévoilons aujourd'hui avec le mouvement
03:55Emmaüs, elle change profondément le regard sur un homme qui occupe une grande place dans
04:02l'histoire de nos organisations.
04:04Mais je voudrais dire, parce que j'ai eu beaucoup de témoignages depuis hier soir,
04:07de bénévoles, de salariés, je voudrais dire deux choses.
04:10Ils ne sont pas responsables, ces bénévoles et salariés, de ce que nous sommes en train
04:15de rendre visible.
04:17Et leur combat, quand ils se sont engagés dans le mouvement Emmaüs, Emmaüs International,
04:23Emmaüs France, à la fondation Abbé Pierre, ce combat pour plus de justice sociale, il
04:28reste d'une acuité très importante.
04:30Et donc, il ne faut pas se tromper.
04:32Voilà.
04:33Mais il faut faire.
04:34Il faut faire la vérité.
04:35Parce qu'on entend aussi, depuis hier, des témoignages justement au sein des structures
04:41comme la fondation Abbé Pierre ou comme Emmaüs, des gens qui disaient, finalement on savait
04:45bien, on disait aux femmes qu'il ne fallait pas aller voir l'Abbé Pierre tout seul,
04:49que quand on était plusieurs, il n'y avait pas de soucis, mais tout seul, c'était compliqué.
04:52Est-ce que vous avez le sentiment aujourd'hui, Christophe Robert, qu'on a raté quelque
04:56chose, que vous avez raté quelque chose ?
04:57Non, non, non.
04:59Quand ce premier témoignage nous a été remonté, les trois organisations, Emmaüs
05:06International, Emmaüs France et la fondation Abbé Pierre, ont été stupéfaits, si vous
05:11voulez, c'était un choc terrible, donc on ne savait pas.
05:14Maintenant, le travail qui a été mené par le groupe EGAE montre qu'effectivement,
05:19il y a des personnes, certaines personnes, qui de façon directe ou indirecte, ont été
05:26confrontées à certaines alertes.
05:28Je ne sais pas ce qui s'est passé, peut-être qu'elles n'ont pas su comment faire, peut-être
05:33qu'elles ont minimisé la réalité des personnes, peut-être n'étaient pas outillées pour
05:42le faire, peut-être qu'elles n'ont pas cru, les personnes, c'est pour ça que nous
05:44disons aujourd'hui, nous les croyons, les victimes.
05:47Vous l'écrivez noir sur blanc, nous vous croyons, nous les croyons.
05:49Oui, mais parce que c'est fondamental, on ne dit pas ça 20 ans, 30 ans, 40 ans après,
05:55c'est comme ça, si vous voulez, et on mesure la souffrance que ça représente pour ces
05:59personnes.
06:00Donc, il faut être très vigilant.
06:01Nous, il n'y avait pas de doute, dès que nous avons vu remonter un certain nombre de
06:06témoignages qui étaient clairs, on savait qu'on allait le rendre public.
06:11Nous avons rendu public le rapport du groupe EGAE, c'est pour nous essentiel.
06:16Maintenant, qu'est-ce qui s'est passé à des moments, oui, bien sûr, il y a des personnes
06:20qui, indirectement ou directement, ont été confrontées à ces alertes à un moment,
06:24mais voilà, on n'était pas là, et je ne vous rassure pas qu'on les juge non plus.
06:29Alors, puisque vous le citez, ce groupe EGAE, je me tourne vers vous, Caroline de Haas,
06:34puisque c'est vous la fondatrice de ce cabinet spécialisé dans les questions d'égalité
06:37entre les femmes et les hommes, et c'est vous qui avez été mandatée par la fondation
06:40Abbé Pierre et par Emmaüs pour faire ce travail de recueil de témoignages, voir si
06:45à partir de cette première accusation, il y en avait d'autres, comment est-ce que vous
06:49avez procédé ?
06:50Alors, d'abord, la première chose, c'est qu'on est dans un cas très particulier.
06:53On n'est pas dans un cas standard d'enquête disciplinaire qui peut exister dans des entreprises
06:58ou des collectivités, dans lesquelles on va appliquer le principe du contradictoire.
07:03On n'est pas du tout dans un cas habituel.
07:05On est dans un cas, non pas d'enquête interne, mais on est dans un cas d'une enquête menée
07:09par une institution qui a décidé d'entendre la parole des victimes.
07:13Donc c'est très différent.
07:14Qui a décidé de regarder les violences en face et de proposer aux victimes un dispositif
07:20pour leur permettre d'être entendues et d'être accompagnées.
07:23Comment on procède dans ces cas-là ? En fait, moi, mon travail, c'est de tirer un fil.
07:27Et c'est le cas, pour le coup, c'est assez similaire dans l'ensemble des enquêtes, que
07:32ce soit des enquêtes internes standards ou que ce soit des enquêtes comme celles qu'ont
07:36commandées Emmaüs et la fondation Abbé Pierre pour entendre la parole des victimes.
07:40On tire un fil.
07:41Donc on a un premier témoignage qui arrive, on entend la personne.
07:44Et puis la personne dit vous devriez interroger telle personne parce qu'elle doit avoir des
07:46informations.
07:47On interroge telle personne.
07:48La personne dit non, j'ai pas d'infos, mais c'est vrai que j'ai entendu quelqu'un qui
07:53m'avait dit qu'elle était mal à l'aise.
07:55Alors on va voir la personne.
07:56La personne elle dit bah oui, en fait, j'étais mal à l'aise parce qu'il s'est passé quelque
07:59chose.
08:00Et souvent, tout le temps, quand on tire le fil, il y a la pelote qui arrive avec.
08:05Et on se rend compte que de témoignage en témoignage, et c'est ça mon travail, c'est
08:09d'aller chercher les témoignages pour identifier si on a un cas isolé unique ou s'il y a
08:13plusieurs cas.
08:14Alors vous dites on est dans une situation particulière parce que les faits présumés
08:18sont anciens, parce que vous le dites, il faut aller chercher témoignage après témoignage,
08:23tirer des fils.
08:24Et puis aussi parce que c'est l'abbé Pierre et que c'est pas n'importe qui, qu'il y a
08:30la réputation, la célébrité, certains en disent même l'idolâtrie.
08:33Il y a cette femme aussi qui disait comment est-ce qu'on fait quand c'est Dieu qui vous
08:38fait ça ? Ce qui sont des mots très forts.
08:40Est-ce qu'on travaille différemment dans ce cas-là ? Est-ce qu'on se dit qu'il peut
08:44y avoir aussi un sentiment d'emprise ?
08:46Alors moi d'abord je voudrais m'associer aux mots de Christophe Robert pour saluer
08:51le courage et la force de celles qui ont témoigné, de celles qui témoigneront et de toutes celles
08:57qui en fait ont été victimes.
08:58Il faut vraiment beaucoup de courage pour faire ça et notamment pour faire ça quand
09:02la personne est aussi connue et aussi importante dans le cœur des Françaises et des Français.
09:08J'ai entendu des histoires très spécifiques et en même temps il y a des similarités
09:12avec l'ensemble des violences qui existent dans la société.
09:15Et je vous en prends deux des similarités que j'ai entendues lorsque j'ai rencontré
09:19les victimes.
09:20La première c'est l'isolement, c'est-à-dire que les faits ont lieu quand elles sont seules
09:24avec l'abbé Pierre et puis l'isolement aussi vis-à-vis de l'entourage et de la société
09:28qui a tendance à ne pas les croire jusqu'à aujourd'hui.
09:30Et puis le deuxième élément qui est très important c'est l'inversion de la culpabilité.
09:34Et quand on entendait la paroissienne tout à l'heure dans votre reportage, moi j'ai
09:38senti un peu ça.
09:39C'est-à-dire qu'on va renvoyer aux victimes le fait qu'elles seraient responsables de
09:43ce qui se passe et que le fait de prendre la parole, d'être entendue pourrait inverser
09:48en fait la responsabilité.
09:50Et donc moi je voudrais redire à toutes les personnes victimes de violences, elles ne
09:53sont pas responsables des violences qu'elles ont subies à aucun moment.
09:56Et la responsabilité qu'a pris aujourd'hui Emmaüs, qu'a pris la fondation Abbé Pierre
10:01de révéler ces faits, est très importante pour lever la chape de plan.
10:05On va aller au Standard où nous attend Aiglantine.
10:07Bonjour Aiglantine.
10:08Oui bonjour.
10:09Et bienvenue.
10:10Merci.
10:11On en a déjà parlé sur cette antenne, ces victimes sont souvent accusées par certaines
10:16personnes de mensonges, de diffamation, de chercher de l'argent, enfin bref, par des
10:20gens qui ne comprennent pas ce que c'est que d'être soumis au silence, au phénomène
10:23de sidération.
10:24Je me demandais si vous aviez des éléments à apporter sur cet élément déclencheur
10:30qui explique la parole de ces victimes.
10:33Je me posais la question de savoir si par exemple la sortie du biopic sur Abbé Pierre
10:38il y a quelques mois pourrait expliquer aussi cette prise de parole.
10:42Est-ce qu'on peut considérer que c'est insupportable par exemple de voir un film
10:45à la gloire de son agresseur sexuel ou est-ce que vous auriez d'autres éléments de votre
10:49côté ?
10:50Merci pour votre question Aiglantine.
10:51Oui, juste pour vous dire, pour que ce soit bien clair vis-à-vis de vos auditrices et
10:55vos auditeurs, nous n'avons pas rencontré des victimes.
10:58Elles ont été rencontrées par le cabinet EGAE sous le sceau de la confidentialité
11:02et de l'anonymat.
11:03Donc personnellement, je ne peux pas répondre à cette question.
11:05Mais sur le contexte, Caroline Noir ?
11:07Oui, alors en fait, il y a une conjonction.
11:09Le pourquoi maintenant, ça revient beaucoup quand même dans les messages.
11:13Il y a beaucoup de messages de soutien qui sont reçus, mais il y a aussi le pourquoi
11:16maintenant.
11:17En fait, il y a une conjonction de plusieurs éléments qui ont permis à cette parole
11:21d'être entendue.
11:22La première chose qui a été déclencheur pour répondre directement à la question
11:25de votre auditrice, ce n'est pas le biopic, ce n'est pas le film sur l'abbé Pierre.
11:29C'est un peu avant les témoignages sur l'église, ce qui s'est passé dans l'église.
11:33En fait, la première victime qui a contacté la Fondation Abbé Pierre et le mouvement
11:37Emmaüs, elle a été destinataire, elle a entendu le témoignage d'une personne qui
11:41racontait avoir subi des violences de la part d'un prêtre en l'occurrence.
11:45Et ce témoignage a fait écho à ce qu'elle avait elle-même vécu et l'a décidé à
11:49franchir le pas de prendre la parole auprès d'institutions.
11:53Donc ça, c'est le premier élément.
11:55Deuxième élément, c'est le temps.
11:56C'est normal, en fait, quand on a été victime d'une personne aussi admirée des
12:01Français, que ça prenne du temps de pouvoir être entendue.
12:04Et puis, le troisième élément, c'est que la Fondation Abbé Pierre et le mouvement
12:08Emmaüs ont réuni les conditions possibles à la parole, c'est-à-dire on garantit un
12:13anonymat et une confidentialité strictes pour les victimes, ont permis aux victimes
12:17d'être entendues par des personnes qui sont expertes de ces thématiques-là.
12:21Et ça, ça fait partie des éléments qui permettent que la parole soit aujourd'hui
12:24entendue.
12:25C'est Angelo qui nous attend maintenant au standard.
12:27Bonjour Angelo, bienvenue.
12:29Oui, bonjour.
12:30Je me laisse poser votre question.
12:31Je suis très confus parce que j'admire vraiment l'Abbé Pierre et son œuvre sociale.
12:36Après, la question que je me pose, c'est par rapport à la médiatisation des affaires
12:40qui passent, qui passent en justice.
12:44C'est l'Abbé Pierre, il est connu.
12:46Alors, a priori, on est sûr qu'il a fait des faits, etc.
12:49Moi, je suis très content que les gens qui sont victimes d'agressions sexuelles y trouvent
12:53aujourd'hui des espaces pour s'exprimer, parce que Dieu sait si c'est lourd à porter
12:58et qu'on vit avec ça toute sa vie.
13:00Mais je me pose la question, ça y est, pour moi, je me dis, on est dans le spectacle de
13:05la médiatisation des affaires de justice de l'Abbé Pierre.
13:07Pourquoi les gens qui sont connus, ils n'auraient pas le droit à cet espace de la justice,
13:14coin barre ?
13:15Et après, quand on en sait un peu plus, on avance.
13:18Merci pour votre interrogation que je soumets à Christophe Robert et Caroline Dehasse.
13:23Alors, il n'y a pas d'affaires de justice en ce qui concerne l'Abbé Pierre, mais s'oppose
13:27effectivement la médiatisation que vous avez souhaitée, d'ailleurs, Christophe Robert,
13:30autour de ces accusations.
13:33Est-ce que vous entendez la remarque, la critique aussi de notre auditeur ?
13:38Oui, je l'entends et il faut qu'on discute de tout ça.
13:41C'est pour ça que c'est précieux que vous nous donniez cet espace pour le faire.
13:45Je comprends ce que dit Angelo, la question on se l'est posée, évidemment, parce qu'il
13:51est décédé depuis 17 ans et que donc, il n'y avait plus de personne à protéger
13:58potentielle victime face à des comportements inadaptés.
14:01Donc, du coup, pourquoi ?
14:03Et je vais vous dire, en fait, c'est très simple, c'est que c'est pour les victimes,
14:10en fait.
14:11Ce qui nous est remonté par le premier témoignage, et je laisserai Caroline Dehasse nous dire
14:16s'il y en a eu d'autres dans ce sens-là, mais c'est que quand on l'a écouté, quand
14:20on l'a cru, c'était de dire « comment vous, vous voyez les choses ? ». Et comment
14:28on voit les choses, c'est que ça soit su, pour reconnaître la vérité et reconnaître
14:35la douleur.
14:36Notre seul guide, ça a été de le faire par respect vis-à-vis des victimes qui ont
14:44eu le courage de témoigner.
14:45C'est la seule chose.
14:46Tout le reste, on peut l'entendre et toutes ces questions sont complètement légitimes,
14:50sincèrement, et on se les est posées.
14:51Et évidemment, moi aussi, ça me meurtrit.
14:53Enfin, Angelo a l'air d'avoir admiré l'abbé Pierre, vous imaginez-moi ? Donc, vous imaginez
14:58tout le mouvement, les bénévoles, les compagnes, les compagnons, mais encore une fois, je
15:02leur dis à tous et à tous, personne n'est responsable, et on va continuer ce combat
15:06contre la misère et contre le mal-logement.
15:08Est-ce que certains de ces témoignages vont être transmis à la justice, Caroline Dehasse ?
15:12La personne qui a commis ces faits est décédée, donc la justice ne va pas pouvoir faire son
15:16travail comme elle aurait peut-être pu le faire.
15:18Je voudrais simplement quand même remettre les choses dans leur contexte historique.
15:22C'est-à-dire qu'en 2024, aujourd'hui, en France, quand vous portez plainte pour
15:26des faits, par exemple, de harcèlement sexuel, dans 94% des cas, la justice classe votre
15:32plainte sans suite.
15:33On est en 2024.
15:34Vous imaginez ces femmes, dans les années 80-90, aller porter plainte contre l'abbé
15:40Pierre ? C'est-à-dire que la probabilité qu'on les croit et que la justice prenne
15:43leur plainte au sérieux était de toute façon très faible.
15:46Et donc, la justice pénale est une voie de traitement des violences, qui aujourd'hui
15:51par ailleurs, globalement, dysfonctionnent.
15:53Il y a d'autres voies aussi pour pouvoir témoigner.
15:56Et ce que font aujourd'hui la fondation Abbé Pierre et Emmaüs, c'est de permettre
16:01aux victimes d'être entendues.
16:02Ça n'efface pas le fait qu'il y aurait pu y avoir une procédure pénale, peut-être,
16:07dans les années 80-90.
16:08Elles n'ont pas souhaité porter plainte à l'époque.
16:10On ne va pas refaire l'histoire.
16:12Par contre, on peut essayer de lever cette chape de plomb et permettre à la parole des
16:16victimes d'être entendue.
16:17Et c'est ça le principal.
16:18Avant de retourner au standard, est-ce que vous imaginez qu'il y ait d'autres victimes,
16:23d'autres témoignages peut-être à venir à la suite de ce rapport ?
16:27Peut-être un mot.
16:28Le mouvement Emmaüs, sur ce sujet, a choisi, alors que le rapport du cabinet Gaëlle nous
16:34a été remis début juillet, d'informer le grand public sur cette situation.
16:39C'est ce que nous faisons depuis hier.
16:40Mais nous avons choisi aussi de mettre en place un dispositif d'écoute d'éventuels
16:46potentiels autres victimes, pour qu'on puisse recevoir leur parole de façon anonyme, avec
16:52le cabinet Gaëlle, et pouvoir aussi, et c'est très important.
16:56Pas surtout, mais bénéficier d'un accompagnement si elle le souhaite, si c'est nécessaire.
17:00Un accompagnement psychologique avec des personnes spécialisées dans ce type de situation.
17:05C'est quoi le numéro ?
17:06La cellule d'écoute, c'est ce que vous avez en tête ?
17:07Il faut envoyer un mail à emmaüs-groupe-egay.fr, vous retrouvez les coordonnées sur le site
17:14de la Fondation Abbé Pierre et d'Emmaüs.
17:15On les mettra aussi sur le site de France Inter.
17:18Bonjour François.
17:19Oui, bonjour.
17:20Et bienvenue sur France Inter, je vous laisse poser votre question.
17:23Oui, il est clair que la lutte contre le patriarcat et l'emprise sont des luttes essentielles
17:30de notre temps, mais est-ce qu'il ne faudrait pas aussi remettre en cause cette prescription
17:39spécifique à l'Église catholique, qui est le célibat des prêtres, qui fait peser
17:46sur ces personnes des contraintes qui sont de plus en plus insupportables, en particulier
17:53dans notre époque où le rôle de la sexualité est d'une sexualité équilibrée et de plus
18:00en plus affirmée, reconnue et installée dans la société ?
18:04Merci pour votre remarque François, je ne sais pas si Christophe Robert vous avez un
18:09avis sur cette question qui fait débat bien sûr sur la société de l'Église.
18:13Je voudrais simplement ajouter qu'on ne parle pas là de vie sexuelle de l'abbé Pierre,
18:18on ne parle pas de vie sexuelle des prêtres, on parle de violence.
18:21Ce n'est pas du tout pareil d'avoir un rapport sexuel avec une personne adulte, un
18:25rapport sexuel consenti, et chacune et chacun peut avoir un débat ou un avis sur le célibat
18:30des prêtres.
18:31Ce n'est pas le sujet.
18:32On parle là de violence, à aucun moment il n'est question dans le rapport ou dans
18:37le témoignage des personnes qu'on a reçues de vie sexuelle, de drague, de séduction,
18:43de consentement, à aucun moment il n'est question de ça.
18:46C'est quoi la suite Christophe Robert ? Il y a Ismaël par exemple sur l'appli France
18:51Inter qui vous demande, la fondation Abbé Pierre dont vous êtes le délégué général
18:56va-t-elle garder son nom ?
18:57Écoutez, c'est une question compliquée, la place de l'abbé Pierre dans le mouvement,
19:05dans l'héritage de ce mouvement, son image dans ce mouvement va forcément bouger.
19:10Mais là on s'est dit que ce n'était pas le moment de réfléchir à ça, c'est trop
19:13tôt, on est dans un moment où on dévoile, un moment où on veut être aux côtés des
19:18victimes et je veux vraiment leur redire tout notre soutien, nous ferons tout ce qui est
19:22possible pour les soutenir, pour les aider.
19:24Mais il y a autre chose avant même le nom, avant même l'iconographie, voyez ce que
19:29je veux dire, c'est le combat contre le mal-logement.
19:31Parce qu'il y a aussi nous des témoignages et des gens qui nous attendent, des personnes
19:35qui souffrent, des personnes sans domicile, des personnes qui sont victimes de la précarité,
19:39toutes ces personnes que l'on aide au quotidien, nous à la Fondation Abbé Pierre avec tout
19:43le réseau associatif grâce aux donateurs de la Fondation Abbé Pierre, le mouvement
19:46Emmaüs dans les communautés avec les compagnes et les compagnons, et ça, ça c'est la deuxième
19:52urgence.
19:53Nous allons continuer ce combat, nous allons le mener sans relâche, à savoir la place
19:57de l'abbé Pierre dans notre mouvement, c'est vraiment trop tôt.
20:00Et justement sur la suite de vos combats, je voudrais qu'on accueille Francine, bonjour
20:03Francine, je crois que vous êtes bénévole chez Emmaüs.
20:07Tout à fait, je suis bénévole dans le Morbihan, Havannes, et ma question est toute simple,
20:13je partage tout à fait ce que vient de dire Monsieur Robert sur le souci des communautés,
20:18des compagnons, des compagnes qui vont être aussi sidérées et malheureuses que moi ce
20:23matin.
20:24Je sers absolument de tout cœur avec les victimes, tout ça, c'est ok.
20:30La seule chose qui me trouble et qui me pose question ce matin, c'est pourquoi, pourquoi
20:35aujourd'hui, pourquoi dévoiler en ce moment, maintenant, aujourd'hui, à quelques encablures
20:42si je puis dire, parce que je suis en Bretagne, de la grande vente dans les communautés,
20:48c'est Monsieur Christophe Robert doit le connaître, c'est le moment de l'année où tout le monde
20:53est en effervescence, on prépare la grande, grande vente à Havannes, c'est quelque chose
20:57d'extraordinaire et c'est un énorme apport pour le budget pour l'année.
21:04Ça perturbe, on imagine un petit peu ce moment important, merci Francine pour votre
21:10question Christophe Robert.
21:11Je comprends totalement Francine, je comprends totalement Francine, je voudrais juste vous
21:14dire, ça va être très simple, on a fait le choix de la totale transparence, nous avons
21:18eu un premier témoignage, nous avons confié à un cabinet spécialisé dans les violences
21:24cette cellule d'écoute, ce rapport de ce cabinet, égaé, a été remis début juillet,
21:30qui donne à voir sept personnes victimes.
21:34On s'est dit, il faut que nous en informions maintenant.
21:37Bien sûr qu'on met en place le dispositif s'il y en avait d'autres, mais il faut qu'on
21:40le dise maintenant, il n'y a pas de bon moment pour un moment si difficile, il n'y a pas
21:43de bon moment pour témoigner de cette difficulté, vous voyez ce que je veux dire.
21:48Mais par contre, nous on sera là, on sera là avec tous les bénévoles, avec les compagnes,
21:52avec les compagnons, avec les mal logés, avec les pauvres, on ne lâchera pas, je vous le
21:56dis, mais il n'y a pas de bon moment.
21:58Je voudrais vous faire part de toutes ces réactions de soutien aussi qui nous sont
22:01arrivées par l'appli France Inter.
22:02Christophe Robert, vous pouvez être fier de votre démarche, nous dit Estelle, merci
22:06pour votre franchise, nous dit Yanis Bravo à la Fondation pour leur courage, nous écrit
22:11de son côté Sabrina, voilà c'est un fleuret lèche de quelques-unes des nombreuses réactions
22:16qui ont été provoquées par ce rapport auprès des auditeurs de France Inter.
22:20Merci à tous les deux d'être venus nous en parler.
22:22Christophe Robert, délégué général de la Fondation, Abbé Pierre, Caroline Dehasse,
22:26fondatrice du groupe EGAE, invité du grand entretien de la matinale.

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