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DB - 20-08-2024

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00:00:30Lucien Levenne, jeune officier républicain, est tombé amoureux d'une jolie veuve,
00:00:42Bathilde de Chastelaire, à la grande fureur des légitimistes qui veulent le provoquer
00:00:46en duel et le tuer.
00:00:48Le docteur du poirier, redoutable intrigant, les en dissuade.
00:00:52Grâce à un stratagème de sa façon, il fera croire à Lucien que Bathilde le trompe.
00:00:59Désespéré, celui-ci déserte et s'enfuit à Paris.
00:01:04Son père, inquiet de son désarroi, le place, grâce à ses hautes relations, dans le cabinet
00:01:10d'un de ses amis, le ministre de Vezes.
00:01:13Je vous ai réunis, chers collaborateurs, car le gouvernement dont je fais partie est
00:01:24rendu assez soucieux par les élections qui, comme vous savez, doivent avoir lieu prochainement.
00:01:28Nous avons d'abord, messieurs, parmi les points les plus préoccupants, les élections
00:01:32de Champagné, dans le Cher, où la nomination de notre ami Blondeau est très incertaine.
00:01:39Le préfet, monsieur de Rigbourd, est un homme très dévoué et très dévot, mais il me
00:01:45fait l'effet d'un imbécile.
00:01:46Il faudra deviner pour lui ce qui rend l'élection de Blondeau si difficile et me le rapporter
00:01:51très vite.
00:01:52Il y a Caen, aussi, où il faut à tout prix, messieurs, que M. Mérobert ne soit pas élu.
00:01:59Ce Mérobert est un homme riche.
00:02:01Il méprise l'argent et il en a beaucoup.
00:02:03Malheureusement, il n'a pas de parents pauvres, et la croix il en a déjà.
00:02:09On ne peut rien voir de pire.
00:02:11Dans ces deux villes, messieurs, nous devons envoyer les gens capables avec de l'argent
00:02:15et des places à distribuer.
00:02:16Nous y avons notamment… Nous y avons…
00:02:19Nous y avons trois débits de tabac à accorder et deux directions de la poste aux lettres.
00:02:25Je vous donne carte blanche pour les destitutions.
00:02:27Et pour tout cela, il nous faudra des pamphlets contre nos adversaires.
00:02:30Où en sont nos gens de lettres?
00:02:32Romain l'est là, monsieur le ministre.
00:02:33Il attend.
00:02:34Ben, allons-y.
00:02:35Voyons, faites-le.
00:02:36N'entraînons pas de temps.
00:02:37Il y a aussi le dossier de Nancy.
00:02:38C'est M. Levin qui l'a pris, monsieur le ministre.
00:02:41Ah!
00:02:42Un instant, je vous prie.
00:02:44Restez assis.
00:02:45Restez assis.
00:02:46Comment est-il sur la portion Nancy?
00:02:48Ben…
00:02:49Hum hum.
00:02:50Ça vous intéresse, Nancy?
00:02:52Oh!
00:02:53Pure curiosité, monsieur le ministre.
00:02:55J'y retrouve simplement des tas de noms de gens que je connais bien.
00:02:58Combien de temps y avez-vous tenu garnissant?
00:03:00Cinq mois.
00:03:01Comment est le préfet?
00:03:03Oh!
00:03:04À mon avis, des plus médiocres.
00:03:05Ah!
00:03:06Dégueulasse.
00:03:07C'est ennuyeux tout cela.
00:03:08Cette ville nous préoccupe.
00:03:09Sur qui nous parlons?
00:03:12Sur qui nous appuyez alors?
00:03:15Que pensez-vous de tous ces noms-là?
00:03:17D'abord, qui est notre candidat?
00:03:19Un gros propriétaire, un nommé Gonin.
00:03:22Vous le connaissez?
00:03:24Un peu au-dessus de ses vaches par la façon de se mouvoir,
00:03:26mais pour l'intelligence.
00:03:28C'est tout ce que le préfet a trouvé.
00:03:31Et qui avons-nous contre nous?
00:03:33Ah!
00:03:34Un monsieur de Constantin.
00:03:36Et le docteur du poirier.
00:03:38C'est lui qui m'intéresse.
00:03:40Quelle sorte d'homme est-ce?
00:03:43C'est un royaliste forcené, mais intelligent,
00:03:46considéré, respecté même.
00:03:50La vie privée?
00:03:52Il n'en a pas, que je sache.
00:03:54La morale?
00:03:56Comme médecin, le dévouement et la bonté même.
00:03:59On peut l'acheter?
00:04:01Je ne le pense pas.
00:04:03Il vit modestement, il n'a pas de voiture.
00:04:05Aïe, aïe, aïe, aïe!
00:04:06Quand un homme a de la capacité et qu'il est pauvre,
00:04:08je m'en méfie.
00:04:10Et ce monsieur de Constantin, vous le connaissez?
00:04:13Non.
00:04:15Mais sa femme, je le sais,
00:04:17est la meilleure amie d'une personne
00:04:19que j'ai beaucoup connue là-bas.
00:04:22Excusez-moi, monsieur le ministre,
00:04:24c'est le dossier que vous vouliez?
00:04:26Veuillez l'apporter avec vous.
00:04:28J'ai dans mon bureau un garçon
00:04:29qui doit me faire un pamphlet sur celui du poirier.
00:04:31Il nous faut examiner cela de plus près.
00:04:34Excusez-moi, venez.
00:04:36Votre parfaite connaissance de ce pays
00:04:38me donne à penser que vous pourriez nous être
00:04:40d'un grand secours là-bas.
00:04:42J'ai fort envie de vous confier la charge de cette élection.
00:04:49Je remercie Votre Excellence.
00:04:51Qui sait que je lui suis tout dévoué?
00:04:54Mais c'est là une mission que je ne saurais remplir.
00:04:57Mon cher, cela ne vous prendra que quelques jours
00:04:59et en cas de réussite, je parlerai de bourgeois.
00:05:02Je lui dirai vos mérites.
00:05:07Que Votre Excellence m'excuse,
00:05:10mais vraiment, je ne saurais que décliner cette offre,
00:05:14pour flatteuse qu'elle soit.
00:05:17Je n'ai pas voulu, comme je le puis,
00:05:19vous donner un ordre,
00:05:21ni vous donner une heure pour réfléchir.
00:05:25J'ai pensé tout haut.
00:05:27Je supplie Votre Excellence
00:05:29de bien vouloir confier cette mission
00:05:33à un homme plus âgé
00:05:35et qui serait peut-être moins sensible que moi aux polémiques
00:05:38et aux injures des journaux.
00:05:40Monsieur, le dévouement que nous devons au pouvoir
00:05:44nous fait parfois, et à tous ici,
00:05:46un devoir d'assumer certaines charges difficiles ou délicates.
00:05:52J'ai pour ma part, je m'en excuse,
00:05:54moins de dévouement au pouvoir que Votre Excellence.
00:05:57Qu'est-ce dire, Monsieur ?
00:05:59Cette mission fait partie des devoirs de Votre Charge.
00:06:02La refuser...
00:06:03En ce cas, j'en demande pardon à l'avance à Votre Excellence,
00:06:08mais j'aurai une seconde prière à ajouter à la première,
00:06:11celle de vous demander d'accepter ma démission,
00:06:15ainsi que mes remerciements de toutes vos bontés pour moi.
00:06:18Souffrez que je vous réponde, mon cher Monsieur,
00:06:20que je ne puis parler de cette démission
00:06:22qu'avec Monsieur Votre Père.
00:06:24Comme je voudrais ne pas avoir à chaque instant recours au génie de mon père.
00:06:35Voici Monsieur Romal.
00:06:38Mes respects, Monsieur le Ministre.
00:06:40Ah, il nous faudrait sur ce docteur du poirier
00:06:44un pamphlet bien vif, un emporte-pièce,
00:06:47quelque chose de bien ingénieux, pour commencer.
00:06:50Gardons les insultes pour plus tard.
00:06:5220 000 exemplaires, et à imprimer à Paris, à emporter.
00:06:56Ne commettons pas la même erreur qu'à Bergerac,
00:06:58où l'imprimeur a communiqué le texte à l'avance à toute la population.
00:07:02Sur quels éléments, Monsieur le Ministre?
00:07:05Je cherche, je cherche, et je ne trouve pas grand-chose.
00:07:08Je peux reprendre mon thème des pamphlets de l'élection de Bourges,
00:07:12où nous n'avions rien du tout contre les candidats.
00:07:14L'élection qui, finalement...
00:07:16a donné un fort bon résultat.
00:07:17Oui, ben, enfin, fouiller, inventer, que sais-je.
00:07:19Mais attaquer, attaquer à fond.
00:07:21Tout cela nous coûte assez cher.
00:07:24Continuez.
00:07:28Monsieur Lucien est rentré?
00:07:38Allez pousser le verrou.
00:07:41Assis-toi.
00:07:42Allez pousser le verrou.
00:07:45Ainsi, vous déclarez la guerre aux pauvres petits quart d'heure de liberté que je puis encore avoir.
00:07:50Qu'est-ce que j'apprends?
00:07:52Que vous donnez votre démission.
00:07:54Comme ça.
00:07:55Mais mon père...
00:07:56Apprenez mon fils qu'il n'y a que les sots qui donnent leur démission.
00:07:58Je suis désolé de vous chagriner, mon père,
00:08:00mais je ne suis pas l'homme de toutes les besognes.
00:08:02Nous voilà encore avec cette vertu.
00:08:04Toutes vos folies de chaleur, votre bon sens, ces terres sérieuses.
00:08:08Savez-vous d'où ça va aboutir?
00:08:10Vous avez renforcé la réputation de triste républicain que vous avez déjà.
00:08:13Dix commis qui briquent votre place ont organisé, je le sais,
00:08:17une calomnie dans ce sens au ministère où je vous ai placé.
00:08:20Mais mon père, je ne suis pas républicain.
00:08:22Je crois vous l'avoir prouvé.
00:08:23Mais sois le temps que tu voudras, mais ne le parais pas.
00:08:26Il est maintenant capital de te laver de la calomnie quitte à un pute d'être républicain.
00:08:30Mais mon père, rien de plus simple, un bon coup d'épée.
00:08:32Des tuels? Mais c'est une manie.
00:08:34Pour te donner en plus la réputation de duelliste encore plus triste.
00:08:38Si tu es tué, ta mère mourra.
00:08:41Et moi, je ne me concernerai jamais de sa perte.
00:08:44J'aime votre mère. Elle est nécessaire à ma vie.
00:08:47Elle ne m'a jamais donné un grain de malheur, elle.
00:08:50Mais mon père, je vous promets, je serai plus gai, plus parlant.
00:08:53Je réformerai mes habitudes.
00:08:55Toi? Est-ce qu'on réforme l'habitude?
00:08:57Si ça se pouvait, combien de voleurs qui ont des millions deviendraient le nez de Jean?
00:09:00Savez-vous à cause de vous le ridicule affreux dans lequel je suis tombé?
00:09:04Au lieu de vous regarder comme un rival dans le cœur de votre mère,
00:09:07je me suis avisé de vous aimer.
00:09:09Et par conséquent, vous me rendez malheureux, mon fils.
00:09:12Vous m'empêchez de dormir.
00:09:14Mais mon père, que faut-il faire pour vous satisfaire?
00:09:17Un amour célèbre.
00:09:19Pardon? Je vous ai malentendu.
00:09:21J'ai dit une grande passion.
00:09:24Comment cela?
00:09:26Avec ses assiduités, sa constance, ses éclats.
00:09:29Précisément, ses éclats.
00:09:31Il vous faudra séduire qui vous voudrez.
00:09:34Passez quatre heures tous les jours avec Elio, ostensiblement.
00:09:38Qui vous choisirez, je ferai les frais de cette passion.
00:09:42Il y en a douze mille francs.
00:09:44Si vous ne les prenez pas tout de suite, je crois que nous nous brouillons.
00:09:50J'ai dit qui vous voudrez.
00:09:52Pourvu que ce soit une fille à la mode.
00:09:53Tout se fait par mode en France.
00:09:55Mais mon père envoie déjà très souvent à l'opéra avec Mademoiselle Ramond.
00:09:57Mais le prince est connu.
00:09:59Voici le dialogue que je veux.
00:10:02Vous savez, ce jeune maître d'erquette,
00:10:04il est décidément avec la petite Ramond.
00:10:06Et qui est la petite Ramond?
00:10:08Mais non, pas avec elle.
00:10:10Jeune le vaine fils, il est avec la petite Gosselin.
00:10:12Est-ce qu'il est la main en pied?
00:10:13Oui.
00:10:14Il est fou de la petite Gosselin.
00:10:16Oh, diable.
00:10:17Fou de Mademoiselle Gosselin?
00:10:19Fou de Mademoiselle Gosselin ou d'une autre, ça m'est égal.
00:10:21Ce que je veux, c'est que le public sache que tu as une maîtresse et qu'on en parle.
00:10:24Que cette passion détourne l'attention du public de votre air de républicain triste.
00:10:29Je n'ai pas souvent refusé vos avis, mon père.
00:10:31Mais cette fois, je vous demande de ne pas insister.
00:10:34J'ai bien compris. À quoi et à qui, tu penses?
00:10:36Très bien compris.
00:10:38Je tiens à être fidèle à une maîtresse que je n'ai jamais eue.
00:10:41Mais essaie plutôt d'être infidèle à une maîtresse que tu auras.
00:10:44Tu elle sera différente de ce que tu as aimé, moins il y aura d'infidélité.
00:10:49D'ailleurs, Mademoiselle Gosselin ou une autre demoiselle célèbre,
00:10:54tôt ou tard, je serai obligé d'être heureux.
00:10:57C'est ça qui me fait horreur.
00:10:58Tu es un enfant, mais heureux qui a une passion.
00:11:01La vieillesse n'est pas autre chose que la privation de la folie, l'absence de passion.
00:11:05Et je place l'absence de la folie bien avant la diminution des forces physiques.
00:11:09Moi, je voudrais être amoureux de la plus laide cuisinière de Paris
00:11:12et qu'elle réponde à ma flamme.
00:11:16Verriez-vous un inconvénient? Est-ce que, de préférence au nom que vous avez cité,
00:11:20je prenne une femme honnête?
00:11:24Vous la prendrez, vous, votre femme honnête.
00:11:26Et puis, quand enfin elle répondra à votre flamme,
00:11:28quand viendra l'heure du Bérenger, que fera le Bérenger?
00:11:33Il lui reprochera de manquer à la vertu.
00:11:35Tu aurais mieux fait de rester dans ton ansi.
00:11:37Dans le fond, ça t'allait fort bien.
00:11:39Tu serais devenu le digne héros de deux ou trois bégales de province.
00:11:45Pas plus tard que ce matin, M. Devesse voulait m'y renvoyer.
00:11:47Lui aussi.
00:11:48Je le sais, mais tu as refusé.
00:11:51Je vous donne l'explication là-dessus, mon père.
00:11:53Vous croyez que le ministre voulait surtout utiliser ma connaissance de ce pays?
00:11:55Non, non, tu n'as rien compris.
00:11:57C'était une marque de confiance flatteuse.
00:11:59Peut-être, mais vous n'ignorez pas combien ces missions électorales sont mal propres.
00:12:03Oh là, mal propres? Par rapport à quoi?
00:12:06Enfin, convenez qu'elles ne sont pas précisément ce qu'il y a de plus honorable.
00:12:10Pas de plus honorable, mais c'était une offre positive.
00:12:14Moi, je suppose toujours que la personne qui me parle veut me tromper
00:12:16si elle ne m'offre pas du positif.
00:12:18Mais ce n'était pas le cas.
00:12:19Vous avez refusé sottement une belle proposition du ministre.
00:12:22Mais comprenez donc, qui fait les ministres aujourd'hui?
00:12:25Les Rothschild, les Leuven.
00:12:27Et les ministres, apprenez cela, font ensuite la fortune de qui ils veulent.
00:12:31Alors pourquoi pas Nancy?
00:12:33Non, mon père, pas Nancy. Pas Nancy.
00:12:35Et pourquoi?
00:12:37Vous le savez aussi bien que moi, c'est une ville où il m'est arrivé...
00:12:41Une ville où il t'est arrivé quelque chose qu'il faut que tu oublies.
00:12:43Et autre chose aussi que tu as déjà fâcheusement oublié, Lucien.
00:12:46C'est que tu en es parti un peu vite.
00:12:48Et dans des formes qu'on pourrait te reprocher plus tard.
00:12:51Tu as donc laissé derrière toi des ennemis.
00:12:55Oui. Beaucoup.
00:12:57Tout de même.
00:13:00Et si tu retournes maintenant, et sous un autre uniforme,
00:13:04et pour une mission officielle,
00:13:06qui t'affrontera, qui t'opposera aux gens qui te détestent.
00:13:10Alors Lucien, mon fils, cela porte un nom.
00:13:16Cela s'appelle le courage.
00:13:22En manquerais-tu?
00:13:26C'est la première fois que j'avais vraiment envie de vous désobéir, mon père.
00:13:33Mais vous venez de trouver le mot qui m'en empêche.
00:13:36Je n'ai pas de chance.
00:13:39Non. Tu n'as pas de chance.
00:13:44Ce sera le dernier sacrifice que vous me demanderez?
00:13:47Le dernier.
00:13:49Le dernier. Je te le promets.
00:14:09C'est vous que je cherchais.
00:14:13Cette petite fille est-elle sûre?
00:14:19C'est une question qu'on ne m'a jamais faite impunément.
00:14:22Et puisque je ne puis chasser votre excellence,
00:14:25je remets ma vengeance à la prochaine chambre.
00:14:28Elle s'en chargera. J'ai bien l'honneur.
00:14:35Pas mal. Pas mal.
00:14:37Le naturel se réfugie chez les danseuses.
00:14:42Je viens de dîner avec monsieur votre père.
00:14:46Il m'a dit que votre nom était devenu un oui.
00:14:51Nom à votre excellence, oui à mon père.
00:14:54C'est ma vie, monsieur le ministre.
00:14:58Pouvez-vous fermer le verrou de cette loge?
00:15:01Rien de plus facile.
00:15:04Vous allez à Nancy. Bravo et merci.
00:15:07Il faut y partir très vite, mon ami, car j'ai de mauvaises nouvelles de là-bas.
00:15:11Dites-moi, ce du Poirier est décidément dangereux, hein?
00:15:14Ma foi, monsieur le ministre, si vous voulez mon avis,
00:15:17la situation est fort mal engagée.
00:15:19Il ne faut justement pas qu'elle le soit.
00:15:21Je peux bien essayer, mais...
00:15:23Vous aurez les plus grands moyens.
00:15:25Je vous en prie.
00:15:27Je vous en prie.
00:15:29Je vous en prie.
00:15:31Vous aurez les plus grands moyens.
00:15:33J'aime mieux dépenser 500 000 francs que de voir passer un du Poirier.
00:15:37C'est un homme de tête et d'esprit.
00:15:39Avec 12 ou 15 têtes comme celle-là, la chambre serait ingouvernable.
00:15:45Je ferai tout mon possible pour vous en préserver.
00:15:49Vous pourrez accorder des places.
00:15:51Deux ou trois bureaux de tabac.
00:15:53Destituer à peu près qui vous voudrez.
00:15:55Vous savez, mon jeune ami, ce sont de grands pouvoirs que je donne à un homme de votre âge.
00:15:59Je connais votre sérieux. Je suis sûr que vous en userez au mieux.
00:16:02Il faudra bien que je tienne votre excellence au courant.
00:16:04Que je lui demande son avis.
00:16:06L'intention. Mes bureaux sont remplis d'espions.
00:16:09Écrivez-moi deux fois par jour.
00:16:11Mais pas par la poste.
00:16:13Par courrier spécial ou par l'entremise de monsieur votre père.
00:16:16Et pour l'urgence, vous aurez le télégraphe.
00:16:19Le télégraphe?
00:16:21Oui, le télégraphe.
00:16:23Comme un préfet ou un ministre.
00:16:26Et sans communiquer mes dépêches au préfet?
00:16:29Bien entendu.
00:16:31Mais il les connaîtra toujours par l'homme du télégraphe.
00:16:34Tâchez tout de même de ne pas vous brouiller avec le préfet.
00:16:37Tirez-vous au mieux de toute cette affaire.
00:16:40Je parlerai de vous au roi et vous pouvez prétendre à tout.
00:16:45Je ne vous vois que deux obstacles à votre avenir.
00:16:48Le premier, aurez-vous le courage plus tard...
00:16:51de parler à 400 députés, dont 300 imbéciles.
00:16:55L'autre, ce premier mouvement, qui chez vous est terrible.
00:16:58D'ailleurs, méfiez-vous du premier mouvement.
00:17:01Il est toujours généreux.
00:17:06Ménagez le clergé et l'ancienne noblesse.
00:17:09Entre eux et nous, il n'y a que la vie d'un enfant.
00:17:12Surtout, dites bien au général Farid...
00:17:15de veiller à ce que trop d'intimité ne s'établisse...
00:17:18entre les soldats et les citoyens...
00:17:20et maintenir les duels entre eux suivis de mort...
00:17:22à environ six par mois.
00:17:24C'est le taux arrêté en conseil des ministres.
00:17:26L'égalité a tendance à rapprocher ces deux classes.
00:17:29Il faut les désunir.
00:17:31Et au préfet, de n'en appeler jamais à ces sentiments...
00:17:34prétendument généreux qui tiennent de trop près...
00:17:36à la subordination des peuples.
00:17:38Et point de pitié pour les républicains.
00:17:41Comment?
00:17:43Non, rien.
00:17:46Non, rien, je... je pensais.
00:17:49Vous pensiez quoi?
00:17:51Je préférerais ne pas partir seul.
00:17:53Emmener qui vous voudrez, mais pas quelqu'un de mon ministère.
00:17:56Non, bien sûr, non.
00:17:58Non, je pense à un homme de sang-froid, un camarade...
00:18:02en qui j'ai autant de confiance...
00:18:04que Votre Excellence peut bien m'en accorder.
00:18:06Qui cela?
00:18:07Votre Excellence ne le connaît pas.
00:18:09C'est un camarade que j'avais à Polytechnique.
00:18:12Actuellement, il est en prison.
00:18:13Hein?
00:18:15Pour dette.
00:18:17Ah!
00:18:43Qu'est-ce que c'est?
00:18:45Veuillez m'ouvrir, je vous prie.
00:18:47Qui êtes-vous?
00:18:48Ministère de l'Intérieur. J'ai un ordre d'élargissement.
00:18:51Un ordre d'élargissement?
00:18:53Oui, concernant M. Koff.
00:18:56Ah!
00:19:13Saisis-le bien, c'est lourd!
00:19:15On le voit bien, hein?
00:19:17Allez, on voit. Allez, donne!
00:19:26Attention!
00:19:27Oh, de maladroits! Du tort!
00:19:29Juste au moment de partir, c'est bien ma veine!
00:19:32C'est bien ma veine!
00:19:34C'est bien ma veine!
00:19:36C'est bien ma veine!
00:19:38C'est bien ma veine!
00:19:40C'est bien ma veine!
00:19:45Oh!
00:19:47Qu'est-ce que c'est?
00:19:53On a le droit de dire des choses pareilles sur les gens?
00:19:55Du moment que c'est de la politique, hein?
00:19:57Ah!
00:20:04Mais ne m'emmerdez pas, mon cher Koff.
00:20:06C'est pas moi qui ai payé des dettes.
00:20:08C'est le ministre.
00:20:10C'est admirable.
00:20:14Non, je ne l'ai pas laissé partir.
00:20:17Je l'ai fait partir.
00:20:19Je sais.
00:20:21Et je ne vous comprends pas.
00:20:24Et pour la première fois de ma vie, je vous en veux.
00:20:30Lucien sera toujours dupe de toutes les femmes qui l'aimeront.
00:20:34Et je vois dans ce cœur-là
00:20:36du fond pour être dupe jusqu'à 50 ans.
00:20:39Mais enfin, mon ami, que souhaitiez-vous?
00:20:42Le détacher définitivement de cette femme?
00:20:45Eh bien, savez-vous ce qui va arriver à Nancy?
00:20:47Lucien n'y sera plus un beau lieutenant libre de son cœur.
00:20:50Tout ce que fera Lucien là-bas sera fait contre elle et contre les siens.
00:20:54Il ne peut pas en être autrement.
00:20:56Car je connais Lucien, il remplira sa mission avec le plus grand aile.
00:20:59Alors elle prendra Lucien en horreur.
00:21:02Je partage vos craintes.
00:21:04Mais je sais que ce voyage est le plus sûr moyen d'en finir avec cette femme
00:21:09et de tout rompre.
00:21:23J'aime mieux un bon coup de lancette
00:21:26qu'une maladie de langueur
00:21:28ou un coup de pistolet
00:21:30ou la trappe.
00:21:34Merci.
00:22:04Regarde!
00:22:07Regarde, il est en train de transmettre.
00:22:11Peut-être une grande nouvelle
00:22:13qui va faire monter ou baisser la rente.
00:22:17Enrichir un ministre.
00:22:19Ou un banquier.
00:22:21Et un banquier.
00:22:23L'un ne va jamais sans l'autre.
00:22:27Les gouvernements ont le plus grand intérêt à ménager la bourse.
00:22:30Un ministère, lui, ne peut pas défaire la bourse.
00:22:33Mais la bourse, elle, peut défaire un ministère.
00:22:43Dis-moi, ce ne sera pas pour nous, par hasard?
00:23:03C'est bon, c'est bon.
00:23:05C'est bon, c'est bon.
00:23:07C'est bon, c'est bon.
00:23:09C'est bon, c'est bon.
00:23:31Qu'est-ce qu'il dit?
00:23:34Je ne sais pas en lire, moi.
00:23:37Bonsoir, il n'est pas trop tard pour dîner?
00:23:39Mais non, mais non. Entrez, soyez les bienvenus.
00:23:41Merci.
00:23:50Qu'est-ce que c'est que ça?
00:23:52Ça vient de Paris.
00:23:53C'est la voiture qui est là devant l'auberge.
00:24:03Un peu de cette excellente piquette.
00:24:05Voilà qui va me changer de l'ordinaire de la prison.
00:24:09Tout ça, c'est des traites à la patrie.
00:24:11Jeuneot!
00:24:12Hé, Jean, viens là, toi.
00:24:15Regarde.
00:24:16Qu'est-ce qu'il t'en dit?
00:24:17Ce n'est pas possible.
00:24:19On va leur faire boire à ces sauts de capé.
00:24:22On va les faire sauter.
00:24:24Par l'auberge, fumier!
00:24:36Que se passe-t-il?
00:24:37Surtout, n'ouvrez pas la porte.
00:24:39Sauvez-vous!
00:24:40Par là!
00:24:41Ils veulent piller votre voiture.
00:24:43Mais pourquoi?
00:24:44Ça, vous le savez mieux que moi.
00:24:48Mais sauvez-vous!
00:25:06Bravo, mes enfants!
00:25:11Bravo!
00:25:13Tu vas partir avec pied devant!
00:25:15Bravo!
00:25:18Tu as l'air d'outre le monde!
00:25:20Monsieur, je m'appelle Leveille.
00:25:21Je t'appelle Fumier.
00:25:23Et voilà ton nom sur ta figure.
00:25:25Et vous, comment vous l'appelez-vous?
00:25:27Je m'appelle Luspectrice.
00:25:29C'est pas possible!
00:25:30Vous plaisiez, d'abord!
00:25:32Lâchez-moi!
00:25:33Lâchez-moi!
00:25:35J'arrive, monsieur!
00:25:36J'arrive!
00:25:38Mais laissez-le!
00:25:39Ils n'existent pas, les viands!
00:25:43Descendez!
00:25:51Attention!
00:25:52Attention, les enfants!
00:25:53Attention!
00:25:54Les gendarmes!
00:25:55Les gendarmes!
00:25:58Les gendarmes!
00:26:00Les gendarmes!
00:26:01Les gendarmes!
00:26:09À vous, moi!
00:26:10Eh bien, il est temps!
00:26:12Monsieur le commissaire de police?
00:26:13Pas de police!
00:26:14Commissaire aux élections!
00:26:15Bon, bon, bon!
00:26:16Excusez-moi.
00:26:18Il vous a mis dans un triste état, monsieur le commissaire!
00:26:21C'est encore heureux qu'il n'ait pas de cailloux!
00:26:24Ah, parce que c'est votre habitude
00:26:25de se voir les envoyer des ministres à coups de pierre!
00:26:27Ma foi, monsieur le commissaire,
00:26:28voilà, la chose, c'est que
00:26:29ils ont trouvé des imprimés
00:26:31qui sont tombés de votre voiture
00:26:32et ils les ont lus
00:26:33et qui disaient du mal
00:26:34de monsieur Dupoirier
00:26:35qui est très aimé par ici!
00:26:37Non, ce n'est pas loin, monsieur le commissaire,
00:26:39il faut les comprendre!
00:26:40Je vois, oui!
00:26:41Bon, maintenant, si j'ai un conseil à vous donner,
00:26:43sauvez-vous vite!
00:26:44Nous ne sommes que tous les deux!
00:26:45Oui, oui, mais il faut qu'il paie d'abord!
00:26:48Le nom de cet homme
00:26:49qui m'a insulté du balcon!
00:26:50Payez, monsieur, ça vaudra mieux!
00:26:51Messieurs, messieurs!
00:26:52C'est 42 francs!
00:26:5342 francs!
00:26:54Un mauvais dîner, je ne l'ai même pas mangé!
00:26:55Alors, comment savez-vous
00:26:56que c'était mauvais nom?
00:26:57Annoncez le sujet de paye!
00:26:58Non, non, non, surtout pas, messieurs,
00:26:59que je vous en supplie, payez, payez!
00:27:00Ils vont revenir avec des tronés en dessous, voyons!
00:27:02Et avec des pierres, cette fauteuse!
00:27:04Allez, tenez, mon brave!
00:27:05Oui, ben, il manque deux francs!
00:27:06Je les garde pour mon pourboire!
00:27:07Donc?
00:27:08Des logeons, des logeons, il va qu'ils reviennent!
00:27:09Sauvez-vous vite, je vous en supplie!
00:27:11Vas-y!
00:27:12Fermez vite!
00:27:13Et ma serviette!
00:27:14Fermez!
00:27:15La vitage au fond!
00:27:17Écoutez-moi!
00:27:18Je vous en supplie, traitez-les!
00:27:19Qu'ils reviennent, je les garde pour le pouboir!
00:27:20Lorsque nous ne pouvons plus les chercher,
00:27:21on les mettera autour du bras!
00:27:22Viens!
00:27:23Allons!
00:27:24Il est prêt!
00:27:25Un, deux, trois, c'est bon!
00:27:26Merci, mon coq, merci!
00:27:27Annoncer la boule en bas, mandonnez!
00:27:28Décidions pas!
00:27:29Décidions pas!
00:27:30Braque le dom!
00:27:31Décidions pas!
00:27:32Levine!
00:27:33C'est la demi-guerre!
00:27:34Des roques!
00:27:35Ces roques!
00:27:36Ben, fais-être!
00:27:37Allez!
00:27:38C'est l'avenir.
00:27:39Ils le vont revenir.
00:27:40On leur en supplie!
00:27:41C'est l'ancien qui m'a donné la parole.
00:28:11C'est l'ancien qui m'a reconnu.
00:28:13Quelle honte.
00:28:15Tu as entendu, on a crié à Valeuven.
00:28:19Ça, c'était le mépris à l'état pur.
00:28:21Le mépris, ça s'avale, Lucien.
00:28:23Ça ne se marche pas.
00:28:25Tu veux que je supporte toute ma vie cette idée d'avoir été insulté impunément ?
00:28:28Si tu as la peau si tendre au mépris, pourquoi as-tu quitté Paris ?
00:28:33J'ai mal conduit toute ma vie.
00:28:36Je suis en train de m'enliser.
00:28:38Peut-être. Mais quelques raisons que tu aies, tu ne peux pas déserter maintenant en pleine bataille.
00:28:42Tu veux un conseil ?
00:28:44Le mieux, c'est de tout oublier de cette histoire.
00:28:47Tout.
00:28:49Dis, le premier mois, tu n'en riras avec personne au moins.
00:28:52Tout le monde se moquerait de moi.
00:28:54Ce n'est pas moi qui en parlerai.
00:28:56Je n'oublie pas ce que je te dois.
00:28:57Que tu m'as évité cinq ans dans un cachot grand comme cette calèche.
00:29:00Pour me faire apprenti bourreau.
00:29:02Mais encore.
00:29:03Le bourreau est plus estimable, c'est par pure sottise que les gens le prennent en grippe.
00:29:06Il accomplit un devoir, lui.
00:29:08Tandis que nous, nous sommes sur la route de tous les honneurs qu'on peut distribuer à la société.
00:29:12En route pour faire une infamie et une infamie nuisible.
00:29:16Le peuple qui se trompe si souvent a eu raison cette fois.
00:29:19Il nous a pris pour les auteurs de ce pamphlet.
00:29:21Dans cette belle calèche anglaise, il a découvert deux agents du ministre.
00:29:24Deux coquins.
00:29:25Et il nous a dit, vous êtes des coquins.
00:29:28Comment sortir de cette boue ?
00:29:31Je me suis moi-même plongé au moral.
00:29:33Comme au physique.
00:29:35Que veux-tu ?
00:29:36Avec l'habit bredé, il faut avoir la peau dure aux outrages.
00:29:39Quoi de plus haut ?
00:29:40Tu veux faire carrière dans les honneurs et rester un homme d'honneur.
00:29:43C'est incompatible.
00:29:44Voilà une drôle de consolation que tu me donnes là.
00:29:46Mais je me moque des honneurs, moi !
00:29:48C'est encore plus grave.
00:29:49Tu aimes la bonne société ?
00:29:50Tu veux t'y faire une place brillante ?
00:29:52Eh bien fais-le.
00:29:53Mais pas comme un fils de famille qui aura toujours les moyens de s'en aller si les choses le dégoûtent par trop.
00:29:58Même ton honnêteté, c'est à ton père que tu le dois.
00:30:03C'est effrayant.
00:30:05Pour ne pas faire de peine à mon père, je me suis laissé entraîner dans cette sale mission.
00:30:09Maintenant, me voilà occupé à calomnier un honnête homme.
00:30:12Avec tous les moyens dont le gouvernement dispose.
00:30:15Et je me retrouve couvert de boue.
00:30:17Et on me crie que mon âme est sur ma figure.
00:30:20Et qu'est-ce que je peux faire ?
00:30:23M'en aller ?
00:30:25Manger le bien gagné par mon père ?
00:30:27Et attendre ainsi la vieillesse en me méprisant moi-même ?
00:30:30Et en m'écriant que je suis heureux d'avoir eu un père qui valut mieux que moi ?
00:30:37Si je n'avais pas ma mère et mon père,
00:30:40je me ferais conduire à Rochefort.
00:30:42Et je m'embarquerais pour l'Amérique.
00:30:45Sous un nom supposé.
00:30:47Et tu viendras avec moi, tiens.
00:30:49Oh, merci. Oh, belle idée.
00:30:51À New York, la charrette du gouvernement est tombée dans l'ornière opposée à la nôtre.
00:30:55La majorité commande, formée en grande partie par la canaille.
00:30:58Le suffrage universel y règne en tirant, et en tirant aux mains sales.
00:31:01Et le clergé qui les abrutit encore plus que nous.
00:31:04Je reviendrai dans deux ans.
00:31:06Et la moralité américaine ?
00:31:08Tu y penses, Lucien ?
00:31:10D'une abominable vulgarité.
00:31:12Tiens, prends un petit marchand de Rouen ou de Lyon, sans imagination,
00:31:15ne pensant qu'à l'argent, et tu auras un Américain.
00:31:18Ce pays soi-disant modèle est un triomphe de la médiocrité sautée égoïste.
00:31:23Et le pire, est que sous peine de périr, il nous faut leur faire la cour.
00:31:28Nous espérons qu'en 1917, l'Europe sera constitutionnelle.
00:31:31Ce sera le seul moyen d'y résister à l'Amérique.
00:31:34Mais alors quoi ? Faudrait-il que je change une troisième fois d'état ?
00:31:38Tu as un mois pour penser à tout cela.
00:31:41En attendant, c'est plutôt de vêtements qu'il te faut changer.
00:31:44Et aussi faire laver la voiture avant de circuler dans notre bonne ville de Nancy.
00:31:48Nancy...
00:31:51Qu'est-ce que je vais y faire à Nancy ?
00:31:55Ton devoir d'abord.
00:31:59Puis il y a là-bas au moins, une jolie dame dont tu n'as pas dû oublier le nom.
00:32:51Lumière chez les Républicains.
00:32:59Lui-Noir chez leurs ennemis.
00:33:09Docteur, Docteur, M. Levin et un autre viennent d'arriver à la préfecture.
00:33:13La femme du portier est arrivée me prévenir aussitôt.
00:33:16J'avais hésité jusqu'à ce moment à croire la chose possible
00:33:19tant elle me paraissait incongruente.
00:33:22Son retour le mettra dans une situation très gênante
00:33:26vis-à-vis des gens qui l'ont reçu.
00:33:29A moins...
00:33:37A moins qu'il ne soit revenu pour régler une affaire personnelle.
00:33:42M. le Préfet, mes devoirs.
00:33:45Le Préfet de Meurthe-et-Moselle vous souhaite la bienvenue, Messieurs.
00:33:48Je ne vous attendais pas.
00:33:50Je ne vous demande pas si vous avez fait le bon voyage.
00:33:53Très mauvais, merci.
00:33:55Pluie et boue ?
00:33:57Beaucoup de boue, M. le Préfet. Beaucoup trop de boue.
00:34:00Mais pas d'accident ?
00:34:02Non.
00:34:03Mais un incident ?
00:34:04Non.
00:34:05Mais un incident ?
00:34:06Non.
00:34:07Mais un incident ?
00:34:08Non.
00:34:09Mais un incident ?
00:34:10Non.
00:34:11Mais un incident ?
00:34:12Enfin, vos gendarmes vous en parleront plus tard.
00:34:14Ce serait trop long à vous raconter ce soir.
00:34:17Oui, oui. Comme vous le voyez, il se fait tard et j'allais me battre au lit.
00:34:22Vous m'excuserez donc mon...
00:34:25J'allais dire mon lieutenant.
00:34:28Quel incident ?
00:34:31Les commissaires aux élections sont molestés dans votre département, M. le Préfet.
00:34:35Les commissaires aux élections sont molestés un peu partout.
00:34:38La nuit, c'est plus sûr.
00:34:40Il me semble que les routes devraient être encore plus sûres le jour que la nuit, non ?
00:34:46Vous plairait-il, M. le sous-préfet, de lire ceci, qui vous précisera les motifs de ma venue ?
00:34:53C'est une lettre du ministre de l'Intérieur.
00:34:56Du... du ministre ?
00:35:00Oh, cette lettre est de la main même de son excellence, M. le Préfet.
00:35:04Comment vous avez quitté l'armée ?
00:35:08Où votre passage n'avait laissé que des regrets.
00:35:11Je l'aurais quitté tôt ou tard.
00:35:13Il est vrai qu'un jeune homme de votre talent...
00:35:17J'aurais quitté l'armée de toute façon,
00:35:20pour ne pas être exposé à me voir commander d'aller sabrer des ouvriers.
00:35:23Mais sabrer, mon cher, comme vous dites, des ouvriers en rébellion contre le gouvernement du roi,
00:35:28ou soutenir ce même gouvernement.
00:35:31Montrez-moi donc la différence.
00:35:33Pardonnez-moi, je m'étais fait une toute autre idée du métier militaire.
00:35:36Pas celle-là.
00:35:37Sans doute, sans doute.
00:35:39Bon, vous avez dîné ?
00:35:41Très légèrement.
00:35:42Eh bien, je vais vous faire apporter un encas.
00:35:45Messieurs, à demain.
00:35:48Un instant, M. le Préfet.
00:35:51Je souhaiterais auparavant que nous regardions ensemble les bordereaux des élections.
00:35:54Oh, à onze heures du soir ?
00:35:56Je vois avec plaisir que le ministre m'envoie un jeune homme plein de zèle.
00:35:59Mais il se fait tard, et je meurs de sommeil, moi.
00:36:02J'ai des ordres, monsieur.
00:36:04Je dois envoyer très vite un premier courrier à son excellence.
00:36:07Souhaite.
00:36:09Mon zèle à moi pour le gouvernement ne saurait être mis en doute, M. le Commissaire.
00:36:12Sachez que c'est un tracas épouvantable que les élections pour un pauvre préfet comme moi qui en ait la charge.
00:36:17Ah, la vie est couleur de rose pour vous où vous courez la poste,
00:36:20tandis que moi ici, j'en perds le sommeil.
00:36:23Je peux parler devant monsieur ?
00:36:25Mais certainement. M. Coff est mon adjoint dans ma mission.
00:36:28Secrétaire seulement. Secrétaire, M. le Préfet.
00:36:30Tenez, voilà les rapports, candidat par candidat.
00:36:36Aurait-il appris quelque chose de cette conspiration qui l'a menacée,
00:36:41et que nous avons déjoué à grand'peine ?
00:36:44Vous vous rappelez cette nuit, Vera ?
00:36:48Je ne me rappelle rien, docteur.
00:36:51En période d'élection, vous savez, il faut se méfier.
00:36:55Les langues se délient.
00:37:01Et si, par hasard, il apprenait quelque chose ?
00:37:07Il me tuerait.
00:37:13Ce n'est pas brillant.
00:37:14Mais on n'y peut rien. Ce département est un des plus mauvais de France.
00:37:17Pourtant, tout a été fait, tout.
00:37:19Affirmez-le, monsieur.
00:37:21M. le Préfet.
00:37:22M. le Préfet.
00:37:23M. le Préfet.
00:37:24M. le Préfet.
00:37:25M. le Préfet.
00:37:26M. le Préfet.
00:37:27M. le Préfet.
00:37:28M. le Préfet.
00:37:29Votre affiche, pas enflée,
00:37:31agents provocateurs, menaces verbales et même écrites.
00:37:34Enfin tout, quoi.
00:37:35J'ai même réussi à éliminer complètement un candidat
00:37:38par un dossier compromettant que m'avait mis ma police.
00:37:41Bon effectivement, c'est une histoire avec une petite fille du Couvent de Saint-Denis.
00:37:44Ça m'a coûté 25 louis.
00:37:46M. Cobes vous les remettra
00:37:47Parce qu'en plus, vous avez aussi des fonds !
00:37:50Voyez-vous, monsieur le Préfet,
00:37:52ce que le ministre ne veut à aucun prix
00:37:55c'est que le docteur Dupoirier soit élu.
00:37:57Il a éliminé le docteur Dupoirier.
00:37:59Mais ça!
00:38:01Mais tenez, je vais vous montrer quelque chose.
00:38:04Voici un tableau que je tiens un jour scrupuleusement.
00:38:07Venez, venez.
00:38:09Alors, Schmitt, le libraire républicain.
00:38:12Soixante voix, autant dire aucune chance.
00:38:14Et notre candidat constitutionnel?
00:38:16M. Gonin, deux cent vingt voix.
00:38:18Mais contre nous, les deux candidats légitimistes.
00:38:20M. de Constantin, deux cent cinq voix.
00:38:23Et M. Dupoirier, un ancien ami à vous, je crois.
00:38:26Pourquoi ancien?
00:38:28Légitimiste aussi, trois cent quinze voix.
00:38:32Eh bien, c'est encore pire que je ne le prévoyais.
00:38:34Permettez, permettez.
00:38:36Nos adversaires sont sur le point de commettre une faute
00:38:39dont nous pouvons tirer avantage.
00:38:41Ce M. de Constantin, je viens d'apprendre, ce soir,
00:38:45qu'il va se désister en faveur du docteur Dupoirier.
00:38:49Qui, récoltant deux cent cinq voix en plus de ses trois cent quinze,
00:38:52est sûr d'être élu.
00:38:53Pas du tout, pas du tout.
00:38:56Ah, si je n'avais si grand sommeil, je vous démontrerais
00:38:59que, bien mené, bien sûr,
00:39:01deux tiers au moins,
00:39:03deux tiers des deux cent cinq voix de M. Constantin
00:39:06peuvent aller à notre candidat M. Gonin.
00:39:10Les deux tiers de deux cent cinq font...
00:39:13Cent trente-six virgule six, six, six, six.
00:39:17Vous êtes très drôle, M. de Polytechnique.
00:39:20Et c'est à cela que je m'emploie et qu'on m'y aide.
00:39:23Qui, on?
00:39:24Ah, permettez que je garde pour moi.
00:39:26Monseigneur l'évêque?
00:39:27Mais non, mais non, il n'y a rien à espérer de ce côté.
00:39:30En êtes-vous bien sûr?
00:39:31Je connais ce pays mieux que vous, mon jeune collaborateur.
00:39:34Oh, monsieur.
00:39:35L'Église est avec la noblesse, pas avec nous.
00:39:38Le grand vicaire, pour ne pas me rencontrer,
00:39:40ne met plus le nez hors de chez lui depuis une semaine.
00:39:42Il fait dire partout qu'il a la goutte.
00:39:44Le diable se présenterait aux élections
00:39:46que l'Église le soutiendrait, par peur de la République.
00:39:49Eh bien, je vous laisse.
00:39:51Nous reprendrons tout cela demain.
00:39:53J'ai une rude journée et je veux prendre des forces.
00:39:55Vous n'aurez qu'à sonner, on vous montrera vos chambres.
00:40:02Eh bien, il n'est pas si mal que ça, ton petit préfet.
00:40:05Ah, tu trouves?
00:40:06Mais qu'est-ce que tu lui reproches, hein?
00:40:08Attention, s'il voit une tache rouge sur la nappe,
00:40:10il va prendre ça pour une couleur politique.
00:40:12Et notre mission serait compromise.
00:40:14Tu sais, de toute façon, elle s'annonce mal.
00:40:17Je pense comme toi.
00:40:19Le plus grave, c'est ce petit préfet.
00:40:22Il n'a ici aucune influence personnelle,
00:40:24qui est incapable de séduire qui que ce soit par sa conversation.
00:40:28Écoute, je ne suis ici que depuis trois heures
00:40:31et je sais déjà que ses pamphlets ont produit l'effet le plus déplorable.
00:40:35Crois-tu que si l'Église se cache de lui, ce soit sans raison?
00:40:39Le grand vicaire fait dire partout qu'il est au lit.
00:40:42Mais moi, je sais déjà qu'il s'est levé au petit jour, le grand vicaire.
00:40:45Ah, pour aller dire la messe.
00:40:48Figure-toi que la situation à Nancy, je la connais aussi bien que lui.
00:40:52Sinon mieux, je m'en doute.
00:40:55Et là aussi, mon âge me nuit.
00:40:57Tu as vu ce petit préfet, qui me traite en rival,
00:41:00et non en aide qu'on lui envoie.
00:41:02L'ennuyeux pour nous, c'est qu'il est à son lieu de la bataille, le ministre,
00:41:06et qu'il faut 27 heures à ton courrier pour aller à Paris.
00:41:09Il ne peut rien pour nous, le ministre.
00:41:12L'ennuyeux, surtout, c'est que quand il ne réussit pas,
00:41:16un ministre est trop heureux de trouver quelqu'un à blâmer.
00:41:21Quelques démarches décisives à laquelle il puisse s'en prendre.
00:41:25Quelles démarches?
00:41:33Bon, bon, bon, comme une discussion politique ne finit jamais,
00:41:36moi, ça me suffit pour ce soir. Je vais me coucher.
00:41:42Pas moi.
00:42:12Sous-titrage MFP.
00:42:43Docteur Dupoirier.
00:42:47Docteur Dupoirier.
00:42:54Lucien Levenne.
00:42:56Monsieur, monsieur, je vous en prie.
00:42:58Monsieur, pas de vengeance contre un vignard.
00:43:00Mais vous êtes fou, mon cher Dupoirier.
00:43:03Vous avez peur de moi?
00:43:05Pourquoi aurais-je peur de vous?
00:43:07Eh oui, au fait.
00:43:09Vous n'avez pas peur de moi?
00:43:11Au fait, vous n'avez pas peur, vous, la nuit?
00:43:13Peur? Pourquoi?
00:43:15Oui, c'est vrai. Vous, vous êtes du gouvernement.
00:43:18Vous êtes invulnérable.
00:43:20Mais moi, je suis d'opposition.
00:43:22Ah, c'est cela.
00:43:24On peut se faire saisir par quatre hommes et se faire jeter à la rivière.
00:43:28Mais je ne sais pas nager.
00:43:30Et une fluxion de poitrine évite d'arriver.
00:43:32Oh, un assassinat, là, vous exagérez, docteur.
00:43:35Je ne suis pas votre ennemi, je suis votre adversaire.
00:43:38Dites-moi, docteur, la peur, ça ne se guérit pas?
00:43:41Non, non, pas de remède.
00:43:43Surtout la nuit.
00:43:44Mon cher docteur, à votre place, j'aurais pris une voiture
00:43:47pour être à l'abri.
00:43:48J'y ai bien songé.
00:43:50Mais on peut séduire mon cocher pour me faire verser.
00:43:54Mais vous, pourquoi n'avez-vous pas pris la vôtre?
00:43:57Mais parce que moi, je n'ai pas peur.
00:43:59Vous avez de la chance d'avoir du courage.
00:44:02Vous n'êtes pas armé?
00:44:04Moi?
00:44:06Jamais.
00:44:07Moi, j'ai deux pistolets.
00:44:09Ah, mais il faut du temps pour se servir de deux pistolets.
00:44:12Les amorcer, viser, tirer,
00:44:15il ne vous serait guère utile si je vous attaquais,
00:44:18même sans armes.
00:44:20Si vous m'attaquiez, même sans armes,
00:44:23mais pourquoi m'attaqueriez-vous?
00:44:25Oh, mais je n'y pense pas, docteur.
00:44:27C'était une manière de parler.
00:44:30Vous avez froid?
00:44:32Non, non, pourquoi?
00:44:34Mais j'entends vos dents qui claquent.
00:44:36Non, non, je ne crois pas que mes dents claquent.
00:44:39Ah, si, elles claquent.
00:44:43On dirait bien que vous avez peur de moi.
00:44:45Peur? Pourquoi, mon Dieu?
00:44:48Je ne sais pas.
00:44:52Peut-être m'avez-vous fait du mal, docteur.
00:44:57Oui, je crois que j'ai un peu froid.
00:45:01Allons, docteur, je vais vous raccompagner chez vous.
00:45:04Non, non, ne faites rien, non.
00:45:07Vous êtes revenu pour me combattre, cher monsieur.
00:45:10Il est préférable pour vous, comme pour moi, d'en rester là.
00:45:14Il n'est bon ni pour vous, ni pour moi qu'on nous voit ensemble.
00:45:17Adieu, monsieur.
00:45:25Pas de vengeance contre un vieillard.
00:45:35Est-tu bien sûr de ta démarche?
00:45:38Ce sont eux qui sont les vrais maîtres ici.
00:45:41Et puis, c'est un peu pour cela qu'on nous a envoyés, non?
00:46:05Monsieur l'abbé!
00:46:07Qu'est-ce que c'est?
00:46:09Le service du roi m'appelle près de vous, monsieur l'abbé.
00:46:12Mais, monsieur, à cette heure?
00:46:14Le service du roi ne connaît pas d'heure.
00:46:17Permettez que je me présente.
00:46:19Mais, je vous ai reconnu, monsieur le Verbe.
00:46:22Que désirez-vous de moi?
00:46:25Une entrevue.
00:46:29Vous êtes le roi.
00:46:31Une entrevue.
00:46:34Venez, venez.
00:46:38J'aimerais mieux que l'on ne nous voit pas entrer ensemble.
00:46:41Attendez-moi ici cinq minutes et demie.
00:46:44Vous voyez ce bâtiment?
00:46:46Vous tournerez cet angle. Vous trouverez une porte.
00:46:49Et un escalier, vous le montrez.
00:46:51Vous longerez la galerie.
00:46:53Vous trouverez une porte noire surmontée d'une croix.
00:46:57Vous frapperez deux coups.
00:46:59Puis cinq. Je vous ouvrirai.
00:47:02Deux.
00:47:04Et cinq.
00:47:30Tu as ta montre?
00:47:32Tu sais bien que je l'ai laissée à ma faillite.
00:47:35Parfaitement honnête, toi aussi.
00:47:38Honnête ou pas, permets-moi de te dire,
00:47:41grande tête politique,
00:47:43que les jésuites, ça ne s'achète pas.
00:47:46Mais, mon cher, la plupart du temps,
00:47:48tu achètes des gens qui n'ont pas d'autre intérêt que l'argent.
00:47:51Mais ce n'est pas du tout le cas des jésuites.
00:47:53Ils peuvent très bien vendre leur voix à leurs ennemis.
00:47:56À condition que leurs ennemis fassent leur politique.
00:48:27Oserais-je, monsieur,
00:48:29vous demander vos lettres de créance?
00:48:32Mais, volontiers.
00:48:36Mon métier, monsieur l'abbé,
00:48:38est de respecter toutes les opinions professées par un galant homme.
00:48:41Et c'est à ce titre,
00:48:43comme à celui de mon respect personnel pour vous, monsieur l'abbé,
00:48:46que je me sens disposé à honorer les vôtres.
00:48:49Je vous en prie, monsieur l'abbé.
00:48:52Que je me sens disposé à honorer les vôtres.
00:48:58Vous remarquerez que je n'ai fait aucune tentative,
00:49:01ni directement, ni indirectement,
00:49:03pour tenter d'altérer ou de changer vos manières de voir
00:49:06sur le sujet qui m'amène ici.
00:49:09Le voici.
00:49:11Ce que craint mon gouvernement, monsieur l'abbé,
00:49:13c'est que le docteur Dupoirier,
00:49:15qui est, lui, un légitimiste excessif,
00:49:18furibond même,
00:49:20propose, s'il était élu,
00:49:23des mesures...
00:49:25extrêmes.
00:49:28Vous-même n'avez que peu de députés dans la chambre actuelle.
00:49:32Un organe de plus n'est pas à dédaigner,
00:49:35ce me semble.
00:49:38Le gouvernement préférerait donc voir élu
00:49:42monsieur de Constantin.
00:49:44Monsieur de Constantin ?
00:49:46Mais, il est votre adversaire.
00:49:49Je sais.
00:49:51Monsieur de Constantin renonce et se désiste
00:49:54au profit du docteur Dupoirier.
00:49:56C'est beaucoup moins certain depuis ce matin, monsieur l'abbé,
00:49:59où j'ai vu madame de Constantin longuement.
00:50:03Oui, elle tient beaucoup à faire de son mari un député.
00:50:07Et dans le ménage, c'est surtout elle qui décide.
00:50:11Qu'attendez-vous exactement de mon ministère ?
00:50:15Voilà.
00:50:17Pouvez-vous faire envoyer des courriers
00:50:19à cent de vos gentilhommes campagneurs ?
00:50:21En joignant ces voix à celles dont le gouvernement dispose,
00:50:23l'affaire est sûre.
00:50:25C'est monsieur de Constantin qui passera.
00:50:27Ainsi, vous pourrez avoir, monsieur l'abbé,
00:50:30élu un homme de votre couleur à la chambre.
00:50:33Et comme cela, tout le monde sera content.
00:50:36Vos pouvoirs sont très grands, monsieur.
00:50:39Ils donnent une haute idée de la mission,
00:50:42dont, si jeune encore, on vous a chargé...
00:50:47Je crois bien que vous n'avez pas 23 ans.
00:50:50J'en ai 26.
00:50:53Mon fils,
00:50:55permettez-moi de vous donner ce nom qui emporte tant d'estime.
00:50:59Mon fils,
00:51:01ma pensée est toute de bienveillance
00:51:04pour vos intérêts dans ce monde et dans l'autre.
00:51:08Ceux de l'âme sont tellement supérieurs aux intérêts mondains.
00:51:15La France, actuellement,
00:51:17prend toutes les allures d'une compagnie industrielle,
00:51:20où toutes les opérations se font en vue des bénéfices
00:51:23que les actionnaires doivent en retirer.
00:51:26Cela tient aux instants naturels de la classe dominante
00:51:29à son pouvoir absolu.
00:51:31Mais croyez-vous
00:51:33que dans 16 ans d'ici, lorsque vous aurez 40 ans,
00:51:36cet âge de maturité
00:51:38sur lequel tout homme sage doit toujours avoir les yeux fixés
00:51:41comme sur le point décisif de sa carrière,
00:51:44croyez-vous que cette même bannière que vous défendez aujourd'hui flottera encore ?
00:51:48Je vous supplie
00:51:50de vous poser devant les yeux cette question
00:51:53qui possédera en France l'influence dominante
00:51:56lorsque j'aurai 40 ans.
00:51:58Songez à votre avenir, mon fils.
00:52:01La religion ne défend pas une juste ambition.
00:52:05Excusez-moi de vous interrompre, monsieur l'abbé.
00:52:08Mon devoir est de vous supplier d'oublier
00:52:10et mon âge et toutes ses considérations.
00:52:14Le mien est de tout tenter
00:52:16pour ramener au bercail un homme qui, si jeune encore,
00:52:19développe une telle maturité de talent.
00:52:22D'un talent que j'ai été bien placé pour juger.
00:52:26Mais que vous avez déployé pour ramener entre nous
00:52:29une coopération à la vérité bien singulière.
00:52:32Monsieur l'abbé,
00:52:34je vous ai exposé les termes de ma proposition
00:52:36à propos de cette élection.
00:52:38Une alliance.
00:52:39Une alliance que je crois avantageuse pour mon maître
00:52:42et pour le vôtre.
00:52:43Tout ceci est bien interdit.
00:52:45Et que nous sommes disposés
00:52:47à mettre le prix pour cette alliance que je vous propose.
00:52:50Un gros prix même.
00:52:52Et vous avez cette somme sur vous ?
00:52:57Non, je ne l'ai pas encore.
00:53:01Mais une dépêche télégraphique peut très bien
00:53:03l'arriver à Paris demain soir.
00:53:05Dont la réponse peut me parvenir après-demain avant midi,
00:53:07laquelle m'ouvrira un crédit de 500 000 francs
00:53:09chez le receveur général.
00:53:11Et qui paiera comment ?
00:53:14En billet de banque.
00:53:17Vous savez, on les reçoit avec méfiance par ici.
00:53:22Aurait-on la même méfiance pour des lettres de change ?
00:53:25Bien sûr, accepté par les premiers négociants de la ville.
00:53:28La calomnie veille autour de nous, mon enfant.
00:53:32Tout ce que nous faisons ici
00:53:34peut être imprimé un jour.
00:53:37C'est déjà beaucoup
00:53:39que trois ou quatre personnes,
00:53:41quel qu'honorable qu'elles soient,
00:53:43soient au courant d'un secret
00:53:45qui peut devenir un secret.
00:53:48A quoi bon faire appel pour le détail à des négociants ?
00:53:52Si le préfet...
00:53:54Monsieur, je suis peut-être un peu jeune
00:53:56pour me charger seul d'une dépense secrète aussi forte.
00:53:58Mais mon ministre m'a fait une condition
00:54:00de ce que le préfet n'intervienne d'aucune sorte.
00:54:09Ou alors de l'or.
00:54:11Des écus que je prendrai moi-même chez le receveur général.
00:54:14Ou alors de l'or.
00:54:16Des écus que je prendrai moi-même chez le receveur général.
00:54:19Oui.
00:54:21Et que l'on déposerait dans une cassette en lieu sûr.
00:54:24Que je vous indiquerai.
00:54:26Et dont j'aurai la clé.
00:54:28Dont nous aurons, vous et moi, chacun, une clé.
00:54:34Bon. Si vous voulez, oui.
00:54:36Je dois vous dire, en tout cas, monsieur,
00:54:39qu'en l'absence de cette cassette
00:54:41que votre télégraphe doit remplir,
00:54:43votre négociation ne saurait faire un pas de plus.
00:54:47Mais...
00:54:49Puisque nous sommes tombés d'accord, monsieur l'abbé,
00:54:52nous allons faire le nécessaire.
00:54:55Sans tarder.
00:54:57Il n'y a pas de temps à perdre.
00:54:59L'élection a lieu après-demain.
00:55:02Et l'issange,
00:55:04elle commence dès 9h et finit à 4h de l'après-midi.
00:55:09Il serait essentiel que vos amis n'aillent voter
00:55:12qu'après que j'ai eu l'honneur de vous visiter,
00:55:15vers les 2h environ.
00:55:17Ce n'est pas rien,
00:55:19ce que vous exigez là de mon ministère.
00:55:22Il faudrait les parquer dans une salle,
00:55:25les tenir enfermés à clé.
00:55:27Jusque là...
00:55:29Je sais, je sais tout cela.
00:55:31Mais...
00:55:33l'enjeu n'est pas mince non plus, monsieur l'abbé.
00:55:38Oh, c'est une gousse d'huile dans les rouages.
00:55:42Je mettrai ceci au pied de la croix.
00:56:08Allez, allez, réveille-toi, en route.
00:56:21Je fais sans plaisir et sans goût
00:56:24des choses que je trouve à la fois déshonorantes
00:56:27et stupides.
00:56:29J'en ai marre,
00:56:31j'en ai marre,
00:56:33j'en ai marre,
00:56:35des choses déshonorantes et stupides.
00:56:47Je viens de te le dire, il m'a fait passer un mot
00:56:49me priant de lui accorder quelques instants pour une communication.
00:56:52J'étais seule.
00:56:53Tu as accepté de recevoir monsieur Levene ?
00:56:55Oui, j'ai accepté.
00:56:56En l'absence de ton mari ?
00:56:58Je crois que tu es folle.
00:57:00C'est parce que tu savais que j'ai de l'amour pour lui
00:57:02que tu as accepté de le recevoir ?
00:57:04Tu n'es même pas curieuse de ce qu'il avait à me dire.
00:57:06Je ne veux pas le savoir. Ne m'en parle jamais.
00:57:10J'espère que tu ne lui as pas parlé de moi au moins.
00:57:13Non, non.
00:57:14D'ailleurs, jamais Lucien ne te parlera de moi
00:57:17ou s'il t'en a parlé, ne me répète rien.
00:57:19Je te le demande.
00:57:21Après tout, ce n'était peut-être pas pour moi qu'il voulait te voir.
00:57:25Figure-toi que non.
00:57:27C'était pour me parler de l'élection de mon mari.
00:57:30De l'élection de ton mari ?
00:57:32Je croyais qu'il ne se présentait pas
00:57:34pour que toutes les voix aillent au docteur Dupoirier.
00:57:36Justement.
00:57:38Il est venu me demander de convaincre mon mari de se présenter
00:57:41afin que le docteur Dupoirier soit battu.
00:57:45Il abuse des choses les plus saintes.
00:57:48C'est un monstre au cœur froid.
00:57:50Un monstre d'ambition et je ne l'avais pas compris.
00:57:54Il a abandonné son régiment
00:57:56où il végétait petit sous-lieutenant
00:57:58pour se lancer dans une carrière plus brillante
00:58:00et méprisable.
00:58:01Et maintenant, il a l'audace de se représenter à Nancy
00:58:04où son hypocrisie lui avait ouvert les portes de nos maisons.
00:58:07Et son premier geste est d'aller te voir
00:58:09pour te demander de trahir notre cause.
00:58:12Et toi, tu le reçois au lieu de le mettre à la porte.
00:58:15Toi, tu l'écoutes.
00:58:16Mais à te voir, on croirait que tu lui trouves du charme.
00:58:19Tu lui trouves de la sincérité après tout ce que je t'en ai dit ?
00:58:22Mais pardonne-moi, Bathilde.
00:58:25Tu ne m'en as jamais dit que du bien.
00:58:27C'est vrai, mais je m'abusais encore.
00:58:29Je me disais que ma sagesse avait pu le désespérer.
00:58:32Je lui pardonnais presque tout.
00:58:34Son départ subi, son silence.
00:58:37Et maintenant, tu ne lui pardonnes plus son retour.
00:58:40Je l'ai attendu, son retour.
00:58:42J'ai toujours cru qu'il reviendrait,
00:58:44une nuit, sous ma fenêtre.
00:58:47Je l'ai guetté, je le jure.
00:58:50Mais non !
00:58:51Il revient en plein jour pour nous marguer,
00:58:53nous humilier.
00:58:56Je ne crois pas.
00:58:58Tu vas lui répéter tout ce que nous nous sommes dit ici, n'est-ce pas ?
00:59:01Mais dis-le que tu es devenue son amie.
00:59:04Je ne lui ai pas parlé de toi, Bathilde.
00:59:06Je te l'avais juré.
00:59:07Et lui, il t'a parlé de moi ?
00:59:09Il m'a dit, je sais que vous avez une amie très chère
00:59:12et que vous lui rapporterez notre entretien.
00:59:14Elle n'aime pas le docteur Dupoirier.
00:59:16Et je ne crois pas qu'elle soit contre notre projet.
00:59:18Si tu te prêtes au projet de M. Levin, je te préviens, Huguette,
00:59:21c'est moi qui ne serai plus ton amie.
00:59:23C'est tout ce que j'ai à te dire.
00:59:27Cela te fera autant de peine qu'à moi. Du moins, je l'espère.
00:59:40Tiens, voilà le petit commissaire de police qu'ils nous ont envoyé.
00:59:42Non, pas commissaire de police, commissaire aux élections.
00:59:57Un, deux, trois, quatre...
01:00:27Ce qui fait que je leur pardonne et que je ne les méprise pas trop, c'est qu'ils n'ont
01:00:35pas de quoi se payer à dîner.
01:00:36Garde-à-armes !
01:00:37Ta mission est connue, les gendarmes sont polis, c'est le préfet qui doit être content.
01:00:54Monsieur Lamorte, je vous prie de transmettre sans délai cette dépêche chiffrée.
01:01:15Monsieur le préfet est-il d'accord ?
01:01:16Je n'ai pas à demander l'avis de monsieur le préfet.
01:01:18Veuillez lire dans cette lettre, qui est du ministre de l'intérieur lui-même, l'article
01:01:23qui concerne le télégraphe.
01:01:24Je ne doute pas que monsieur le préfet vous donne son accord, mais comprenez-moi, je
01:01:28suis fonctionnaire.
01:01:29Écoutez, monsieur Lamorte, il est une heure, nous sommes en hiver, et la brume, si nous
01:01:34tardons, risque d'arrêter la transmission de la dépêche.
01:01:36Je vous prie donc de la transmettre immédiatement, car il me faut absolument la réponse demain
01:01:40à midi.
01:01:41Mais voyez, je vous en prie, monsieur le préfet, dont je dépends, monsieur, moi et toute
01:01:45ma famille.
01:01:46Bon !
01:01:47Paris transmettre.
01:01:48Oui, j'y suis.
01:01:49Enfin voulez-vous ou ne voulez-vous pas, monsieur, donnez ordre de faire passer ma dépêche.
01:01:58Je pense que je pourrais au moins l'allier.
01:01:59Je vous ai dit non, monsieur, et voilà cinq minutes de perdue.
01:02:02Ah, monsieur, je n'aime guère qu'on dise qu'on perd son temps avec moi.
01:02:05Dis-moi, monsieur, qu'on me fasse perdre le mien.
01:02:07Eh bien, monsieur, jusqu'à nouvel ordre, le préfet ici, c'est moi, et je vous réponds
01:02:10non.
01:02:11Eh bien, je vais envoyer un courrier à Paris.
01:02:12Mais savez-vous, monsieur, que personne ne peut passer sans un permis signé de moi,
01:02:15et encore avec un signe particulier.
01:02:18Vous, vous n'aurez ni chevaux, ni passeport.
01:02:20Monsieur le préfet, monsieur le préfet, il n'est plus de gouvernement possible si
01:02:24vous n'obéissez pas comme moi au ministère de l'Intérieur.
01:02:26J'ai des ordres pour le général.
01:02:28Je vais lui demander de vous faire arrêter.
01:02:30Me faire arrêter, moi ? Mais vous perdez le sens.
01:02:33Monsieur, avec ces façons-là, vous serez arrêté, battu peut-être, content, ça je
01:02:37ne sais pas.
01:02:38Monsieur, vous êtes un insolent et vous me rendrez raison.
01:02:39Vous auriez bien besoin, monsieur, que je vous rende raison, mais je ne vous accorderais
01:02:42l'honneur de tirer l'épée avec vous qu'après les élections.
01:02:45C'est une dépêche télégraphique de Paris.
01:02:47Bien, entrez, entrez.
01:02:48Mais donnez, mord-bleu, donnez donc.
01:02:50Mais c'est que la dépêche est pour monsieur Levenne.
01:02:55Pour monsieur Levenne ? Eh bien, monsieur, vous voilà préfet, je vous cède la place.
01:03:02Monsieur le préfet me dénoncera, monsieur, et je serai destitué.
01:03:11Voulez-vous me soutenir ? Je vous supplie, monsieur, j'ai une famille, quatre enfants,
01:03:16Monsieur Levenne aura la direction supérieure des élections.
01:03:19Me tenir au courant, heure par heure, signé, Devese.
01:03:24Monsieur Lamorte, si cette dépêche n'est pas ce soir à Paris, et s'il y a âmes qui
01:03:33vivent en inconnaissance, je demande votre changement par le télégraphe.
01:03:37Vous m'avez bien compris ? Et c'est vous qui transmettrez la dépêche.
01:03:43Arrêtez le sous-préfet, non, ça, tu as peut-être été un peu loin, non ?
01:03:52Tiens, il en a oublié son mouchoir, et même sa tabatière.
01:03:57Mais je n'étais pas du tout en colère.
01:04:00Le ministre m'a dit qu'il donnerait jusqu'à 500 000 francs pour ne pas avoir du poirier
01:04:05à la chambre.
01:04:06Pourquoi en dire plus ? L'argent parle tout seul, non ? Et alors ?
01:04:09Si avec l'argent qu'il m'est alloué, je fais passer contre l'ennemi du ministre,
01:04:14un autre de ses ennemis, ça n'est pas amusant, ça ?
01:04:27Madame de Constantin.
01:04:40Je voulais vous voir pour vous dire...
01:04:43Depuis hier, j'ai réfléchi et j'ai parlé à mon mari.
01:04:47Il se retirera d'une bataille pour laquelle sans doute il n'était pas fait.
01:04:53Chère cousine...
01:04:54Il fera passer toutes ses chances au docteur du poirier.
01:04:57Oh, madame, ma chère cousine,
01:05:00cette décision honore grandement monsieur de Constantin,
01:05:04et vous-même, qui êtes pour lui de si bons conseils.
01:05:09Au nom du roi, je vous adresse mes profonds remerciements.
01:05:13Portez-les plutôt à votre fille.
01:05:15C'est elle qui les mérite.
01:05:34Batilde, Batilde,
01:05:54je n'ai pas l'habitude de vous faire des compliments,
01:05:56mais je vous en dois aujourd'hui.
01:06:00Madame de Constantin sort d'ici.
01:06:03Elle est venue me dire que sur vos conseils,
01:06:06son mari va s'effacer devant le docteur du poirier.
01:06:10Que pourtant, je le sais, vous n'aimez guère.
01:06:14Oh, je le déteste.
01:06:16Vous n'en avez que plus de mérite.
01:06:18Et s'il est élu, je le détesterai plus encore.
01:06:24Je ne comprends plus.
01:06:26Pourquoi le soutenez-vous ?
01:06:28Parce que monsieur Levenne le combat.
01:06:30Cela me suffit.
01:06:34Excellente raison, excellente.
01:06:37Vous avez eu des torts, vous avez commis des imprudences,
01:06:41mais vous vous rachetez aujourd'hui.
01:06:44Au nom du roi, je vous en remercie.
01:06:47Et moi, votre vieux père, je vous en suis reconnaissant.
01:06:55Vous pouvez. Soyez contents.
01:06:58Mettez de l'ampion aux fenêtres.
01:07:02Je l'aime encore.
01:07:13Alors ?
01:07:15Rien.
01:07:17Rien.
01:07:19Il va faire nuit.
01:07:21On ne verra plus rien.
01:07:23Rien.
01:07:32Êtes-vous bien sûr d'avoir expédié mon télégramme ?
01:07:34Oh, monsieur le commissaire.
01:07:36Maître des requêtes.
01:07:37Oh, monsieur le maître des requêtes,
01:07:39comment pouvez-vous croire que j'aurais...
01:07:41Elle est partie sur le champ,
01:07:43sur la tête de mes enfants, je vous le jure.
01:07:45Si j'apprends jamais que vous avez retardé son départ.
01:07:47Oh, mais...
01:07:53On m'a prié de vous la porter de toute urgence.
01:08:02Il n'y a pas de réponse, merci.
01:08:11Rien.
01:08:12Toujours rien.
01:08:14Et la nuit tombe. On n'y verra plus clair.
01:08:17Le préfet est bien capable d'avoir envoyé un de ses commis
01:08:19à la station du Télégraphe, à quatre lieues d'ici.
01:08:22Pour arrêter la réponse à ma dépêche.
01:08:24Qu'est-ce que tu veux qu'on y change ?
01:08:27Tu sais ce que tu vas faire ?
01:08:29Tu vas prendre un cheval, et tu vas aller à deux postes d'ici.
01:08:32Voir si on n'a pas arrêté cette réponse.
01:08:34Par ordre.
01:08:37Tu m'entends ?
01:08:38Inutile.
01:08:39Comment ça, inutile ?
01:08:41La belle combinaison s'écroule.
01:08:44Voilà la réponse de madame de Constantin,
01:08:46annonçant que son mari renonce,
01:08:48et se désiste,
01:08:50en faveur du docteur Dupoirier.
01:08:56Et quel ton glacial !
01:08:58Le ton d'une dame outragée,
01:09:00qui a failli tomber dans les bras d'un monsieur,
01:09:02et qui se reprend.
01:09:04Monsieur ! Monsieur ! Monsieur !
01:09:06Le Télégraphe marche.
01:09:08Monsieur le maître de requête, le Télégraphe marche.
01:09:11Le Télégraphe marche.
01:09:15Le Télégraphe...
01:09:18On va vous porter tout de suite la dépêche.
01:09:30C'était à craindre.
01:09:32Et console-toi.
01:09:33C'est peut-être mieux ainsi.
01:09:35C'était trop risqué, vois-tu.
01:09:37Et surtout trop tard.
01:09:39Je te regardais faire.
01:09:40Tu me faisais l'effet d'un médecin,
01:09:42qui fait une saignée à un homme,
01:09:43qui va mourir dans les deux heures.
01:09:45Sur quoi les Sceaux pourront dire
01:09:47que c'est la saignée qui l'a fait mourir.
01:09:49Mais si j'avais eu seulement 48 heures de plus.
01:09:51Mais Dupoirier aurait passé quand même.
01:09:54Monsieur, la dépêche de Paris.
01:10:06Ministère de l'Intérieur à M. le Receveur Général Nancy.
01:10:10Remettre 500 000 francs à M. Leven.
01:10:13Et en plus, le ministre t'aurait reproché
01:10:15cet argent tombé dans la poche de ses ennemis.
01:10:17Mais le ministre ne m'aurait rien reproché du tout.
01:10:19Peut-être même aurait-on dit
01:10:20que tu en avais fourré une partie dans ta poche à toi.
01:10:23Mais non, mon père est trop riche.
01:10:25Mais tais-toi, Leven.
01:10:27Tu ne sais ni ce que c'est qu'un riche,
01:10:29ni ce que c'est qu'un pauvre.
01:10:30Mais c'est ce qui fait ton charme.
01:10:34Tiens, tu portes des lunettes maintenant ?
01:10:36C'est celle du préfet.
01:10:44Mais on voit rien du tout avec ça.
01:10:46Ça ne me sert que pour les lettres anonymes.
01:10:49Oh, anonymes.
01:10:52Il y en a d'intéressantes.
01:10:53Pas plus que les autres.
01:10:54Aussi plus.
01:10:56Quelquefois.
01:10:58Tiens, la voilà.
01:11:01Je te passe l'orthographe qui est souvent un piège.
01:11:05C'est adressé à M. le Commissaire des élections.
01:11:08C'est donc adressé à toi, pas la préfecture.
01:11:11M. le Commissaire des élections,
01:11:13je vous fais savoir que le fameux docteur du poirier
01:11:17ne se gêne pas pour soulager les dames
01:11:19de la belle société qui ont fauté.
01:11:23Donne-moi ça.
01:11:30C'est amusant, n'est-ce pas ?
01:11:33Mais qu'est-ce que tu as ?
01:11:35Rien, rien.
01:11:39C'est ignoble.
01:11:41Vraiment, l'âme de l'homme est comme un marais infect.
01:11:44Si on ne passe pas vite, on l'enfonce.
01:11:46Ne jette pas cette lettre, voyons.
01:11:51C'est invraisemblable.
01:11:53Et invérifiable, en plus.
01:11:55Invérifiable, peut-être.
01:11:56Invraisemblable, pourquoi ?
01:11:58Parce que...
01:11:59Le poirier n'est pas homme à refuser un tel service
01:12:01à quelqu'un de son parti.
01:12:02Il passe en plus pour un médecin charitable.
01:12:04Je ne veux pas me poser cette question, tu entends ?
01:12:07Je dirais même.
01:12:08Voici, comme dirait ton ami l'abbé Dijonval,
01:12:11qui pourrait être une arme redoutable
01:12:13qui voudrait s'en servir.
01:12:15Il y a là-dedans de quoi abattre un plus fort
01:12:17qu'un docteur du poirier.
01:12:19Ce serait le moment.
01:12:22Écoute, Coff,
01:12:23nous avons le bonheur de vivre sous cinq polices.
01:12:26Mais nous, nous ne sommes ni des policiers,
01:12:28ni des espions.
01:12:29Notre métier est bas, je le sais.
01:12:31Oui.
01:12:32Mais dans tout ce que nous faisons,
01:12:34où s'arrête et où commence la bassesse ?
01:12:36Ma bassesse, ta bassesse, notre bassesse.
01:12:39Pour ce qui est de moi, tu permets.
01:12:40J'en suis seul juge.
01:12:42Bon, bon.
01:12:44Ce qui veut dire que tu ne montreras cette lettre à personne.
01:12:47D'autres s'en serviraient, mais pas toi, c'est cela ?
01:12:49Exactement.
01:12:50Et d'ailleurs, tu vas me la rendre tout de suite.
01:12:53Tu es le chef de l'expédition.
01:12:55Je ne puis qu'obéir.
01:12:59Mais je te ferai simplement remarquer
01:13:02que trois personnes au moins
01:13:04ont déjà eu connaissance de ce texte.
01:13:06Toi et moi ? Et puis qui ?
01:13:09Et celui ou celle qui l'a écrit.
01:13:13Ça s'appelle en termes savants un scripteur.
01:13:17N'oublions jamais le scripteur.
01:13:19Un auteur de lettres anonymes,
01:13:21tout comme les gens qui écrivent sur les murs ou dans les urinoirs,
01:13:23c'est déjà un homme de lettres.
01:13:26Et la haine de l'homme de lettres est aussi dangereuse que celle du prêtre.
01:13:30Ce scripteur, il aime qu'on le lise.
01:13:33Il en attend beaucoup de satisfaction.
01:13:36Il a écrit les premières phrases d'une tragédie.
01:13:38Il ne s'en tiendra pas là.
01:13:39Il va continuer, tu peux m'en croire.
01:13:41Il va se chercher d'autres lecteurs
01:13:43si les premiers n'ont pas fait attention à ce qu'il a écrit.
01:13:45Et un jour, Lucien,
01:13:47on saura que tu as eu l'édition originale en main
01:13:50et que tu ne t'en es pas servi.
01:13:54Voilà ce que j'avais à te dire sur ce document.
01:13:58Voilà qui m'est complètement égal.
01:14:00J'en suis bien sûr.
01:14:02J'en suis très honnête.
01:14:04Mais je te dis, moi, que si tu n'utilises pas tous les moyens,
01:14:07et je dis bien tous,
01:14:09pour empêcher l'élection de Dupoirier,
01:14:10tu trahis la mission qui t'a été confiée.
01:14:13Remarque que, moi,
01:14:15cela m'est complètement égal.
01:14:21Ça m'aurait pu une figure de toile remuer de la boue.
01:14:23Les autres se gêneraient, non ?
01:14:24Peut-être.
01:14:25Mais moi, j'en ai eu assez comme cela.
01:14:26Dans ces cas-là, il fallait rester à Paris.
01:14:29C'était plus simple et c'était plus franc, Lucien.
01:14:45Et si encore tu avais un intérêt puissant à ne pas t'en servir.
01:14:49Mais j'avoue que je ne comprends pas.
01:14:51Talleyrand n'a pas agi autrement toute sa vie.
01:14:55Mais qu'est-ce qui t'arrête ?
01:15:00Je ne sais pas.
01:15:13Un jour, peut-être,
01:15:15je te dirai la vérité.
01:15:22Je vous en prie, pas de vengeance contre un vieillard.
01:15:24Pas de vengeance contre un vieillard.
01:15:29Pas de vengeance contre un vieillard.
01:15:34Pas de vengeance contre un vieillard.
01:15:59Pas de vengeance contre un vieillard.
01:16:30Comment avez-vous osé ?
01:16:33Je suis entré par la petite porte.
01:16:35J'avais gardé la clé qu'au beau lieu.
01:16:40C'est une lâcheté de plus, M. Levenne.
01:16:43Il a fallu encore que vous commettiez celle-là,
01:16:45après votre retour assez ignoble à Nancy.
01:16:48C'est bien, cela vous ressemble.
01:16:51Mais maintenant, je vous prie de quitter le quartier.
01:16:54Je vous en prie.
01:16:56Cela vous ressemble.
01:16:58Mais maintenant, je vous prie de quitter ma chambre.
01:17:01Mais vite, ou j'appelle.
01:17:05Pas avant que vous ne m'ayez entendu.
01:17:07Vous êtes resté trop longtemps silencieux
01:17:09pour que je puisse m'intéresser à aucun mot
01:17:11qui sorte de votre bouche.
01:17:15Je ne peux pas vous mépriser davantage.
01:17:20Vous connaissez le chemin ?
01:17:22Vous laisserez la clé sur la porte.
01:17:24Mathilde.
01:17:27Il s'est passé ce soir une chose très grave.
01:17:30Pour vous comme pour moi.
01:17:34Et je vous jure que je ne partirai pas d'ici avant de l'avoir dite.
01:17:38Je ne sais pas si mon bonheur en dépend.
01:17:40Et j'ai grand peur que non.
01:17:41J'ai renoncé au bonheur quand j'étais séparé de vous.
01:17:43Et je ne sais pas si des mots pourront me le rendre.
01:17:46C'est peu de choses.
01:17:48Des mots.
01:17:49Même quand ils expriment la vérité.
01:17:52Mais il faut les dire.
01:17:54C'est ma dernière chance.
01:17:56Depuis six mois, Mathilde,
01:17:58je vis dans le plus profond malheur.
01:18:00Il n'est pas de nuit où je n'ai eu à me défendre
01:18:01contre la tentation de me tuer.
01:18:03Si je ne l'ai pas fait, c'est pour ma mère.
01:18:05Depuis mon départ de Nancy, je n'ai pas désiré une femme.
01:18:09Toutes celles que je pourrais avoir m'en appellent une autre.
01:18:12Que je n'ai pas eue.
01:18:15Et que je n'ai jamais cessé d'aimer.
01:18:17Non !
01:18:18Vous m'avez abandonné !
01:18:19Mais non !
01:18:21Un homme est parvenu à nous séparer.
01:18:24Un homme a manigancé une chose horrible.
01:18:28Il fallait qu'elle fût bien horrible
01:18:30pour que je m'enfuie comme je l'ai fait,
01:18:32sans chercher à vous revoir.
01:18:34Et bien, Mathilde,
01:18:36tout à l'heure,
01:18:37cet homme m'a avoué la vérité.
01:18:40Si je ne l'ai pas tué sur le champ,
01:18:43c'est qu'il m'a semblé qu'à la faveur de son aveu,
01:18:45le bonheur revenait.
01:18:47J'avais plus de bonheur que de haine.
01:18:52Cet homme,
01:18:53c'est le docteur du poirier.
01:18:55Oh, mon Dieu !
01:18:57Cet homme m'a toujours fait peur.
01:18:59Qu'est-ce qu'il a fait ?
01:19:00J'ai reçu aujourd'hui une lettre anonyme
01:19:02qui le dénonce.
01:19:06Lisez-la.
01:19:07Non, non !
01:19:08Lisez-la, Mathilde.
01:19:10Je n'ai pas d'autre moyen de vous faire comprendre ce qui s'est passé.
01:19:13Lisez-la.
01:19:14Je vous le demande.
01:19:16C'est là toute ma défense.
01:19:19C'est mon sort qui se joue.
01:19:29Car cette lettre à la main, je suis allé le voir.
01:19:32Et je sors de chez lui.
01:19:34Je vous écoute, monsieur.
01:19:36Docteur du poirier,
01:19:38j'ai reçu une lettre anonyme à votre sujet.
01:19:41Une seule ?
01:19:42Non.
01:19:44Mais celle-ci m'intéresse.
01:19:46Ma femme, monsieur, je vous faisais jusqu'ici l'honneur
01:19:48de vous croire plus délicat.
01:19:50Je me suis trompé, c'est tout.
01:19:52Et que dit ce libel qui vous intéresse tant ?
01:19:56On vous accuse, docteur, d'avoir pratiqué des avortements.
01:19:59Vous êtes faux.
01:20:02Et que j'ai assassiné ma mère, peut-être.
01:20:04Vendu ma soeur aussi.
01:20:06Des avortements.
01:20:08Il faut, monsieur, que votre régime soit tombé bien bas
01:20:11pour inventer des horaires pareils.
01:20:13Et que votre préfet...
01:20:14Le préfet n'est pour rien dans tout cela, monsieur.
01:20:16C'est moi qui ai reçu cette lettre.
01:20:18Mais c'est pire encore que je n'aurais pu supposer.
01:20:21Et après ?
01:20:23Et c'est moi qui viens vous en parler.
01:20:25On dirait bien drôle que vous accordez créance à cette infamie.
01:20:28Vous.
01:20:30Vous que j'ai toujours traité en ami.
01:20:32Vous.
01:20:33Me soupçonnez.
01:20:34Moi.
01:20:36Mais c'est à peine croyable.
01:20:38Je ne vous soupçonne pas, docteur.
01:20:42Je vous ai vu.
01:20:44De mes yeux.
01:20:46Je vous ai vu.
01:20:47Qu'est-ce que vous dites ?
01:20:48J'ai dit je vous ai vu, docteur.
01:20:51A l'hôtel de Pont-levé.
01:20:53Chez madame de Chastelaire.
01:20:55La nuit du 17 juillet.
01:20:57Vous et cette mademoiselle Bérard.
01:21:00Je vous ai vu tous les deux.
01:21:02J'étais là.
01:21:04Derrière le rideau.
01:21:07Dans l'antichambre.
01:21:12Oui, mon ami.
01:21:14Vous étiez là le 17 juillet.
01:21:17Et je le savais.
01:21:19Qu'est-ce que ça veut dire ?
01:21:21Cela veut dire, monsieur...
01:21:22Je vous en prie.
01:21:23Laissez-moi parler.
01:21:25Sans violence.
01:21:26J'ai horreur de la violence.
01:21:28Ce n'était pas un avortement.
01:21:30Dieu me témoigne que rien de tel ne m'a jamais été demandé.
01:21:33Par personne.
01:21:34Madame de Chastelaire.
01:21:36Je crois la connaître assez pour jurer qu'elle n'a jamais eu d'amant.
01:21:39Attendez.
01:21:41Ce soir-là, j'ai joué une comédie.
01:21:43De fort mauvais goût peut-être.
01:21:45Pour vous faire croire.
01:21:46Oui.
01:21:47Que madame de Chastelaire venait d'avoir...
01:21:49Un accident.
01:21:51Une comédie ?
01:21:53Expliquez-vous.
01:21:55Quelle comédie ?
01:21:56Et pourquoi à moi ?
01:21:57Vous savez ce que j'ai fait cette nuit-là, monsieur ?
01:21:59Je vous ai sauvé la vie.
01:22:02Monsieur, vous n'étiez pas également aimé par tout le monde.
01:22:05Dans l'ancien.
01:22:07Mais certains jeunes gens de la ville,
01:22:09ils m'en avaient averti,
01:22:10avaient bel et bien l'intention de vous provoquer en duel
01:22:13et de vous tuer.
01:22:14Qui ?
01:22:15Nous ne nommons personne.
01:22:16Les Rollers ?
01:22:17Pas de nom, je vous en prie.
01:22:19Secret professionnel.
01:22:21Sans Réal ?
01:22:22Guerrillo ?
01:22:23Laissez, laissez, c'est le passé tout cela.
01:22:25Mais ils avaient bien l'intention de vous tuer.
01:22:28Je suis intervenu et j'ai eu assez de pouvoir sur eux
01:22:31pour leur interdire ce combat.
01:22:32Et de quel droit, s'il vous plaît ?
01:22:36Je crois que vous étiez alors mon ami
01:22:38et que je ne voulais pas qu'on vous tue.
01:22:40Je ne comprends pas.
01:22:41Quel rapport avec...
01:22:42Vous ne comprenez pas le rapport.
01:22:44Pour empêcher ce duel, ces duels,
01:22:47j'ai dû promettre à tous vos ennemis de vous faire partir de la ville.
01:22:51Vous connaissez, monsieur,
01:22:52je savais que vous ne céderiez ni à des menaces
01:22:55ni à des conseils de prudence.
01:22:58J'ai donc dû inventer un stratagème.
01:23:01Oui, j'ai pensé à vous faire croire
01:23:03que madame de Chastelaire n'était commandée pas digne de vous.
01:23:07En montant cette comédie assez affreuse, j'en conviens,
01:23:10et elle ne m'amusait pas non plus,
01:23:12je savais l'effet qu'elle ne pouvait manquer d'avoir sur vous.
01:23:15Je savais que le chagrin, l'honneur, l'amour même,
01:23:19vous ferait partir de la ville.
01:23:21Je ne me suis pas trompé.
01:23:22Je ne suis donc pas un médecin marron, monsieur,
01:23:24comme vous savez le croire.
01:23:28Et voilà comment j'ai sauvé la vie à un jeune homme
01:23:31qui est devenu le commissaire d'un roi que je déteste.
01:23:36Si vraiment vous avez voulu me sauver la vie de cette manière,
01:23:40c'était une erreur, monsieur.
01:23:43Je n'y tenais pas tellement à la vie,
01:23:46et surtout sauver à ce prix-là.
01:23:50Disons que vous avez cru bien faire.
01:23:55Je débattrai de ce point avec ces messieurs et à coup d'épée.
01:24:00Non, non, hélas, à coup de pistolet.
01:24:03Soit, mais après les élections.
01:24:06Je le regretterai de tout cœur,
01:24:07mais naturellement, là, je ne pourrai plus rien pour vous.
01:24:09Je l'espère bien.
01:24:12Vous me croyez ?
01:24:15Vous me croyez ?
01:24:16Taisez-vous, je n'en sais même rien.
01:24:18Si, si, vous me croyez, et vous avez raison.
01:24:20Vous me croyez tout bêtement parce que c'est vrai.
01:24:23Allons.
01:24:25Je ne vous demandais pas de me prendre ma main, non,
01:24:28mais de prendre cette lettre,
01:24:30afin que nous la brûlions ensemble.
01:24:32Elle ne présente plus d'intérêt.
01:24:34Maintenant que vous savez la vérité.
01:24:37Qu'est-ce que je sais ? La vérité ?
01:24:39Quelle vérité ? La vôtre ?
01:24:42Ou la vraie ?
01:24:46La lettre.
01:24:49La lettre.
01:24:52C'est la lettre.
01:24:55C'est la lettre.
01:25:00La lettre.
01:25:16J'ai tout compris maintenant.
01:25:28Cette nuit-là, Bathilde,
01:25:30j'ai d'abord eu la tentation d'entrer dans votre chambre
01:25:33et de vous insulter.
01:25:36Mais j'ai pensé, si je parais devant elle,
01:25:39je mourrais de honte,
01:25:42et elle aussi.
01:25:44Alors je me répétais,
01:25:47je ne peux plus l'aimer, Bathilde.
01:25:52Je vous aimais encore.
01:25:56Je pensais que vous m'aviez caché la vérité,
01:25:59mais que vous aviez des excuses.
01:26:01C'était un aveu trop cruel à me faire.
01:26:03Et après tout, pourquoi me l'auriez-vous fait ?
01:26:05Je n'étais pas votre amant,
01:26:07par ma sottise, ma très grande sottise.
01:26:09Taisez-vous.
01:26:10Mais Bathilde, si j'avais été votre amant,
01:26:12tous ceux qui cherchaient à nous séparer,
01:26:14tous nos ennemis, étaient sans pouvoir sur nous.
01:26:16Vous avez vécu près de moi, Lucien.
01:26:19Vous étiez mon ami.
01:26:21Presque votre frère.
01:26:23Oui.
01:26:24Pas votre amant.
01:26:26Vous avez pu croire que j'étais cette femme méprisable.
01:26:32Mais cette femme, c'était vous,
01:26:35et je ne l'ai pas méprisé.
01:26:38C'était moi, cette menteuse.
01:26:41Vous ne me mentez pas.
01:26:43Elle ne nous ait pas dit son secret.
01:26:45Mais si j'avais eu un tel secret, Lucien,
01:26:47je ne me serais pas engagée.
01:26:49Et moi, je comprenais pourquoi elle ne s'était pas donnée à moi,
01:26:51pourquoi elle se reprenait, pourquoi elle se rendait malheureuse.
01:26:54J'imaginais tout son tourment.
01:26:56Et elle me donnait le bonheur de lui pardonner.
01:27:00Je ne vous avais pas donné ce bonheur, moi.
01:27:04Vous avez beau dire,
01:27:06vous ne me la ferez jamais aimer, cette femme que vous dites.
01:27:09Et pourquoi se raconter des histoires ?
01:27:12Même si elle avait eu tous les vices,
01:27:14je n'aurais jamais cessé de l'aimer.
01:27:16Même la dernière des catins ?
01:27:18Si, c'était vous.
01:27:20Oui.
01:27:24Et vous lui avez été fidèle,
01:27:26à cette femme que vous appelez Mathilde ?
01:27:32Vous le jurez ?
01:27:35Oui.
01:27:38Je le jure.
01:27:41Pour mériter aux yeux de Dieu,
01:27:45que vous m'aimiez.
01:27:56Pour mériter ce qui nous arrive aujourd'hui.
01:28:01Embrasse.
01:28:03Embrasse Mathilde.
01:28:08Pas ta Mathilde.
01:28:10Moi.
01:28:12Mais c'est la même.
01:28:31J'ai toujours ta bague.
01:28:33Elle ne m'a pas quitté.
01:28:36Moi,
01:28:38j'ai jeté la tienne dans la pièce d'eau du jardin,
01:28:42pour qu'elle ne soit pas trop loin.
01:28:47Je la regarde,
01:28:49souvent,
01:28:51et j'ai l'impression
01:28:53qu'elle m'aime.
01:28:56Je la regarde,
01:28:58souvent.
01:29:02Allons la chercher.
01:29:08Mets un manteau.
01:29:10Allons la chercher.
01:29:15On ne peut pas.
01:29:17On ne peut pas.
01:29:19Il y a une grande couche de glace dessus.
01:29:23Mon fou.
01:29:28Il faudra attendre le printemps.
01:29:33Mais c'est où nous serons au printemps ?
01:29:36Non.
01:29:39Promis-t'Ali.
01:29:53Sous-titrage ST' 501
01:30:23Elle est là.
01:30:53Elle est là.
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01:32:56Sous-titrage ST' 501
01:33:21Peut-on savoir, messieurs, ce qui me vaut l'honneur ?
01:33:27Chut.
01:33:29Vous sortez, monsieur, comme un voleur,
01:33:31d'une maison qui n'est pas la vôtre.
01:33:33Comment avez-vous dit ?
01:33:35Messieurs, messieurs, je vous en prie.
01:33:40Tiens, tiens, docteur Dupoirier.
01:33:43Eh bien, vous n'avez pas perdu de temps.
01:33:45Je vous en prie, docteur, laissez-moi faire.
01:33:47Allons, messieurs, allons.
01:33:49Inutile de risquer un éclat ici.
01:33:57Oh, la chose est simple, messieurs.
01:33:59Vous détenez une lettre à laquelle nous nous intéressons beaucoup,
01:34:02mes amis et moi.
01:34:04Et que nous venons vous demander.
01:34:06Donnez-la-moi.
01:34:08Et de quel droit, s'il vous plaît ?
01:34:10Nous sommes seuls juges des raisons.
01:34:12Si vous permettez, donnez-moi cette lettre, messieurs.
01:34:15Et si je refuse, nous l'aurons quand même.
01:34:18Et contre votre gré.
01:34:22Il est vrai que vous êtes sains de dire,
01:34:24il est vrai que vous êtes sains contre un,
01:34:27sans compter le docteur.
01:34:29Monsieur Levin, monsieur Levin.
01:34:31Je vous en prie, docteur, à mon tour de vous dire, laissez-moi faire.
01:34:34Maintenant, donnez-moi cette lettre, monsieur Levin.
01:34:36N'insistez pas, je vous ai dit non.
01:34:38Et non.
01:34:40Mais comment avez-vous dit tout à l'heure
01:34:42que je sortais de cette maison comme un voleur ?
01:34:45Je l'ai dit, c'est exact.
01:34:47Et j'ajouterai que vous sortiez de chez une personne
01:34:50auprès de laquelle un petit personnage comme vous nous déplait
01:34:53et nous gêne.
01:34:55Et si le mot mépris a un sens pour vous, monsieur...
01:34:57Oui, j'ai entendu.
01:34:59J'ai des oreilles.
01:35:02Et alors ?
01:35:07Finalement, docteur,
01:35:09c'est une chance que vous vous soyez trouvé là.
01:35:14Je crois que l'on va avoir besoin de vous.
01:35:16Oui, pour un combat. Je suis l'offensé.
01:35:18Non pas, monsieur.
01:35:20Je t'essoie, mais vous m'aviez d'abord insulté.
01:35:23Oui, pour l'exemple.
01:35:25Monsieur a raison. L'insulte a précédé la voie de fait.
01:35:27Oh.
01:35:29Il me semble, messieurs.
01:35:31Qu'en pensez-vous, sans réal ?
01:35:33Je pense en effet que la qualité d'offensé n'est pas certaine,
01:35:36mais peut-être partagée.
01:35:38Dans ce cas, le code est formel.
01:35:40Tirage au sort ou forme de combat au gré des adversaires.
01:35:43En êtes-vous d'accord ?
01:35:45Oui.
01:35:47Oui, mais je n'ai pas de témoins.
01:35:49Vous êtes pauvre, hein ?
01:35:52Moi ?
01:35:55Je vous remercie.
01:35:58Mais... les armes ?
01:36:07Mes compliments, messieurs.
01:36:09Je vois que vous n'aviez rien laissé au hasard.
01:36:12Tout était prévu.
01:36:15Et pourquoi pas, je vous prie, le choix des armes à l'offensé ?
01:36:18Parce qu'il n'y a pas d'offensé.
01:36:20On a dit pas de choix.
01:36:22Comment pas de choix ?
01:36:35J'ai bien le droit de m'amuser, monsieur.
01:36:42Et voilà, monsieur.
01:36:44Figurez-vous que j'ai gagné.
01:36:46Alors je me donne le choix des armes.
01:36:48Mais encore une fois, monsieur, vous n'êtes pas l'offensé.
01:36:51Mais... vous non plus.
01:36:54Je choisis donc...
01:36:57le pistolet.
01:36:59Je n'y suis pas maladroit.
01:37:01Moi non plus.
01:37:04J'avais quand même le droit de jouer ma vie à pile ou face.
01:37:10Vous ne saurez jamais ce qu'il y avait dans le creux de ma main.
01:37:17Jouer ma vie ?
01:37:19Il a faute, la mienne non.
01:37:21Soyez tranquille, monsieur.
01:37:23Monsieur, je vous en prie, pas de paroles blessantes.
01:37:26Allons là-bas, tout se passera mieux.
01:37:28Allons.
01:37:47Messieurs.
01:37:49Vous connaissez les règles du duel sur deux lignes parallèles.
01:37:53Et à marche ininterrompue.
01:37:55Oui, oui.
01:37:57Vous l'acceptez donc ?
01:37:59Oui, oui.
01:38:10Messieurs.
01:38:12Connaissez-vous ces armes ?
01:38:14Non, non.
01:38:23Voulez-vous vous réconcilier ?
01:38:26Il en est encore temps.
01:38:29C'est bon.
01:38:36Dans ce cas...
01:38:45Messieurs.
01:38:47Préparez-vous à prendre vos places.
01:39:01Allez.
01:39:15Êtes-vous prêts ?
01:39:22Armés.
01:39:28Messieurs.
01:39:30Faites attention au signal que je vais donner.
01:39:32Feu à volonté.
01:39:34Partez.
01:39:37Faites attention au signal que je vais donner.
01:39:39Feu à volonté.
01:39:41Partez.
01:40:06Feu à volonté.
01:40:36Feu à volonté.
01:41:06Feu à volonté.
01:41:36Feu à volonté.
01:42:06Feu à volonté.
01:42:08Feu à volonté.
01:42:10Feu à volonté.
01:42:12Feu à volonté.
01:42:14Feu à volonté.
01:42:16Feu à volonté.
01:42:18Feu à volonté.
01:42:20Feu à volonté.
01:42:22Feu à volonté.
01:42:24Feu à volonté.
01:42:26Feu à volonté.
01:42:28Feu à volonté.
01:42:30Feu à volonté.
01:42:32Feu à volonté.
01:42:34Feu à volonté.
01:42:36Feu à volonté.
01:42:38Feu à volonté.
01:42:40Feu à volonté.
01:42:42Feu à volonté.
01:42:44Feu à volonté.
01:42:46Feu à volonté.
01:42:48Feu à volonté.
01:42:50Feu à volonté.
01:42:52Feu à volonté.
01:42:54Feu à volonté.
01:42:56Feu à volonté.
01:42:58Feu à volonté.
01:43:00Feu à volonté.
01:43:02Feu à volonté.
01:43:04Feu à volonté.
01:43:06Feu à volonté.
01:43:08Feu à volonté.
01:43:10Feu à volonté.
01:43:12Feu à volonté.
01:43:14Feu à volonté.
01:43:16Feu à volonté.
01:43:18Feu à volonté.
01:43:20Feu à volonté.
01:43:22Feu à volonté.
01:43:24Feu à volonté.
01:43:26Feu à volonté.
01:43:28Feu à volonté.
01:43:30Feu à volonté.
01:43:32Feu à volonté.
01:43:34Feu à volonté.
01:43:36Feu à volonté.
01:43:38Feu à volonté.
01:43:40Feu à volonté.
01:43:42Feu à volonté.
01:43:44Feu à volonté.
01:43:46Feu à volonté.
01:43:48Feu à volonté.
01:43:50Feu à volonté.
01:43:52Feu à volonté.
01:43:54Feu à volonté.
01:43:56Feu à volonté.
01:43:58Feu à volonté.
01:44:00Feu à volonté.
01:44:02Feu à volonté.
01:44:04Feu à volonté.
01:44:06Feu à volonté.
01:44:08Feu à volonté.
01:44:10Feu à volonté.
01:44:12Feu à volonté.
01:44:14Feu à volonté.
01:44:16Feu à volonté.
01:44:18Feu à volonté.
01:44:20Feu à volonté.
01:44:22Feu à volonté.
01:44:24Feu à volonté.
01:44:26Feu à volonté.
01:44:28Feu à volonté.
01:44:30Feu à volonté.
01:44:32Feu à volonté.
01:44:34Feu à volonté.
01:44:36Feu à volonté.
01:44:38Feu à volonté.
01:44:40Feu à volonté.
01:44:42Feu à volonté.
01:44:44Feu à volonté.
01:44:46Feu à volonté.
01:44:48Feu à volonté.
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01:44:54Feu à volonté.