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Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 20 septembre 2024 : la comédienne, réalisatrice, écrivaine et chanteuse, Agnès Jaoui. Aujourd’hui, elle publie "La taille de nos seins" aux éditions Grasset, sort un nouvel album "Attendre que le soleil revienne" et est à l’affiche du film de Sophie Fillières "Ma vie Ma gueule".
Transcription
00:00Il y a des artistes qui, de part ce qu'elles construisent, nous racontent, créent et nous
00:06laissent, marquent les esprits et s'associent à nos vies et vous êtes l'une d'entre
00:10elles.
00:11Vous êtes de celles qui aiment tout essayer, mais avec envie et rigueur et puis surtout
00:14détermination.
00:15L'actrice que vous êtes nous a touché avec des rôles évidemment puissants.
00:19On pense notamment à On connaît la chanson.
00:21Vous avez d'ailleurs reçu le César de la meilleure actrice dans un second rôle.
00:24La réalisatrice aussi nous a accueilli avec Le goût des autres, co-écrit avec Jean-Pierre
00:27Jacquery, entre autres, qui a reçu le César du meilleur film.
00:30Aujourd'hui, vous avez deux casquettes supplémentaires, chanteuse et écrivaine.
00:33Votre ouvrage, illustré par Cécile Partouche, La taille de nos seins, vient de paraître
00:37chez Grasset.
00:38Votre premier album, Attendre que le soleil revienne, sort aujourd'hui, soit douze chansons
00:43incarnées.
00:44C'est mon quatrième album.
00:45C'est votre quatrième album.
00:46Mais c'est le premier en français.
00:47Voilà, votre premier album en français, attendre que le soleil revienne, sort aujourd'hui,
00:53soit douze chansons incarnées qui mêlent rire et intimité, souvenir et réalité.
00:57Il y a un film également à côté duquel il ne faut pas passer, c'est Ma vie, ma gueule
01:02de Sophie Filière.
01:03Et il y aura d'ailleurs une rétrospective à la Cinémathèque du 16 au 23 septembre
01:07prochain.
01:08Ces trois objets, finalement, ces trois créations ont un point commun.
01:14C'est les femmes, la vie et les rapports humains, j'ai l'impression.
01:20Oui, mais du reste, les rapports humains me semblent l'essentiel de la vie.
01:26Enfin, en tout cas, l'essentiel des sources d'inspiration.
01:29Souvent, quand on me dit mais vous faites des films sur les rapports humains, je me
01:33dis mais oui, mais sur quoi d'autre faire des films ?
01:36Oui, si, la beauté de la nature ou les animaux, j'en sais rien.
01:41Mais enfin, effectivement, oui, ce qui me passionne, c'est les rapports humains.
01:45Il y a un autre point commun, c'est le lâcher prise, Agnès.
01:48On sent que là, vous êtes totalement à nu réellement, vous vous livrez totalement.
01:52Est ce que c'est difficile de lâcher prise ?
01:54Oui, oui, en tout cas, moi, ça m'a pris longtemps.
02:00Aussi, tout ce truc de légitimité qui commence en fait à me fatiguer parce que
02:04je vois que c'est souvent des femmes qui se sentent illégitimes et qui s'excusent
02:09de faire ce qu'elles font ou qui n'osent pas dire, s'affirmer, etc.
02:13Donc, mais le fait est, je me disais non, je ne vais pas faire ça en plus et ça en plus.
02:18Alors que c'était des goûts que j'avais et puis des choses que j'avais travaillées
02:23comme le chant, par exemple, même le chant classique.
02:26Je ne disais à personne que j'en faisais.
02:29Je faisais des concerts, même sous un faux nom.
02:32Je m'excusais un petit peu d'avoir toutes ces passions, c'est vrai.
02:35Et je m'excuse un peu moins, même si c'est toujours compliqué de savoir jusqu'où
02:40on peut se dévoiler aussi, parce qu'on se fait vite manger et que je n'ai pas non plus
02:44envie de... J'ai envie de garder ma liberté.
02:48Dans l'album, dans le livre, dans le film Ma Vie, Ma Gueule,
02:53les femmes ne vont pas forcément bien au départ, mais elles vont bien à l'arrivée.
02:57On est d'accord ? Il y a toujours ce côté optimiste que vous avez.
03:02J'ai l'impression que vous avez toujours eu, d'ailleurs.
03:04Il y a toujours une forme de résilience, j'ai l'impression aussi.
03:06C'est-à-dire que je trouve que les Français, les Parisiens
03:12et le monde en général se plaint énormément et dans la plainte et dans le négatif
03:18et dans... Voilà, il y a une espèce de course à la nouvelle la plus catastrophique partout.
03:26Et c'est ultra anxiogène.
03:28Évidemment que le monde ne va pas bien, que plein de choses ne vont pas bien.
03:33Mais passer son énergie à le constater et en rajouter ne me semble d'aucun intérêt.
03:41Il y a un clin d'œil aussi, peut-être à votre mère.
03:46Vous dites dans le livre qu'elle n'a jamais pris une décision importante
03:49quand elle était avec votre père, jusqu'à ce qu'elle en prenne une, celle de le quitter.
03:56C'est aussi un hommage, ça, aux femmes que vous vouliez leur rendre,
03:58à leur dire, voilà, ne subissez pas votre vie, prenez des décisions.
04:01Oui, complètement.
04:03Et puis aussi dire aux jeunes filles,
04:07n'investissez pas trop sur l'idée du prince charmant qui restait demeure
04:11et que moi-même, j'avais en tête,
04:14et sur la joliesse, sur le physique,
04:17sur plein d'idées dans lesquelles on est encore enfermés,
04:21malgré toutes les révolutions, parce que la beauté passe,
04:25parce que votre prince charmant ne peut pas tout.
04:29Et cultivez plutôt tout ce qui va vous rendre indépendante, libre,
04:33ce qui va être vos amis pour la vie, l'art, la musique, la culture, l'amitié,
04:38tout ce qui va demeurer au-delà de vos 35, 45, 25, 15,
04:44parce que pour certains, on n'est consommable que très jeune.
04:47Donc, vraiment, ouais, allez, faites gaffe à vos rêves,
04:53parce qu'il y en a qui sont maléfiques et qui ne vous feront pas du bien.
04:59– Vous allez beaucoup plus loin dans le livre.
05:01C'est fort, ça, vous nous livrez un secret
05:04que vous avez porté pendant très longtemps,
05:05celui où l'un de vos oncles vous a emmené derrière la colline,
05:08il vous a demandé de vous déshabiller.
05:11Vous dites que vous avez eu l'impression, à ce moment-là,
05:13que c'était une histoire d'amour.
05:14Pendant très longtemps, vous avez pensé que c'était une histoire d'amour.
05:17Est-ce que ce livre, ce n'est pas aussi une façon
05:20de mettre des mots pour aider les autres ?
05:23Agnès Diame.
05:25– Le travail artistique des autres m'a toujours réconfortée,
05:30fait du bien, voire sauvé la vie.
05:32Donc, si je peux le rendre un tout petit peu,
05:35ça c'est ce qui me touche le plus, ce qui m'émeut le plus.
05:39J'avais envie de dire que, oui, j'avais essayé de croire
05:42que c'était une histoire d'amour pour me protéger.
05:45Et je pense qu'on a été pas mal dans ce cas-là,
05:50parce que si, c'est des âges où on est très ambivalente.
05:53J'avais 11 ans la première fois, mais on a envie d'exister.
05:58Moi, j'avais envie qu'on me regarde, j'avais envie…
06:00– D'être belle, en plus, vous parliez de la beauté.
06:03– Évidemment, un adulte qui s'intéresse à vous,
06:06voilà, j'étais jeune et bête, donc je me disais,
06:09oh là là, je dois avoir quelque chose de spécial,
06:11et je rêvais d'avoir quelque chose de spécial.
06:13Donc, on tombe dans ce piège ou dans d'autres, oui.
06:18– Je voudrais juste qu'on termine sur…
06:20que vous me racontiez la chanson,
06:22« Le taxi pour la Marseille ».
06:25Du coup, il est extraordinaire, vos voix sont sublimes,
06:29en harmonie, c'est en fusion totale.
06:31– Avec Nawel Ben Krayem.
06:33– Cette chanson, elle est… – Merci.
06:35– J'ai l'impression qu'elle est aussi très particulière pour vous.
06:39– Oui, Nawel Ben Krayem, c'est une chanteuse franco-tunisienne
06:44et une poétesse, avec une voix extraordinaire.
06:48On se l'est rencontrée il y a quelques années,
06:51je lui ai proposé qu'on écrive ensemble,
06:53et oui, cette chanson raconte des trajets
06:59que je fais souvent avec…
07:01Moi, j'adore essayer de deviner d'où viennent les accents,
07:04et quand il y a un accent qui vient de Tunis,
07:07et en particulier de la Marseille, ou de la Goulette surtout,
07:10où vivait mon grand-père, en général, je le reconnais,
07:14et on se met à parler, et c'est vrai que je pense important aussi
07:18de parler de musulmans et de juifs qui s'entendent
07:23malgré la différence de leur confession,
07:26comme je l'évoque dans la chanson,
07:29et malgré les atrocités qui se passent en Israël, en Palestine,
07:35on a beaucoup de choses en commun, notamment nous, les juifs du Maghreb,
07:41mais pas seulement, voilà, enfin, tous ces moments que j'ai passés,
07:47dans les taxis, puis dans d'autres moments,
07:50j'avais envie d'en parler, oui, aussi.

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