• il y a 3 mois
Philippe Naigeon était un fils de bonne famille, brillant polytechnicien, menant une carrière prestigieuse et habitant les beaux quartiers de Paris. Au printemps 1994, il va subitement décimer à coup de pistolet toute sa famille. Son épouse et deux de leurs enfants deux garçons de huit et treize ans. Leur petite sœur, six ans, qui a eu le réflexe de se cacher, va être la seule survivante du massacre. Les policiers sur place diront tous avoir été bouleversés par ce spectacle sanglant et ahurissant. Sans rien montrer, il avait lentement mûri son geste, happé par un désir de vengeance. Mais se venger de qui et de quoi ?
Retrouvez tous les jours en podcast le décryptage d'un faits divers, d'un crime ou d'une énigme judiciaire par Jean-Alphonse Richard, entouré de spécialistes, et de témoins d'affaires criminelles.
Regardez L'heure du Crime avec Jean-Alphonse Richard du 23 septembre 2024.

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Transcription
00:0014h15, c'est l'heure du crime sur RTL, avec Jean-Alphonse Richard.
00:07Terrifiante découverte hier soir dans un hôtel particulier du 16ème arrondissement à Paris.
00:12Trois morts dont deux enfants, le père de famille est le suspect numéro un.
00:15Une petite fille a survécu au drame.
00:19Bonjour, Philippe Neijon était un fils de bonne famille,
00:23brillant polytechnicien, une carrière prestigieuse.
00:26Il habitait les beaux quartiers à Paris.
00:28Au printemps 1994, cet homme va pourtant assassiner toute sa famille.
00:34Son épouse, ces deux garçons de 8 et 13 ans, une petite fille de 6 ans,
00:38qui a eu le réflexe de se cacher, sera la seule survivante du massacre.
00:43Les policiers diront n'avoir jamais vu dans leur carrière une telle scène de crime.
00:49Le père de famille va dans un premier temps avouer,
00:52qu'il se mûrait dans les dénégations une paranoïa galopante.
00:56Les enquêteurs vont toutefois parvenir à réécrire le scénario de cette tragédie intime,
01:02aidée par les psychiatres qui vont se concentrer sur la personnalité de Philippe Neijon.
01:07Sans rien montrer, le mari et père de famille avaient lentement mûri son geste,
01:12happé par un désir de vengeance.
01:14Mais se venger de qui et de quoi ?
01:17Que s'est-il passé derrière les murs de cet hôtel particulier
01:20et dans le 16e arrondissement de Paris ?
01:22Question posée à nos invités.
01:24L'affaire Philippe Neijon, le massacre de la villa Scheffer.
01:28J'ai tiré sur ma femme, je l'ai frappée avec la crosse,
01:31j'ai rejoint au premier mon fils Armand.
01:34Avant que je l'achève, il m'a dit « Papa, je t'aime ».
01:38L'enquête de l'heure du crime, la seule émission radio 100% fait divers.
01:41A tout de suite sur RTL.
01:5114h15, Jean-Alphonse Richard sur RTL.
01:56L'heure du crime.
01:58Dans l'heure du crime aujourd'hui, l'affaire Philippe Neijon,
02:00à Paris, printemps 1994, directeur financier,
02:03ancien collaborateur de cabinet ministériel,
02:06se retrouve au cœur d'un bain de sang.
02:08Presque toute sa famille, dont deux jeunes enfants tués,
02:11le mari est le suspect numéro 1.
02:14Jeudi 19 mai 1994, aux alentours de 19h,
02:18le commissariat du 16e arrondissement de Paris est appelé en urgence.
02:22Villa Schaeffer, une discrète voie privée, proche du Trocadéro.
02:26Des coups de feu, entendu.
02:28Les policiers débarquent au numéro 18,
02:30un hôtel particulier occupé par le couple,
02:33Philippe et Éliane Neijon et leurs trois enfants.
02:36La maison est plongée dans le silence, la pénombre.
02:39Au premier étage, dans la bibliothèque,
02:42le père de famille, Philippe Neijon, 45 ans,
02:44est affalé dans un fauteuil, inconscient.
02:47À côté de lui, une bouteille de cognac presque vide,
02:50des tablettes de Valium, un pistolet automatique calibre 6.35.
02:54Dans le bureau adjacent, du sang sur les murs,
02:57sur le sol, Armand, 8 ans, gît sur le dos.
03:00Frappé à la tête, tué d'une balle.
03:02Au rez-de-chaussée, dans l'escalier qui mène à la cave,
03:05le corps de la mère de famille, Éliane Neijon, 38 ans,
03:08couverte de coups, elle s'est défendue.
03:11Une balle lui a fracassé le crâne.
03:13Au sous-sol, dans le cellier, l'aîné de la fratrie,
03:16Charles-Louis, 13 ans, adossé à un réfrigérateur.
03:19Frappé, la tête ensanglantée, une cordelette autour du cou.
03:24Il respire faiblement, il émet une petite plainte.
03:27Il mourra à l'hôpital.
03:29Au deuxième étage, la cadette Isabelle, 6 ans,
03:32blessée au cuir chevelu, un doigt fracturé,
03:35est découverte recroquevillée dans une penderie.
03:38Vivante ! Ce regard, c'est ce qui m'a frappé.
03:41Elle ne pleurait pas, elle ne disait rien,
03:43dira le commandant Treziski, ajoutant,
03:46en 20 ans de carrière, je n'avais jamais vu un tel massacre.
03:51Le père de famille, Philippe Neijon,
03:53plongé dans le coma et transféré à l'hôtel Dieu,
03:56salle Cusco, une unité judiciaire.
03:58Suspect numéro 1 du triple crime.
04:00Dans la chambre parentale, la police a retrouvé
04:03son revolver 22 long-rifle avec une cartouche
04:05percutée dans le barillet.
04:07La crosse était endommagée, maculée de sang,
04:10tout comme un marteau laissé à proximité.
04:12Mercredi 24 mai, 5 jours après le drame,
04:15Philippe Neijon est placé en garde à vue.
04:17Faible, mais lucide, assure le commandant de police.
04:20Philippe Neijon déclare,
04:22Éliane, ayant obtenu le divorce,
04:24je n'avais qu'une seule solution.
04:26Qu'on disparaisse tous, le père de famille ajoute.
04:29J'ai tiré sur ma femme, je l'ai frappée avec la crosse.
04:31Ensuite, j'ai tué Charles-Louis au sous-sol,
04:34à coup de marteau.
04:35Je lui ai serré la corde autour du cou,
04:37parce qu'il gémissait.
04:38J'ai rejoint au premier Armand et Isabelle.
04:41Avant que je l'achève,
04:43Armand m'a dit,
04:44« Papa, je t'aime. »
04:47Tous ceux qui connaissent les Neijons sont abasourdis.
04:50Philippe, polytechnicien,
04:51ancien membre de cabinet ministériel,
04:53directeur financier à la Caisse des dépôts et consignations,
04:56et Éliane, fille d'ambassadeur,
04:58étaient mariées depuis 16 ans.
05:00Seuls les intimes étaient au courant des turbulences
05:03agitant le couple.
05:05Éliane souhaitait divorcer.
05:07Dix jours avant la tragédie,
05:09les Neijons étaient passés devant le juge
05:11des affaires matrimoniales.
05:13Le mari était opposé à la séparation.
05:16« La maison est à moi.
05:17Les enfants sont à moi.
05:19Je ne partirai jamais. »
05:20aurait-il hurlé en recevant la convocation judiciaire.
05:25Un massacre dans les beaux quartiers,
05:27c'est comme cela que vont être présentés dans les journaux.
05:29C'est crime qui frappe évidemment tout de suite les imaginations.
05:32C'est un scénario qui apparaît pourtant des plus élémentaires.
05:35Un mari qui refuse le divorce,
05:38il se venge et il tue tout le monde.
05:41On est là dans une espèce de coup de folie,
05:43mais on va s'apercevoir que c'est une affaire un peu plus compliquée que cela.
05:46C'est une affaire à tiroir.
05:48Bonjour Philippe Bilger.
05:49Bonjour.
05:50Merci infiniment d'être avec nous aujourd'hui dans le studio de l'heure du crime.
05:53Alors évidemment, j'ai envie de dire la formule consacrée,
05:56on ne vous présente plus,
05:57mais c'est vrai qu'on vous connaît très bien Philippe Bilger.
05:59Vous êtes magistrat honoraire.
06:01Vous avez été longtemps avocat général
06:04lors des procès d'assises.
06:05Et vous étiez justement au procès de Philippe Néjon.
06:08On va en parler de ce procès, on ne va y venir pas tout de suite.
06:11Vous étiez avocat général lors de ce procès.
06:13Alors tout de suite, évidemment ce dossier vous a marqué,
06:16parce que comment oublier une telle folie, un tel massacre ?
06:19C'est une scène d'épouvante que les policiers découvrent ce jour-là ?
06:24Absolument.
06:25C'est un procès qui m'a marqué,
06:28mais j'ose le dire comme tant d'autres.
06:31Simplement, le caractère très particulier de l'accusé,
06:36l'atmosphère familiale qui s'est terriblement dégradée
06:41dans les derniers jours, dans les dernières semaines,
06:44l'horreur de ces actes qu'accomplit sur des petits enfants
06:49avec une sauvegarde inouïe d'une petite de 6 ans,
06:53les péripéties de l'oralité des débats d'une audience criminelle
06:59où j'ai évidemment beaucoup apprécié Maître Maître,
07:03dont le rôle a été extrêmement difficile,
07:06la personnalité plus que singulière de l'accusé,
07:10les péripéties très surprenantes du procès,
07:14et bien sûr la condamnation.
07:17Tout cela composait un paysage effrayant.
07:20On est dans ce huis clos, encore un petit mot Philippe Bilger,
07:24on est dans ce huis clos, dans ce très bel hauteur particulier,
07:27on est dans les très beaux quartiers de Paris,
07:29dans cette voie privée.
07:31Il s'est acharné, notamment sur son épouse.
07:34Il y a une espèce de froideur dans ses crimes,
07:36de mécanique criminelle qui est très étonnante.
07:39Oui, en même temps, et je le pensais déjà à l'époque,
07:44comme tous les êtres extrêmement intelligents,
07:49mais très rigides,
07:51à partir du moment où le destin
07:55crée un obstacle à l'extériorisation de leur pouvoir,
08:01il y a à un moment donné une catastrophe absolue
08:05qui se met en branle.
08:06Il ne supporte pas le refus que lui présente sa femme,
08:11il ne supporte plus d'avoir plus la main sur sa famille, c'est ça ?
08:14Absolument, vous l'avez dit dans votre excellente relation,
08:18à un moment donné, l'arbitrage
08:22qu'opérait dans son délire Philippe Néjon,
08:26c'était ou bien nous restons tous ensemble,
08:29ou bien nous mourrons tous.
08:31Bonjour Maître Stéphane Maître.
08:33Bonjour.
08:34Merci infiniment d'être avec nous aujourd'hui,
08:36également dans le studio de l'Horreur du Crime.
08:37Vous êtes avocat au barreau de Paris,
08:39et on vient de le dire, vous étiez à ce procès,
08:42et puis pendant l'affaire, vous avez été l'avocat de Philippe Néjon.
08:45Vous allez nous raconter la difficulté de défendre cet homme,
08:47qui s'était assez compliqué,
08:49et là il est accusé des pires crimes.
08:51Ça ne va pas très bien dans ce couple,
08:54Philippe Néjon et son épouse ?
08:56Ça ne marche pas ?
08:57C'est peut-être là l'effet gâchette, le déclic,
09:01qui a entraîné cette catastrophe ?
09:04Bien sûr, les débats et l'instruction
09:08ont montré à quel point ce couple, cette famille,
09:13était sur la pente d'une dislocation,
09:18qui était totalement insupportable,
09:20dans l'esprit de Philippe Néjon.
09:22Je ne vais pas redire ce qui vient d'être dit,
09:24mais ce type d'affaires, malheureusement,
09:26on en connaît d'autres,
09:28ou bien on vit tous ensemble,
09:30ou bien on disparaît tous.
09:32Il y a régulièrement,
09:34on entend parler de ce genre d'affaires,
09:36je crois que ce qui l'a rendu un peu plus connu,
09:39c'est la dimension sociale,
09:41le profil de l'accusé,
09:44le fait qu'il s'agisse d'un polytechnicien,
09:46le fait qu'il s'agisse d'une famille
09:48vivant dans le XVIe arrondissement.
09:50Il y a probablement un peu le syndrome
09:52Dupont-de-Ligonnès,
09:54qui rend cette affaire particulièrement célèbre,
09:57alors que malheureusement, des drames comme ceux-ci,
09:59il en existe d'autres, et régulièrement.
10:01C'est intéressant ce que vous dites,
10:03avec ce parallèle rapide,
10:05avec Dupont-de-Ligonnès,
10:07on est dans un huis clos,
10:09dans une famille qui a des principes,
10:11qui est sous l'œil d'amis
10:13qui sont du même milieu,
10:15et on comprend d'autant moins,
10:17parce que finalement, ils sont intelligents, ces gens-là,
10:19ils ont plutôt les pieds sur terre.
10:21Bien sûr, mais je crois qu'il ne faut pas
10:23surdimensionner
10:25l'aspect,
10:27comment dire, tradition,
10:29respect,
10:31stabilisé, familial.
10:33Il y a un drame personnel qui se joue
10:35dans cette famille, un drame psychologique,
10:37qui va bien au-delà
10:39d'un problème d'image,
10:43et de questions de divorce
10:45qui se fait ou qui ne se fait pas dans certaines familles.
10:47On n'est pas là, on n'est pas dans cette thématique-là.
10:49On est vraiment en présence
10:51d'un homme qui,
10:53mentalement, ne peut pas concevoir
10:55que sa famille
10:57soit disloquée.
10:59Car, j'ai beaucoup de mal à le dire,
11:01parce que quand on sait ce qui s'est passé,
11:03quand on connaît la fin de l'histoire,
11:05mais
11:07peut-on encore
11:09rappeler
11:11que selon moi,
11:13selon ce que j'ai vécu et ce que j'ai vu,
11:15peut-on encore
11:17dire que cet homme aimait sa famille
11:19plus que tout au monde ?
11:21C'est très difficile à dire, c'est extrêmement compliqué
11:23à dire, mais je ne veux pas
11:25que mes paroles soient
11:27perçues comme une provocation,
11:29parce que c'est extrêmement difficile à dire.
11:31Et à entendre, bien sûr.
11:33Comment un homme
11:35qui aime sa famille peut arriver
11:37à détruire celle-ci ?
11:39En fait, c'est ça
11:41la terrifiante interrogation
11:43de ce type d'affaire.
11:45Le père de famille est en détention provisoire,
11:47la police s'intéresse à son parcours.
11:49L'affaire Philippe Néjon,
11:51le massacre de la Village Schéffère.
11:53J'ai entendu des coups de feu et maman qui criait
11:55« Arrête, Philippe ! »
11:57Je me suis caché dans ma chambre.
11:59L'enquête de l'heure du crime, on se retrouve dans un instant, sur RTL.
12:09« L'heure du crime, consacrée aujourd'hui à la ténébreuse affaire Philippe Néjon.
12:18Mai 1994, à Paris.
12:20Ce polytechnicien se retrouve accusé d'avoir tué son épouse
12:23et deux de ses trois jeunes enfants.
12:25Il n'aurait pas supporté le divorce
12:27qui s'annonçait un coup de folie
12:29ou bien des crimes prémédités.
12:33Les enquêteurs de la première division de police judiciaire
12:35ont obtenu des aveux rapides
12:37de Philippe Néjon.
12:39Il a reconnu qu'il avait tué son épouse et ses enfants
12:41mais sans donner vraiment de détails,
12:43d'explications.
12:45Ainsi, il ne dit rien de la lutte
12:47qu'il a opposée à Éliane,
12:49rouée de coups, laissée pour morte,
12:51finalement abattue dans le hall
12:53alors qu'elle avait réussi à se traîner
12:55vers l'escalier de la cave,
12:57il l'aurait achevé à coups de talons.
12:59La rescapée Isabelle, 6 ans,
13:01regardait la télé avec Armand au deuxième étage.
13:03Au policier,
13:05Philippe Néjon raconte avoir entendu des coups de feu
13:07et sa mère criait
13:09« Arrête Philippe ! »
13:11La petite fille a été frappée à la tête,
13:13elle s'est enfuie dans sa chambre,
13:15a poussé son lit contre la porte
13:17et s'est cachée dans l'armoire.
13:19Les parents et les amis d'Éliane Néjon
13:21racontent que le couple a commencé à se fissurer
13:23après la naissance du premier enfant, Charles-Louis.
13:25Ils n'étaient pas d'accord sur l'éducation.
13:27Philippe Néjon avait des idées strictes
13:29et bien arrêtés.
13:31Il commandait à propos de tout,
13:33il critiquait son épouse,
13:35la dévalorisait devant les enfants.
13:37Les disputes devenaient plus fréquentes.
13:39Le petit Charles-Louis m'avait dit
13:41qu'il préférait que papa s'en aille,
13:43témoigne Clara Martins, l'ancienne baby-sitter.
13:45Le mari soupçonnait l'épouse
13:47d'avoir eu une liaison
13:49avec un artiste-peintre de plus en plus jaloux.
13:51Il l'a surveillée, l'a harcelée.
13:53Trois semaines avant le drame,
13:55le couple s'est disputé.
13:57Éliane s'est rendue au commissariat du 16ème
13:59pour dire qu'elle avait été traînée
14:01dans l'escalier.
14:03« J'ai cru que mon mari allait me lancer par-dessus la balustrade »,
14:05affirme-t-elle.
14:07Philippe Néjon, dément d'avoir été violent,
14:09« J'en fais le serment le plus total », témoigne-t-il.
14:11Éliane décide alors de se séparer.
14:13Elle ne part pas en vacances
14:15en Grèce avec son mari,
14:17se réfugie chez ses parents en Normandie,
14:192 mai.
14:21Elle annonce à Philippe sa décision de divorcer.
14:23Une semaine plus tard, la garde des enfants
14:25est confiée à la mère.
14:27L'époux a jusqu'au 9 juin pour quitter
14:29le domicile conjugal.
14:31Le jour des crimes,
14:33Philippe Néjon a déjeuné avec un de ses meilleurs amis.
14:35Il lui a demandé d'intervenir auprès d'Éliane
14:37pour qu'elle renonce au divorce.
14:39L'ami parle de lassitude,
14:41mais il ne se doutait pas
14:43que Philippe allait commettre le pire.
14:45L'enquête établit pourtant
14:47que le week-end précédent,
14:49le mari est allé chez ses parents, à Dijon.
14:51Il a ramené le pistolet
14:536.35 de son père.
14:55Le jour des faits,
14:57il est rentré plus tôt que d'habitude,
14:59vers 17h15.
15:01Il a essayé de convaincre Éliane de la laisser dormir
15:033 jours par semaine à la maison.
15:05Elle a refusé.
15:07Il est ressorti.
15:09Il s'est rendu au parc de Saint-Cloud pour essayer le pistolet.
15:11Il est ensuite passé chez un armurier
15:13pour acheter le revolver 22 long-rifle,
15:15des cartouches.
15:17Dans des pharmacies, il s'est procuré 3 boîtes de Valium
15:19grâce à des ordonnances vierges
15:21de sa sœur médecin.
15:23Le juge d'instruction
15:25dit qu'il y a là tous les signes
15:27d'une préméditation.
15:29Il faut noter que le mari
15:31nie farouchement la préméditation.
15:33Il commence d'ailleurs à échafauder sa défense.
15:35Il accuse les enquêteurs d'avoir manipulé
15:37ses aveux, d'avoir trafiqué ses déclarations.
15:39C'est l'amorce
15:41d'une guerre procédurale qui va s'amplifier
15:43au point qu'on va penser que cet homme
15:45n'a pas tout à fait toute sa raison
15:47et qu'il risque de ne pas être jugé.
15:49On va voir ce qui va arriver
15:51dans le prochain chapitre de l'heure du crime.
15:53Philippe Béger, vous étiez
15:55l'avocat général lors du procès de
15:57Philippe Néjon. On va parler dans un petit
15:59moment de ce procès spectaculaire
16:01où va se passer beaucoup de choses.
16:03On a l'impression que cet homme
16:05Philippe Néjon, vous l'avez dit, il est psychorigide.
16:07Il a des principes.
16:09Il est accroché à ses principes. Pas question de divorcer.
16:11Pas question de laisser ses enfants.
16:13Mais on a l'impression qu'il est aussi
16:15un petit peu en guerre contre sa belle famille.
16:17On est là dans des très bons milieux.
16:19Son épouse est fille d'ambassadeur.
16:21Apparemment, il n'est pas très bien vu. Il en souffre de ça.
16:23Il me semble
16:25que ça n'était pas évidemment
16:27ostentatoire
16:29dans son parcours.
16:31Pas plus à l'audience que
16:33dans l'examen du dossier.
16:35Mais je crois que
16:37cet homme brillant, ayant
16:39réussi des études
16:41d'une manière
16:43exemplaire,
16:45était tout de même
16:47d'un terreau
16:49infiniment plus brut,
16:51sans oeuf au bout,
16:53que sa belle famille raffinée.
16:55Et sans doute,
16:57sans qu'elle l'ait voulue, celle-ci
16:59a fait apparaître,
17:01pour un être qui n'était pas aussi
17:03raffiné, des humiliations.
17:05Peut-être des
17:07moments
17:09où il se sentait inférieur.
17:11Où il ne se sentait pas
17:13considéré comme il aurait dû l'être.
17:15Il était un peu frustré de tout ça.
17:17Un peu humilié, fatalement.
17:19D'autant plus que,
17:21me semble-t-il,
17:23les crimes l'ont démontré.
17:25Avant, c'était un homme de pouvoir
17:27qui voulait poser une main rude
17:29sur l'ensemble de sa famille.
17:31Et il est devenu
17:33encore pire,
17:35un homme de pouvoir, par le crime
17:37qu'il a exercé,
17:39et qui a failli faire disparaître
17:41toute sa famille.
17:43Il y a peut-être quelque chose à creuser.
17:45Les psychiatres vont s'y atteler.
17:47C'est intéressant.
17:49Il ne se sentait peut-être pas bien, mais ce n'est pas parce qu'on se sent
17:51un peu humilié, un peu rejeté par sa belle-famille
17:53qu'on doit tuer tout le monde, évidemment.
17:55Là, ça dépasse totalement l'entendement
17:57Stéphane Maître, avocat à Paris,
17:59avocat de Philippe Néjon.
18:01Vous connaissez bien Philippe Néjon.
18:03Vous l'avez beaucoup approché à l'époque.
18:05Vous avez essayé de lire dans ses mécanismes
18:07qui sont parfois compliqués à décrypter.
18:09Très vite, il va dire
18:11« Non, mais moi, je n'ai pas dit tout ça.
18:13C'est des aveux en garde à vue, mais alors là,
18:15c'est des aveux extorqués. »
18:17On l'entend 10 fois par jour, peut-être.
18:19Vous savez,
18:21Philippe Néjon a eu,
18:23aura eu en tout, 5 avocats
18:25dans cette affaire.
18:27J'ai pour ma part été désigné d'office en toute fin d'instruction
18:29au moment où il s'agissait
18:31de savoir s'il fallait renvoyer
18:33Philippe Néjon devant la cour d'assises.
18:35Et puis, j'ai été redésigné d'office
18:37au stade de la cour d'assises.
18:39Après les 4 confrères
18:41qui m'ont précédé,
18:43j'ai vécu la même chose qu'eux, c'est-à-dire
18:45une situation dans laquelle
18:47Philippe Néjon
18:49en fait
18:51refusait toute défense.
18:55On a dit qu'il faisait obstacle
18:57à la tenue future
18:59de son procès et à la progression
19:01de l'instruction, mais il faut avoir en tête
19:03aussi qu'il faisait obstacle à sa propre
19:05défense. Et il y avait pourtant
19:07parmi ceux qui m'ont précédé
19:09des confrères
19:11qui n'étaient pas sur une ligne du tout
19:13de connivence, qui étaient
19:15même plutôt, qui rejoignaient
19:17Philippe Néjon dans
19:19ce qu'on peut qualifier parfois de stratégie
19:21de rupture et de refus
19:23intégral. Mais même
19:25ces défenseurs-là, il a fini
19:27par les récuser. Il était dans une optique
19:29en fait d'incapacité
19:31mentale d'aborder
19:33les faits qui lui étaient reprochés.
19:35Stéphane Maître, juste un petit mot. Aujourd'hui, on parlerait
19:37de féminicide. À l'époque,
19:39ça n'existe pas. Ce mot, il n'apparaît pas
19:41dans les cours d'assises.
19:43Mais le fait est, c'est que lui, il dit, c'est ma femme
19:45qui est en tort. C'est elle qui a tout provoqué.
19:47Ce qui est quand même hallucinant aussi.
19:49Il est dans cette espèce de défense.
19:51Il y est pour rien presque. On a l'impression
19:53qu'il y est pour rien dans ce qui s'est passé.
19:55Alors, je crois pas
19:57qu'on puisse dire que c'est un système de défense
19:59de sa part. En fait, Philippe Néjon
20:01de façon
20:03totalement décalée par rapport
20:05à l'ampleur
20:07des faits,
20:09donnait l'impression
20:11de plaider son futur dossier de divorce.
20:13Mais, je ne crois pas
20:15qu'on puisse dire
20:17qu'il tentait par ce biais-là
20:19de trouver une quelconque justification
20:21aux actes qui lui étaient reprochés.
20:23Son système de défense n'a jamais consisté
20:25à dire, ma femme l'a bien cherché.
20:27Pas du tout. Il avait
20:29cette tendance à
20:31ne pas vouloir
20:33et probablement ne pas pouvoir
20:35aborder les faits eux-mêmes, mais
20:37à déporter la discussion
20:39sur la périphérie
20:41des événements
20:43et en particulier sur la procédure de divorce
20:45qu'il avait subie.
20:47Et donc, on a effectivement
20:49eu des interventions qui consistaient
20:51à certains égards
20:53à ternir probablement l'image de sa femme,
20:55mais plus dans ce qui était pour lui un dossier de divorce
20:57que dans une affaire
20:59qui le concernait lui-même pour un crime.
21:01Les investigations se heurtent
21:03au tir de barrage du mari et de son avocat.
21:05Tout pour échapper à un procès.
21:07L'affaire Philippe Neijon,
21:09le massacre de la Villa Schéffère.
21:11Pour un père ordinaire, un divorce, c'est correct.
21:13Mais pour moi, c'est inacceptable.
21:15L'enquête de l'heure du crime.
21:17Qui est ce mari en colère qui dit qu'on a extorqué
21:19ses aveux ? Est-il en état d'être jugé ?
21:21À suivre, dans un court instant sur RTL.
21:31Une première victoire.
21:33Jean-Alphonse Richard sur RTL.
21:35L'heure du crime jusqu'à 15h.
21:37Un polytechnicien encore une fois
21:39d'un très haut niveau,
21:41mais un caractère rigide, paranoïaque
21:43qui exerçait
21:45une emprise plus que
21:47discutable sur ce groupe familial.
21:51Au programme aujourd'hui de l'heure du crime,
21:53l'affaire Philippe Neijon. Ce polytechnicien,
21:55directeur financier à la Caisse des dépôts
21:57est accusé d'avoir
21:59tué son épouse et deux de ses trois
22:01enfants au printemps 94 à Paris.
22:03Cet homme a-t-il toute sa raison ?
22:05L'expertise psy est très
22:07attendue.
22:09Mardi 10 janvier 95, 8 mois
22:11après la tuerie de la villa Schaeffer,
22:13Philippe Neijon répond aux questions du docteur
22:15Henri Grinspan à la prison de
22:17la santé. Le mari pleure à plusieurs
22:19reprises. Lors des prochaines séances,
22:21il se révélera beaucoup plus maître
22:23de lui. L'expert psychiatre
22:25décrit un homme d'une intelligence
22:27supérieure, déçu par une carrière
22:29qui n'était pas selon lui à la hauteur de
22:31ses diplômes et dressants.
22:33De lui-même, un portrait
22:35opaque et impénétrable.
22:37A propos de son divorce, l'homme indique
22:39« Pour un père ordinaire, c'est correct. Mais
22:41pour moi, c'est inacceptable. »
22:43Le docteur Grinspan décrit une personnalité
22:45psychorigide, enfermée
22:47dans la paranoïa. Philippe Neijon
22:49a enquêté sur le prétendu amant
22:51de sa femme, persuadé qu'il ne
22:53s'agissait pas d'un simple ami.
22:55Il a vérifié en secret les dépenses
22:57de son épouse. Le mari considère
22:59que sa femme est la seule responsable
23:01de ce qui est arrivé. Il garde
23:03vis-à-vis d'elle un sentiment de préjudice.
23:05Cela lui permet d'éviter
23:07de vivre sa propre culpabilité,
23:09note le psychiatre.
23:11Philippe Neijon n'était pas délirant
23:13au moment des faits. Il sera jugé.
23:17Philippe Neijon refuse les contre-expertises
23:19psychiatriques. Au juge d'instruction,
23:21il ne donne plus aucun détail
23:23sur ce qui s'est passé. Un événement
23:25qu'il appelle toujours le drame
23:27ou la tragédie. Il conteste avoir préparé
23:29ses crimes. 7 novembre
23:311996, c'est pourtant pour meurtre
23:33avec préméditation
23:35et tentative de meurtre
23:37qu'il est renvoyé aux assises.
23:39Et c'est un procès
23:41très mouvementé qui va se tenir, on va le voir
23:43dans le chapitre suivant.
23:45Philippe Bilger,
23:47vous étiez l'avocat général
23:49lors de ce procès.
23:51Il y a quelque chose de très important dans cette expertise
23:53psy, c'est la paranoïa.
23:55Là, le docteur Greenspan,
23:57il décrit très bien cet homme qui s'enferme
23:59dans ses doutes, dans sa surveillance.
24:01Il épie son épouse,
24:03il pense qu'elle le trompe,
24:05il est toujours sur le qui-vive.
24:07Là, peu à peu, ça monte dans cet hôtel
24:09particulier. Absolument,
24:11il y a le mélange
24:13qui existe parfois
24:15dans certaines personnalités
24:17qui, heureusement, n'aboutissent pas
24:19tout au pire.
24:21C'est le mélange, l'homme de pouvoir
24:23que j'évoquais tout à l'heure,
24:25avec tout de même une fragilité
24:27psychologique qui le
24:29conduit à mettre tout en doute,
24:31tout en suspicion,
24:33et à avoir sur la vie
24:35une vision un peu
24:37suspicieuse et
24:39emplie de susceptibilité.
24:41Et ce qu'a dit l'expert
24:43Greenspan me paraît assez
24:45vrai, ce mélange
24:47finalement de fragilité
24:49et de certitude
24:51d'être plus fort que les autres.
24:53Et on le
24:55voyait, et comme
24:57Stéphane l'a évoqué à l'instant,
24:59on verra à l'audience
25:01le caractère très singulier
25:03de cet être-là qui,
25:05pendant un très long temps,
25:07refuse de s'expliquer sur ce
25:09qui lui est reproché. Oui, très imprévisible,
25:11parfois très impulsif aussi,
25:13donc il y a tout ce mélange chez cet homme.
25:15Stéphane Maître, vous avez été
25:17l'avocat de Philippe Neijon,
25:19vous êtes avocat à Paris.
25:21Est-ce que finalement, tout simplement,
25:23votre client, Philippe Neijon,
25:25est-ce qu'il n'aurait pas peur tout simplement
25:27de perdre son honneur en
25:29refusant de parler, en éludant
25:31ses responsabilités ?
25:33Je ne crois pas qu'il s'agisse
25:35d'une question d'honneur au sens
25:37sociologique, si vous voulez,
25:39parce que son honneur
25:41sociologique, de toute façon,
25:43il est largement
25:45compromis parce qu'il...
25:47Oui, il a tout perdu.
25:49Son attitude pendant
25:51l'instruction, puis pendant le procès,
25:55son propos n'est pas de réhabiliter
25:57son honneur.
25:59C'est un peu comme
26:01quelqu'un qui est accusé d'un crime
26:03mais qui plaide son dossier de divorce,
26:05vous voyez ?
26:07Oui, mais ça c'est de se défausser, finalement.
26:09Il pose
26:11sa responsabilité à côté.
26:13Il ne parle pas des faits,
26:15il parle d'autres choses, finalement.
26:17Philippe Neijon
26:19ne parle pas des faits parce que je pense qu'il
26:21ne le peut pas.
26:23Les faits qui lui sont
26:25reprochés
26:27ne sont pas entendables
26:29y compris par lui-même.
26:31C'est écrasant.
26:33C'est quelqu'un qui ne peut pas,
26:35qui ne veut pas, certes, mais qui ne
26:37ne peut pas, à mon sens, aborder
26:39les faits, peut-être
26:41presque pour des raisons de survie mentale.
26:43Mais je ne crois pas
26:45qu'il faille surdimensionner
26:47même si ça
26:49a plu à certains journalistes
26:51de mettre l'accent là-dessus. Je ne crois pas qu'il
26:53faille surdimensionner l'aspect
26:55sociologique, l'aspect
26:57honneur, tenir son rang.
26:59Je ne crois pas que c'était au centre
27:01de ce qu'il avait dans la tête.
27:03C'est important ce que vous dites, Stéphane Maître.
27:05Philippe Bilger, il va dire...
27:07Allez-y.
27:09Je vous rejoins, Maître.
27:11Il ne faut pas le
27:13surdimensionner, mais je crois
27:15qu'il ne serait
27:17pas honnête de
27:19l'occulter un petit peu.
27:21Au fond, derrière tout cela,
27:23il y a aussi le fait que
27:25comment ose-t-elle
27:27mettre en cause
27:29ma conception, la vie
27:31familiale, et donc naturellement
27:33ma réputation.
27:35Mais ce n'est pas l'essentiel. Je vous rejoins.
27:37Ce que vous dites, Philippe Bilger, c'est que
27:39c'est moi le patron, finalement, pour parler
27:41un petit peu trivialement.
27:43Oui, alors...
27:45Encore une fois, vous l'avez évoqué
27:47vous-même tout à l'heure dans votre
27:49relation, voilà un être
27:51qui ne conçoit pas de
27:53compromis avec l'existence
27:55et avec les aléas
27:57d'une vie qui,
27:59en commun, impose
28:01un certain nombre de sacrifices
28:03et de concessions. C'est
28:05ou l'entente, selon
28:07ses critères, ou c'est
28:09l'apocalypse criminelle.
28:11Trois ans après la tragédie,
28:13le mari va comparaître aux assises.
28:15L'affaire Philippe Néjon,
28:17le massacre de la villa Scheffer.
28:19Ma femme, je l'aime, je veux l'aimer avant
28:21et après le procès.
28:23L'enquête de l'heure du crime, on se retrouve dans un instant
28:25sur RTL.
28:27L'heure du crime, jusqu'à 15h
28:29sur RTL.
28:31L'heure du crime, présenté par Jean-Alphonse
28:33Richard sur RTL.
28:35Retour aujourd'hui dans l'heure du crime sur l'affaire
28:37Philippe Néjon, un bain de sang dans les
28:39beaux quartiers de Paris. Ce polytechnicien
28:41est accusé d'avoir tué son épouse
28:43et deux de ses enfants. Le 19 mai
28:451994, il n'acceptait pas de divorcer.
28:47Trois ans plus tard, il est jugé.
28:49Lundi 8 septembre
28:511997,
28:53Philippe Néjon, 46 ans, est devant
28:55la cour d'assises de Paris. Veste verte,
28:57cravate, visage très pâle.
28:59Il semble flotter dans ses vêtements.
29:01Il refuse de parler des crimes.
29:03Très en colère, il traite les avocats de
29:05salauds. Je n'ai jamais brutalisé
29:07ma femme, affirme-t-il. A 14h45,
29:09l'accusé se lance dans un
29:11monologue, deux heures obscures,
29:13parfois incompréhensibles,
29:15au cours desquelles il se présente comme une victime.
29:17Un père massacré, un mari
29:19trahi par sa belle famille.
29:21Il évoque Eliane, ma femme,
29:23je l'aime, je veux l'aimer avant et après
29:25le procès, dit-il. A propos d'Isabelle,
29:27sa fille rescapée, il affirme
29:29ma fille, ça l'est
29:31miraculeusement sortie. Je veux vivre
29:33pour qu'elle sache la vérité.
29:35Philippe Néjon parle de torture blanche
29:37en prison, d'ignominie quand la
29:39police l'a interrogée à l'hôpital,
29:41de provocation quand Eliane portait
29:43une robe transparente alors qu'elle
29:45demandait le divorce. Il ricane
29:47parfois entre ses propos.
29:49Tout le monde s'interroge sur sa santé mentale.
29:51L'avocat général Philippe Bigère
29:53tente de le rassurer avec ces mots
29:55je suis prêt à vous suivre
29:57sur les chemins obscurs de votre vie.
30:01Mardi 9 septembre, Philippe Néjon,
30:03enfermé dans une bulle paranoïaque, selon l'expert
30:05psychiatre, refuse de comparaître.
30:07L'accusé parle d'une parodie de justice.
30:09Une courte apparition le mercredi,
30:11il annonce vouloir se défendre,
30:13vouloir choisir son avocat.
30:15L'avocat général estime que l'accusé
30:17se moque de la justice. S'agit-il
30:19dans cette affaire
30:21d'illusion d'assassinat.
30:23Mais bon Dieu, que M.
30:25Néjon devienne un homme,
30:27que sa lâcheté se dissipe et qu'on en finisse.
30:29S'en porte le magistrat. Jeudi,
30:31le polytechnicien n'est pas là.
30:33On lit en son absence le déroulé
30:35insupportable, minute par minute,
30:37du massacre de la villa
30:39Schaeffer.
30:41Et on va voir dans le prochain chapitre
30:43quel va être le verdict de ce procès.
30:45Pour l'instant c'est très mouvant
30:47et c'est très spectaculaire parce que cet accusé
30:49il est totalement imprévisible.
30:51M. Stéphane Maître, vous êtes
30:53à ce procès l'avocat de Philippe Néjon.
30:55Je ne vais pas vous demander
30:57si c'était difficile de le défendre parce que la défense
30:59elle paraît quasiment impossible.
31:01Il y a ce monologue dans lequel il se lance.
31:03Désolé, mais très souvent
31:05on ne comprend pas. C'est très obscur,
31:07très opaque ce qu'il raconte.
31:09Oui, c'est tellement
31:11obscur, tellement opaque
31:13que très rapidement
31:15l'atmosphère qui
31:17se dégage de ce
31:19monologue
31:21c'est que tout le monde finit par se regarder
31:23en se disant mais qui est cet homme ?
31:25Il ne va pas bien.
31:27Il y a quelque chose qui tourne par rond.
31:29Je ne crois pas que
31:31ce soit calculé d'ailleurs.
31:33Mais il y a au centre
31:35de tout ce qui se dit,
31:37au centre de ce flot de paroles,
31:39cette atmosphère
31:41qui conduit
31:43je crois tout le monde à se dire
31:45mais est-ce que
31:47cet homme
31:49a toute sa tête ?
31:51Je prends
31:53beaucoup de précautions quand je dis ça parce que
31:55évidemment quand on est à l'avocat de la défense
31:57on est toujours suspecté de vouloir utiliser
31:59des artifices
32:01pour... Il faut quand même
32:03se souvenir ce que c'est qu'un avocat de la défense.
32:05Ce n'est pas quelqu'un qui est
32:07chargé
32:09d'éviter une peine
32:11méritée
32:13ni de tricher. C'est quelqu'un qui doit
32:15en face
32:17de charges très graves
32:19être capable de faire ressortir
32:21des éléments
32:23aussi de personnalité.
32:25Et parmi ces éléments de personnalité il y a aussi
32:27la santé mentale, la question du discernement
32:29au moment des faits mais aussi la question du discernement
32:31au moment du procès.
32:33Donc là
32:35évidemment vous avez intérêt
32:37et vous avez raison, vous êtes dans votre rôle
32:39de souligner la fragilité extrême de cet homme
32:41quoi qu'il ait fait.
32:43C'est vrai que c'est quelqu'un qui est forcément
32:45fragile. Philippe Bilger, vous êtes
32:47avocat général à ce procès.
32:49Paradoxalement je dirais, mais
32:51bien sûr, je ne
32:53contredit pas forcément
32:55fortement maître-maître.
32:57Il y a tout de même
32:59comme vous l'avez dit vous-même
33:01une sorte de
33:03rectitude dans le
33:05comportement des gens, c'est-à-dire
33:07cette volonté d'échapper
33:09à l'interrogation centrale
33:11sur son crime.
33:13Il met en cause
33:15la nature du procès,
33:17la qualité de ses juges,
33:19parfois même la légitimité
33:21de son avocat. Donc tout cela
33:23est cohérent par rapport
33:25à ce qu'il est durant le procès.
33:27Il échappe à l'essentiel.
33:29Philippe Bilger,
33:31vous avez dit, parce que vous essayez
33:33de l'amadouer, il ne veut pas parler,
33:35il n'est pas là, etc. C'est très compliqué.
33:37Vous vous énervez d'ailleurs un petit peu en un moment donné
33:39en disant, soyez un homme, etc.
33:41Vous allez avoir cette phrase qui est très frappante.
33:43Vous allez lui dire, je suis prêt
33:45à vous suivre sur les chemins obscurs
33:47de votre vie. C'est-à-dire, je vous tends la main,
33:49racontez-moi ce qui s'est passé.
33:51Oui, parce que même si je pouvais
33:53considérer que
33:55Philippe Néjon était
33:57à juste titre accusé
33:59devant cette cour d'assises,
34:01d'abord par passion
34:03personnelle pour les obscurités
34:05des êtres, et ensuite à cause
34:07des siennes, qui étaient perceptibles.
34:09Le monologue
34:11très long, cette volonté d'échapper
34:13à l'essentiel de ce qui lui
34:15était reproché, tout ce qui
34:17s'était déroulé avant les crimes
34:19et lors des crimes, tout cela,
34:21à moins d'être un obtus
34:23absolu, ne pouvait pas
34:25me détourner de
34:27la certitude qu'il y avait là
34:29une psychologie singulière
34:31et c'est un euphémisme.
34:33Maître Stéphane Maître, votre client
34:35a priori, il n'y a pas trop d'émotion ?
34:37Il n'est pas vraiment dans la compassion ?
34:39Est-ce qu'il a des mots pour les victimes ?
34:41Non ? Pas vraiment ?
34:43Il n'a pas de mots pour les victimes
34:45parce qu'il n'a pas de mots pour les faits qui lui sont
34:47reprochés. C'est quelque chose
34:49qui est éludé. Il reste
34:51à la périphérie, car encore une fois,
34:53selon moi, il est dans
34:55l'incapacité
34:57d'être en face de la réalité
34:59qu'il accuse.
35:01Il ne peut pas verbaliser.
35:03On ne peut pas avoir de l'émotion quand on n'aborde pas
35:05les faits dans
35:07toute leur émotion.
35:09Ils n'abordent pas les faits.
35:11Réclusion criminelle
35:13à perpétuité requise.
35:15Que vont dire les jurés ?
35:17L'affaire Philippe Néjon, le massacre
35:19de la ville à Schaeffer, inventer ce que
35:21vous voulez mais mettre un fantôme en prison
35:23à vie, cela ne redonne pas
35:25espoir. L'enquête de l'or du crime, je vous retrouve
35:27tout de suite sur RTL.
35:29Jean-Alphonse Richard sur RTL.
35:31L'or du crime.
35:33L'or du crime, présenté
35:35par Jean-Alphonse Richard sur RTL.
35:37Dans l'or du crime
35:39aujourd'hui, l'affaire Philippe Néjon, un
35:41bain de sang dans les beaux quartiers de Paris.
35:43En septembre 1997, ce polytechnicien,
35:45directeur financier à la Caisse
35:47des dépôts, est jugé pour avoir assassiné
35:49sa femme et deux de ses trois
35:51enfants après une semaine de débat.
35:53Voici l'or du verdict.
35:55Vendredi 12 septembre
35:571997,
35:59Philippe Néjon est condamné à 30
36:01ans de prison assorti d'une peine de sûreté
36:03de 20 ans. L'avocat général
36:05avait demandé la perpétuité.
36:07Avant que les jurés se retirent, l'accusé
36:09leur avait lancé « Inventez
36:11ce que vous voulez, coupez-moi une tête,
36:13une jambe, mais mettre un
36:15fantôme en prison à vie,
36:17cela ne redonne pas espoir. »
36:19Philippe Néjon est sorti
36:21de prison en 2012. Après
36:2318 ans de détention, il n'est
36:25jamais revenu sur l'affaire de la rue
36:27Schaeffer. « C'est une personne
36:29très carencée sur le plan narcissique
36:31qui ne peut pas imaginer vivre
36:33sans son épouse qui représente tout
36:35pour lui. Il va hésiter entre
36:37je me tue, je la tue. »
36:39La voix de Gérard Lopez,
36:41psychiatre expert auprès des tribunaux,
36:43c'était sur BFM TV en 2011.
36:45On vous
36:47retrouve dans 7 heures du crime,
36:49Stéphane Maître, avocat de Philippe Néjon.
36:51Évidemment, il y a ce verdict qui tombe.
36:53On ne pouvait pas s'attendre
36:55à beaucoup moins que 20 ans de prison.
36:57L'avocat général, on va y revenir, avait demandé
36:59la perpétuité.
37:01Ce procès, il a été vraiment
37:03sans arrêt en mouvement. Il n'était
37:05pas là. Il était là, Philippe Néjon.
37:07Qu'est-ce qu'on peut retenir de lui ?
37:09Est-ce qu'il avait toute sa tête ou pas, ce procès ?
37:11Je crois qu'il y a une expertise qui a été lancée.
37:13Bien sûr, c'était vraiment quand même une question
37:15qui restait centrale, même si
37:17la tendance
37:19générale consistait
37:21d'une certaine façon à évacuer cela
37:23parce que les experts s'étaient
37:25déjà prononcés au cours de l'instruction.
37:27Moi, pour ma part, j'ai
37:29demandé, au cours des débats,
37:31à ce que soit vérifié par expertise
37:33si Philippe Néjon
37:35était en état
37:37d'être jugé. Vous voyez, c'est pas
37:39tellement la question du discernement au moment des faits,
37:41mais c'est plus la question
37:43de l'état d'être jugé.
37:45Est-il en état mental,
37:47psychologique, psychiatrique, d'être jugé ?
37:49De comprendre son procès ?
37:51Et puis, plus largement,
37:53est-il accessible
37:55à la sanction pénale,
37:57à un verdict ? Peut-il le comprendre ?
37:59Est-il en état d'être jugé ?
38:01Alors là, il y a eu des rebondissements et des complications.
38:03Je ne vais pas rentrer dans le détail, mais
38:05cette demande a été rejetée, puis finalement
38:07acceptée, mais avec le même expert
38:09que celui qui avait rendu la précédente expertise. Bref,
38:11cafouillage, difficulté
38:13procédurale. Au bout du compte,
38:15Philippe Néjon a lui-même refusé
38:17cette expertise que je sollicitais.
38:19Et donc, la parenthèse
38:21se referme autour de l'état mental
38:23de cet homme, parce qu'on voit bien que lui-même
38:25n'est pas accessible
38:27à ces demandes qui ont pu être faites.
38:29Philippe Bilger, vous êtes
38:31avocat général à ce procès.
38:33Vous aviez demandé la perpétuité.
38:35Alors, vous ne l'avez pas obtenue.
38:37Alors, en effet, alors que
38:39d'habitude, dans toutes les
38:41affaires criminelles, je
38:43prenais la peine, quelle que soit la
38:45sanction requise, ou
38:47éventuellement le doute
38:49qui emportait l'acquittement,
38:51là, est-ce que j'étais moi-même
38:53victime de l'atmosphère
38:55très particulière du procès ?
38:57Je n'ai pas consacré
38:59cinq minutes à expliquer
39:01pourquoi la réclusion à perpétuité
39:03m'apparaissait comme une évidence
39:05et j'ai cru comprendre.
39:07D'abord, ça a été une erreur
39:09de ma part, parce que j'aurais dû
39:11l'expliquer, et je crois que j'aurais pu
39:13trouver des motifs pour
39:15la justifier, et j'ai cru
39:17comprendre, on n'a violé aucun
39:19secret, que la manière
39:21très étrange dont Philippe Néjon
39:23a traité son avocat
39:25a probablement
39:27influé aussi
39:29sur l'esprit collectif du jury
39:31en disant, a-t-il
39:33vraiment été défendu ?
39:35Alors qu'il pouvait l'être
39:37et au mieux par maître-maître.
39:39Et il ne voulait pas l'être défendu,
39:41c'est ça le problème de son avocat.
39:43Je pense qu'il ne me démentira pas.
39:45Bien sûr, évidemment. Juste un petit mot
39:47Philippe Bilger, vous allez dire de lui,
39:49c'est une bombe humaine d'irresponsabilité.
39:51En quelques mots, vous décrivez
39:53parfaitement cette espèce de thème qui a explosé.
39:55Je le crois, parce qu'en réalité
39:57au fil du procès,
39:59encore une fois, j'ai vu
40:01de plus en plus une logique
40:03délirante, mais qui avait
40:05son explication à partir
40:07de sa structure de caractère
40:09et bien sûr,
40:11après, je crois
40:13me rappeler que c'est seulement
40:15dans les dernières minutes du procès
40:17qu'il a commencé à aborder
40:19l'accusation qui lui était
40:21reprochée, mais d'une
40:23manière totalement délirante
40:25qu'en insultant la victime,
40:27si mes souvenirs sont bons.
40:29Et les victimes, pardon.
40:31Stéphane Maître, il est condamné, il est parti en prison.
40:33Il n'y a pas d'appel, je crois, d'ailleurs à l'époque
40:35aux Assises.
40:37Vous l'avez suivi un petit peu,
40:39Philippe Neijon ? Non, j'ai perdu tout contact
40:41avec Philippe Neijon à l'issue du
40:43procès et
40:45je n'ai par conséquent eu aucune nouvelle
40:47de la suite, mais je voudrais dire
40:49un dernier mot à propos du verdict. Moi, je pense que
40:51en définitive,
40:53avec tout ce qui s'est passé, avec
40:55cette obstruction
40:57totale à sa propre défense,
40:59bon, au bout du compte, le résultat
41:01final est que les jurés,
41:03je pense plutôt les jurés, plutôt que
41:05la Cour elle-même, les magistrats,
41:07ont quand même considéré que cet homme
41:09ne pouvait
41:11sur le plan psychiatrique pas
41:13prendre le maximum de la peine.
41:15Il y a eu, nécessairement
41:17selon moi, une appréciation
41:19nuancée de son
41:21équilibre mental
41:23qui peut expliquer
41:25que la Cour d'Assises ne soit
41:27pas allée jusqu'au maximum de la peine encourue.
41:29Juste un mot avec tous les deux, c'est un
41:31procès qu'on n'oublie pas, ça.
41:33Philippe, juste un petit mot.
41:35Très vite, parce que le hasard a fait
41:37que j'ai pu suivre un peu
41:39le parcours de cette jeune fille
41:41qui avait été sauvée.
41:43Et vous, Maître ?
41:45C'est un des procès qui m'a le plus marqué.
41:47Merci infiniment, Maître Stéphane Maître
41:49et Philippe Bilger d'avoir été les invités de
41:51L'Heure du Crime. Merci à l'équipe de l'émission, rédactrice en chef
41:53Justine Vignot, préparation Marie Bossard,
41:55Lisa Canalès, réalisation
41:57en direct, Jonathan Griveaux.

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