• il y a 3 mois
Le 18 mars 2018, les Russes étaient invités aux urnes pour l'élection présidentielle avec un seul favori depuis l'an 2000 : Vladimir Vladimirovitch Poutine. Depuis des années, il n'est pas seulement le président de la Russie, il a mis sur pied un système qui gère et gangrène le pays. Gouvernement, services secrets et crime organisé travaillent main dans la main.

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00:00Saint-Pétersbourg, 6 heures du matin.
00:05Nous avons rendez-vous avec Andrei Zhikov,
00:10un ancien inspecteur de la brigade financière de la ville.
00:13Bonjour.
00:15L'homme, aujourd'hui à la retraite,
00:18a fait de la lutte anticorruption son cheval de bataille.
00:21Avec lui, nous partons à la recherche
00:25de ce qui serait la dernière demeure de luxe du président russe.
00:30Merci.
00:38Le golfe de Finlande.
00:40Nous roulons plein nord, en direction de la frontière finlandaise.
00:44C'est ici, entre mer et forêt, sur une presqu'île isolée,
00:48que la villa se cacherait.
00:54Après 3 heures de route, nous semblons approcher du but.
00:57Les maisons luxueuses se succèdent,
00:59cachées à la vue des curieux par leur clôture.
01:06Selon nos informations, la villa du président russe
01:09se trouverait sur la commune de Lodoshny,
01:11mais bizarrement, personne ne semble pouvoir nous indiquer le chemin.
01:16Bonjour, Lodoshny, c'est loin ?
01:20Ah, vous ne savez pas.
01:22C'est par là, Lodoshny ?
01:27L'endroit est très bien.
01:29Plus il est difficile de trouver l'endroit, mieux c'est pour eux.
01:32Sans personne, ils se sentent plus en confiance.
01:34Eux, ils n'ont aucune envie de se retrouver avec du monde.
01:42Pendant plusieurs heures, nous errons,
01:45quand un habitant nous donne une indication.
01:48On cherche la maison de Vladimir Poutine.
01:50C'est du côté de Viborg. Vous verrez le panneau Zimino.
01:5330 km, c'est goudronné.
01:56Merci.
02:00Nous trouvons finalement le chemin d'accès.
02:02La nuit est tombée.
02:09Ici, la route est bonne.
02:11Nous nous rapprochons.
02:13L'endroit est très beau de ce que l'on voit.
02:15Ici, un président peut venir séjourner
02:17et se faire une belle base de repos.
02:20Regardez la clôture, alors qu'il n'y a rien autour.
02:23Et tout est fermé.
02:26Voilà, ça doit être là.
02:28L'accès est solidement fermé.
02:30Impossible d'aller plus loin.
02:32Ce qui se cache derrière cette barrière est la forêt.
02:35C'est cela.
02:39Un vaste complexe résidentiel
02:41que l'opposition russe a réussi à filmer avec un drone.
02:44Maison de service, 3000 m².
02:47Elliport.
02:49Maison des invités, 1500 m².
02:52Et au meilleur endroit, bien caché,
02:54la maison du maître des lieux.
02:56745 m² et 1500 m² de dessert.
03:02Les aménagements sont à la hauteur du standing présidentiel.
03:06Une vaste piscine intérieure.
03:09Un salon luxueux avec billard.
03:11Et pour les moments de travail,
03:13ce bureau, dominé par le symbole du pouvoir en Russie,
03:16lègue la deux têtes.
03:18Au total, plus de 48 hectares
03:20qui seraient désormais réservés
03:22à l'usage unique du maître de la Russie.
03:27Depuis son accession à la tête du Kremlin
03:29le 1er janvier 2000,
03:31Vladimir Poutine multiplie
03:33des signes extérieurs de richesse.
03:35Hurra !
03:37Hurra !
03:39Hurra !
03:44Comme ces dizaines de montres de luxe qu'il collectionne,
03:47certaines valant jusqu'à 400 000 €.
03:50Mais il y aurait aussi ce yacht
03:52à plus de 25 millions.
03:55Ou encore ce gigantesque palais
03:57estimé à 1 milliard d'euros.
04:00Comment le président russe,
04:02qui gagne environ 150 000 € par an
04:04et n'a fait carrière que dans la fonction publique russe,
04:07pouvait s'offrir un tel train de vie ?
04:09Il a passé les 17 dernières années de sa vie
04:12à accumuler une énorme masse d'argent.
04:14Pour moi, il possède 200 milliards de dollars.
04:18Cette fortune aurait-elle été acquise
04:20grâce à la corruption ?
04:23Quand vous regardez l'entourage de Poutine,
04:25ses amis de toujours,
04:27ils ont fait tellement d'argent.
04:29C'est impossible de gagner autant
04:31avec des investissements honnêtes.
04:33C'est impossible.
04:35Jusqu'où le président russe serait-il prêt
04:37à aller pour garder le pouvoir
04:39et protéger ses intérêts ?
04:41Sacha était bien informé
04:43et cela n'était pas bon pour Poutine.
04:45Et il n'allait pas se taire,
04:47ce que Poutine a compris.
04:49Enquête au cœur du Tsar Système
05:05Saint-Pétersbourg
05:12Tout commence à Saint-Pétersbourg,
05:14la deuxième ville de Russie.
05:20C'est ici que naît Vladimir Vladimirovitch Poutine
05:23en 1952, dans une famille ouvrière.
05:28En 1970, âgé de 18 ans,
05:30il intègre les services secrets russes,
05:32alors appelés KGB.
05:35Il y fait carrière.
05:37Deux décennies plus tard,
05:39en 1991,
05:41le système soviétique s'effondre.
05:45Le maire de Saint-Pétersbourg
05:47lui propose de devenir son adjoint.
05:49Vladimir Poutine quitte le KGB
05:51et aurait alors perfectionné
05:53le système existant, la corruption.
05:58Dans le sud de l'Allemagne,
06:00en Bavière, vit un homme
06:02qui a bien connu ce système,
06:04Franz Sedlmayr.
06:10Au début des années 90,
06:12il monte à Saint-Pétersbourg
06:14une société de sécurité
06:16qui forme la police locale
06:18et la fournit en équipement.
06:20Un contrat signé sous le patronage
06:22de Vladimir Poutine.
06:24Mais très vite,
06:26des policiers tentent de l'exproprier.
06:28Des types sont venus six mois
06:30avant le début de l'entreprise.
06:32Ils ont dit qu'ils avaient des projets
06:34pour nous, comme par exemple
06:36changer les managers de la boîte.
06:40J'ai répondu que tant que je serais
06:42président de la compagnie,
06:44ce n'était pas possible.
06:46On était partenaire,
06:48mais c'est moi le patron
06:50qui décide qui travaille ou pas
06:52dans la boîte.
06:54Nous étions une compagnie
06:56qui marchait bien
06:58Je suis allé voir M. Poutine
07:00et sa réaction a été intéressante
07:02parce qu'il m'a dit que ce n'était pas
07:04son problème et pas le problème
07:06de la ville.
07:08Et sa réaction a été
07:10qu'il ne voulait pas interférer
07:12dans une dispute
07:14entre des partenaires
07:16de business.
07:18J'ai dit ok, pourquoi ça ?
07:20Et il a répondu clairement
07:22qu'il avait assez de travail
07:24à faire pour protéger
07:26les intérêts du maire
07:28vis-à-vis des organes du pouvoir.
07:30J'ai compris basiquement
07:32qu'il y avait des relations
07:34de travail spécifiques
07:36dans la ville,
07:38pas aussi normales
07:40qu'ailleurs,
07:42disons-le comme cela.
07:48Vladimir Poutine
07:50aurait alors suggéré
07:52aux jeunes entrepreneurs
07:54certaines initiatives
07:56pour rester propriétaire
07:58de sa société.
08:02Nous devions développer
08:04nos contacts avec les politiques
08:06pour pouvoir survivre dans ce marché
08:08après les investissements
08:10et pour faire cela,
08:12il fallait que je cultive
08:14ma relation avec Vladimir Poutine.
08:18Et comment avez-vous fait alors ?
08:20Eh bien, je lui ai dit
08:22que nous n'étions pas
08:24les ennemis de la ville,
08:26que nous étions amis
08:28et que nous étions prêts
08:30à contribuer au budget de la ville
08:32ce que nous avons fait.
08:34Et nous avons décidé aussi
08:36que nous devions sponsoriser
08:38une équipe pour les Goodwill Games
08:40qui allaient se tenir dans la ville
08:42en 1994 et on a fait une donation
08:44de plus d'un million de dollars
08:46à la ville de Saint-Pétersbourg.
08:50Malgré sa bonne volonté,
08:52Franz Osedelmayr a finalement été exproprié
08:54et a dû quitter la Russie.
08:56Depuis, il est en procès
08:58avec l'état russe pour se faire indemniser.
09:04Vladimir Poutine, lui,
09:06ne se serait pas seulement servi dans les caisses des entreprises.
09:08Le système de corruption
09:10qu'il aurait mis en place
09:12se serait également fait au détriment de la population.
09:16En 1991,
09:18Saint-Pétersbourg,
09:20toujours sous le choc de la chute du mur,
09:22meurt de faim.
09:24Vladimir Poutine est alors chargé d'approvisionner la ville
09:26en nourriture.
09:28Pour remplir les magasins,
09:30un système d'échange se met en place
09:32avec les pays étrangers
09:34des matières premières comme le pétrole ou le bois
09:36contre de la nourriture.
09:38Problème, les matières premières quittent le pays
09:40mais la nourriture, elle, n'arrive pas.
09:42André Korschagin
09:44est un ancien élu de Saint-Pétersbourg.
09:46Nous le rencontrons à Londres
09:48où il a obtenu le statut de réfugié politique.
09:52En 1991,
09:54alerté par ces dysfonctionnements,
09:56des députés d'opposition
09:58montent une commission d'enquête parlementaire
10:00et découvrent un système de fraude.
10:02Les matières premières ne sont pas échangées
10:04mais vendues.
10:06Les députés cherchent à savoir
10:08à qui profite le crime.
10:10C'est une copie
10:12des infos rassemblées
10:14pour la commission d'enquête parlementaire
10:16quand les députés locaux
10:18ont essayé d'enquêter
10:20sur l'ensemble des machinations
10:22qui se sont produites.
10:30Aux questions de la commission,
10:32on voit bien la fraude conçue
10:34pour permettre à quelqu'un de s'enrichir.
10:40Et ils ont accusé Poutine
10:42de machinations illégales
10:44portant sur des centaines de millions de dollars.
10:46C'était des sommes énormes.
10:52La commission estime alors
10:54le montant des sommes fraudées
10:56à 900 millions de dollars.
10:58Ses conclusions sont sans appel.
11:00L'analyse comparée
11:02des prix indiqués dans l'accord
11:04témoigne du caractère criminel
11:06des conditions de cet accord.
11:08Poutine refuse de présenter
11:10tout un ensemble de documents
11:12dans l'intention de cacher la vérité
11:14sur la situation des affaires.
11:16Quelle est l'implication réelle
11:18de Vladimir Poutine dans cette fraude ?
11:20L'a-t-il couverte ou l'a-t-il organisée ?
11:22Un document
11:24joint à l'enquête des députés
11:26prouve que Vladimir Poutine est directement impliqué.
11:28C'est cette licence d'exportation
11:30de bois qu'il a lui-même signée
11:32alors qu'il n'en avait ni le droit
11:34ni le pouvoir.
11:38On voit bien que c'est le camarade Poutine
11:40qui a autorisé ce marché.
11:42On voit sa signature et son nom ici.
11:44Il l'a fait activement.
11:46Et cela lui était agréable
11:48car à cette époque,
11:50obtenir la signature
11:52d'une personne aussi importante
11:54sur le moindre papier,
11:56c'était absolument impossible sans payer.
12:04Et dans ces cas-là,
12:06la mairie pouvait remarquer
12:08qu'il y avait les enveloppes
12:10et même des valises pleines d'argent
12:12qui circulaient.
12:14Car pour ce type de service,
12:16il fallait payer en cash.
12:18L'enquête parlementaire
12:20est transmise à Moscou.
12:22L'administration accuse réception
12:24et préconise que Vladimir Poutine
12:26soit écarté.
12:28Il doit être démis de ses fonctions
12:30et ne doit plus se voir confié
12:32de responsabilités publiques.
12:34De suite, Vladimir Poutine
12:36reste adjoint de Saint-Pétersbourg.
12:44Commettre un crime pareil
12:46n'est possible qu'avec le soutien
12:48du sommet des services de l'Etat.
12:50Et les gens qui ont commis cela,
12:52dont le camarade Poutine,
12:54avaient compris que toutes ces affaires
12:56seraient couvertes.
12:58L'affaire, transmise à la justice,
13:00est enterrée.
13:02La police locale est curieuse.
13:06Au début des années 90,
13:08Andrey Zhikov est inspecteur
13:10à la brigade financière de Saint-Pétersbourg.
13:12Avec trois de ses collègues,
13:14il commence à enquêter discrètement
13:16sur Vladimir Poutine.
13:22Voilà ma carte de flic ordinaire.
13:24Inspecteur en chef
13:26au département des affaires économiques
13:28et de la corruption.
13:30Dans cette enquête,
13:32les policiers sont soutenus
13:34par le ministère de l'Intérieur russe
13:36qui leur fournit une carte spéciale.
13:38Et voici ma carte quand nous enquêtions
13:40sur l'affaire criminelle de Poutine.
13:42On nous a donné cette carte spéciale
13:44et c'était pour que l'on ne nous pose pas de questions
13:46car si l'on disait que l'on enquêtait sur lui,
13:48l'équipe aurait été dissoute en 24 heures.
13:50Après huit années de travail,
13:52les enquêteurs accusent Vladimir Poutine
13:54d'avoir mis en place un système criminel.
13:57Et qu'avez-vous trouvé sur Poutine ?
14:00Qu'avons-nous trouvé ?
14:02Une société criminelle, on a trouvé.
14:04Pratiquement toute la mairie de Saint-Pétersbourg
14:06était transformée en société du crime.
14:08En particulier
14:10ceux qui étaient dirigés par Vladimir Poutine.
14:14A l'époque, on donnait des pots de vin en appartement
14:16et pour cela, ils avaient créé une société
14:18qui permettait de faire participer
14:20beaucoup de monde à la corruption.
14:22Les chefs du gouvernement,
14:24les chefs de la procurature,
14:26les juges.
14:30En 1999,
14:32Andrey Zhikov est licencié de la police de Saint-Pétersbourg.
14:34L'enquête est enterrée.
14:38Ce que les policiers avaient également découvert,
14:40c'est que pour asseoir son emprise
14:42sur la ville et s'enrichir,
14:44Vladimir Poutine aurait aussi collaboré
14:46avec la mafia.
14:50Dans le Saint-Pétersbourg des années 90,
14:52le chef de la mafia s'appelle Gennady Petrov.
14:54L'homme est incontournable.
14:56Tous ceux qui souhaitent faire du business
14:58passent par lui
15:00car il aurait un atout maître.
15:02Il travaillerait main dans la main avec le maire adjoint Vladimir Poutine.
15:08C'est ce que va nous raconter le yakuza
15:10Kinichi Kamias.
15:12Nous le rencontrons en Suède.
15:14Pour la première fois,
15:16ce membre du crime organisé japonais,
15:18désormais repenti, accepte de se livrer.
15:22Un spécialiste des jeux d'argent
15:24arrive à Saint-Pétersbourg pour développer
15:26le business des casinos.
15:28Ça, c'est en octobre 1992.
15:32Parmi ses associés russes,
15:34le chef de la mafia locale Gennady Petrov
15:36et son adjoint Sergei Kuzmin.
15:38Là, c'est Kinichi.
15:40Là, c'est Sergei.
15:44Et là, c'est Gennady.
15:48J'ai tout de suite vu que ce n'étaient pas des gens normaux.
15:52Ils avaient leur propre hôtel
15:54et des gardes du corps équipés
15:56comme des militaires,
15:58avec des mitraillettes pour se protéger.
16:04Ils venaient me chercher eux-mêmes
16:06à l'aéroport
16:08et parfois même avec un bus.
16:10Moi, je me demandais,
16:12pourquoi un bus ?
16:14Et Gennady me disait,
16:16parce que dans cette ville,
16:18je contrôle aussi tout ce qui touche au transport.
16:22Gennady Petrov semble contrôler
16:24de nombreux business.
16:26Quelles étaient les relations avec les autorités ?
16:30De ce que je comprenais,
16:32il contrôlait tout.
16:34Il pouvait donc avoir toutes les autorisations.
16:36Le chef de la mafia
16:38aurait alors expliqué à Kinichi Kamiya
16:40que le véritable maître du jeu
16:42serait en réalité le maire adjoint
16:44de la ville, Vladimir Poutine.
16:46C'est lui qui autorise l'ouverture
16:48de casinos.
16:50Ils m'ont expliqué,
16:52enfin Gennady m'a dit,
16:54que les autorisations venaient de Poutine.
16:56J'étais surpris.
16:58Je me demandais pourquoi il contrôlait aussi
17:00les casinos.
17:04Peut-être qu'il voulait faire du business.
17:08Et Kinichi Kamiya comprend
17:10qu'entre Vladimir Poutine et Gennady Petrov,
17:12il y aurait plus que les affaires.
17:14Ce que je comprends,
17:16ce qu'ils m'ont dit,
17:18ils étaient amis avec Poutine alors ?
17:22Oui, c'est ce qu'il m'a dit.
17:26Vladimir Poutine,
17:28ancien du KGB,
17:30protégé du maire et de Moscou,
17:32règne en maître sur Saint-Pétersbourg.
17:38En 1996, le président Boris Yeltsin
17:40lui demande de le rejoindre à Moscou.
17:44Vladimir Poutine devient alors
17:46député du Kremlin.
17:48Et deux ans plus tard,
17:50il est nommé directeur du FSB,
17:52le nouveau nom du KGB.
17:54Son rôle ?
17:56Protéger Boris Yeltsin et sa famille,
17:58accusés de corruption.
18:02Pour moi, le retour dans les organes de sécurité,
18:04c'est le retour dans ma chère maison.
18:10Le 31 décembre 1999,
18:12acculé, Boris Yeltsin démissionne
18:14et nomme Vladimir Poutine président par intérim.
18:18Chers compatriotes,
18:22je viens de recevoir la charge
18:24de chef de l'État.
18:28Le nouveau maître du Kremlin
18:30signe immédiatement son premier décret,
18:32une immunité totale
18:34pour son prédécesseur et sa famille.
18:38Le président, quittant son poste,
18:40ne peut faire l'objet d'une enquête administrative
18:42ou d'une enquête judiciaire.
18:44Il ne peut être ni retenu, ni arrêté.
18:48Signé, Vladimir Poutine.
18:52Le règne de Vladimir
18:54Vladimirovitch Poutine vient de commencer.
18:56En aurait-il profité
18:58pour entretenir ses relations
19:00et continuer à faire du business ?
19:06Officiellement,
19:08Vladimir Poutine, président,
19:10est un chantre de la lutte anticorruption.
19:14Nous étudions aujourd'hui la question
19:16du perfectionnement de notre système anticorruption.
19:18Aujourd'hui, je dois dire que nos lois
19:20et nos pratiques anticorruption
19:22sont au niveau des standards mondiaux.
19:28Mais à en croire Sergei Kolesnikov,
19:30ce ne serait qu'une façade.
19:32En 2010,
19:34cet homme d'affaires a dû quitter
19:36précipitamment la Russie.
19:40Un jour, j'ai appris qu'un proche de Poutine
19:42voulait me piéger
19:44en mettant de la drogue dans ma voiture
19:46pour me faire envoyer en prison.
19:48Qu'avez-vous fait alors ?
19:52C'était très simple.
19:54J'ai pris mon portefeuille,
19:56je suis monté dans un avion
19:58et je suis parti.
20:00Depuis, il change régulièrement de pays
20:02pour donner ses rendez-vous.
20:04Cette fois, c'est à Vilnius,
20:06la capitale de la Lituanie.
20:08Ici,
20:10il se sent en sécurité.
20:12Dans sa chambre d'hôtel,
20:14il nous fait écouter un enregistrement
20:16réalisé au cours d'une réunion avec ses associés,
20:18une des dernières.
20:20C'était en 2009 à Saint-Pétersbourg.
20:22Il dirigeait alors une entreprise
20:24de matériel médical aux résultats florissants.
20:28C'était une réunion de travail.
20:30On était tous les trois avec mes associés.
20:32On analyse les résultats financiers de l'entreprise.
20:38Selon Sergei Kolesnikov,
20:40l'entreprise comptait un actionnaire caché,
20:42Vladimir Poutine.
20:44Grâce à lui,
20:46l'entreprise florissante aurait reçu
20:48de nombreuses commandes publiques,
20:50avec à la clé des bénéfices conséquents
20:52réclamés par un certain Mihaïl Ivanovitch.
20:56De quel argent parle-t-on ?
20:58Notre argent ou celui de Mihaïl Ivanovitch ?
21:00Mihaïl Ivanovitch.
21:02L'argent de Mihaïl Ivanovitch,
21:04c'est 439 968 000 ?
21:06L'argent de Mihaïl Ivanovitch ?
21:08Qui est Mihaïl Ivanovitch ?
21:10Mihaïl Ivanovitch.
21:12Ce surnom pour nous,
21:14c'est Poutine.
21:16Pourquoi un surnom ?
21:18Pour que nous puissions parler
21:20sans nommer un nom connu.
21:22Pour être plus libre de discuter.
21:24Et ne pas attirer l'attention
21:26sur ce dont nous parlions.
21:30Ce jour-là,
21:32les associés de Sergei Kolesnikov
21:34ont annoncé l'inversement
21:36de l'ensemble des bénéfices,
21:38plus de 450 millions d'euros
21:40à leur associé caché,
21:42Vladimir Poutine.
21:44Inversement illégal,
21:46la fonction publique de Vladimir Poutine
21:48l'empêche de toucher
21:50de l'argent d'une entreprise privée.
21:52Cet argent,
21:54selon Sergei Kolesnikov,
21:56Vladimir Poutine l'aurait utilisé
21:58pour construire ce gigantesque palais
22:00au bord de la mer Noire.
22:02Bien éloigné de la modestie
22:04affichée par Vladimir Poutine
22:06dans sa dernière déclaration de patrimoine officiel.
22:08Le président russe
22:10n'y déclare qu'un terrain
22:12de 1500m2,
22:14un appartement de 77m2,
22:16un petit garage,
22:18deux vieilles voitures soviétiques
22:20et une Lada Niva, avec sa remorque.
22:26Sergei Kolesnikov a déjà accusé
22:28publiquement à plusieurs reprises
22:30Vladimir Poutine d'enrichissement illégal.
22:32Il n'a jamais été attaqué en justice.
22:38Vladimir Poutine, président,
22:40n'aurait donc pas coupé avec ce genre de pratiques.
22:44Qu'en est-il de ces anciennes relations ?
22:48Particulièrement avec Gennady Petrov,
22:50le chef de la mafia de Saint-Pétersbourg.
22:54Le 14 juin 2008,
22:56ce dernier et ses proches sont arrêtés en Espagne,
22:58sur les îles Balear.
23:06La police
23:08vient les chercher dans son immense villa,
23:10qu'il avait faite construire avec vue plongeante sur la mer.
23:18Pablo Muñoz,
23:20un journaliste d'investigation espagnole,
23:22a couvert cette arrestation.
23:28C'est une construction
23:30vraiment magnifique.
23:32La superficie est énorme.
23:34Il y a des centaines
23:36de mètres carrés
23:38et l'emplacement
23:40exceptionnel.
23:42C'est la maison d'un seigneur,
23:44d'un numéro un.
23:48Sa puissance, Gennady Petrov
23:50en faisait la démonstration côté rue.
23:54C'est vraiment le genre
23:56de manières russes qui ont beaucoup d'argent
23:58et qui veulent le montrer.
24:00Il suffit de voir les colonnes.
24:02Ils ne veulent pas seulement
24:04avoir de l'argent,
24:06ils veulent que cela se sache.
24:10Trains de vie fastueux,
24:12mais aucun revenu déclaré.
24:14En 2007, la justice espagnole
24:16commence à s'intéresser à Gennady Petrov.
24:18Le chef mafieux est mis sur écoute
24:20et sous surveillance.
24:22L'opération Troïka est lancée.
24:26Regardez dans cet arbre.
24:28Les enquêteurs y ont placé
24:30une petite maison pour les oiseaux.
24:32Mais dedans,
24:34il n'y avait rien pour les oiseaux.
24:36Juste une caméra de surveillance
24:38qui enregistrait
24:40les allées et venues
24:42de Petrov et de sa famille.
24:44Ils ont surnommé la caméra
24:46le nid du coucou.
24:48Petrov n'a jamais su
24:50qu'elle faisait l'objet d'une enquête.
24:52Parmi les procureurs
24:54à l'initiative de cette enquête,
24:56José Grinda.
24:58Dans les écoutes téléphoniques
25:00qu'il a ordonnées,
25:02il découvre stupéfait
25:04l'ampleur des liens
25:06entre la mafia russe
25:08et le gouvernement de Vladimir Poutine.
25:10Il accepte d'en parler
25:12devant une caméra
25:14pour la première fois.
25:16Quand vous lancez l'enquête,
25:18qu'est-ce qui vous surprend
25:20Monsieur Petrov parle
25:22avec certains hommes politiques
25:24et certains fonctionnaires.
25:26Ensuite, il y a des conversations
25:28dans lesquelles ils évoquent
25:30les intérêts de Petrov en Russie.
25:32Et il parle sur un ton
25:34qui n'est pas un ton amical
25:36mais plutôt un ton pour
25:38obtenir des résultats
25:40de l'influence
25:42de ces personnes publiques.
25:44Pour moi,
25:46c'est ce que l'on appelle
25:48un trafic d'influence.
25:50Un trafic d'influence
25:52qui aurait notamment lieu
25:54entre le chef de la mafia
25:56Gennadiy Petrov
25:58et Tolik,
26:00autrement dit
26:02Anatoly Serdyukov,
26:04le ministre de la défense
26:06de Poutine.
26:08C'était une relation
26:10très intime.
26:12Ce n'est pas comme s'ils se connaissaient
26:14à peine.
26:16Ce dont nous sommes sûrs
26:18c'est que Petrov
26:20entretenait une relation
26:22de supériorité hiérarchique
26:24vis-à-vis de Serdyukov.
26:26Peut-être pas hiérarchique
26:28mais en tout cas
26:30de supériorité.
26:32Dans les conversations,
26:34dans la façon de parler,
26:36Serdyukov est clairement
26:38en dessous de Petrov.
26:40Des liens entre le chef mafieux
26:42Gennadiy Petrov
26:44et un ministre proche
26:46de Vladimir Poutine.
26:48Mais celui-ci
26:50pourrait aussi figurer en personne
26:52dans les conversations enregistrées
26:54grâce à un surnom
26:56qui revient régulièrement
26:58dans les écoutes,
27:00celui de Premier.
27:02Comme dans cette conversation
27:04entre Gennadiy Petrov
27:06et son fils Anton
27:08où le Premier
27:10semble avoir la main
27:12sur tous les types de business.
27:14Le 26 novembre 2007,
27:16à 9h06,
27:18Anton Petrov appelle son père Gennadiy.
27:20Petrov lui explique
27:22qu'il a vu le Premier
27:24au sujet des avions.
27:26Le Premier est prêt à aider
27:28à la fois sur le dossier des avions
27:30mais aussi pour l'éther
27:32et le business de l'électricité.
27:34Quand nous lui demandons
27:36le procureur botte en touche
27:38sourire au bord des lèvres.
27:40Dans quelles circonstances
27:42est évoqué le nom Premier
27:44et qui évoque-t-il ?
27:46Je ne sais pas,
27:48je ne m'en souviens pas.
27:50Mais il tient
27:52à nous montrer rapidement
27:54ce document manuscrit.
27:56Cela a été trouvé
27:58au domicile de monsieur Untoria,
28:00avocat de Petrov
28:02et qui est aussi sur le banc des accusés.
28:04Pour monsieur Poutine,
28:06terrain sur Malaga,
28:08pas acheté.
28:10On ne sait pas ce que cela veut dire.
28:20Selon nos informations,
28:22les enquêteurs auraient la conviction
28:24que c'est bien Vladimir Poutine
28:26qui se cacherait derrière le surnom de Premier
28:28utilisé par Gennadiy Petrov.
28:30Relâché par l'Espagne
28:32dans l'attente de son procès,
28:34le chef mafieux vit aujourd'hui
28:36tranquillement en Russie,
28:38protégé par le gouvernement russe
28:40qui refuse de l'extrader.
28:48Ce trafic d'influence,
28:50d'autres en auraient été témoins
28:52au plus haut niveau.
28:56Vladimir Milov a été ministre adjoint
28:58de l'économie de Vladimir Poutine
29:00depuis 2000 à 2002.
29:02Selon lui, sous l'influence
29:04du maître du Kremlin,
29:06la Russie s'est transformée en kleptocratie.
29:12Il a établi un contrôle total
29:14des biens et des revenus
29:16dans les industries principales.
29:20Et il a fait cela avec les gens
29:22de son cercle proche
29:24et certains dont la rumeur dit
29:26qu'ils sont connectés
29:28à des groupes de crime organisés
29:30de Saint-Pétersbourg.
29:36Pour moi,
29:38c'est du crime organisé en soi
29:40car c'est une chose criminelle
29:42pour des bureaucrates de pouvoir
29:44contrôler le cash flow.
29:48Ils reçoivent tous les contrats d'État,
29:50les financements,
29:52ils inventent même
29:54des projets spécifiques
29:56absolument inutiles.
29:58Peut-on dire que Poutine
30:00est le parrain ?
30:02Absolument, il contrôle tout personnellement.
30:04Ainsi,
30:06depuis que Vladimir Poutine est au pouvoir,
30:08ses plus proches amis,
30:10surnommés la bande de Saint-Pétersbourg,
30:12auraient été récompensés.
30:14Comme son conseiller juridique
30:16à la mairie de Saint-Pétersbourg,
30:18Dimitri Medvedev, devenu premier ministre
30:20et même président pendant quelques années.
30:22Ou son secrétaire à la mairie,
30:24devenu patron de Rosneft,
30:26la plus grande entreprise pétrolière russe.
30:28Il y a aussi
30:30les frères arcadiers Boris Rotenberg
30:32amis de judo de Saint-Pétersbourg,
30:34bénéficiaires de nombreuses commandes d'État
30:36et aujourd'hui multimilliardaires.
30:40Ce vieil ami,
30:42devenu président de Rossiya,
30:44la banque de l'élite russe.
30:46Quant à un autre,
30:48Nikolai Shamalov, ancien du KGB,
30:50en est devenu l'actionnaire principal.
30:52Quant à son fils,
30:54Kirill Shamalov, il a été promu
30:56plus jeune milliardaire de Russie
30:58en devenant miraculeusement actionnaire
31:00de la compagnie pétrolière russe Sibourg
31:02juste après son mariage avec Yekaterina,
31:04la fille aînée de Poutine.
31:08Un gendre milliardaire
31:10qui pourrait servir de prête-nom à Vladimir Poutine
31:12pour mettre à l'abri
31:14une partie de son patrimoine.
31:18Souvenez-vous,
31:20la demeure de luxe
31:22au bord du golfe de Finlande,
31:24gardée 24h sur 24 par les services secrets russes,
31:26elle serait exclusivement occupée
31:28par Vladimir Poutine.
31:30Mais officiellement,
31:32le propriétaire du domaine,
31:34c'est Sibourg, la compagnie de gaz
31:36détenue par Kirill Shamalov.
31:38Un gendre accommodant
31:40que l'on retrouverait derrière d'autres biens de luxe
31:42qui pourraient appartenir en réalité
31:44au président russe.
31:50Biarritz, dans le sud de la France.
31:56Au-dessus de la plage Chambre d'Amour,
31:58perchée sur la falaise,
32:00une des plus belles villas de la côte.
32:02300 mètres carrés,
32:042000 mètres carrés de terrain,
32:06elle est estimée
32:08aux alentours de 4 millions d'euros.
32:12Pierre Hafner est militant anticorruption.
32:14Cette maison,
32:16il s'y intéresse depuis que des russes
32:18s'y sont installés il y a une dizaine d'années.
32:38Un propriétaire qui se cache de la vue des voisins
32:40et qui dissimule son identité.
32:48Il n'y a rien inscrit.
32:50Les volets sont fermés.
32:52La villa n'est pas habitée
32:54pour le moment.
32:56Pour découvrir l'identité du propriétaire,
32:58l'homme a mené son enquête.
33:00J'ai rencontré des artisans
33:02qui sont venus travailler ici.
33:04L'homme m'a dit, mais j'ai travaillé pour Poutine ici.
33:06Et il m'a dit, ils m'ont payé tout en liquide.
33:08Et vous ne trouverez rien sous le nom de Vladimir Poutine.
33:10Rien sous le nom de Vladimir Poutine.
33:12Mais sur les documents
33:14fournis par l'état français,
33:16le propriétaire de cette villa
33:18est Kirill Shamalov,
33:20le gendre du président russe.
33:22Mais le proche
33:24sur lequel s'appuie le plus Vladimir Poutine
33:26est un ami de longue date.
33:32En avril 2016,
33:34éclate le plus grand scandale financier
33:36des dernières années,
33:38les Panama Papers.
33:40Plus de 11 millions de documents confidentiels
33:42issus du cabinet d'affaires
33:44panaméen Mossack Fonseca.
33:46Tous racontent la même chose.
33:48La création de offshore
33:50dans des paradis fiscaux,
33:52avec un but, blanchir l'argent
33:54de la fraude fiscale ou de la corruption.
33:58Au banc des accusés,
34:00Sergei Roldugin, l'un des plus célèbres
34:02musiciens russes,
34:04mais aussi parrain de la seconde-fille
34:06de Vladimir Poutine,
34:08n'est pas un ami depuis l'enfance.
34:10Sa signature figure sur des documents
34:12ayant permis de cacher
34:14plus de 2 milliards de dollars au Panama.
34:16S'agit-il de sa fortune
34:18personnelle ou aurait-il
34:20accepté de dissimuler l'argent
34:22de son ami d'enfance Vladimir Poutine ?
34:28A Saint-Pétersbourg,
34:32Sergei Roldugin
34:34vient régulièrement jouer à la Philharmonie.
34:38L'homme est connu pour sa modestie.
34:44Ida Tcharkasov est le directeur de l'établissement.
34:46Pour lui, le musicien n'a rien
34:48d'un homme richissime.
34:54C'est un homme qui me semble
34:56très tranquille vis-à-vis de l'argent.
34:58Pas intéressé.
35:02Un homme, disons-le comme cela,
35:04qui ne se comporte et ne vit pas
35:06comme quelqu'un qui aurait 2 milliards de dollars.
35:12Quand il vient à la Philharmonie,
35:14il me demande à l'avance par téléphone
35:16car il conduit lui-même
35:18de lui réserver une place de parking
35:20si c'est possible.
35:22Un milliardaire se comporte autrement.
35:26Mais en revanche,
35:28il a été le témoin direct de l'amitié
35:30entre Sergei Roldugin et Vladimir Poutine.
35:32Il était et reste un ami
35:34de Vladimir Vladimirovitch Poutine.
35:38Je les ai vus ensemble une fois
35:40à la cérémonie en l'honneur d'un musicien
35:42il y a 4 ans à la Philharmonie.
35:46Ils étaient invités tous les deux.
35:48On les voyait ensemble.
35:52On voyait que c'étaient des proches.
36:02Alors le président russe,
36:04aurait-il utilisé l'amitié qui le lie au musicien
36:06pour s'en servir de prête-nom
36:08et ainsi cacher sa fortune personnelle ?
36:14Nous tentons de joindre Sergei Roldugin.
36:24Je suis journaliste de la télévision française.
36:26Il serait possible de parler à Sergei Pavlovitch Roldugin ?
36:32C'est pas le bon numéro.
36:34C'est la réponse systématique
36:36faite aux journalistes étrangers.
36:40Mais devant les journalistes russes,
36:42sur la première chaîne nationale,
36:44l'homme a tenté de se justifier.
36:46Son explication sur les 2 milliards de dollars,
36:48des dons à but éducatif
36:50obtenus auprès de mécènes.
36:56L'apprentissage de la musique
36:58est très cher et très individualisé.
37:00La prise en charge des musiciens coûte très cher.
37:04Alors je demande de l'argent à mes amis.
37:06Et sans doute je finis par les énerver
37:08à force de leur demander
37:10de participer financièrement à mes projets.
37:14Mais ça marche pas mal.
37:16Et à l'en croire,
37:18il n'a aucun problème à justifier
37:20l'utilisation des fonds.
37:24Les sommes qui sont à moi,
37:26je sais où ça va.
37:28J'ai montré les instruments que j'achète.
37:30L'instrument 1, l'instrument 2,
37:32les 4 pianos que je viens d'envoyer
37:34à Sochi, dans une école de musique.
37:40Cette version des faits,
37:42les journalistes russes qui ont travaillé
37:44sur les Panama Papers n'y croient pas.
37:48À Moscou,
37:50au siège de Novaya Gazeta,
37:52un des derniers journaux russes indépendants,
37:54nous retrouvons Roman Shlenov.
37:56Pour lui,
37:58l'explication musicale
38:00sonne faux.
38:06En réalité,
38:08cette réponse n'est pas sérieuse.
38:122 milliards de dollars,
38:14ça ne correspond pas
38:16aux quelques instruments qu'il a ramenés
38:18de l'étranger.
38:22Avec 2 milliards de dollars,
38:24il aurait inondé le pays
38:26d'instruments de musique.
38:28Et il ne voit qu'un seul bénéficiaire
38:30possible.
38:32La question se pose
38:34de qui contrôle exactement les moyens.
38:38Et qui a besoin de Roldogin
38:40pour ne pas se montrer
38:42et ne pas montrer que ses moyens sont à lui.
38:44La première idée qui vient,
38:46c'est le président Riffes.
38:50Eh bien, c'est très dur de le prouver,
38:52c'est un ancien des services secrets.
38:54Il ne doit pas figurer sur les documents.
38:56Un fonctionnaire russe intelligent
38:58ne laisse jamais sa signature.
39:00Sur le moindre dossier, pour cela,
39:02il fait appel à une personne de confiance,
39:04un ami proche ou un lointain de la famille.
39:08Il reste tout de même une question.
39:10Pourquoi accumuler autant d'argent ?
39:14Je ne sais pas pourquoi un homme
39:16veut contrôler toutes ses ressources financières.
39:18Je ne sais vraiment pas
39:20à quoi c'est destiné.
39:22Au final,
39:24et quel est le rôle de son entourage ?
39:30Cette question,
39:32nous l'avons posée au maître du Kremlin
39:34comme une trentaine d'autres.
39:38Êtes-vous le bénéficiaire final
39:40de l'argent des Panama Papers ?
39:42Avez-vous demandé à M. Roldogin
39:44de signer pour vous des documents ?
39:46Quelle est la destination de l'argent ?
39:48Sans réponse.
39:52Nous devons nous contenter de la version
39:54donnée par Vladimir Poutine
39:56sur la chaîne pro-gouvernementale
39:58Russia Today en avril 2016.
40:00Selon le président russe,
40:02Sergei Roldogin est un homme honnête,
40:04tout comme lui.
40:06Plus il y aura de gens comme lui,
40:08mieux ce sera.
40:10Et je suis fier d'être son ami.
40:12Il construit de la chose.
40:14Un ami du président russe,
40:16sans doute ça doit avoir à faire
40:18avec de la corruption.
40:20Mais quelle corruption ?
40:22Il n'y a aucune corruption.
40:26Rien à cacher donc.
40:28Pourtant,
40:30depuis plusieurs années,
40:32dès qu'une personne s'apprête à montrer
40:34les preuves de la corruption de Vladimir Poutine,
40:36du gouvernement ou des oligarques,
40:38le Kremlin n'hésiterait pas
40:40à la menacer, voire la sacrifier.
40:44La menace de mort.
40:48L'homme d'affaires,
40:50William Browder,
40:52vit avec, en permanence.
40:56Ce soir-là, à Londres,
40:58il organise une cérémonie d'hommage
41:00à Sergei Magnitsky.
41:04Sergei Magnitsky
41:06était mon avocat.
41:08Il a été tué car son crime
41:10est d'avoir exposé la corruption du système Poutine.
41:12Quand j'ai eu la nouvelle
41:14le 17 novembre 2009 au matin,
41:16j'ai eu le cœur brisé.
41:18Et ça a changé ma vie.
41:28En 2009,
41:30après deux années d'enquête,
41:32Sergei Magnitsky vient de prouver
41:34que de hauts responsables russes
41:36ont volé 250 millions de dollars
41:38lors de l'expropriation illégale
41:41Il informe la justice russe
41:43de ses découvertes.
41:45La réplique est immédiate.
41:47L'homme est arrêté pour faute fiscale
41:49et emprisonné.
41:51Il a été arrêté
41:53et mis en détention préventive.
41:55Puis torturé
41:57pour qu'il retire son témoignage
41:59contre les officiels du gouvernement.
42:06Il était dans une cellule
42:08sans fenêtre
42:10en décembre à Moscou
42:12où il fait froid à mourir.
42:16Il était plus résistant
42:18qu'il ne le pensait
42:20et il a refusé
42:22de signer une confession
42:24et de se parjurer.
42:28Il a été battu à mort de nuit
42:30par huit gardes.
42:32Il avait 37 ans,
42:34une femme et deux enfants.
42:39Pour comprendre pourquoi son avocat
42:41gênait tant les autorités russes,
42:43William Browder se lance dans une enquête
42:45avec un but, retrouver les 250 millions
42:47de dollars volés grâce à l'expropriation.
42:51Au bout de sept ans,
42:53se dessine enfin le circuit de l'argent
42:55au travers de dizaines de sociétés offshore
42:57jusqu'à l'un des bénéficiaires,
42:59Sergei Roldugin,
43:01ami d'enfance de Vladimir Poutine.
43:04C'est le flux d'argent
43:06que Sergei Manitsky a découvert
43:08et la raison pour laquelle
43:10il a été tué.
43:12L'argent passe par des banques russes,
43:14des banques moldaves,
43:16jusqu'à arriver au compte de Roldugin,
43:18le fameux violoncelliste
43:20des Panama Papers
43:22qui est l'ami d'enfance de Poutine
43:24et son prêtenant.
43:26La morale de l'affaire Manitsky
43:28est que si vous avez quelque chose
43:30que les autorités veulent voler,
43:32plus cette chose a de la valeur,
43:34plus ils mettront de moyens pour le voler.
43:36Et si vous faites quoi que ce soit
43:38pour leur barrer le chemin,
43:40alors rien ne les arrêtera,
43:42même vous tuer ou tuer vos employés
43:44et en le faisant
43:46de la manière la plus sadique possible.
43:52Décidé à venger son avocat,
43:54William Browder attaque de front Vladimir Poutine.
43:58En décembre 2012,
44:00il parvient à faire adopter par les Etats-Unis
44:02le Magnitsky Act.
44:04Cette loi permet de geler à l'étranger
44:06les biens mal acquis des officiels russes.
44:08La loi Manitsky
44:10ruine le modèle de business de Poutine.
44:12Il a travaillé dur
44:14pendant 17 ans pour voler
44:16en commettant des crimes
44:18et maintenant, avec l'argent bloqué à l'ouest,
44:20cela n'en vaut plus le coup.
44:22Il est touché au cœur
44:24de ce qui est le plus important pour lui.
44:26Conséquence pour William Browder,
44:28il serait lui-même devenu
44:30l'ennemi numéro un du Kremlin.
44:34J'ai été menacé de mort,
44:36de kidnapping,
44:38de nombreuses enquêtes criminelles sont ouvertes
44:40contre moi en Russie.
44:42J'ai été condamné à 18 ans de prison par compte humain.
44:44Les Russes veulent me tuer.
44:46Mais ils veulent me tuer de telle sorte
44:48que cela n'ait pas de répercussions
44:50pour Vladimir Poutine et pour son régime.
44:52Donc,
44:54ils doivent trouver une façon de me tuer
44:56qui ne ramène pas l'enquête vers eux.
44:58Et pour l'instant, ils n'ont pas trouvé.
45:00Ils y pensent, j'en suis sûr.
45:02Ils en parlent.
45:04Et moi, je dois les empêcher d'y arriver.
45:10L'avocat de William Browder
45:12n'est pas le seul à être tombé dans ce combat
45:14contre la corruption.
45:16En 2006, prise depuis cet hôpital londonien,
45:18une photo fait le tour du monde.
45:20Des cheveux tombés par poignée,
45:22une peau jaunie.
45:24Alexandre Litvinenko,
45:26ancien agent russe du FSB Sommers,
45:28rongé de l'intérieur
45:30dans un hôpital londonien.
45:38Sa femme Marina
45:40convainc le personnel soignant et scotlandgarde
45:42de rechercher les causes de cette maladie soudaine
45:44et inexpliquée.
45:50Quand Alexandre était hospitalisé
45:52et que je disais qu'il fallait vérifier
45:54si ce n'était pas un empoisonnement,
45:56les médecins me regardaient comme une folle,
45:58en ne comprenant pas comment un homme
46:00pouvait arriver à l'hôpital avec les signes
46:02d'un empoisonnement radioactif
46:04et que des gens aient pu vouloir le tuer.
46:06L'ancien agent du FSB
46:08enquêtait ouvertement sur les liens
46:10entre le créneau de Poutine,
46:12le crime organisé et le blanchiment d'argent
46:14en Europe.
46:16Ouvertement,
46:18c'est ici son arrêt de mort.
46:26Alexandre était bien informé
46:28et ce n'était pas bon pour Poutine.
46:30Le fait que mon mari possède
46:32des informations gênantes,
46:34qu'il était prêt à partager,
46:36ce n'était pas un homme prêt à se taire
46:38et ça, Poutine l'a compris.
46:42Le 23 novembre 2006,
46:44après trois semaines d'agonie,
46:46Alexandre Litvinenko meurt.
46:48Sa femme saisit la justice.
46:50Les conclusions de l'enquête sont formelles.
46:52Alexandre Litvinenko
46:54a été victime d'un meurtre
46:56empoisonné au polonium-210,
46:58un métal 400 fois plus radioactif
47:00que l'uranium
47:02et que seul un réacteur nucléaire
47:04peut produire.
47:08C'est du matériel radioactif
47:10qui a été utilisé
47:12et la quantité qui a été retrouvée
47:14est sans précédent.
47:18Cela veut dire que c'était un acte
47:20de terrorisme d'Etat.
47:22Qui a pu autoriser que du matériel
47:24radioactif soit transporté jusqu'à Londres
47:26et utilisé là ?
47:28Qui a donné l'autorisation ?
47:30C'est une partie importante de la question,
47:32savoir qui porte la responsabilité
47:34de cela et qui doit être puni.
47:38Pour Marina Litvinenko,
47:40l'identité des commanditaires
47:42n'a aucun doute.
47:44Elle s'appuie sur l'enquête de Scott Vanguard
47:46pour pointer du doigt Vladimir Poutine
47:48et le chef des services secrets
47:50Nikolai Patrushev.
47:54Dans l'enquête publique,
47:56quand on parle de Patrushev,
47:58le patron du FSB,
48:00ou de Poutine,
48:02il y a le terme probablement.
48:04C'est un terme juridique
48:06qui dit que ce crime
48:08n'aurait pas pu arriver sans eux.
48:10Il est accusé officiellement.
48:14Mais l'enquête est remontée
48:16jusqu'à deux anciens membres
48:18des services secrets russes
48:20qui vivent aujourd'hui en Russie
48:22protégés par le pouvoir.
48:24Comme si le crime d'Etat
48:26faisait partie du système.
48:32L'Etat russe est devenu
48:34une structure de corruption.
48:40Contre ceux qui critiquent
48:42ou qui voudraient mettre à jour la corruption,
48:46ils ont ce qu'il faut
48:48pour les faire taire.
48:50Malheureusement, c'est une réalité aujourd'hui.
48:54Ce climat de menaces,
48:56nous l'avons ressenti plusieurs fois
48:58au cours de notre enquête.
49:00Comme cet appel d'un agent du FSB,
49:02les services secrets russes,
49:04tentant de nous dissuader
49:06de poursuivre notre travail.
49:08Une autre personne
49:10a également pris contact avec nous.
49:14Il s'agit de l'homme de main
49:16d'un industriel lié au Kremlin
49:18sur lequel nous avons enquêté.
49:20Il propose de nous rencontrer,
49:22équipé de son équipe
49:24et de son équipe
49:26pour qu'on puisse
49:28s'assurer de la sécurité
49:30de l'industrie.
49:32Il s'agit de l'homme de main
49:34d'un industriel lié au Kremlin
49:36sur lequel nous avons enquêté.
49:38Il propose de nous rencontrer,
49:40équipé d'une caméra cachée.
49:42Nous lui donnons rendez-vous
49:44dans un café du centre de Moscou.
49:48Nous filmons en caméra cachée.
49:50On va faire ça comme ça.
49:52Je ne vous cite pas,
49:54vous ne citez pas, ça reste entre nous.
49:56Je ne suis personne,
49:58vous me comprenez ?
50:00Nous commençons à l'interroger
50:02sur son travail.
50:04Pourquoi ça vous intéresse ?
50:06Je ne comprends pas.
50:08Parce que nous sommes journalistes.
50:10Quels journalistes ?
50:12Si vous étiez journaliste,
50:14vous écririez sur autre chose.
50:16Vous savez ce que vous faites ?
50:18Vous voulez savoir qui vous paie
50:20et d'où vous vient l'idée à vous
50:22qui avez l'air si sympathique ?
50:26L'homme s'amène alors à changer de ton.
50:28Il devient menaçant.
50:30Même si ce n'est pas toujours agréable,
50:32il y a des moments
50:34où il faut savoir discuter.
50:38Parce que vous savez,
50:40quand il y a des choses délicates dans les films,
50:42parfois on oublie celui qui a tué.
50:44Du coup ensuite on tue celui qui a tué
50:46et c'est une préparation très difficile.
50:52Depuis notre rencontre,
50:54l'homme ne nous a jamais recontactés.
51:00Corruption généralisée,
51:02lien avec la mafia assassina,
51:04combien de temps le système Poutine
51:06peut-il encore durer ?
51:08Rendra-t-il un jour des comptes ?
51:12Aujourd'hui,
51:14il pense à sa propre survie
51:16et à la survie de ses amis
51:18au jour le jour.
51:20Il fait ce qui est nécessaire
51:22aujourd'hui pour survivre
51:24jusqu'au jour suivant.
51:26C'est la Russie à laquelle nous faisons face
51:28et c'est pour cela que c'est si difficile
51:30pour nous de comprendre ce qui se passe.
51:34Historiquement,
51:36je pense qu'il est déjà en train
51:38de prendre la sortie.
51:40La question est combien de temps
51:42il va pouvoir tenir le pouvoir.
51:44Beaucoup de gens vont vouloir le poursuivre en justice.
51:50C'est la raison pour laquelle il veut rester président de la Russie
51:52car il comprend que moi
51:54et beaucoup d'autres victimes de ces crimes
51:56vont vouloir le juger pour ces crimes.
52:02Dans dix jours, quand Vladimir Poutine sera réélu
52:04au premier tour d'une élection jouée d'avance,
52:06il gagnera six années supplémentaires
52:08de pouvoir absolu, synonyme d'immunité.

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