Ça vous regarde - Eurodéputés RN : le procès d'un système

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Grand témoin : Caroline Fourest, directrice du journal « Franc-Tireur » et autrice de « Le Vertige MeToo » (Grasset)

GRAND DÉBAT / Eurodéputés RN : le procès d'un système

« Le récap » par Bruno Donnet

Le procès des assistants parlementaires des eurodéputés RN débute lundi 30 septembre 2024. L'ancien Front National est accusé de détournement de fonds publics. En 2014, 24 eurodéputés RN ont été élus et sont aujourd'hui accusés d'emplois fictifs. Une partie de leurs collaborateurs, embauchés à l'aide des 23 000EUR alloués par le Parlement Européen, aurait en réalité directement travaillé pour le parti. Pour contrecarrer la justice, les assistants parlementaires auraient ensuite produit des faux documents, comme des revues de presse antidatées. Des preuves accablantes ont été révélées par Libération et Mediapart, mettant en cause des figures phares du parti, telles que Jordan Bardella, Louis Aliot ou Julien Odoul. Marine Le Pen risque jusqu'à un an d'emprisonnement, 1 million d'euros d'amende et 5 ans d'inéligibilité. Quel sera l'impact de ce procès sur son agenda politique ? Les électeurs du RN seront-ils sensibles à cette affaire ?

Invités :
- Camille Vigogne Le Coat, grand reporter au service France du « Nouvel Obs » et autrice de « Les rapaces » (Les Arènes),
- Jean-Sébastien Ferjou, fondateur du site d'information « Atlantico »,
- Stéphane Zumsteeg, directeur du département opinion à l'institut de sondage Ipsos,
- En Skype : Valérie de Senneville, grand reporter au journal « Les Echos ».

GRAND ENTRETIEN / Caroline Fourest : #MeToo, faut-il séparer l'oeuvre de l'homme ?

À la fois réalisatrice, journaliste et féministe, Caroline Fourest plaide pour l'épanouissement du mouvement #MeToo tout en dénonçant les abus et excès qu'il peut engendrer. « Il m'est insupportable de voir ce nouveau pouvoir MeToo être invoqué pour en abuser, opprimer ou tyranniser » argue-t-elle. En revenant sur les exemples les plus frappants et ceux passés sous le radar des médias, l'autrice tente de « ne pas enfermer dans le même sac MeToo, sans esprit de nuance ni graduation, des accusations aussi graves que l'inceste, le viol, le harcèlement au travail, et des accusations plus légères telles qu'une proposition sexuelle déplacée ou une relation asymétrique ». Un exercice qui soulève de nombreuses questions : comment distinguer le vrai « MeToo » du faux ? Comment trouver un équilibre après le vertige ? Comment traiter ce tourbillon ? Que faire de cette émotion collective ?

Grand témoin : Caroline Fourest, directrice du journal « Franc-Tireur » et autrice de « Le Vertige MeToo » (Grasset)

LA QUESTION QUI FÂCHE / Faut-il surtaxer les inconditionnels de l'avion ?

- Léa Falco, co-fondatrice de « Construire l'écologie »,
- Gérard Feldzer, ancien pilote de ligne, Président de « Aviation Sans Frontières ».

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé p

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Transcription
00:00Bonsoir et bienvenue dans ça vous regarde notre grand témoin ce soir vous la reconnaissez c'est
00:09Caroline Fourest bonsoir. Bonsoir. Et merci d'être la journaliste, féministe, réalisatrice,
00:15le vertige, Me Too, chez Grasset. Votre dernier essai fait couler beaucoup beaucoup d'encre,
00:21énorme carton en librairie d'un côté et pas mal de critiques des féministes de l'autre. Rien que
00:26ça, ça mérite d'être interrogé. On va en parler. Vous ouvrez pour la première fois une
00:31conversation publique, c'est votre expression, sur les dérives du mouvement Me Too. Interview
00:36tout à l'heure dans la deuxième partie. Mais d'abord on va s'arrêter ce soir sur un procès,
00:40celui des assistants parlementaires des eurodéputés du RN. Il commence ce lundi,
00:46il va durer deux mois et parmi les prévenus Marine Le Pen, de quoi entacher ou pas sa
00:53rentrée politique en fanfare à l'Assemblée. Grand décryptage dans un instant avec nos invités
00:58sur ce plateau. Enfin, la question qui fâche ce soir, faut-il taxer les inconditionnels de
01:04l'avion ? C'est l'association Action Climat qui fait cette proposition, tir croisé avec nos
01:09chroniqueurs à la fin de cette émission. Voilà donc pour le sommaire, on y va Caroline Fourest ?
01:12Allez on y va. Ça vous regarde ? Top générique.
01:24C'est l'ombre au tableau d'une rentrée politique jusqu'ici réussie sur tous les plans. Ce lundi,
01:31Marine Le Pen se rendra au tribunal correctionnel de Paris comme 26 membres de son parti. Le procès
01:37des assistants parlementaires des députés européens du RN doit donc durer deux mois.
01:42Alors que risque-t-elle ? Que lui reproche la justice ? Et en quoi ce procès peut avoir des
01:47conséquences sur son agenda politique ? Bonsoir Camille Yvigogne Le Coat. Bonsoir. Et bienvenue
01:52sur ce plateau, grand reporter au service France du Nouvel Obs. Votre dernier livre, vous étiez venu
01:57ici nous en parler, Les Rapaces sur le maire de Fréjus, est à lire aux Arènes. Bonsoir Jean-Sébastien
02:02Ferjoux. Bonsoir. Ravi de vous accueillir. Vous êtes journaliste, fondateur du site d'information
02:07Atlantico et bonsoir Stéphane Zumsteg. Bonsoir. Bienvenue, directeur du département opinion
02:12d'Ipsos. Nous sommes également à distance ce soir avec Valérie de Senneville. Bonsoir à vous.
02:18Grand reporter justice aux échos, vous connaissez bien l'affaire. Merci d'être là. Vous aussi vous
02:23la connaissez très bien, cette affaire. Caroline Fourest, vous avez écrit dessus. Franc-tireur en
02:28fait d'ailleurs sa une cette semaine. Marine Le Pen, juge, est prévenue. On va voir la une qui
02:33s'affiche. Mais avant de vous donner... Non, pas de l'une. Là voilà, c'est mieux comme ça. La parole
02:38à tous. On a besoin d'un bon rappel des faits. C'est Bruno Donnet qui va nous le faire dans son
02:43récap qu'on accueille tout de suite.
02:47Bonsoir mon cher Bruno. Bonsoir Myriam, bonsoir à tous. Alors dans votre récap ce soir, une affaire
02:58et une affaire dans l'affaire. Oui, alors l'affaire d'abord Myriam, elle est assez simple. La justice
03:04reproche à l'ancien front national d'avoir détourné des fonds publics européens. L'effet remonte à 2014,
03:12au moment où le parti de Marine Le Pen a obtenu 24 députés au Parlement européen. A cette époque,
03:18chaque député disposait d'une enveloppe de 23 000 euros tous les mois, théoriquement, pour payer ses
03:24assistants parlementaires. Or, d'après d'anciens cadres du parti, Marine Le Pen aurait imposé à
03:30tous les élus de son groupe de détourner la plus grande part possible de ses subventions. En clair,
03:36ça veut dire chaque député a le droit de recruter un assistant pour lui, pour son travail de
03:42parlementaire, mais les autres assistants qui seront recrutés seront dédiés à autre chose. Quoi ? Le
03:49parti. On est en train de mettre en place un système d'emploi fictif. Voilà des accusations assez
03:55lourdes de la part d'Emeric Chopra qui est depuis revenu très largement sur ces déclarations.
04:00Il n'empêche, dans cette affaire, 27 membres du Front National sont accusés. Marine et Jean-Marie
04:06Le Pen, Louis Alliot, Bruno Gollnisch, Julien Oudoul ou encore l'ancien élu frontiste Nicolas
04:12Bay qui, comme la majorité des mises en cause, a toujours réfuté ces accusations. Il y a eu une
04:18période où, dans la période d'embauche des collaborateurs parlementaires, il y a peut-être
04:22eu une période de flottement, mais il n'y a pas eu d'infraction ni de volonté de commettre une
04:25infraction. Voilà, enfin, celle qui risque le plus gros dans cette affaire, c'est bien sûr Marine
04:29Le Pen. Elle encourt théoriquement jusqu'à un million d'euros d'amende, dix ans d'emprisonnement
04:35et une peine d'inéligibilité qui peut aller jusqu'à cinq ans. Voilà donc, Myriam, pour l'affaire.
04:41Et l'affaire dans l'affaire, donc. Alors l'affaire dans l'affaire, elle concerne cette fois Jordane
04:46Bardella. Le journal Libération a enquêté et révélé qu'en 2015, l'actuel président du
04:51Rassemblement National a été, durant quatre mois, l'assistant parlementaire de l'eurodéputé Jean-François
04:57Jalk. Or, d'après nos confrères, Jordane Bardella n'a jamais effectué le plus petit travail européen.
05:04Pire, il aurait même produit de faux documents pour tenter d'établir le contraire. Une affaire
05:09qui tombe mal pour celui qui a toujours défendu une conception assez personnelle du rôle des
05:15assistants parlementaires. Nous considérons, nous, que nos assistants parlementaires peuvent aussi
05:19faire de la politique. Voilà, nos assistants parlementaires européens, c'est pas des fonctionnaires,
05:23c'est pas des technocrates européens. Ils sont aussi candidats aux élections, ils sont aussi élus,
05:26ils sont aussi impliqués dans l'organisation du mouvement. Voilà, tout l'état-major du
05:31Rassemblement National se retrouve donc en très fâcheuse posture et l'affaire tombe mal, très mal,
05:36pour Marine Le Pen, elle qui, en 2004, nous avait dit ceci.
05:41Tout le monde a piqué de l'argent dans la caisse sauf le Front National et on trouve ça normal ?
05:46Nous sommes 20 ans plus tard et la justice accuse donc le parti de Marine Le Pen d'avoir détourné
05:526,8 millions d'euros d'argent public.
05:54Effectivement, c'est une somme importante. Merci beaucoup pour ce rappel d'effet, Bruno Donnet.
05:59Camille Vigogne-Lecoate, vous qui suivez Marine Le Pen pour votre journal, dans quel état d'esprit
06:05ils sont, tous ces prévenus, et Marine Le Pen au premier chef, à la veille de ce procès, à la fois
06:11le discours officiel mais aussi la coulisse que vous suivez ?
06:15Alors, officiellement, ce qu'on entend au Rassemblement National, c'est évidemment une tentative de minimiser
06:20l'importance de ce procès. On parle d'un machin, d'un serpent de mer qui revient et ses conséquences.
06:27Il y a aussi la volonté d'en faire un procès politique. On présente ça comme la volonté de réduire au silence
06:33le Rassemblement National à l'heure où il enregistre de grands succès électoraux, alors même que,
06:39on l'a très bien rappelé dans le rappel d'effet, l'enquête dure depuis 9 ans et ses faits sont évidemment très anciens.
06:46Il n'empêche que, quand on creuse un petit peu, il y a évidemment une inquiétude parce que l'enquête, elle a été très longue,
06:53elle est extrêmement documentée, étayée. Les preuves qu'il y a eu, notamment une réflexion systémique, systématique
07:02autour de cette embauche d'assistants parlementaires qui n'ont jamais, pour beaucoup, mis les pieds à Bruxelles ou à Strasbourg,
07:08les preuves, elles sont dans le dossier qui est extrêmement lourd, extrêmement fourni.
07:12Toute la question des magistrats, maintenant, ça va vraiment être d'identifier deux choses.
07:17Déjà, la nature de prouver et de réussir à prouver la nature systémique de l'organisation et l'implication,
07:27le degré d'implication de Marine Le Pen qui apparaît aux yeux de tous ceux qui connaissent bien le dossier
07:33comme la donneuse d'ordre à l'origine.
07:37Elle sera là, d'ailleurs ? Elle a décidé d'assister ?
07:39Elle a dit qu'elle se rendrait aussi souvent que son agenda politique lui laisse le temps sur les bancs
07:46et qu'elle était très fière et très heureuse d'avoir, je crois, retrouvé ses habits de juriste en tant qu'avocate de formation
07:52pour s'être plongée dans le dossier. Effectivement, je pense qu'elle montrera aux yeux des caméras et des Français
08:00celle d'une personne heureuse que la justice se rende.
08:04Dans les faits, on peut imaginer l'angoisse qui se saisit des cadres du Rassemblement national.
08:12Vous l'avez dit, une peine d'inégibilité qui va avoir des conséquences politiques.
08:18Sur 2027, peut-être, on va voir ça.
08:20Lui, Jean-Marie Le Pen, pour des raisons de santé, n'y sera pas.
08:22Valérie de Selville, vous, vous suivez le dossier de prêt.
08:25On est quand même, Bruno Donnel le rappelait, à près de 7 millions d'euros de détournement présumé.
08:31C'est donc beaucoup d'argent sur 8 ans.
08:34C'est beaucoup plus, il faut le dire, quand même, que dans l'affaire des assistants Modem de François Bayrou.
08:41Est-ce que ça peut changer quelque chose ?
08:43Oui, d'autant plus que, en fait, pour la première fois, on a une sorte de dossier miroir, si vous voulez,
08:53de cette affaire, qui est celui des assistants parlementaires du Modem.
08:58Même si les quantums ne sont pas du tout les mêmes, puisqu'on parlait d'un peu plus de 200 000 euros de détournement pour le Modem.
09:06Et là, on en est, compte tenu des remboursements, puisque Marine Le Pen, Jean-Marie Le Pen et d'autres députés ont déjà remboursé,
09:15on en est à un peu plus de 3 millions d'euros de détournement.
09:22Ça donne le sentiment, quand même, d'un procès de tout un système ORN.
09:26Vous reprenez, iriez, le mot de système ?
09:30Oui, parce que, justement, il était déjà dans l'affaire des parlementaires du Modem, le terme de système.
09:37Et, justement, il n'a pas été employé, il a été rejeté par le tribunal concernant Bayrou,
09:45parce qu'ils disent que le système n'a pas été prouvé, parce que Bayrou n'était pas au courant.
09:52Or, là, tout le dossier, comme vous le disiez tout à l'heure, tout le dossier est extrêmement bien argumenté et fourni de mails, notamment.
10:04Je pense notamment à un mail qui a été saisi demandant à Marine Le Pen
10:15« Est-ce que ça ne t'embête pas que j'aille au Parlement européen, parce que j'aimerais bien faire la connaissance de la députée auquel je suis rattachée ? »
10:22écrit l'assistant parlementaire, qui est en poste normalement depuis 4 mois.
10:29Il y a donc des mails qui ont été saisis, des comptes du trésorier qui disent qu'il va falloir faire des économies,
10:36et puis on compte sur le Parlement européen, en gros.
10:41Donc, il y a des éléments de preuves solides.
10:43D'ailleurs, on voyait, même s'il est revenu sur ses propos l'ancien député européen Imrik Chopra,
10:49de parler d'emplois fictifs pour envoyer spécial les marines turquies de Mediapart.
10:53D'un mot, Valérie de Saint-Deville, la ligne de défense des avocats du RN,
10:57on a l'impression qu'elle a pas mal varié. Là, ils assument de faire de la politique, aujourd'hui, c'est ça ?
11:02En fait, elle n'a pas tant varié que ça.
11:06Ils ont toujours dit « on fait de la politique, on n'est pas des fonctionnaires européens,
11:12et il y a une différence entre les Allemands et nous, bref, on est français ».
11:18Le problème, c'est que les règlements du Parlement européen sont les mêmes pour toutes,
11:22qu'on soit allemand, français, italien ou espagnol.
11:26C'est pas une ligne.
11:28Et en plus, les avocats ont changé, parce qu'Alexandre Varrault,
11:34qui défendait bon nombre de députés, est devenu lui-même député européen.
11:41Oui, l'avocat du RN.
11:43Merci, vous restez avec nous.
11:45Jean-Sébastien Ferjou, c'est particulier, quand même, cette ligne de défense.
11:48On ne cherche pas à dire qu'on a respecté les règles, on conteste les règles.
11:52Non, je la trouve parfaitement logique dans la position du RN.
11:56C'est pénible, ça, de contester les règles ?
11:58Ça l'est au moins devant l'opinion.
12:00Je ne pense pas que ça le soit devant un tribunal.
12:04L'opinion sait aussi que c'est un procès judiciaire.
12:06Très vraisemblablement, Marine Le Pen sera condamnée.
12:08La seule question qui se pose, vraiment, c'est « sera-t-elle inéligible ?
12:10Et surtout, aura-t-elle le temps d'être condamnée ? »
12:12En première instance, puis en appel.
12:14Parce qu'en appel, l'inéligibilité éventuelle ne serait pas suspensive,
12:20ce qui la mettrait donc en situation de ne pas pouvoir se présenter à la présidentielle de 2026.
12:25Pour bien comprendre le dossier, ce qu'elle dit, Marine Le Pen, avec ses défenseurs,
12:29c'est qu'en gros, on est ostracisé au RN,
12:31il y a un cordon sanitaire à Bruxelles, au Parlement européen,
12:35donc on fait de la politique à Paris.
12:37Parce qu'au fond, on ne peut rien faire à Bruxelles.
12:39C'est ça qu'ils disent, c'est particulier, quand même.
12:41C'est là où je trouve qu'il y a une vraie question de philosophie politique.
12:43Il y a eu d'autres affaires concernant le RN.
12:45L'affaire des faux, je trouve ça accablant,
12:47produire des faux dans une procédure judiciaire.
12:49C'est inexcusable.
12:51C'est une vraie question de philosophie politique.
12:53Est-ce qu'un député, qu'il soit d'ailleurs député au Parlement français ou au Parlement européen,
12:57est souverain ?
12:59Est-ce que c'est à lui de décider ce qu'est la nature de son activité politique ?
13:03Moi, il me semble quand même que cette affaire, elle est connue depuis longtemps.
13:05Vous aurez constaté, comme moi, que le RN a plus de députés aujourd'hui,
13:09d'ailleurs aussi plus à l'époque que le Modem,
13:11ce qui explique vraisemblablement que les quantums,
13:13les fameux chiffres que vous donniez, étaient différents.
13:15Donc elle va plaider devant les Français.
13:17C'est pour elle l'occasion de saisir les Français et l'opinion plus que la justice.
13:21Je trouve vraiment qu'il y a deux aspects dans ce dossier.
13:23Oui, oui, c'est incontestablement, très vraisemblablement d'ailleurs,
13:27à mon sens, un système.
13:29Il y a d'autres éléments que ceux qui ont été avancés par Valérie Tienneville.
13:31Un eurodéputé lui-même qui, à l'époque,
13:33alertait Marine Le Pen en disant
13:35attention, et ça, c'est dans le dossier.
13:37C'est ce qui fait la différence avec François Bayrou.
13:39Il faut rappeler que la France insoumise a aussi
13:41une affaire équivalente.
13:43Parce que derrière, il y a la question du financement.
13:45Il y a la question, oui, mais c'est là
13:47où on peut se poser la question du deux poids, deux mesures
13:49dans la manière dont la justice fonctionne.
13:51Parce que les faits datent de la même époque.
13:53Mais on voit bien qu'il y a des agendas politiques
13:55qui semblent motiver la justice plus que d'autres.
13:57Souvenez-vous, Jean-Luc Mélenchon
13:59avait eu une défense beaucoup plus offensive.
14:01Il a signé une tribune dans le journal du dimanche l'année dernière
14:03avec Lula, avec un certain nombre
14:05d'autres chefs, soit de parti,
14:07soit d'Etat, en parlant de l'offert,
14:09la manière dont la justice pouvait être
14:11instrumentalisée pour se débarrasser
14:13d'opposants politiques.
14:15Parce que derrière cette question-là, rappelons-le,
14:17il y a la question du financement de la démocratie.
14:19Est-il normal qu'un parti, peu importe que ce soit
14:21le Rassemblement national ou LFI, ne se voit pas
14:23qu'aucune banque, par exemple, ne veuille leur prêter ?
14:25Mais non, ce n'est pas une autre question.
14:27C'est un débat qui est afférent pour vous,
14:29mais ce n'est pas celui de la justice
14:31auquel elle sera confrontée lundi.
14:33C'est le débat devant l'opinion. Vous pouvez ignorer la réalité,
14:35mais ça n'empêche pas qu'il y a des millions de Français...
14:37J'ignore pas la réalité.
14:39Il y a des millions de Français.
14:41Il y a des gens plus génériques que vous, Myriam.
14:43On peut ignorer, si vous voulez, la réalité.
14:45La réalité est que les banques ne prêtent pas
14:47d'argent au RN. Il y a des parlementaires
14:49du RN qui ont vu leur compte en banque
14:51fermé par leurs banques.
14:53Il y a une vraie ostracisation.
14:55C'est dit. On a bien compris le raisonnement.
14:57Il y a une chose qui va intéresser
14:59les Français, c'est qu'est-ce qu'elle risque Marine Le Pen.
15:01Elle dit très clairement
15:03qu'à titre personnel, il n'y a pas d'enrichissement
15:05personnel. Comme François Bayrou,
15:07elle risque d'être relaxée.
15:09C'est un parti qui va être condamné,
15:11donc pas de problème sur 2027
15:13et une éventuelle inéligibilité ?
15:15Non, parce que je pense que la justice
15:17s'attache aux faits et pas aux opinions
15:19et s'attache en l'occurrence à regarder
15:21la nature du dossier. C'est parce que la justice
15:23est indépendante qu'elle travaille sur le modem,
15:25qu'elle travaille sur le RN
15:27et sur la France insoumise et qu'en fonction
15:29de la gravité des faits qu'elle trouve
15:31notamment dans les perquisitions, elle décide d'ouvrir
15:33au nom des enquêtes. En l'occurrence,
15:35concernant Marine Le Pen...
15:37Les procès, eux, sont politiques.
15:39Là-dessus, je...
15:41Je n'irai pas du tout
15:43sur ce genre de propos que je trouve
15:45dangereux, personnellement.
15:47En revanche...
15:49Elle est aussi dangereuse d'ignorer, je pense,
15:51pour la sérénité de la démocratie.
15:53Si on reste sur les faits, moi, je suis un journaliste de faits,
15:55elle est poursuivie pour le détournement de fonds publics
15:57et complicité. En gros, on va regarder
15:59quel était son degré d'implication,
16:01est-ce qu'elle était la donneuse d'ordre ou pas.
16:03Si c'est le cas, si ce que laissent
16:05dire certaines pièces du dossier
16:07est confirmé ou pas, on le verra
16:09évidemment pendant le procès, on verra aussi sa défense.
16:11Elle peut être condamnée elle-même.
16:13Elle peut être condamnée en première instance,
16:15elle peut évidemment faire appel,
16:17elle peut éventuellement avoir un pourvoi en cassation.
16:19Tout ça, c'est suspensif.
16:21La grande question, et tout le monde
16:23est en train de compiler son agenda pour regarder,
16:25est-ce qu'elle peut être condamnée...
16:27Est-ce qu'elle peut être condamnée
16:29avant 2027 ou pas et donc être
16:31latinégée ? Et apparemment, effectivement...
16:33On va avancer. Je vous donne la parole.
16:35Comment les Français regardent ça ?
16:37Est-ce que ça peut avoir un effet, pardonnez-moi,
16:39sur l'opinion ?
16:41Il va y avoir des députés connus,
16:43Julien Audoul, qui est très médiatique, qui va aussi être au procès.
16:45Vous nous disiez ça dans un instant.
16:47Valérie de Setteville, et puis je vous demanderai
16:49votre regard aussi, Caroline Foureste,
16:51sur l'ensemble de cette affaire.
16:53Je voudrais qu'on dise un mot sur l'affaire dans l'affaire.
16:55Bruno Donnet nous l'a expliqué.
16:57Est-ce que c'est pas ça,
16:59le vrai talon d'Achille aujourd'hui pour le RN,
17:01de faux documents,
17:03je mets du conditionnel, auraient été faits
17:05pour que Jordan Bardella
17:07puisse éviter d'être cité et qu'on parait
17:09comme prévenu dans cette affaire
17:11des faux assistants parlementaires à Bruxelles ?
17:13Non, mais il n'est pas prévenu,
17:15Jordan Bardella. Ce qui est sûr,
17:17c'est que
17:19cette affaire va jeter
17:21un voile de suspicion sur
17:23tous les documents que pourra
17:25produire la Défense.
17:27Beaucoup...
17:29Et puis, il risque d'y avoir
17:31des révélations lors de ce procès,
17:33parce que beaucoup
17:35de noms moins connus
17:37que M. Odule ou M.
17:39Aliot, etc.,
17:41sont prévenus. Ils sont 26.
17:4326, ça fait beaucoup.
17:4526 qui ont
17:47demandé à changer d'avocat parce que
17:49ils trouvaient que leur Défense n'était pas
17:51suffisamment assurée. Donc, je ne...
17:53je n'efface pas
17:55le fait qu'il puisse y avoir des révélations
17:57un peu fracassantes lors de l'audience.
17:59Bon, écoutez, on va essayer de suivre ça.
18:01Votre regard peut-être sur cette affaire Bardella.
18:03C'est Tristan Berthelot,
18:05le journaliste de Libération, qui en a fait
18:07un livre. Alors,
18:09il faut mettre du conditionnel, bien évidemment,
18:11mais ce qu'il raconte
18:13avec des preuves à l'appui, c'est que
18:15pour éviter, justement,
18:17d'être prévenu dans ce procès,
18:19il a, après, il aurait,
18:21après, fait des documents antidatés pour expliquer
18:23qu'il y a des revues de presse et oui,
18:25il avait bien la poste d'aide, alors qu'il était
18:27à peine 19 ans, je crois,
18:29à Paris, assistant de
18:31Philippot.
18:33En fait, je ne sais pas
18:35qui tombe de sa chaise en apprenant que
18:37le RN peut s'arranger avec la réalité,
18:39la vérité et la justice et les règles.
18:41Il se trouve que
18:43moi, comme jeune journaliste, j'ai commencé à travailler
18:45sur eux en 1995, vous voyez, ça fait
18:47un petit moment, et ça
18:49fait donc 30 ans,
18:5130 ans, que je vois successivement
18:53des gens quitter ce parti
18:55et nous raconter des choses incroyables,
18:57des choses qui n'existent pas
18:59dans les autres partis politiques,
19:01c'est-à-dire un fonctionnement qu'on a appelé
19:03le front familial, ça n'est pas
19:05un parti comme un autre, c'est une
19:07famille politique, où
19:09souvent, l'argent politique
19:11est confondu avec l'argent de la famille,
19:13où la demeure familiale, par exemple,
19:15de Montretout, elle a été héritée grâce à
19:17la politique, où moi, lorsque j'écris
19:19un livre avec Fiamma Ettavener qui s'appelle
19:21Marine Le Pen démasquée,
19:23elle est la première fois
19:25candidate à une élection présidentielle,
19:27j'ai des anciens eurodéputés
19:29du Front National qui me racontent
19:31et qu'on cite, et on va à la barre devant
19:33un tribunal et on gagne sur ce point,
19:35que, par exemple, Marine Le Pen lui a demandé
19:37à un eurodéputé, Jean-Claude Martinez,
19:39d'embaucher Huguette Fatna, qui est un corps
19:41d'ailleurs cité dans cette affaire,
19:43qui ne sait pas où est Bruxelles,
19:45et ne sait pas où est Strasbourg, parce qu'Huguette Fatna,
19:47elle garde les enfants de Marine Le Pen
19:49au manoir de Montretout,
19:51et que d'ailleurs son contrat de travail, il le dira
19:53à la barre devant les magistrats, prévoit
19:55qu'elle travaille au manoir de Montretout.
19:57Il y a dans cette affaire Thierry Léger,
19:59qui est le garde du corps de la famille Le Pen,
20:01père et fille, on est bien
20:03au-delà d'une affaire comme le Modem,
20:05de quelques assistants parlementaires
20:07qui ont été un peu payés sur une enveloppe européenne
20:09pour faire un peu de politique à Paris.
20:11On est bien, bien au-delà.
20:13Alors justement, les Français vont regarder,
20:15forcément, en début de semaine, au moins le coup d'envoi
20:17de ce procès, quels peuvent être
20:19les effets en termes d'image pour Marine Le Pen.
20:21Vous avez tous parlé des risques du judiciaire
20:23qui sont énormes si elle était condamnée à une peine
20:25entraînant son inégibilité.
20:27Est-ce que Marine Le Pen, est-ce que le Rassemblement national
20:29risque aujourd'hui quelque chose d'un point de vue politique ?
20:31Pour parler clairement d'un point de vue électoral,
20:33je n'en suis absolument pas persuadé.
20:35Pourquoi ? Parce que c'est un parti antisystème
20:37qui est soutenu par une partie des Français
20:39qui sont eux-mêmes antisystèmes. Donc ça ne les dérange pas.
20:41Dans l'électorat RN, on peut trouver tout.
20:43Peut-être qu'il y aura des gens du RN qui seront scandalisés
20:45parce qu'ils vont l'entendre durant le procès,
20:47mais dans leur immense majorité, les sympathisants
20:49et les électeurs du RN, cette histoire,
20:51à minima, ne va pas les intéresser,
20:53au mieux pour le RN,
20:55va à nouveau entretenir l'idée
20:57que de toute façon, les juges rouges
20:59sont une fois en plus...
21:01Le désamour avec les juges est déjà très important.
21:03Les nouveaux électeurs, les ralliés de la dernière heure,
21:05si je puis dire...
21:07Ce qui est intéressant
21:09avec ces néovotants
21:11du Rassemblement national,
21:13c'est les raisons qui les font abandonner d'autres parties.
21:15Ces gens-là, en général, sont civiques, ont voté,
21:17se sont manifestés au début de leur vie
21:19avant de basculer dans le RN
21:21pour différents types de partis.
21:23Mais à chaque fois, ce qu'ils pensent vraiment,
21:25c'est qu'avec le RN,
21:27les choses vont changer.
21:29Tout le monde est bien conscient que le RN
21:31est victime d'ostracisme.
21:33Cette idée s'est encore plus développée
21:35avec les déclarations d'Emmanuel Macron
21:37pendant sept ans, faisant tout pour l'exclure
21:39et en assumant le fait de vouloir l'exclure.
21:41Les procès proches du RN lui en veulent énormément.
21:43On ne peut pas expliquer
21:45aujourd'hui à un militant du RN
21:47que le RN n'est pas ostracisé.
21:49En se victimisant, même ce procès peut la renforcer.
21:51C'est ça, ce que vous nous dites.
21:53C'est pour ça que ce que dit Caroline Forest
21:55est très important.
21:57Je suis pas moins un journaliste de fait
21:59que vous, et je pense que l'Obs
22:01est tout autant un journal d'opinion
22:03que n'importe quelle presse.
22:05Il faut distinguer ce que vous disiez,
22:07qu'il peut y avoir l'affaire des faux au conditionnel
22:09ou des choses qui relèvent d'une forme d'enrichissement personnel,
22:11parce que rien ne justifie
22:13de faire rémunérer sa nounou,
22:15même s'il y avait quelque chose d'équivalent
22:17concernant Mme de Sarnez.
22:19Mais ça, effectivement, c'est indéfendable.
22:21L'autre n'est pas défendable devant un tribunal.
22:23De toute façon, les magistrats sont indépendants.
22:25Ils le condamneront, Marine Le Pen,
22:27s'ils estiment devoir le faire.
22:29En revanche, la question du financement
22:31de la démocratie et aussi de la perception
22:33de cette ostracisation du parti,
22:35c'est pour ça qu'il faut savoir distinguer
22:37les choses.
22:39D'ailleurs, François Bayrou réclamait cette banque de la démocratie
22:41quand il était en campagne.
22:43Est-ce que François Bayrou, comme commissaire au plan,
22:45a produit beaucoup de choses pour la France ?
22:47S'agit-il d'un emploi fictif ?
22:49On peut aller loin dans la définition de l'emploi fictif.
22:51On parle de la même chose.
22:53Il n'y a pas de procédure judiciaire.
22:55Oui, il n'y a pas de procédure judiciaire,
22:57mais c'est une question politique.
22:59C'est pour ça que je dis que je distingue.
23:01Oui, il faut absolument condamner
23:03et montrer en quoi le RN,
23:05comme dans d'autres, comme dans un certain nombre de mairies,
23:07et vous avez travaillé sur le système de frais justes,
23:09et c'est très important que la presse
23:11soit capable de le mettre en avant.
23:13Après, ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain,
23:15parce qu'il y a quand même cette question de la démocratie,
23:17la question du financement de la démocratie.
23:19Elle est majeure.
23:21Alors, je voudrais qu'on avance,
23:23parce qu'on va essayer de voir,
23:25et je remercie Valérie de Senneville
23:27d'avoir été à distance avec nous ce soir.
23:29C'est un procès qui arrive à un moment très particulier,
23:31n'est-ce pas, Jean-Sébastien Ferjou ?
23:33C'est le moment où Marine Le Pen
23:35savoure son emprise sur le gouvernement Barnier.
23:37Alors, avant de vous entendre
23:39sur les effets politiques,
23:41peut-être pendant ces deux mois à l'Assemblée,
23:43est-ce qu'elle va être en retrait,
23:45ou au contraire, elle va essayer de déplacer
23:47le bras de fer ici à l'Assemblée
23:49en censurant plutôt que peut-être elle ne l'aurait voulu,
23:51eh bien, on va revenir sur cet alignement des planètes
23:53pour le RN avec Elsa Mondingava.
23:55Musique
23:57Musique
23:59Musique
24:01Après les élections législatives,
24:03Marine Le Pen garde le sourire.
24:05C'est une victoire différée !
24:07Mais le résultat est décevant pour le RN.
24:09Premier groupe,
24:11mais troisième force dans l'hémicycle,
24:13derrière le nouveau Front populaire
24:15et le camp présidentiel.
24:17Après un été discret,
24:19Marine Le Pen veut prendre sa revanche.
24:21Alors qu'Emmanuel Macron
24:23cherche un Premier ministre,
24:25la triple candidate
24:27à l'élection présidentielle
24:29distribue les veto
24:31contre Bernard Cazeneuve ou Xavier Bertrand.
24:33Ce sera donc
24:35Michel Barnier à Matignon,
24:37validé par le RN
24:39mais immédiatement placé sous sa surveillance.
24:41Le RN en arbitre.
24:43Rien ne peut désormais se faire
24:45sans le RN
24:47ou contre le RN.
24:49Marine Le Pen a dans son jeu
24:51une carte maîtresse
24:53qu'elle va prendre un malin plaisir à utiliser.
24:55La menace de la censure.
24:57Quand le ministre de l'Economie,
24:59Antoine Armand,
25:01écarte le RN de l'arc républicain
25:03et lui ferme sa porte,
25:05la présidente du groupe RN
25:07réplique immédiatement.
25:09Je pense que le Premier ministre
25:11doit aller expliquer à l'ensemble de ses ministres
25:13quelle est la philosophie de son gouvernement
25:15car il semblerait que certains n'aient pas encore totalement compris.
25:17Et voilà Michel Barnier
25:19qui décroche son téléphone
25:21pour la rassurer.
25:23Le RN ne cesse de montrer les muscles.
25:25Nous sommes faiseurs de Premier ministre
25:27et faiseurs de gouvernement.
25:29Mais il oublie souvent de rappeler
25:31que pour faire tomber le gouvernement,
25:33il faut 289 députés.
25:35Le RN
25:37et son allié siotiste
25:39ne sont que 142.
25:41Ce qui est intéressant
25:43dans cette séquence,
25:45c'est qu'il y a deux mois pour le budget,
25:47ça va être vraiment l'épreuve de vérité
25:49et il y a deux mois pour le procès.
25:51Comment elle va faire coïncider ces temporalités ?
25:53Est-ce qu'elle va au contraire
25:55rester un peu discrète
25:57parce qu'il y a ce procès en cours
25:59ou au contraire, elle va déplacer la bataille
26:01dans l'arène politique ?
26:03Je pense qu'elle n'a pas vraiment choisi, Marine Le Pen,
26:05la carte de la discrétion à l'Assemblée
26:07pour l'année qui vient.
26:09Elle l'a dit et répété,
26:11elle veut mettre le gouvernement sous surveillance,
26:13ça a plutôt l'air de bien se passer.
26:15J'ai plutôt tendance à dire
26:17qu'elle n'a pas forcément d'intérêt
26:19à provoquer dans sa stratégie actuelle
26:21la chute du gouvernement.
26:23Elle essaie de se présenter, on l'a vu,
26:25comme un parti responsable,
26:27un parti qui ne participe pas au chaos
26:29dans le pays
26:31et le parti de l'ordre.
26:33Si elle fait tomber ce gouvernement,
26:35ça contrecarre un peu...
26:37Mais pour vous, ces stratégies sont autonomes
26:39l'une de l'autre au printemps prochain.
26:41Mais quand Valérie de Senville nous dit
26:43qu'il y aura peut-être des éléments fracassants
26:45dans les prochaines semaines...
26:47Ça peut quand même percuter sa narration
26:49qui serait celle d'une progression
26:51ininterrompue d'un parti
26:53qui serait désormais professionnel,
26:55présentable, sans aspérité, etc.
26:57Ça la ramène quand même
26:59au parti familial,
27:01le parti avant tout
27:03machine à cash
27:05pour elle et son clan.
27:07Ça la ramène à ce qu'était le Front national
27:09et à ce qu'est encore en partie
27:11le Rassemblement national
27:13qui a changé sur certains aspects
27:15mais qui n'a absolument pas complété
27:17de la façon dont ils essayent de convaincre
27:19l'opinion publique et d'ailleurs les législatives l'ont montré.
27:21Stéphane Zumsteig ?
27:23Je pense que durant ce procès, le RN a tout intérêt
27:25à être de moins en moins neutre,
27:27bienveillant ou neutre, malveillant,
27:29comme il l'a été jusqu'à présent à l'égard du gouvernement de Barnier
27:31parce qu'il faudra bien qu'on parle d'autre chose
27:33que du procès, évidemment,
27:35et donc pour qu'on parle plus du RN...
27:37La diversion à l'Assemblée ?
27:39Dans l'Assemblée, il faudra que celui-ci
27:41soit beaucoup plus offensif, beaucoup plus critique
27:43à l'égard de Michel Barnier.
27:45On ne peut pas oublier une chose,
27:47je reviens à l'électorat du RN,
27:49ils n'ont pas voté pour des députés,
27:51pour avoir plus de députés RN,
27:53pour les députés qu'ont félicité ensuite Bruno Rotailleau
27:55en disant que c'est formidable,
27:57le ministre de l'Intérieur applique notre programme
27:59ou propose notre programme.
28:01Pour vous, la bienveillance, c'est-à-dire la non-censure,
28:03si ça dure trop longtemps, se sera portée
28:05au négatif pour Marine Le Pen ?
28:07Mais le RN est sur une ligne de crête,
28:09c'est très bien de vouloir montrer qu'il pèse dans le jeu politique
28:11et donc qu'il est responsable et qu'il ne censure pas automatiquement,
28:13bien sûr, mais il faut faire très attention
28:15à son électorat, son électorat qui est très souvent populaire,
28:17arrivent les questions budgétaires,
28:19on apprend qu'il n'y aurait pas d'hausse des impôts
28:21pour les classes moyennes
28:23ou pour les milieux populaires,
28:25mais il va y avoir des baisses drastiques
28:27dans les dépenses publiques.
28:29Et s'il y a bien un électorat qui t'en demande
28:31de dépenses d'argent public, notamment pour les services publics,
28:33c'est cet électorat du RN.
28:35Donc les occasions seront assez bonnes,
28:37au-delà de l'immigration et de l'insécurité,
28:39pour le RN de taper fort.
28:41Et je finis avec ça,
28:43le RN a besoin de temps, ça tombe bien,
28:45il a encore 10 mois, on ne peut pas le dissoudre,
28:47mais le RN doit faire oublier une chose,
28:49c'est ce résultat extrêmement décevant
28:51des élections législatives, qui n'est pas dû,
28:53contrairement à ce qu'on dit uniquement aux barrages républicains,
28:55le RN a fait la démonstration qu'il n'était pas prêt
28:57à prendre le pouvoir. Et je ne parle pas que des brebis galeuses,
28:59je parle du plan Mathieu,
29:01qui ont été pointés par la presse pour des déclarations
29:03il y a quelques années, la plupart du temps, sur les réseaux sociaux.
29:05Non, il y a eu des intermoéments
29:07sur l'abrogation de la loi retraite,
29:09la bourde des binationaux,
29:11et le fameux plan Matignon.
29:13Les Français ont quand même compris que le RN n'était pas prêt.
29:15L'objectif, maintenant, c'est de se donner du temps
29:17pour prendre le pouvoir.
29:19Donc il y a encore un travail sur la crédibilité à faire.
29:21Vous aurez le mot de la fin, Jean-Sébastien Ferjou.
29:23Comment vous voyez sa stratégie, qui peut être un peu percutée
29:25par ce procès, qui va être long ?
29:27Oui, qui va être long. Après, elle est effectivement
29:29soumise à une injonction contradictoire,
29:31parce que Marine Le Pen a essayé de jouer la respectabilité,
29:33de jouer justement la normalisation,
29:35l'intégration au système républicain,
29:37contrairement à la France insoumise,
29:39et donc contester violemment le système et la justice.
29:41Ça va à l'encontre de cette stratégie-là.
29:43Après, moi, je suis un peu surpris de voir
29:45que le narratif du RN est repris
29:47benoîtement, d'ailleurs, par la gauche,
29:49qui aime bien jouer à shérif, fais-moi peur,
29:51parce que, non, le RN n'est pas dans une progression inéluctable.
29:53Et vous l'avez rappelé, ce qui s'est passé
29:55au mois de juin, ça n'est pas
29:57le Front républicain qui a fonctionné.
29:59Ce sont des électeurs qui doutent, et il faut bien voir
30:01ce qui est en train de se passer à l'heure actuelle.
30:03Il y a toute une partie de cet électorat,
30:05et l'offre alternative, elle n'a pas surgi.
30:07Il y a une partie de cet électorat
30:09qui commence à se dire, est-ce que c'est un vote stérile ?
30:11Est-ce que c'est la bonne candidate ?
30:13Ils ne sont pas capables d'acquérir une culture de gouvernement.
30:15Et où ? Parce que, de toute façon, le système
30:17ne les laissera jamais se faire élire.
30:19Et donc, est-ce que, si nous voulons vraiment
30:21du changement, ce vote-là,
30:23qui était perçu jusqu'à présent comme le vote
30:25de la promesse du changement, contrairement à d'autres,
30:27contrairement à la droite, qui avait beaucoup déçu du temps de Nicolas Sarkozy,
30:29peut-être, cette question-là,
30:31elle est en train de ressurgir.
30:33Elle est compliquée pour Marine Le Pen,
30:35parce que, justement, ça se double
30:37de ce qu'on disait juste avant,
30:39l'injonction contradictoire, être respectable,
30:41mais être anti-système.
30:43Merci beaucoup. On s'arrête là.
30:45Merci pour ce décryptage sur ce procès
30:47qui commence lundi.
30:49Merci d'avoir été en direct avec nous sur LCP.
30:51On va parler à présent de cet essai.
30:53Je pense que, quoi,
30:55c'est la 20e émission que vous faites.
30:57Non, pas vraiment.
30:59C'est la dernière sur LCP.
31:01On est très heureux
31:03que vous ayez gardé un peu de temps pour nous,
31:05Caroline Fourest.
31:07C'est peu dire que cet essai fait couler beaucoup d'encre.
31:09Au fond, est-ce qu'on peut poser la question
31:11des dérives du mouvement MeToo
31:13pour mieux le protéger ?
31:15C'est un peu la question qui résume cet ouvrage.
31:17Regardez l'invitation de Marion Becker.
31:19Interview toutes les deux juste après.
31:21Si on vous invite,
31:23Caroline Fourest,
31:25c'est pour votre analyse du mouvement de libération
31:27de la parole.
31:29Après MeToo, vous dressez un bilan
31:31dans le vertige MeToo.
31:33Vertige nécessaire, dites-vous,
31:35face à la chape de silence
31:37qui entourait le viol et l'inceste.
31:39Mais vous avez entrepris
31:41d'en dénoncer les excès.
31:43Dans ce nouveau monde,
31:45il suffit désormais d'accuser pour exister.
31:47D'une flèche sur les réseaux sociaux
31:49pour clouer au pilori.
31:51D'un « je te crois » pour sortir le goudron
31:53et les plumes.
31:55Dans cet essai, vous questionnez
31:57comment libérer la parole
31:59sans piétiner la présomption d'innocence
32:01ni altérer la présomption
32:03de véracité.
32:05Doit-on nommer au risque de briser
32:07des réputations ?
32:09Pour vous, Caroline Fourest,
32:11la féministe, la journaliste
32:13et la réalisatrice, tous les MeToo
32:15ne se valent pas.
32:17Vous revenez sur l'histoire du mouvement,
32:19d'Harvey Weinstein à Nicolas Hulot,
32:21PPDA ou Judith Gaudrech,
32:23entre autres.
32:25Disséquer et graduer les affaires
32:27et dénoncer la judiciarisation
32:29du soupçon.
32:31Un discours qui passe mal
32:33chez les féministes qui vous accusent
32:35d'affaiblir le combat.
32:37Caroline Fourest met à terre
32:39tous les soubassements de la parole libérée
32:41et de la honte changeant de camp.
32:43Comment une féministe qui prétend
32:45sauver MeToo peut-elle emprunter
32:47un vocabulaire minimisant les violences ?
32:49Quand on veut discréditer une victime
32:51sans pourtant s'en prendre ouvertement à elle,
32:53pour ne pas avoir l'air
32:55anti-féministe, on l'accuse
32:57d'être une marionnette,
32:59manipulée par d'autres.
33:01C'est ce qu'on dit de moi,
33:03c'est ce qu'elle dit de moi.
33:05Mais n'est-ce pas là le sexisme le plus cru ?
33:07Judith Gaudrech
33:09vous reproche une forme de défiance
33:11à l'égard des victimes.
33:13En vous attaquant au mouvement
33:15de libération de la parole,
33:17en nuançant son bilan, Caroline Fourest,
33:19vous deviez vous douter
33:21qu'on vous reprocherait
33:23d'abîmer le combat des femmes.
33:27Alors Caroline Fourest,
33:29est-ce que vous attendiez un tel tir de barrage
33:31de certaines féministes ?
33:33J'aime bien que vous disiez certaines
33:35parce que ça fait deux fois que j'entends les féministes
33:37et je peux dire grâce à ce livre que non
33:39Clémentine Autain, Sandrine Rousseau
33:41et même Judith Gaudrech,
33:43qui est récemment féministe, ne sont pas
33:45toutes les féministes.
33:47Il y a beaucoup de féministes
33:49qui ont dit des choses que je dis dans ce livre,
33:51qui le disent aussi, qui le disent avec moi.
33:53Justement, pour bien comprendre vous, la féministe,
33:55de toujours, il y a des féminismes ?
33:57En quoi vous vous distinguez
33:59de celles que vous avez citées ?
34:01Il y a un débat idéologique très important et puissant
34:03entre vous.
34:05Depuis longtemps, il y a toujours eu plusieurs féminismes,
34:07même dans les années 70, par exemple, il y avait un débat
34:09très vif entre des féministes réformistes
34:11et des féministes révolutionnaires.
34:13Les féministes révolutionnaires disaient aux réformistes
34:15il ne faut pas porter plainte
34:17pour viol en justice.
34:19Il ne faut pas dénoncer des violeurs
34:21quand ils sont immigrés, parce que c'est faire le jeu
34:23de la justice bourgeoise et raciste.
34:25Ce sont les féministes réformistes qui ont gagné,
34:27qui ont écrit la loi contre le viol
34:29et qui ont fait régresser les violences sexuelles.
34:31Et pour répondre à ce que je viens d'entendre,
34:33je ne ministre pas les violences sexuelles.
34:35Je dis juste que sous le mot d'agression sexuelle
34:37en justice, on met des choses très variées
34:39qui valent des peines très variées
34:41et c'est très bien comme ça.
34:43Et moi, je suis pour qu'on condamne
34:45les violences sexuelles à la hauteur de ce qu'elles sont.
34:47Je ne mets pas sur le même plan
34:49un Edouard Baer
34:51qui a été récemment épinglé dans la presse
34:53pour des comportements de dragues lourdes
34:55et un Hervé Weinstein.
34:57Vous demandez la hiérarchisation.
34:59Je ne mets pas Dominique Pellicot,
35:01qui pour moi représente quand même un très grand sommet
35:03de gravité de violences sexuelles,
35:05sur le même plan que d'autres accusations
35:07ou sur le même plan, par exemple,
35:09qu'une pédiatre légiste féministe qui est accusée
35:11pour un examen mal compris et mal vécu.
35:13Vous avez la dent dure quand même
35:15sur ces féministes-là. Vous leur reprochez,
35:17pour prendre un exemple dans l'actualité,
35:19une forme de gêne, de malaise, par exemple,
35:21dans l'affaire de la jeune Philippine,
35:23ce meurtre présumé,
35:25enfin, le suspect présumé
35:27du meurtre.
35:29Je ne suis pas encore à exprimer sur ce sujet.
35:31Évidemment, le livre est sorti bien avant.
35:33Par contre, je parle du féminisme
35:35à indignation variable.
35:37En fait, si vous voulez, moi, ça fait...
35:39Je raconte dans le livre tout mon combat
35:41contre les viols, accompagné des victimes de viols.
35:43Parfois, on s'est débrouillé
35:45comme on a pu quand on n'avait pas
35:47cet écho médiatique et quand on avait face à nous
35:49le silence et le patriarcat
35:51à son heure de l'heure.
35:53C'est toute une partie du livre
35:55qui, évidemment, ne fait pas débat.
35:57C'est normal qu'on débatte des parties
35:59où je parle de l'emballement médiatique
36:01et du féminisme à indignation variable,
36:03c'est-à-dire qu'il y a aujourd'hui des voix
36:05dans l'espace public... Le féminisme est souvent
36:07porté soit par des femmes politiques
36:09qui, on vient de l'entendre, comme Clémentine Autain,
36:11par exemple, dans l'affaire Tahabouaf,
36:13le fils spirituel de M. Mélenchon,
36:15qui a été investi, à un moment donné,
36:17pour des élections législatives,
36:19et qui, finalement, a été retiré,
36:21mais Clémentine Autain l'a défendue jusqu'au bout,
36:23tout en disant nous avions entendu des accusations
36:25d'agressions sexuelles à son encombre
36:27d'une extrême gravité que nous n'avions jamais entendue avant.
36:29Et puis, depuis que M. Mélenchon a décidé
36:31que Tahabouaf, il devait réintégrer
36:33l'avis politique aux côtés des insoumis,
36:35on n'entend plus parler de ces accusations
36:37et il va peut-être bientôt devenir assistant parlementaire
36:39au sein de l'Union européenne,
36:41grâce à la France insoumise.
36:43Quand Sandrine Rousseau balance sur la place publique
36:45des faits qui ne relèvent pas
36:47de la loi, de l'affaire Bayou,
36:49contre un concurrent dans son propre parti,
36:51il disparaît de la vie politique.
36:53Je dis juste que,
36:55et je vais vous répondre sur MeToo,
36:57moi je prends tout MeToo, je défends tout MeToo,
36:59mais je ne prends que MeToo.
37:01Je ne suis pas d'accord pour prendre des règlements
37:03de compte instrumentales politiques
37:05qui se servent du féminisme
37:07pour faire de la politique politicienne.
37:09Puisqu'on est à l'Assemblée nationale, je voudrais vous parler
37:11en matière de violences sexuelles et sexistes
37:13des hommes politiques.
37:15Un homme qui a reconnu sa faute pour vous
37:17et qui a été condamné par la justice
37:19ne peut être doublement puni par une sorte
37:21de mort sociale.
37:23On le retrouve très régulièrement dans le livre
37:25et quels que soient les accusés.
37:27En politique, par exemple, Adrien Quatennens.
37:29Typiquement, pas selon les accusations.
37:31Vous avez remarqué qu'il y a tout un passage
37:33où je raconte, par exemple, Adrien Quatennens,
37:35pour moi, qui fait partie de la France insoumise,
37:37donc je ne juge pas en fonction de l'étiquette politique,
37:39je juge en fonction des faits.
37:41Il a été condamné pour violences conjugales.
37:43Il a été condamné pour une gifle sur son épouse
37:45dans le cadre d'un divorce très conflictuel.
37:47J'estime que Adrien Quatennens,
37:49pour moi, d'un point de vue féministe,
37:51il a le droit de revenir sur les bandes d'Assemblée,
37:53il avait le droit de revenir sur les bandes d'Assemblée
37:55parce que d'abord, il a reconnu sa faute.
37:57Il a été condamné parce qu'il l'a reconnu.
37:59Et que contrairement à beaucoup d'hommes
38:01qui ont un geste de violence,
38:03il laisse passer leurs épouses pour des menteuses.
38:05Donc, il a reconnu sa faute.
38:07Il a été condamné pour cette faute et il ne présente pas
38:09de risque de violence au sein de l'Assemblée nationale.
38:11Il aurait dû être sanctionné par les urnes et pas par sa famille politique.
38:13C'est ce que vous écrivez.
38:15Par contre, il y a deux autres accusés
38:17dans le monde politique, Damien Abad
38:19et M. Joël Goriot,
38:21qui, eux, sont accusés de fait d'avoir
38:23mis d'une substance,
38:25donc une forme de soumission chimique,
38:27pour droguer des collègues et en abuser.
38:29Je dis, sur ces cas-là,
38:31le principe de précaution doit être maximal.
38:33Il se trouve qu'ils sont, Horizon et l'autre,
38:35plutôt proches de l'ancienne majorité présidentielle.
38:37Mais, encore une fois,
38:39ce n'est pas l'étiquette politique qui m'intéresse.
38:41Ce sont les faits et c'est la dangerosité
38:43et le risque de récidive.
38:45On reviendra peut-être à l'affaire Philippine,
38:47c'est là aussi où il y a un vrai débat.
38:49Quand quelqu'un n'a pas encore été jugé
38:51pour des faits où on sait qu'il est capable
38:53de droguer quelqu'un pour en abuser,
38:55je trouve normal que le principe de précaution s'applique.
38:57Parce qu'il y a la question de la justice,
38:59c'est très important,
39:01elle n'a pas du tout la même temporalité
39:03que la société, et cette libération de la parole,
39:05il faut bien en faire quelque chose dans la société.
39:07Parce que celles qui accusent,
39:09celles qui sont victimes,
39:11ont besoin que leur parole,
39:13quelque part, se matérialise dans la société.
39:15Qu'est-ce qu'on fait quand la justice est silente,
39:17quand la justice dysfonctionne aussi,
39:1986 % de classements sans suite,
39:21quand la prescription est passée,
39:23quand, faute de preuve,
39:25on ne peut pas y arriver,
39:27à la faire passer, cette justice ?
39:29Comment la société, pour vous,
39:31doit s'emparer de cette question ?
39:33C'est là où, si on me lit, au lieu d'écouter
39:35des gens qui ne veulent pas qu'on me lise,
39:37on découvre que c'est le but de ce livre,
39:39de s'interroger sur notre vigilance collective.
39:41Comme féministe, moi, je n'ai pas envie
39:43d'attendre seulement la justice.
39:45Je ne crois pas à la justice rien que la justice.
39:47Je pense que la justice ne passe pas assez
39:49dans beaucoup de cas d'abus et de violences sexuelles.
39:51Donc, on est tous un peu jurés,
39:53on est tous un peu chargés de cette vigilance,
39:55et du coup, on vit tous,
39:57et c'est pour ça aussi que le livre a ce succès,
39:59c'est qu'on vit tous, depuis des années,
40:01des tas de situations
40:03où on ne sait pas comment juger.
40:05C'est-à-dire que moi, quand quelqu'un vient me dire
40:07qu'elle a été agressée
40:09ou qu'il a été agressé,
40:11selon ce qu'elle me raconte ou ce qu'il me raconte,
40:13je me fais un avis, je l'écoute,
40:15et très souvent, je la crois ou je le crois.
40:17Le je l'écoute doit arriver
40:19avant le je te crois.
40:21Expliquez-nous cet ordre-là.
40:23Toutes les victimes, leurs regards changent
40:25quand elles entendent le je te crois,
40:27qui est devenu un slogan, d'ailleurs.
40:29Moi, à une victime qui me raconte quelque chose,
40:31et ça m'est arrivé tellement souvent dans ma vie,
40:33depuis l'âge de 12 ans, je dis je te crois.
40:35Evidemment que je dis je te crois.
40:37Mais il se trouve que dans mon militantisme
40:39comme féministe et comme journaliste,
40:41j'ai vécu des situations où j'ai vu des gens
40:43au nom du je te crois, un je te crois
40:45qu'on n'avait pas imaginé avant MeToo,
40:47totalement littéralistes et totalement aveugles,
40:49renoncer à l'examen des faits,
40:51des faits qui, parfois, sont sous leurs yeux.
40:53Et je raconte l'histoire du Collectif 50-50
40:55qui m'a décidé à écrire ce livre,
40:57où j'ai vu des gens qui, au nom du je te crois,
40:59ont soutenu une fausse accusation
41:01contre une féministe
41:03dans une pièce où elles étaient,
41:05où elles saient que ce geste n'a pas eu lieu,
41:07que ça n'était pas un viol, pas une agression sexuelle,
41:09mais ils ont dit qu'on ne peut pas dire
41:11qu'on ne croit pas la victime, même si on sait que ce n'est pas vrai.
41:13Et donc, c'est fou, on arrive à des aberrations,
41:15et ce n'est pas un cas isolé,
41:17c'est un cas de plus en plus.
41:19Donc, encore une fois, le je t'écoute que je propose,
41:21c'est un je t'écoute public, si vous voulez.
41:23C'est la journaliste qui dit à la féministe,
41:25comme féministe, évidemment que tu crois toutes les victimes.
41:27Comme journaliste, tu es obligée de douter.
41:29Quand les victimes de Tarek Ramadan viennent me voir,
41:31la première fois que je les écoute,
41:33je ne leur dis pas que je suis en train de douter de leurs paroles.
41:35Mais pendant qu'elles me parlent, comme journaliste,
41:37je suis obligée d'en douter.
41:39Parce qu'avant de porter une accusation publique,
41:41avant de nommer quelqu'un, quand on est journaliste
41:43et que c'est sa responsabilité, on est bien obligé de douter.
41:45Le tribunal médiatique et social
41:47broie
41:49beaucoup d'innocents.
41:51Beaucoup de gens qu'on ne voit pas.
41:53C'est toujours un ou deux de trop, bien sûr.
41:55Mais est-ce que vous trouvez qu'il y a un vrai problème
41:57au niveau des chiffres, des nombres de cas ?
41:59Dans cinq ans, on me dira, de toute façon j'ai l'habitude,
42:01on n'avait pas vu qu'il y avait autant de cas,
42:03autant de gens qui sont sortis à la vie sociale,
42:05qui ne peuvent plus travailler.
42:07Je parle évidemment beaucoup du milieu du cinéma.
42:09Vous avez bien compris qu'on vit une France à deux vitesses.
42:11On a la France de Mazan,
42:13où je ne crois pas que les accusés
42:15se sentent,
42:17aient tellement senti la honte de changer de camp.
42:19J'ai l'impression qu'ils n'ont toujours pas tellement honte,
42:21les co-accusés Dominique Pellicot.
42:23Et là, c'est pas redescendu.
42:25J'aimerais qu'on démocratise MeToo beaucoup plus.
42:27Et puis, dans le milieu du cinéma,
42:29je vous assure qu'on vit une autre réalité.
42:31C'est un milieu qui est absolument terrorisé
42:33à l'idée de la moindre accusation
42:35rétrospective, même pour des faits isolés,
42:37même pour des faits légers.
42:39C'est-à-dire qu'on n'est plus du tout
42:41comme Pierre Weinstein.
42:43Et là, tous ces gens-là, ils ne sont ignorés du grand public.
42:45Ils ne savent pas qu'il y a un réalisateur
42:47qui a fini au téléphone portable son film
42:49pour une histoire qui n'est pas encore jugée
42:51et sur laquelle il y a des versions très contradictoires.
42:53D'ailleurs, vous reconnaissez, par exemple,
42:55à Judith Godrech ou à Adèle Haenel,
42:57un très grand courage. Il y a des pages là-dessus.
42:59Mais en même temps, vous dites, attention,
43:01elles deviennent des procureurs. Ce terme est très fort.
43:03Mais pardon, mais tout le monde le vit.
43:05Si Judith Godrech... Je le vis là,
43:07mais moi, c'est pas grave, je suis pas accusée de viol.
43:09Si un film est nommé par Judith Godrech,
43:11elle a aujourd'hui un tel statut,
43:13socialement, depuis qu'elle a parlé,
43:15que dans le cinéma, ça vaudrait sentence.
43:17Et encore une fois, là aussi,
43:19j'ai fait cette distinction.
43:21Quand Judith Godrech parle en tant que victime
43:23de ce qu'elle a vécu, de ce qu'elle a ressenti
43:25en écoutant Bono Jaco parler de son désir
43:27et parler du cinéma comme un trafic
43:29illicite de jeunes filles,
43:31j'ai été une des premières à dire
43:33qu'elle a raison de le dire, c'est fort de le dire
43:35et à soutenir cette parole.
43:37Et à croire, quand elle devient procureure
43:39et qu'elle mène le procès
43:41de la famille du cinéma, sans mener
43:43celui de la responsabilité parentale
43:45qui a permis tous ces abus,
43:47qui a permis de la mettre dans cette situation de fragilité,
43:49là, c'est moi qui suis un peu plus
43:51Me Too peut-être que Judith Godrech
43:53et qui voudrait qu'on en parle un peu plus en profondeur.
43:55Pour terminer, c'est ma dernière question.
43:57Qu'est-ce que vous attendez de ce livre,
43:59qui marche de façon absolument spectaculaire ?
44:01Le rêve de Caroline Fourest,
44:03après ce livre, ce serait quoi ?
44:05Est-ce qu'une véritable conversation
44:07avec ces féministes-là
44:09puisse être possible, sereinement,
44:11ou bien au-delà, avec la jeunesse ?
44:13Qu'est-ce que vous attendez ?
44:15Je savais que ce serait un moment difficile à passer,
44:17mais je le vis un peu, en fait,
44:19ce qui est en train de se passer.
44:21D'abord, je vois des gens qui étaient très critiques,
44:23qui étaient déjà préparés à faire les retours de bâtons
44:25vis-à-vis de Me Too, dire
44:27que ce que je trouvais excessif
44:29ou ce qui était grotesque
44:31ou ce qui était de l'ordre de l'instrumentalisation
44:33n'était pas Me Too, c'était juste de l'abus de pouvoir.
44:35Et de l'autre côté,
44:37évidemment, que mon souhait le plus cher,
44:39j'ai pas espoir de faire changer d'avis Clémentine Autain
44:41ou Sandrine Rousseau,
44:43mais j'ai espoir que des gens qui, sincèrement,
44:45pensent que le féminisme n'est peut-être
44:47que ça, que ce féminisme politique est partisan,
44:49que des jeunes de 20 ans...
44:51Et je sais comment j'étais
44:53à 20 ans, j'étais une féministe radicale.
44:55Si quelqu'un avait sorti un livre pour dire
44:57attendez, est-ce qu'on peut réfléchir deux secondes
44:59à faire en sorte de protéger Me Too de quelques excès,
45:01j'aurais été très en colère.
45:03Donc je sais très bien que des jeunes d'aujourd'hui de 20 ans,
45:05ils peuvent être braqués en entendant des résumés
45:07de mon livre. Mon espoir,
45:09c'est que lorsqu'ils vont traverser
45:11des situations un peu plus compliquées,
45:13où ils vont voir autour d'eux des gens
45:15être accusés,
45:17où ils vont vouloir convaincre des gens et des hommes
45:19de changer,
45:21un jour, peut-être, ils ouvrent ce livre
45:23et ils finiront par m'écrire, et ils commencent déjà,
45:25parce que j'ai déjà des gens qui m'écrivent en me disant
45:27j'étais très remontée contre votre livre, je l'ai lu, pardon,
45:29je m'excuse, et j'ai compris
45:31que c'était tout à fait une démarche féministe,
45:33mais une démarche féministe
45:35qui veut vraiment convaincre, pas simplement
45:37faire peur, convaincre.
45:39C'est le début d'une grande question que vous ouvrez.
45:41J'ai aussi le début.
45:43Que tout le monde s'en mêle maintenant, ne me laissez pas seule.
45:45Cinq ans après, chacun essaie d'élever cette conversation.
45:47Mais vous n'êtes pas seule, Caroline Forest.
45:49Ça, je peux en témoigner.
45:51Allez, vous restez avec moi, c'est la dernière séquence
45:53de l'émission, le vertige Me Too,
45:55je le remontre une dernière fois, c'est-à-dire aux éditions
45:57Grasset. La question qui fâche,
45:59pour terminer, on accueille nos chroniqueurs.
46:11Bonsoir à vous deux, sans transition,
46:13absolument aucune.
46:15On va prendre un peu l'avion,
46:17si vous le voulez bien, avec Léa Falco. Bonsoir.
46:19Bonsoir. Plutôt pas trop prendre l'avion.
46:21Merci d'être là, justement, j'ai dit un peu, on va voir.
46:23On est ravies de vous retrouver sur ce plateau,
46:25avec la militante écologiste que vous êtes,
46:27Val Férailler, avec Gérard Feltzer.
46:29Bonsoir, on ne vous présente plus.
46:31Ancien pilote,
46:33grand spécialiste de l'aéronautique,
46:35président d'Avions sans frontières,
46:37c'est Action Climat qui nous a soufflés.
46:39La question qui fâche, regardez.
46:55Les emissions de CO2 des vols internationaux
46:57sont en constante augmentation depuis 30 ans.
46:59Pour inverser la courbe,
47:01une association écologiste
47:03fait aujourd'hui une proposition choc.
47:05Taxer les grands voyageurs.
47:07L'idée est de cibler les personnes
47:09qui prennent le plus l'avion,
47:11des voyageurs qui sont les plus gros pollueurs,
47:13mais aussi les passagers
47:15les plus aisés.
47:17Concrètement, cette taxe serait progressive
47:19et prendrait en compte à la fois
47:21la longueur des trajets et leurs fréquences.
47:23Par exemple, pour un 1er aller-retour dans l'année
47:25vers une ville lointaine comme New York,
47:27la taxe serait de 100 euros.
47:29Elle monterait à 500 euros au bout du 5e vol.
47:31Pour un 1er trajet plus court,
47:33à Barcelone par exemple,
47:35la taxe serait nulle.
47:37Au 5e voyage, elle atteindrait 400 euros.
47:39400 euros pour un billet qui nous coûte 160,
47:41ça dissuade d'aller voir sa famille.
47:43Une mesure malheureusement nécessaire
47:45pour l'association
47:47à l'origine de cette proposition,
47:49le réseau Action Climat.
47:51Les personnes qui prennent souvent l'avion
47:53représentent un nombre de vols assez important.
47:55Si on augmente sensiblement
47:57le prix des billets d'avion pour ces personnes-là,
47:59le nombre de vols va diminuer
48:01donc les émissions de CO2 vont diminuer avec.
48:03D'après les calculs de l'association,
48:05cette taxe grand voyageur
48:07permettrait de réduire les émissions de CO2
48:09du secteur de 13,1%
48:11et rapporterait
48:132,5 milliards par an à l'Etat.
48:15Sans surprise, les compagnies aériennes
48:17ont déjà dit leur opposition à une telle mesure.
48:19Pour elles, la solution
48:21doit être technologique.
48:23La question qui fâche est donc la suivante.
48:25Faut-il taxer
48:27les inconditionnels de l'avion ?
48:29Gérard Fetzer, à vous de commencer.
48:31Oui, alors je suis un peu schizophrène
48:33parce que je ne suis pas un ennemi du RAC.
48:35Du réseau Action Climat.
48:37Mais en fait,
48:39oui, ils ont raison de dire
48:41la technologie ça ne résout pas tout.
48:43Il y a une rupture
48:45technologique à faire, certes.
48:47Si on investit beaucoup d'argent, on y reviendra.
48:49Mais il y a aussi une rupture sociologique,
48:51une rupture sociale.
48:53Ne pas considérer l'avion comme un produit de consommation,
48:55ce qui est le cas aujourd'hui.
48:57Donc vous êtes pour la taxe des grands voyageurs ?
48:59Il faut la moduler. Il faut être prudent par rapport à ça.
49:01Il ne faut pas favoriser les plus riches
49:03par rapport aux plus pauvres aussi.
49:05Parce que 500 euros de plus,
49:07pour eux, ça ne changera rien.
49:09Donc il faut être intelligent sur l'affaire.
49:11Et puis l'écueil principal, c'est la concurrence.
49:13C'est un secteur qui est ultra concurrentiel
49:15avec 400 000 emplois à la clé
49:17tout le secteur aéronautique, constructeur, compagnie aérienne,
49:19confondus,
49:21emplois directs et indirects.
49:23Et je comprends que les politiques hésitent toujours un petit peu.
49:25Pourtant, il y a urgence.
49:27Donc il faut faire quelque chose et ça va dans le bon sens.
49:29D'accord avec ça, j'imaginais.
49:31En très large partie.
49:33On est tout à fait d'accord.
49:35Ça a été montré par ailleurs dans le magnéto.
49:37Le fait que le secteur aérien soit, quand vous regardez
49:39en vision macroéconomique,
49:41le secteur qui aujourd'hui, non seulement n'a pas entamé
49:43la réduite de baisse d'émissions de gaz à effet de serre,
49:45mais qui en plus l'a augmentée.
49:47Depuis le Covid, on est remonté vers une hausse des émissions.
49:49Et donc ça, c'est tout à fait problématique.
49:51Et on est d'accord sur le fait que la technologie,
49:53et aujourd'hui tous les grands rapports qui existent sur la question le montrent,
49:55ne pourra pas seule permettre cette réduction des émissions.
49:59Donc il faut qu'on arrive à une question de réduction du trafic.
50:01On est d'accord. La question n'est pas si on le fait, mais comment on le fait.
50:03À ce propos, quand j'étais pilote sur Boeing 747,
50:05j'étais tout fier d'annoncer à mes passagers,
50:07regardez, on bouffe 6 litres au 100 km par passager.
50:11Aujourd'hui, on en est à 3.
50:13Quand je suis passé sur Airbus, j'en étais plus qu'à 3.
50:15On sera bientôt à 2.
50:17Alors on ne peut pas dire qu'on ne fait pas de progrès.
50:19Mais le problème, c'est que la technologie est dépassée par la demande.
50:23C'est vrai que là, si on double le trafic aérien tous les 15-20 ans,
50:27on ne va pas y arriver, et surtout pas en 2050.
50:29Le risque, c'est que les riches seulement voyageront à l'avenir.
50:31Disons que là, on n'est pas sur un système d'interdiction,
50:33dans ce qui est proposé par le RAC.
50:35En fait, ça a été rapidement dit,
50:37c'est plus 50 euros de taxes au fur et à mesure qu'on prend des vols.
50:39Donc le premier vol est « offert » en termes de taxation.
50:43Et ensuite, vous rajoutez à chaque vol supplémentaire 50 euros.
50:46Et ça s'arrête à 400.
50:48C'est-à-dire que si vous prenez 4, 5, 6, 7, 8 vols dans l'année,
50:51vous payez 400 euros de taxation.
50:53Il y a ceux qui sont à 400 euros près, puis les autres.
50:55Oui, mais vous savez, ceux qui sont à 400 euros près,
50:58malheureusement, et vous le disiez, il y a une réalité sociologique derrière,
51:00ceux qui sont à 400 euros près, ils ne prennent pas l'avion.
51:02Déjà, vous pensez ?
51:04Ce n'est pas que je pense, c'est qu'en fait, c'est écrit dans le rapport.
51:06Ils ont fait des calculs avec tout un tas de modèles économiques.
51:10Et en fait, les 20 % les plus aisés en France aujourd'hui
51:14prennent 40 % des vols en France.
51:17Donc c'est la solution pour vous ?
51:19Non, mais ce n'est pas la solution.
51:21C'est une partie d'un bouquet de solutions qui est plus large
51:24et que par ailleurs, ils explorent.
51:25Il y a neuf mesures différentes dans le rapport
51:27qu'ils observent selon trois critères,
51:28qui est l'impact sur les émissions du secteur de gaz à effet de serre,
51:31l'impact en termes de répartition de l'effort entre les classes sociales,
51:34et puis un point sur lequel on n'est pas encore arrivés,
51:36mais qui est important, c'est-à-dire la sieste fiscale,
51:38les revenus fiscaux qui seront générés par cette potentielle taxation.
51:41Oui, alors on a besoin de milliards.
51:43Sur l'économie, l'impact d'une taxe grand voyageur comme ça,
51:46sur l'économie, il y a quand même le secteur aérien qui redémarre,
51:49les emplois, le tourisme ?
51:51C'est vrai que 400 000 emplois, c'est pas rien en France,
51:54tout confondu, et qu'il faut faire attention aussi
51:58aux disparités du pouvoir économique de chaque passager.
52:02Est-ce qu'on crée pas une inégalité entre celui
52:05qui va économiser toute l'année pour faire son petit voyage,
52:08l'augmenter, alors que l'autre va avoir les moyens de compenser ?
52:12C'est les deux petits voyages, alors !
52:15Il faut faire attention aux inégalités provoquées.
52:18Je suis absolument d'accord, mais vous savez,
52:20deux voyages en avion par an, c'est très peu courant.
52:22On est malheureusement, dans les classes qui parlons sur les plateaux,
52:25sur les plateaux de télé, des classes sociales très favorisées en moyenne.
52:28Donc nous, peut-être que dans notre entourage,
52:30on voit tout le monde prendre l'avion.
52:32C'est pas le cas du tout dans le reste du pays.
52:34C'est quelque chose à prendre en compte.
52:36Et sur cette question des emplois, je vous rejoins tout à fait.
52:38C'est d'ailleurs pour ça, je suppose, que le rapport ne parle pas
52:41d'interdire purement et strictement l'aviation.
52:43On sait qu'aujourd'hui, c'est pas possible.
52:45Il disait pas plus de quatre vols par an.
52:48Par vie, pardon. C'était par vie.
52:50La proposition d'Action Climat est beaucoup plus raisonnable.
52:53Donc vous dites quoi, pour terminer ?
52:56Chiche, parce que c'est ici le budget qui va se décider.
52:59Il y a une prise de conscience des députés, heureusement.
53:03Ça va dans le bon sens. Pas assez vite, à mon goût,
53:05pour essayer de faire de la rupture technologique.
53:08C'est quoi, la rupture technologique ?
53:10On parle beaucoup d'hydrogène, par exemple,
53:12avec pratiquement pas zéro émission.
53:14Ça n'existe pas, mais très peu, par rapport à aujourd'hui.
53:17Mais il faut investir massivement dans la recherche et le développement.
53:20Et là, le Concorde, à l'époque où c'était la vitesse, la vitesse, la vitesse,
53:24aujourd'hui, c'est l'avion, zéro émission,
53:27émission, émission, émission, le bruit.
53:29On parle pas du bruit, et vous devriez vous y intéresser,
53:32parce qu'on est des riverains, et il y en a de plus en plus,
53:36et comme il y a de plus en plus d'avions...
53:38Et l'avion vert, c'est pourquoi ?
53:40En quel horizon, j'allais y venir ?
53:422035, l'avion électrique pour du court-moyen courrier.
53:45Pour des petits avions, il faut le dire aussi.
53:48Pour des avions de 70 places.
53:50Oui, ce sont aujourd'hui de petits avions.
53:52Ce qui m'horripile, c'est surtout que c'est un produit de consommation.
53:56On va à Barcelone, on va à Berlin pour s'amuser, boire un coup,
53:59parce que c'est 49,99 euros.
54:01Donc ça, par contre, c'est pas acceptable.
54:04Il y a un moment où on va prendre conscience
54:06qu'on y va pas pour boire un coup.
54:08On a démocratisé le voyage avec le low cost, mais ça, c'est plus possible.
54:12Encore une fois, on m'entend beaucoup dire
54:14qu'on a démocratisé le voyage en avion.
54:16Quand vous regardez les chiffres, c'est pas tellement vrai.
54:19C'est la consommation plutôt du premier quintile,
54:22plutôt du premier deuxième,
54:24c'est-à-dire les 20-40 % de la population les plus aisées.
54:27Les autres, ça reste relativement anecdotique.
54:29Ça veut pas dire que ça n'existe pas, mais c'est anecdotique.
54:31En attendant l'avion ouvert, pour terminer, qu'est-ce qu'on fait ?
54:34On taxe sur les grands voyageurs ?
54:36Il y a plein de choses intéressantes.
54:38Plus on va à New York, plus on taxe.
54:40Les low cost, c'est quand même une grosse partie du marché.
54:43Les tarifs ont baissé.
54:45Absolument.
54:46Il y a d'autres propositions dans le rapport que je trouve intéressantes.
54:49Des taxations sur le kérosène.
54:51Quand vous partez en vacances en train ou en voiture,
54:54vous payez une taxe sur le carburant.
54:56Quand vous le faites en avion,
54:58vous en payez une qui est largement dérisoire.
55:00Rien que de se remettre au niveau
55:02et de faire payer les consommateurs d'avion
55:04au même titre que ceux qui prennent la voiture ou le train,
55:06c'est déjà bien.
55:07Ensuite, il faut aller plus loin.
55:09Cette taxe, elle va dans le bon sens,
55:11d'autant plus que, on l'a pas dit,
55:13ça rapporterait à peu près, selon leurs calculs,
55:152,5 milliards d'euros par an.
55:17Ce qui, dans un contexte de réduction budgétaire,
55:19n'est quand même pas tout à fait intéressant.
55:21Rendez-vous à la COP, les BRICS notamment,
55:23le Brésil, l'Inde, la Chine,
55:25l'Afrique du Sud,
55:27qui sont absolument contre toute taxe
55:29et commander dans un marché ouvert.
55:31Mais dans ce cas-là, on ne le ferait pas.
55:33Vous prenez souvent l'avion ?
55:35Vous faites attention ?
55:37Non, je prends évidemment que le train.
55:39C'est une blague.
55:41Il y a beaucoup de gens, et pas que sur les plateaux de télévision.
55:43Oui, mais beaucoup.
55:45Et franchement, je trouve que le côté
55:47culpabilisons les gens qui veulent voyager,
55:49au lieu d'être toujours dans le repli,
55:51d'être sur son petit territoire,
55:53je crois que ça va avoir des conséquences démocratiques,
55:55pas seulement écologiques,
55:57et que si on doit taxer les grands voyageurs,
55:59alors il faut s'assurer que cette taxe,
56:01elle ne sert pas à renfluer les caisses,
56:03elle sert à faire la mutation écologique.
56:05On sera tous d'accord.
56:07C'est fini !
56:09Du coup, à vous, Caroline Fourest,
56:11le vertige MeToo, c'est-à-dire Chier Grasset,
56:13et merci à mes chroniqueurs
56:15pour ce ping-pong
56:17sur la taxe sur les grands voyageurs.
56:19Une nouvelle question qui fâche,
56:21un nouvel invité politique, un nouveau débat,
56:23ce sera pour la semaine prochaine.
56:25Profitez bien d'ici-là. A mardi prochain.
56:39Sous-titrage Société Radio-Canada

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