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Cette semaine dans « Ici l'Europe », Caroline de Camaret et Alexandre Poussart reviennent sur les tensions commerciales entre les États-Unis et l'Europe. Après la hausse des droits de douane décidée par Donald Trump début avril, finalement suspendue pour 3 mois... analyse de la stratégie imprévisible du président américain et de ses conséquences pour les pays membres de l'Union Européenne avec Guillaume Klossa (fondateur de Europa Nova) et les eurodéputés Jean-Marc Germain et Marie-Pierre Vedrenne.

Avec :
Guillaume Klossa, fondateur du think tank européen Europa Nova
Jean-Marc Germain, membre du groupe des SD au Parlement européen, et du PS en France
Marie-Pierre Vedrenne, pour le groupe Renew Europe au centre de l'hémicycle, et en France membre du Modem, le parti du Premier ministre François Bayrou

Et en première partie, Caroline de Camaret reçoit Alain Berset, Secrétaire général du Conseil de l'Europe

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Transcription
00:00France 24, LCP, Public Sénat, présente.
00:24Bonjour à tous et merci de nous rejoindre pour Ici l'Europe.
00:28L'Union Européenne est-elle encore la championne du droit et de la démocratie ?
00:34Pour le savoir, nous allons nous tourner vers une institution qui déborde le cadre de l'Union Européenne à 27,
00:40à savoir le Conseil de l'Europe, une organisation internationale instituée en 1949
00:45qui compte 46 pays signataires de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme,
00:51une institution garante de l'État de droit sur un continent marqué par la guerre en Ukraine et la montée des populismes.
00:58Mais nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui son secrétaire et général depuis plus de six mois,
01:04un Suisse, Alain Berset. Bonjour.
01:06Bonjour.
01:06Vous nous rendez visite aujourd'hui.
01:07Vous avez été conseiller fédéral et président de la Confédération suisse en 2018, en 2023.
01:14Est-ce que vous estimez aujourd'hui, en regardant ce qui se passe à travers le monde et l'Europe,
01:19surtout que l'impunité a atteint des niveaux sans précédent ?
01:23Oui, écoutez, je crois qu'on voit bien ce qui se passe avec l'agression de la Russie sur l'Ukraine.
01:28On voit aussi ce qui se passe dans d'autres régions du monde.
01:30On a le sentiment qu'aujourd'hui, c'est un peu la force, la violence, la destruction, la guerre et l'impunité
01:36qui semblent dominer l'agenda, alors qu'en fait, on veut exactement le contraire.
01:39On aimerait un monde fondé sur des règles stables, avec des relations de paix et avec une responsabilité
01:47que chaque État prend envers ce qu'il ne fait pas.
01:51La Russie, qui a siégé d'ailleurs 26 ans au Conseil de l'Europe, a été exclue trois semaines
01:57après son agression contre l'Ukraine.
02:00Une exclusion que vous jugez aujourd'hui qui a été utile, nécessaire en tout cas ?
02:05Vous savez, d'abord, la guerre en Ukraine a commencé en 2014, avec l'annexion de la Crimée,
02:10ensuite la guerre dans l'Est de l'Ukraine.
02:13Et à ce moment-là, bien sûr, avec la Russie au Conseil de l'Europe, c'était compliqué.
02:16Il y avait des discussions, voir ce qui était possible de faire.
02:17Parce que l'Ukraine est membre aussi, soyons précis.
02:19L'Ukraine est membre aussi, bien sûr.
02:21Et avec l'agression à pleine échelle, je dirais, de février 2022,
02:26franchement, pour une organisation qui défend la démocratie, l'État de droit et les droits humains,
02:32quand vous avez un membre qui en attaque militairement avec cette violence, cette force, un autre,
02:38franchement, ce n'est pas possible de ne pas réagir.
02:41Et donc, effectivement, la Russie a été exclue du Conseil de l'Europe,
02:43ce qui a permis au Conseil de l'Europe de rester très effectif et soutenant pour l'Ukraine
02:49et notamment, justement, de porter quelque chose contre l'impunité.
02:55Alors, contre l'impunité, en attendant, depuis le début de la guerre en Ukraine, il y a trois ans,
02:58il y a eu six mandats d'arrêt de la Cour pénale internationale contre Vladimir Poutine lui-même,
03:03enlèvement d'enfants.
03:04Il y a des crimes de guerre et crimes contre l'humanité, contre des hauts responsables russes.
03:08Ça ne les empêche pas de dormir, pas complètement non plus de voyager.
03:11C'est quand même un peu l'impunité.
03:13Personne ne dit que c'est simple.
03:15Alors, je suis complètement d'accord avec vous.
03:16Vous savez, ce que le Conseil de l'Europe a pu faire, d'abord, c'était créer ce qu'on appelait le registre des dommages.
03:21Il s'agit d'enregistrer toutes les destructions aux maisons privées.
03:26On a maintenant aussi les décès des proches qui sont enregistrés, toutes les conséquences de la guerre.
03:31Et l'idée, c'est d'avoir tout cela avec la plus haute qualité possible d'enregistrement
03:36pour pouvoir un jour envisager réparation et reconstruction.
03:41C'est cela.
03:42Et la guerre est encore en cours.
03:44La guerre se déroule actuellement au moment où on parle.
03:47La guerre se déroule en Ukraine.
03:49Ce n'est pas du tout terminé.
03:51On souhaiterait évidemment que ça puisse s'arrêter dans des conditions qui soient favorables pour l'Ukraine,
03:55pour sa souveraineté, pour les libertés qui doivent pouvoir y être exercées.
03:59Mais aujourd'hui, ce n'est pas le cas.
04:00Ça ne veut pas dire qu'il faut abandonner toute la discussion.
04:04Non, nous, on se prépare pour pouvoir effectivement être présent au moment où on pourra envisager des réparations.
04:09Notamment à travers l'idée d'un tribunal spécial qui sera chargé de juger les crimes d'agression en Ukraine.
04:15Il paraît que vous travaillez à ce qui l'émerge.
04:19Oui, alors encore une fois, si on ne veut pas que l'impunité l'emporte.
04:23Alors que le crime d'agression a été reconnu.
04:25Il y a eu un vote aux Nations Unies en 2022 qui disait que plus de 140 pays ont dit
04:29que ce qui se passe en Ukraine, c'est un crime d'agression.
04:32C'est une agression de la Russie contre l'Ukraine.
04:34Et on a constaté juste après qu'il n'y avait pas de cour international qui était compétente pour se saisir de ce sujet.
04:40Et donc, dans ces conditions, si on ne veut pas que l'impunité l'emporte,
04:43on doit réfléchir à la création d'un tribunal dédié.
04:47Ça avance.
04:49On a besoin pour ça, évidemment, que des États le souhaitent.
04:52Le Conseil de l'Europe ne fait pas ça de son côté.
04:54Nous, nous sommes, avec le Conseil de l'Europe, prêts à faire le travail,
04:57prêts à mettre tout ça en place si c'est souhaité par des États.
05:00On ne travaille que pour des États qui sont partis à des conventions ou pour nos États membres.
05:04Vous entendez lutter aussi contre la montée de l'autoritarisme, du populisme,
05:07de la désinformation et des menaces qui pèsent sur nos démocraties.
05:10Vaste programme.
05:11Vous savez, d'abord, la démocratie recule un peu partout et on n'a pas de retour aux années 90.
05:20On ne va pas pouvoir dire que c'est embêtant ce monde-là.
05:22Vous savez, les réseaux sociaux, l'intelligence artificielle, c'était quand même mieux avant, c'est plus simple.
05:27Non, ce n'est pas possible.
05:28On doit, en fait, faire avec ce contexte et donc, la seule manière de faire, c'est de s'adapter,
05:33d'adapter le fonctionnement de nos démocraties à ce monde dans lequel la diffusion de l'information,
05:38la manière de mener le débat a complètement changé,
05:41un monde dans lequel il y a beaucoup plus de fragmentation et de polarisation.
05:44Alors, ça veut dire quoi de repenser à la démocratie ?
05:48Ça veut dire de tout mettre en place, de réfléchir ensemble à une architecture de sécurité démocratique sur le continent européen.
05:56Ce n'est pas seulement l'Union européenne, c'est les garantiements du Conseil de l'Europe avec une immense diversité.
06:01Cela signifie d'adapter nos modes de fonctionnement, notamment par rapport à la culture du débat que nous avons.
06:07Qu'est-ce qu'on fait avec les réseaux sociaux ?
06:09Qu'est-ce qu'on fait avec les fausses informations qui sont diffusées à dessein dans le cadre de processus démocratiques ?
06:14Qu'est-ce qu'on fait avec l'éducation et la formation des jeunes ?
06:17Puisque vous êtes sur les réseaux sociaux, les géants du numérique américain, soutenus d'ailleurs par Donald Trump,
06:22auxquels finalement ils ont donné aussi leur soutien, refusent toute réglementation européenne
06:27au nom de la liberté d'expression sur les réseaux.
06:29Est-ce que notre continent peut, doit les brider ?
06:32Vous faites référence là aussi à toute la discussion qui a eu lieu à Munich avec le vice-président Vance
06:37au sujet de la liberté d'expression qui ferait défaut sur le continent européen.
06:41Franchement, écoutez, moi je m'étais attendu à toutes les critiques possibles et imaginables
06:44de la part des États-Unis, trop de régulation, que sais-je moi, trop de vieilles institutions, ce que vous voulez.
06:52S'il y a bien une critique que je n'ai pas vue venir, ça je dois l'avouer, c'est la critique sur la liberté d'expression.
06:58La liberté d'expression en Europe, elle est absolument garantie, c'est aussi la diversité des opinions,
07:04on doit toujours faire attention à ce que ça ne recule pas,
07:06mais la liberté d'expression, ce n'est pas la liberté à dessein avec des objectifs politiques
07:10de faire exprès de diffuser des fausses informations, donc évidemment il faut un certain contrôle.
07:15Les médias, pendant des dizaines et des centaines d'années, ont quand même respecté une certaine déontologie.
07:21Et maintenant, depuis une vingtaine d'années, avec les réseaux sociaux,
07:25chaque personne qui a un compte sur un réseau social devient potentiellement un émetteur d'informations pour le monde entier,
07:31seulement il n'y a plus la déontologie qui est liée.
07:34Alors il faut évidemment, et on doit pouvoir s'attendre à cela,
07:37que celles et ceux qui dirigent les entreprises, ils soient attentifs.
07:40Sinon, on mine les conditions même d'exercice de la démocratie.
07:44Alors au Conseil de l'Europe, vous voulez aussi renforcer notre résilience face aux ingérences étrangères.
07:50Des élections importantes approchent en Roumanie, en Pologne et en Roumanie.
07:55On a vu d'ailleurs des présidentielles annulées sous l'influence de TikTok,
07:59qui avait clairement lui voté ou appelé à voter pour un seul et même candidat, pro-russe qui plus est.
08:04Est-ce que vous regardez de près ce qui se passe là-bas ?
08:07Là-bas et ailleurs. On a beaucoup, beaucoup d'élections partout.
08:09La démocratie, c'est vivant. Donc en fait, il faut qu'on vote assez souvent.
08:13Et c'est un système qui est très fragile.
08:16Mais ce système, parce qu'il fait participer les masses à des décisions communes,
08:21il est très, très fragile aux manipulations de l'opinion ou de l'information.
08:24Et donc, les ingérences étrangères sont, on le voit de plus en plus fortement,
08:29c'était le cas en Roumanie, c'est le cas en Moldavie.
08:33Quelles sont les conséquences ?
08:34Tout le monde a des réponses différentes.
08:35Moi, je ne suis pas en mesure de juger de ce qui s'est passé en Roumanie,
08:38parce que je n'ai pas les détails.
08:39Je constate simplement qu'une cour compétente pour le faire a pris la décision d'annuler les élections
08:45et de les refaire.
08:47C'est une des réponses possibles.
08:49En même temps, il faut que la démocratie puisse s'exprimer.
08:51Et il faut surtout mettre de l'ordre dans ce débat.
08:54Tout le monde se plaint d'ingérences étrangères, mais on ne parle pas toujours des mêmes.
08:58Quand j'étais en Géorgie, le parti au pouvoir en Géorgie se plaint d'influences étrangères.
09:04Le rêve géorgien qui est pro-russe maintenant.
09:07Et il parlait d'ingérences étrangères de la part de l'Ouest et des États-Unis.
09:11Si on va en Moldavie, on se plaint d'ingérences étrangères qui viennent de la Russie.
09:15Et la manipulation de l'opinion, parce que ce système, c'est le meilleur, la démocratie.
09:19Il n'y a pas mieux.
09:20J'en connais des bien pires.
09:21Mais il n'y a pas mieux.
09:22Par contre, il est très fragile à la manipulation de l'information et de l'opinion.
09:27Et c'est à ça qu'il faut qu'on s'adapte.
09:28Il faut qu'on soit capable de poser des conditions pour que la démocratie fonctionne
09:32dans un monde qui n'est plus celui d'il y a 30 ans.
09:35Alors, les États-Unis n'ont qu'un siège, évidemment, le Conseil de l'Europe, c'est l'Europe.
09:38Donc, on siège d'observateurs au Conseil de l'Europe.
09:40L'administration Trump ne veut plus financer à travers le monde le multilatéralisme,
09:46surtout pas celui qui promeut les femmes, l'égalité, les minorités raciales et sexuelles.
09:50Et au sein même du Conseil de l'Europe, vous vivez une certaine bataille des valeurs,
09:55puisque vous avez quand même, on le disait, 46 pays qui ne sont pas sur les mêmes bases.
09:59La Turquie, la Hongrie, par exemple, refusent de signer une convention contre les violences faites aux femmes.
10:03Comment vous arrivez à conjuguer tout cela ?
10:05Est-ce qu'il y a vraiment une valeur du Conseil de l'Europe ?
10:07Alors, il y a la Convention européenne des droits de l'homme de 1950, qui fête 75 ans cette année,
10:17qui est le texte de base.
10:20Et c'est un texte auquel tous les pays membres adhèrent.
10:23Et ils respectent non seulement la convention, ils doivent non seulement respecter la convention,
10:26mais aussi accepter les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg,
10:30qui sont basées sur la convention et qui peuvent condamner des violations de droits humains.
10:37Ça, ça marche.
10:38Après, naturellement, aller plus loin, il y a une immense diversité de contextes, de réalités différentes.
10:45Aujourd'hui, le monde dans lequel on vit et les valeurs européennes,
10:48on n'est pas en train de voir un mouvement de convergence.
10:50On est en train de voir, depuis une quinzaine d'années, un mouvement où ça diverge.
10:54Et ça, c'est inquiétant.
10:55C'est-à-dire qu'il y a un mouvement qui ne va pas dans la bonne direction.
10:57Cela dit, on peut voir le verre à moitié vide, ce que je viens de faire avec vous maintenant.
11:00On peut aussi le voir à moitié plein.
11:02Les 46 membres du Conseil de l'Europe, par exemple, n'appliquent plus la peine de mort,
11:07alors que sur tous les autres continents, des pays l'appliquent.
11:10On a quand même atteint des choses, ça, c'est le verre à moitié plein.
11:13On a atteint des succès, on a atteint des niveaux ensemble qu'on ne retrouve pas ailleurs
11:18et que nous devons aujourd'hui défendre, protéger.
11:21Et on doit se préparer avec ces éléments autour de la sécurité démocratique dont je parlais.
11:26Cette architecture de sécurité démocratique est donc liée à l'état de droit et aux droits humains
11:31pour, au moment où les conditions seront un peu plus favorables, pouvoir de nouveau progresser.
11:35Sur les violences faites aux femmes, vous avez raison, c'est un vrai sujet d'importance aujourd'hui.
11:40Moi, j'étais très frappé, parfois même choqué, de voir dans des pays très avancés
11:44une forme de libération de la parole, avec des paroles de nouveau inacceptables.
11:48Encore une fois, là aussi, ça recule.
11:50Mais ce n'est pas pour les moments où ça va bien qu'on est là et qu'on a besoin des institutions.
11:54Ce n'est pas quand il fait beau qu'on a besoin d'un parapluie, c'est quand il pleut,
11:58c'est quand le temps est moins bon.
11:59Aujourd'hui, c'est à ça que nous sommes confrontés sur le territoire européen.
12:03Et je crois que c'est pour des moments comme ceux-là, exactement,
12:05que le Conseil de l'Europe a été fondé il y a plus de 75 ans.
12:08Alors, le Conseil de l'Europe qui a aussi, dans des rapports,
12:11critiqué plusieurs pays européens, la Pologne, la Finlande, la Belgique,
12:14pour leur gestion des migrants, là aussi, la montée des discours populistes anti-migrants
12:20ont peut-être fragilisé le droit de ces migrants.
12:25La question qui se pose, ce n'est pas automatiquement de savoir
12:27pour quelle raison une personne s'est retrouvée là où elle se retrouve,
12:29pour quelle raison elle a pris la route où elle a migré,
12:31pour quelle raison elle a voulu changer ses conditions de vie
12:34ou a été contrainte de changer ses conditions de vie.
12:37Ça, c'est une question dont on peut discuter.
12:39C'est une question de nature politique.
12:41Comment est-ce qu'on traite, par exemple, dans les États membres,
12:43la question des demandes d'asile ?
12:45Comment est-ce que c'est fait ?
12:45C'est fait de manière différente dans différents pays.
12:47Tout ça, ça dépend d'une politique, je dirais, nationale,
12:51ou de politique nationale.
12:53Mais rien ne permet, rien ne permet, dans ces conditions,
12:57de ne pas respecter la dignité humaine,
13:00de ne pas respecter les droits humains.
13:03Votre pays d'origine, je le disais, la Suisse,
13:05est un peu à arc-obouter sur son modèle confédéral des cantons.
13:09On refuse toute adhésion à l'Union européenne,
13:11où elle aurait, évidemment, l'inverse n'est pas vrai, d'ailleurs,
13:15où elle aurait tout à fait le droit d'entrer.
13:17Et elle a même eu des relations houleuses avec ce club des 27.
13:21C'est peut-être un peu moins vrai, maintenant,
13:23avec Donald Trump, qui est en train de couper un petit peu
13:26et lancer une guerre commerciale.
13:28Vous savez, nous avons, disons, sur le continent européen,
13:32d'abord des pays qui sont fortement intégrés au marché européen,
13:37à la culture européenne, sans forcément être membre de l'Union européenne.
13:42Mais cela dit, des pays comme la Suisse que vous mentionnez,
13:45la Suisse a des relations très stables avec l'Union européenne
13:48au travers d'accords bilatéraux.
13:50Alors, c'est un peu plus compliqué, c'est quand même très complexe, en fait.
13:53On a plus de 120 accords bilatéraux qui règlent tout ça.
13:56Il y a des discussions qui se poursuivent.
13:58Mais la question que vous posez, elle est effectivement essentielle.
14:01Est-ce que, confrontés à l'agression de l'Ukraine par la Russie,
14:06à la présence de la Chine, aux États-Unis,
14:08qui semblent, dans le fond, créer beaucoup d'incertitudes
14:11et se détacher ou remettre en question le lien avec l'Europe,
14:15eh bien, nous sommes tous sur le même continent.
14:18Et puis, on peut faire ce qu'on veut,
14:19mais la géographie, elle est assez têtue.
14:20D'ailleurs, Donald Trump, qui véritablement a engagé
14:24un bras de fer commercial,
14:25la Suisse taxée à 31% plus que les Européens, d'ailleurs.
14:29Nous, taxés également,
14:31est en train de réfléchir à la façon de répondre.
14:35Est-ce que ce protectionnisme voulu outre-Atlantique,
14:39il est en train aussi de porter atteinte à nos démocraties ?
14:41Alors, je pense d'abord que cette manière de faire,
14:45en fait, la stratégie qui me paraît présente dans toute cette affaire,
14:49c'est la création d'incertitudes.
14:50C'est la création d'incertitudes.
14:53C'est le poids de la parole, les annonces et des virages.
14:58Regardez, ces droits de douane sont annoncés de manière très claire
15:02et ensuite, ils sont suspendus pour une certaine durée.
15:05Puis après, ils vont revenir, peut-être sous une autre forme.
15:07Tout ça crée de l'incertitude.
15:09Il ne faut pas s'essayer trop déstabiliser par cela.
15:11C'est naturellement très négatif, mais pour tout le monde.
15:13Je veux dire, je pense que les premiers concernés à toucher,
15:17si c'était vraiment mis en œuvre,
15:18ce seraient les consommatrices et les consommateurs des États-Unis.
15:23Mais après, ça a des conséquences dans le monde entier.
15:25Donc, il ne faut pas se laisser trop emporter par tout ça.
15:28Il faut essayer, dans le fond, d'isoler tout ce bruit de fond qu'on a
15:31pour recomprendre un peu où est la musique, où est la partition,
15:34et de réfléchir, non pas seulement dans l'ultra court terme,
15:37on est trop dans le court terme aujourd'hui.
15:38On pense, un jour, on annonce des droits de douane,
15:40le lendemain, ils sont suspendus pour 90 jours.
15:44C'est quoi 90 jours ? C'est rien, c'est une paille.
15:46On doit penser à ça, trouver le chemin dans cet environnement très mouvant,
15:50mais toujours avoir aussi une idée sur qu'est-ce que nous souhaitons être,
15:54où est-ce que nous souhaitons nous trouver dans 3 ans, dans 10 ans, dans 25 ans.
16:00Ça paraît hallucinant aujourd'hui de penser à 25 ans,
16:02mais c'est dans cet ordre de catégorie qu'on doit penser pour les générations
16:05qui vont nous suivre.
16:07Et c'est dans cet ordre de catégorie, d'ailleurs,
16:08que de certains immenses pays sur d'autres continents pensent.
16:12Arrêtons de penser avec l'horizon temporel de la validité
16:17d'une publication sur les réseaux sociaux.
16:19Pensons à long terme.
16:20Voilà, moins d'immédiateté et un peu plus de long terme.
16:23Merci à vous, Alain Berset, d'avoir été notre invité aujourd'hui,
16:27secrétaire général du Conseil de l'Europe.
16:29Merci à vous de nous avoir suivis.
16:31Restez en notre compagnie pour reparler de droits de douane
16:33voulu par Donald Trump.
16:35La guerre commerciale aura-t-elle lieu ?
16:36C'est notre débat tout de suite,
16:39en compagnie de mes confrères de la chaîne parlementaire
16:43et de Xavier Chemiseur.
16:44Bonjour, bonjour à tous et merci de nous rejoindre pour ce débat d'ici l'Europe.
16:54Un débat consacré aux tensions commerciales entre les Etats-Unis et l'Union européenne
16:59après la hausse des droits de douane décidée par Donald Trump début avril
17:04et puis hausse finalement suspendue pour trois mois par le locataire de Washington
17:08à la stratégie si imprévisible, même si finalement, on va l'avoir,
17:13l'acier, l'aluminium et le secteur automobile européen
17:15continuent de faire les frais de droits de douane américains à hauteur de 25%.
17:21Alors s'ouvre désormais une période de négociation entre Américains et Européens
17:26pour s'accorder sur de futurs tarifs commerciaux.
17:29Donald Trump, qui a reçu la dirigeante italienne d'extrême droite Georgia Meloni
17:34à la Maison-Blanche, se dit sûr à 100% qu'il trouvera un accord avec l'Europe.
17:39Les Américains souhaitent en réalité que Bruxelles supprime
17:43certaines barrières commerciales non tarifaires,
17:46autrement dit nos normes européennes, écologiques, sanitaires
17:49ou encore numériques qui s'imposent aux entreprises américaines sur notre sol.
17:54Et puis enfin, malgré cette suspension de la hausse des droits de douane
17:57pour l'Union Européenne, la guerre commerciale est à son comble
18:00entre Washington et Pékin et l'Union Européenne pourrait en faire les frais
18:04en voyant son marché inondé de produits chinois bon marché.
18:08Et pour en parler, trois invités, Guillaume Clossat à nos côtés,
18:12ancien Sherpa au Conseil européen, fondateur du groupe de réflexion européen
18:18Europa Nova qui a publié son rapport Europe 2040,
18:22demain c'est aujourd'hui, j'imagine qu'on en parlera,
18:24et puis en duplex, deux euros députés français,
18:28Jean-Marc Germain, membre du groupe des socialistes et démocrates
18:33au Parlement européen et du PS en France, bien sûr,
18:36Marie-Pierre Védrenne également pour le groupe Renu Europe
18:38au centre de l'hémicycle et en France, membre du Modem,
18:42le parti du Premier ministre François Bayrou.
18:45Alors Guillaume Clossat, cette suspension pendant trois mois
18:48de la guerre commerciale que Donald Trump voulait initialement déclarer aux Européens,
18:52est-ce que c'est une opportunité ou finalement une période d'incertitude
18:57qui va fragiliser notre économie européenne ?
18:59D'abord, ce n'est pas une surprise, contre toute attente.
19:01Dans la stratégie européenne, il y avait l'idée que les Américains
19:04allaient progressivement attaquer d'abord leurs employés durs,
19:08c'est-à-dire le Mexique, le Canada, et puis leurs premiers alliés,
19:11puis les Européens, et qu'il y aurait des allers-retours,
19:14et qu'il fallait laisser d'abord les premiers attaqués réagir
19:18avant d'attendre un statu quo où on pourrait négocier.
19:21Et donc la situation dans laquelle on se trouve,
19:23cette pause de 90 jours, quelque part, en tout cas,
19:27des discussions que moi j'ai eues avec la Commission européenne
19:29depuis décembre, janvier, même avant l'élection,
19:31on s'attendait à ce que les choses se passent à peu près comme ça.
19:34Le sujet, c'est que c'est une guerre tarifaire,
19:39mais pas que.
19:42Et c'est pas seulement une affaire de normes,
19:44parce que les Américains aussi ont des normes,
19:46ils ont des normes extraterritoriales qui sont extrêmement invasives,
19:49aussi extrêmement problématiques,
19:50et si on peut en discuter, pourquoi pas ?
19:52Mais il y a aussi une affaire de...
19:53Qu'est-ce qui se joue derrière cette guerre commerciale ?
19:55C'est beaucoup plus que ça.
19:57C'est que c'est l'idée de prendre les Européens en étau,
20:02entre les Américains et les Chinois,
20:03et forcer les Européens à s'aligner sur les Américains.
20:07Et le délai de 90 jours, c'est pas non plus un délai aléatoire.
20:12Il n'a pas été choisi au hasard.
20:13Il englobe en fait le sommet de l'OTAN qui doit avoir lieu fin juin.
20:17Et l'idée, c'est de montrer aux Européens
20:20combien ils sont dépendants de la sécurité américaine,
20:24et donc de créer, même pas un rapport de vassalité,
20:28un rapport de domination.
20:29Donc on est vraiment la cible.
20:30Et donc il y a un enjeu pour nous, essentiel,
20:33qui est de s'organiser en puissance
20:35pour pouvoir être écouté et reprendre l'agenda,
20:41reprendre la main dans l'agenda.
20:42Parce qu'aujourd'hui, en fait, depuis le jour de l'élection de Donald Trump,
20:44chaque jour, il lance un truc et on est réactif.
20:48Donc il faut changer d'attitude et arriver à être proactif.
20:50Et reprendre la main.
20:51C'est pas du tout évident.
20:52Marie-Pierre Vedren, Donald Trump a préféré négocier avec les Européens,
20:56les futurs tarifs commerciaux.
20:57Il a aussi félicité l'Europe qui considère que l'Europe a eu une bonne réponse.
21:04Est-ce qu'il faut, sans féliciter,
21:06ou au contraire, se méfier, se dire qu'il y a quelque chose qui cloche
21:08quand Donald Trump félicite l'Union européenne ?
21:12Il faut effectivement, tout simplement, défendre nos intérêts,
21:17défendre nos législations, défendre nos entreprises.
21:21Je rejoins ce qui a été dit par Guillaume Clossard.
21:23Il n'y a pas de surprise.
21:25Il y a une idéologie qui est défendue par Donald Trump et par son administration.
21:30Il s'attaque à l'ordre international.
21:32Il s'attaque aux intérêts européens.
21:34À nous de rester calmes, à nous surtout de rester unis.
21:37Parce que la vraie force de l'Union européenne, c'est son unité.
21:39Alors, que d'échelle d'État et de gouvernement aient discuté
21:43avec l'administration Trump, c'est une chose.
21:45Mais il ne faut pas oublier que l'interlocuteur,
21:48ça doit être la Commission européenne.
21:49Et que nous devons être unis et déterminés derrière la Commission européenne.
21:53Et nous devons créer un rapport de force
21:55qui est favorable également aux intérêts européens.
21:59Donc moi, je pense que nous devons aussi utiliser
22:02tout notre arsenal juridique que nous avons contribué
22:04à façonner dans le mandat précédent.
22:07Taxer, là aussi, où ça peut faire mal.
22:10Du côté des Etats-Unis, que ce soit du côté des services,
22:13utiliser l'instrument sur la coercition économique.
22:15On a un panel large.
22:16On doit être prêt à l'utiliser,
22:17à avoir une vraie volonté politique pour cela.
22:20Reste à savoir jusqu'où, finalement,
22:22peut aller cette riposte européenne
22:24et jusqu'où on veut aller.
22:26Je vais me tourner vers vous, Jean-Marc Germain.
22:29Une suspension de la guerre commerciale,
22:31ouf de soulagement pour les Européens.
22:33Mais finalement, quand les droits de douane s'élèvent à 10%,
22:35qu'ils sont encore à 25% sur l'acier,
22:38sur l'aluminium, sur l'automobile,
22:40la Commission européenne, finalement,
22:42a-t-elle été plutôt naïve,
22:44en suspendant, elle aussi,
22:45les mesures de rétorsion par les 27,
22:48juste avant ce revirement américain, d'après vous ?
22:51D'abord, dans votre question,
22:54il y a le fait qu'il n'y a pas de suspension
22:58de la guerre commerciale.
23:00Il y a simplement une pause qui est faite
23:03à un niveau intermédiaire de 10%,
23:04mais rappelons que les droits de douane
23:07étaient de 1,97% avant cette hausse.
23:12Donc, on fait bien face à une hausse sans précédent
23:14des droits de douane,
23:15même si elle n'est pas aussi élevée
23:17que ce qui était prévu.
23:18Deuxièmement, il faut avoir,
23:21pour juger les mesures de rétorsion
23:24que prend la Commission européenne,
23:27bien percevoir quelle est la stratégie de Trump.
23:30Et pour moi, cette stratégie,
23:31c'est une stratégie de long terme
23:33qu'il a énoncée à Davos.
23:35Il veut que les entreprises
23:36qui souhaitent vendre des produits
23:38sur le sol américain,
23:39les produisent sur le sol américain.
23:42Il l'a énoncée très clairement en ces termes.
23:44D'où ces droits de douane très violents,
23:47très importants,
23:47et imposés sur tous les continents.
23:51Ensuite, il a fait face à une réalité
23:53qui est que la hausse des droits de douane
23:56n'est pas sans conséquences non plus
23:58sur l'économie américaine.
24:00Peut-être que ça,
24:01ce n'est pas sa principale préoccupation,
24:03mais ce qui a dû le faire changer
24:06ou en tout cas temporiser,
24:07c'est le fait que les bourses
24:09se sont effondrées.
24:11Et n'oublions pas que l'administration Trump,
24:13c'est une administration d'oligarques,
24:1513 milliardaires qui sont dans son administration,
24:20dans son gouvernement,
24:21et ça, c'est un impact très fort.
24:23Et donc, que l'Union européenne
24:26prenne son temps pour prendre les mesures adéquates,
24:29certes, mais la réponse doit être ferme.
24:31C'était d'ailleurs le premier mot
24:33d'Ursula van der Leyen.
24:35Les mesures qui seront prises
24:37doivent être adéquates
24:38pour minimiser les dommages
24:40sur l'économie européenne
24:43et sur les différents pays européens.
24:46Et puis surtout,
24:46j'imagine qu'on y reviendra,
24:47mais il faut se préparer
24:49à ce que cette nouvelle situation
24:51avec des barrières douanières
24:52bien plus élevées que par le passé,
24:55dure et donc que l'Europe
24:56soit davantage en maîtrise
24:59de sa propre production.
25:00Et donc, augmenter et stimuler
25:04le made in Europe.
25:05Guillaume Clossa, les négociations,
25:07ça y est, ont commencé
25:08entre Bruxelles et Washington.
25:10Est-ce que les Européens
25:12peuvent espérer, au terme de cette crise,
25:14finalement déboucher sur un accord
25:16de libre-échange transatlantique
25:17entre l'Union européenne et les États-Unis ?
25:19La vérité, c'est qu'il y a eu des discussions
25:21sur un accord de libre-échange
25:22la dernière décennie,
25:24que beaucoup d'Européens étaient sceptiques,
25:26mais que le blocage a eu lieu
25:27parce que c'est les Américains
25:28qui n'en voulaient pas.
25:29Les Américains n'en voulaient pas
25:30parce que, dans leur compréhension
25:33des choses,
25:34l'Europe était la première puissance
25:36commerciale mondiale, industrielle,
25:38mais aussi à l'époque en matière
25:39de services,
25:40et que cet accord allait profiter
25:42massivement aux Européens.
25:43Et donc, il a été bloqué, en fait.
25:45Et on a vu les dynamiques
25:46dès 2013,
25:47parce que la population américaine,
25:52les dirigeants américains,
25:53on se rappelle à la fois que Donald Trump
25:55et Mme Clinton avaient dit
25:58qu'elles mettraient fin aux discussions
26:00parce qu'ils considéraient que ce n'était pas favorable aux Américains.
26:03La réalité, c'est que ce n'est toujours pas favorable aux Américains.
26:06Et donc, oui, nous, on a intérêt à un accord de libre-échange.
26:08En fait, on a même intérêt
26:10à étendre nos accords de libre-échange
26:13parce qu'on reste la première puissance exportatrice mondiale.
26:16Et de loin,
26:16que la moitié de notre...
26:18la création de richesses dépend, pour nous, du libre-échange.
26:21Le temps d'assurer la transition vers une autonomie,
26:24ça va durer une, deux décennies.
26:27Donc, il y a beaucoup de choses...
26:29On a besoin de ce libre-échange.
26:30On en a absolument besoin.
26:32Alors, le fait qu'on dope notre marché intérieur
26:34et qu'on ait une vraie stratégie de croissance,
26:36ce qui n'est pas le cas,
26:37on a un agenda de compétitivité,
26:38mais compétitivité ne veut pas dire croissance.
26:41Et les Européens ont besoin de croissance interne
26:43et d'augmenter leur potentiel de croissance.
26:45Et pour ça, il faut, sans doute une relance,
26:47mais il faut aussi augmenter la population active.
26:51Alors, on a grandi avec l'idée d'un marché
26:53qui permettait des rapports commerciaux
26:58qui adoucissaient les mœurs,
26:59un peu comme la musique ou la danse.
27:02Mais pour danser, il faut être deux.
27:03La guerre commerciale, elle est suspendue,
27:05mais elle est là.
27:07Maros Sefcovic, le commissaire européen au commerce,
27:09l'a clairement dit.
27:10Pour lui, l'Union devra faire des efforts importants.
27:12Marie-Pierre Védrenne et Jean-Marc Germain.
27:14L'Union européenne doit-elle faire des efforts,
27:17assouplir ses normes pour trouver un accord avec les États-Unis
27:21et finalement renier à ce principe de cette Europe
27:24qui protège qu'on vote en permanence dans nos émissions ?
27:27Assouplir ses normes, non.
27:32Assouplir ses normes, ce n'est pas notre objectif
27:35et ce n'est pas notre rôle.
27:37Par contre, il est certain que la politique commerciale
27:40est en fait la projection de nos normes intérieures.
27:43Donc, je rejoins ce qui a été dit.
27:45On doit renforcer notre marché intérieur,
27:48véritablement mettre en œuvre ce qui a été prôné
27:50dans le rapport Draghi, dans le rapport l'État,
27:52et effectivement multiplier des accords de partenariat
27:56avec d'autres pays du monde.
27:58Mais pour autant, ces accords de libre-échange
28:00tels qu'on doit les concevoir
28:02ne doivent pas abaisser nos normes.
28:05Ça doit être complété par d'autres législations,
28:07telles que la réforme des douanes,
28:08telles que d'autres enjeux.
28:10Mais multiplier, diversifier, en tout cas,
28:13nos sources d'approvisionnement
28:14pour les coûts plus sûrs et plus durables,
28:16c'est un élément indispensable dans le sens.
28:20Jean-Marc Germain, un mot de Giorgia Meloni,
28:22la dirigeante italienne d'extrême droite,
28:24qui a été reçue à la Maison-Blanche par Donald Trump.
28:26D'ailleurs, Donald Trump se dit sûr à 100%.
28:29Je cite qu'il y aura un accord avec l'Europe
28:31sur ses tarifs douaniers.
28:33Est-ce que sur ce dossier, Giorgia Meloni,
28:35par sa proximité politique avec Donald Trump,
28:37est un atout pour l'Union européenne ?
28:41Je ne crois pas.
28:41D'ailleurs, elle l'a dit elle-même
28:43qu'elle n'était pas là au nom de l'Union européenne.
28:46En revanche, qu'elle ait des rapports diplomatiques
28:48avec Donald Trump, c'est tout à fait normal.
28:51Mais je crois que ce qu'il faut vraiment comprendre,
28:54puisque la question de base,
28:55effectivement, vous avez raison de le soulever,
28:58c'est est-ce que nous,
28:59dans cette période où on temporise,
29:01dans cette période où on cherche des solutions
29:03qui sont multiples,
29:07est-ce qu'on doit, au fond,
29:08faire ce que souhaite sans doute Trump le plus
29:11et avec lui, ceux qui l'entourent,
29:15qui est renoncé à nos normes ?
29:16Il faut bien entendre ce que ça veut dire.
29:18Concrètement, c'est-ce qu'on est prêt
29:20à accepter le poulet lavé au chlore ?
29:23Concrètement, est-ce qu'on est prêt
29:24à accepter le bœuf aux OGM ?
29:29Et sur le numérique,
29:32qui est évidemment l'intérêt
29:33de son plus proche Elon Musk,
29:35est-ce qu'on est prêt à accepter
29:37que ces réseaux sociaux
29:40ne soient pas régulés
29:41et puissent, par exemple,
29:43influencer, échanger des résultats d'élection
29:46ou propager la haine en ligne ?
29:50La réponse, elle est claire
29:51quand on la pose comme ça.
29:53Elle est non.
29:53Donc, négocier autant qu'on le peut.
29:55Mais vraiment, j'insiste là-dessus.
29:57En fait, le « doux commerce »,
29:59c'était l'expression de Montesquieu,
30:01c'est le fait d'échanger
30:03entre les uns et les autres
30:05ce qu'on sait le mieux faire.
30:07Effectivement, aboutit à une baisse des prix,
30:10à une amélioration du bien-être des consommateurs.
30:14Mais à terme, ça nous met dans une situation
30:16de dépendance absolue.
30:18Et on le voit bien,
30:19le partenaire commercial
30:20peut nous faire beaucoup de mal.
30:23Et donc, ça repose sur un autre pilier
30:25qui est qu'il y ait des démocraties
30:27qui soient à la tête des continents
30:31avec lesquels on commerce.
30:32Et aujourd'hui, le fait que 70% des gouvernements
30:35soient dans des situations
30:37qu'on appelle de démocratie illibérale
30:39est devenu un problème
30:41pour le commerce international
30:43parce que cette arme de bien-être
30:45se retourne comme une arme économique
30:46contre nous.
30:47C'est pour ça que j'insiste sur le fait
30:48qu'on doit de toute urgence
30:51d'abord protéger les entreprises
30:53qui seront concernées.
30:55Il doit y avoir un plan massif
30:56de l'Union européenne,
30:58comme ça a été le cas pour le Covid,
30:59pour qu'il n'y ait aucune perte d'emploi
31:01dans les secteurs qui soient concernés
31:03et de toute urgence mettre en place
31:05à la fois un bail European rights,
31:08c'est-à-dire favoriser, par exemple,
31:10dans la commande publique,
31:11l'achat européen
31:12et un soutien massif à nos entreprises.
31:15Malgré cette suspension des tarifs douaniers
31:17pour l'Union européenne,
31:18la guerre commerciale est à son comble
31:20entre Washington et Pékin.
31:22Est-ce que l'Union européenne,
31:23Guillaume Clossat,
31:24doit s'en inquiéter économiquement ?
31:26Est-ce que ça va retomber sur nous, cette guerre ?
31:29Bien sûr que ça peut retomber sur nous.
31:31Dans la mesure où on a besoin
31:33à la fois du marché américain
31:34et du marché chinois.
31:35Et il ne faut pas du tout
31:37qu'on soit amené à choisir
31:38entre l'un ou l'autre des marchés.
31:40La stratégie des Américains,
31:42c'est nous obliger à choisir
31:43pour le marché américain,
31:45en disant,
31:46vous comprenez,
31:47on vous apporte la sécurité,
31:48et donc vous ne pouvez pas avoir
31:49le beurre et l'argent du beurre,
31:50c'est-à-dire l'accès au marché chinois
31:51et la sécurité.
31:53D'où cette deadline.
31:55Les Américains veulent nous intégrer
31:56dans cette guerre contre la Chine.
31:57Oui, mais complètement.
31:58Et cette guerre tarifaire
32:00est aussi un instrument
32:02dans cette perspective.
32:03Et ce n'est pas caché.
32:04Il suffit de discuter
32:04avec les responsables
32:05de la fondation Heritage
32:06qui conseillent Donald Trump.
32:09C'est l'objectif stratégique
32:10de faire que les Européens
32:12se rallient,
32:14acceptent finalement
32:15d'être sous la domination américaine
32:17et fassent bloc avec eux
32:19contre la Chine.
32:21Et ce n'est pas du tout
32:22notre intérêt,
32:22ce n'est pas notre vision du monde.
32:23On est pour un monde multipolaire,
32:25on n'est pas pour un monde
32:26complètement déséquilibré
32:27et qui plus est,
32:28il est hors de question pour nous
32:29de nous mettre sous la domination
32:31d'une démocratie presque libérale.
32:33Parce que c'est en train
32:34de se passer aux Etats-Unis.
32:38Et l'autre risque,
32:39évidemment,
32:40c'est la menace
32:42que brandissent indirectement
32:43les Américains.
32:44C'est-à-dire,
32:44mais bon,
32:45s'il n'y a pas d'accord,
32:45vous allez être submergés
32:47de produits chinois.
32:49Il y a une alternative.
32:49parce que c'est discuter
32:51avec les Chinois sur,
32:53et on l'a déjà fait
32:53dans le passé,
32:55sur un package quantité,
32:57qualité de produits
32:58qui sont acceptés en Europe.
33:01Mais il nous faut
33:02une grande discussion
33:02à l'échelle globale.
33:04Et je pense qu'il faut
33:05créer un rapport de force,
33:07un rapport de puissance
33:08qui nous permette
33:09de discuter avec les Américains.
33:10Parce qu'aujourd'hui,
33:10on n'est pas audibles.
33:12Ce qui est bien,
33:12c'est que c'est un sujet
33:13qui est mouvant.
33:14On aura l'occasion
33:15d'en débattre et d'en redébattre.
33:17Merci à vous trois.
33:17Merci, Alexandre.
33:18Merci à vous trois
33:18d'avoir participé
33:19à cette émission.
33:21Merci à vous
33:21qui nous avez suivis
33:22dans ce débat
33:23qui agitera encore
33:24l'avenir de l'Union européenne.
33:27Merci de votre fidélité
33:28et à bientôt.
33:29Restez avec nous
33:30pour d'autres informations.
33:31Sous-titrage Société Radio-Canada

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