État de droit: "Je crois qu'on ne mesure pas le basculement qu'on est en train de vivre sur les fondements juridiques qui ont constitué la France", assure l'avocat Mourad Battikh
170 parlementaires LR ont signé une tribune en soutien à Bruno Retailleau dans Le Figaro après ses propos polémiques sur "l'État de droit", qu'il a jugé "ni sacré ni intangible" ce dimanche. Pour les députés et les sénateurs des Républicains, "l'État de droit est essentiel à la démocratie mais il n'a jamais été figé".
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00:00Je crois qu'on ne mesure pas le basculement qu'on est en train de vivre sur les fondations,
00:06sur les fondements juridiques qui ont constitué la France depuis près de 200-250 ans.
00:11Il y a un moment dans l'histoire de France où on a décidé de faire une révolution française,
00:15on a décidé que le roi ne pouvait plus décider à lui seul de la politique générale de la nation
00:21et on a décidé d'encadrer ces règles du jeu par un état de droit,
00:25c'est-à-dire que les gouvernés et les gouvernants se soumettent à cet état qui est supérieur aux gouvernés et aux gouvernants.
00:32Et donc, ce que dit aujourd'hui le ministre de l'Intérieur, c'est un basculement sans précédent.
00:37C'est-à-dire, moi, ministre de l'Intérieur, je vais pointer du doigt l'indépendance de la justice
00:43et je vais vous dire comment la justice doit être rendue, je vais définir les nouvelles règles du jeu et je vais décider.
00:49Je vous arrête tout de suite. Pourquoi un ministre ou un gouvernement ne pourrait pas changer la loi quand la loi n'est pas adaptée ?
00:58On va parler tout à l'heure, en fin d'émission, d'Israël.
01:01Israël, qui est en dehors de la guerre, qui est dans une situation d'insécurité permanente,
01:07fait évoluer son droit en permanence, justement, pour se protéger des agressions.
01:12Et alors, on le fait évoluer jusqu'où ? En fonction de ce que décide le peuple ?
01:16Et si le peuple décide qu'il fallait le rétablissement de la peine de mort, on fait évoluer ou on ne fait pas évoluer ?
01:20Qu'est-ce qu'on fait sur la peine de mort ? Allons jusqu'au bout du raisonnement.
01:25Si on va jusqu'au bout du raisonnement et que le peuple dit, puisque c'est ce que Bruno Rotailleau dit,
01:31il dit « je suis le porte-voix du peuple ». Et si le peuple dit « allons jusqu'au rétablissement de la peine de mort », est-ce qu'il faut le faire ?
01:37Est-ce que le peuple demande ça ?
01:39Bien sûr, bien sûr, aujourd'hui, si vous faites les sondages, bien sûr, si vous faites les sondages,
01:43le peuple, sur certains dossiers, sur certaines infractions, il dit « moi, je suis pour le rétablissement de la peine de mort ».
01:48Vous voyez bien que, intellectuellement, on ne peut pas aller au bout de cette idée de courir derrière le peuple et de courir derrière le populisme.
01:58C'est ça, l'état de droit.
01:59Ce que vous voyez, c'est que les droits de droit ne marchent plus et ils ne marchent plus.
02:04Sur beaucoup de fronts, ils ne marchent plus. Vous le voyez très bien.
02:08Vous le voyez bien qu'il y a une insécurité qui est galopante.
02:11Vous voyez bien qu'il y a un taux de réitération et de récidive qui est énorme.
02:17Vous voyez bien que nous sommes dans un pays où il y a énormément de zones qui ne sont pas sécurisées, où les Français ont peur.
02:26Ils le disent, les Français, ou pas les Français d'ailleurs, ceux qui vivent en France, ils le disent.
02:31Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, le Rassemblement national est en train de monter, comme d'ailleurs dans beaucoup de pays européens,
02:38où l'extrême droite monte pour ces raisons-là.
02:41Je me permets de vous apporter quelques éléments concrets du quotidien d'un humble avocat pénaliste.
02:47Les peines qui sont prononcées par les juridictions pénales aujourd'hui, les juridictions correctionnelles, n'ont jamais été aussi sévères.
02:54C'est pas moi qui le dis, c'est plusieurs magistrats, etc.
02:58Ça ne résout pas le problème.
03:00Ça ne résout pas le problème.
03:05C'est très important, ça ne résout pas le problème.
03:07Donc l'idée de faire croire à ceux qui nous regardent, de dire que la justice n'est pas assez sévère, qu'il faut mettre des peines plus sévères,
03:13qu'il faut plus de moins, ce n'est pas ça la solution, M. Trahard.
03:17Vous le savez, la solution...
03:19La vraie solution c'est qu'il y ait un suivi judiciaire qui soit à la hauteur et une exécution des peines qui soit à la hauteur.