Deuil périnatal : Briser le silence de cette douleur innommable
Dans un poignant témoignage, Valérie partage sa douloureuse expérience de devenir mamange, mettant en lumière la réalité souvent cachée et passée sous silence des parents endeuillés.
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00:00C'est apprendre à reconstruire sa vie, il y a un avant et un après.
00:04Pour moi, le deuil périnatale, c'était une très grosse souffrance.
00:11Samedi après-midi, à l'heure du goûter, je me lève du canapé et j'ai rompu la poche des os.
00:17Je me suis rendue au CHOR et après, tout s'est enchaîné dramatiquement.
00:22J'ai été hospitalisée pour surveillance. Au bout de quelques jours, j'ai accouché normalement,
00:26mais elle ne pouvait pas survivre.
00:28On m'a expliqué comment ça allait se passer.
00:30On m'a dit qu'on allait accoucher en salle de naissance.
00:33On me demande si l'un ou les deux parents veulent voir le bébé à la naissance.
00:39On ne comprend pas ce qui se passe. Il y a l'incompréhension, l'injustice.
00:42Il y a un gros moment de déni au début.
00:44Si on ne réagit pas, on se dit que peut-être ça ne va pas se passer.
00:48Mais malheureusement, la réalité nous rattrape.
00:51C'est surtout l'après qui était assez vague,
00:53parce qu'il n'y a pas de structure, de process mis en place pour toutes ces personnes
01:00qui sont en deuil périnatal dans certaines structures hospitalières de La Réunion,
01:04où on reçoit un flyer.
01:06C'est grâce au flyer que j'ai découvert l'association Nos Tous Petits de La Réunion.
01:10On a décidé de prendre en charge nous-mêmes les obsèques de notre petit garçon
01:14et de participer à la cérémonie d'adieu organisée par l'association Les Tous Petits.
01:17On lui a dit au revoir quand on l'a mis dans le cercueil au CHOR,
01:20mais vraiment, le vrai au revoir, et vraiment, symboliquement,
01:24ça a été la cérémonie des adieux organisée à Saint-Pierre.
01:28Ça a été compliqué de revenir à la maison, de continuer,
01:31et c'est surtout de revoir les autres après.
01:33La cellule proche, on va dire, eux, ils sont au courant à l'instant T,
01:36mais ceux qui étaient un peu plus éloignés, qui m'ont connue enceinte
01:40et qui me revoient six mois après, hélas, qu'est-ce qui se passe ?
01:44Pourquoi il n'y a pas de poussette ?
01:46Après, avec l'association, justement, on fait des piquenics ou des groupes de parole
01:50et vraiment, là, on a un discours, on entend d'autres personnes
01:54parler le même langage que nous.
01:56Il n'y a pas de tabou, en fait, parce que dans la société,
01:58actuellement, parler judaï-périnatale, c'est très compliqué.
02:01Les gens en ont peur, donc on n'en parle pas.
02:03Et la pire chose qui peut arriver pour des parents qui ont perdu leur bébé,
02:07c'est que l'entourage fasse comme s'il n'existe pas.
02:09Pour nous, il n'y a pas de question, en fait, parce qu'il existe,
02:12il a existé et il existera toujours dans notre cœur.
02:15Les rencontres organisées par l'association, vraiment,
02:18c'est une bouffée d'air à chaque fois parce que
02:21certains peuvent avoir peur quand on y va en disant
02:24on va pleurer tout le long, on va ressasser tout.
02:27Non, on ne pleure pas, on parle, justement, on est légitime à cet endroit-là.
02:30Et ça permet de donner aussi des encouragements
02:33aux malheureux nouveaux parents qui arrivent
02:37et qui sont dans le désarroi le plus total.
02:40Tout doucement, ça va mieux, mais il y aura forcément un autre jour
02:43où ça ira moins bien, une date anniversaire
02:46ou le prénom qu'on va entendre dans la rue, que ce n'était pas prévu.
02:49Voilà, donc ça revient, on est comme dans un océan.
02:52Des fois, il est très calme et des fois, il est un peu plus agité,
02:55mais au fil du temps, les vagues sont quand même un peu plus légères.
02:59Et on dit que de la douleur innommable,
03:04on apprend à vivre avec une douce peine.
03:06Je veux dire à toutes les personnes qui sont concernées par ça
03:09qu'elles ne sont pas seules et que même si à l'instant T
03:12je pense que ce n'est pas possible de remonter la pente,
03:16ce n'est pas possible de croire en l'avenir un jour après l'autre.
03:20Il faut accepter sa peine, il faut la vivre en fait,
03:22il ne faut pas essayer de la colmater trop vite.
03:24On avance comme on peut.
03:25Il n'y a pas de mode d'emploi et un jour ça peut aller,
03:28le lendemain un peu moins,
03:30mais après on apprend quand même à vivre avec.
03:32Et on puise notre force avec une mamange
03:35avec qui c'est devenu une très bonne amie, Vanessa.
03:38On aime à se dire que nos petits garçons jouent ensemble sur leur nuage
03:41et rigolent en nous voyant faire notre vie en bas.