• il y a 2 mois
Xerfi Canal a reçu Stephan Pezé, professeur des universités à Toulouse School of Management, Université Toulouse Capitole, pour parler de l'engagement des salariés pour le climat.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcription
00:00Bonjour Stéphane Peset.
00:10Bonjour Jean-Philippe.
00:11Stéphane Peset, Toulouse School of Management, co-auteur dans la revue française de gestion
00:15avec Christelle Théron, également Toulouse School of Management, d'un papier consacré
00:18aux activistes internes qui œuvrent pour le climat, les collectifs d'activistes internes,
00:25marcher sur des lignes de crête, comment les collectifs de salariés engagés pour
00:28le climat tentent de transformer leur entreprise de l'intérieur ? Quatre lignes de crête
00:33que vous identifiez et donc sur lesquelles il faut se préparer à marcher si on veut
00:37s'engager.
00:38Est-ce que vous pouvez nous les développer ? Je vais vous aider d'ailleurs.
00:40Un, il faut faire exister dans la durée.
00:42Oui, oui.
00:43Le premier challenge c'est déjà d'avoir un collectif qui permet d'être plusieurs
00:47et pas tout seul pour porter ces sujets.
00:49Quand on a envie de pousser l'entreprise à intégrer plus fortement les enjeux socio-écologiques
00:53dans ses activités, tout seul c'est difficile, à plusieurs c'est mieux.
00:56Le but c'est d'aller chercher du monde et puis pour la direction par exemple, avoir
01:00un collectif constitué de plusieurs centaines de salariés, tout de suite ça représente
01:04une certaine envie des salariés d'agir plus sur ce sujet et donc on devient visible sur
01:08la carte et on devient une partie prenante.
01:10Et on devient crédible.
01:11Exactement.
01:12L'idée c'est d'aller chercher par des actions de sensibilisation par exemple des
01:14nouveaux membres et d'entretenir la dynamique des actions dans la durée pour faire en sorte
01:18que le collectif vive, continue à exister et ne disparaisse pas par exemple s'il y
01:21a des membres actifs pour une raison x ou y qui quittent l'entreprise.
01:24Deuxième ligne de crête, il faut savoir enrôler au-delà des jeunes cadres.
01:28Tout à fait.
01:29Donc là c'est le profil des salariés qui s'engagent, c'est forcément aujourd'hui
01:32des gens qui ont plutôt une forte sensibilité aux enjeux socio-écologiques et qui ont la
01:35capacité à trouver du temps dans leur emploi pour travailler en plus de leur travail sur
01:39ces sujets et qui n'ont pas peur d'être visibles et remarquées dans l'entreprise
01:43par leur engagement.
01:44Donc on a plutôt des jeunes cadres qui travaillent sur ces collectifs, en tout cas les profils
01:48que l'on identifie à partir des données publiques que l'on a étudiées, c'est plutôt
01:52ce type de profil, mais coui de des salariés moins sensibles, coui de des autres catégories
01:56socio-professionnelles.
01:57Donc il faut savoir trouver des actions qui vont permettre de se tourner vers ces salariés,
02:01d'aller les chercher, de leur donner envie de participer à ce mouvement collectif.
02:04Dialogie entre conflit et compromis, c'est la troisième ligne de crête.
02:08Oui.
02:09Alors là c'est comment est-ce qu'on peut avoir un agenda de transformation de l'entreprise
02:12de l'intérieur, mais qui soit réaliste.
02:13Et ça se joue dans un premier temps avec différents services dans l'organisation,
02:17en essayant de transformer des processus, par exemple la manière dont on gère les
02:20équipements informatiques, la manière dont on gère les déchets.
02:23Les collectifs ne peuvent pas décider par eux-mêmes de transformer ces processus, il
02:26faut l'accord d'autres services, la transformation pilotée par d'autres services parce que
02:30ça engage leur budget, leur propre périmètre, leurs prérogatives, etc.
02:33Et donc il faut créer une relation avec ces services, se faire reconnaître comme une
02:37partie prenante, les challenger, mais tout en respectant leurs prérogatives pour réussir
02:41à faire passer des changements qui vont dans le bon sens, qui ne sont peut-être pas perçus
02:44comme suffisamment forts et suffisamment rapides, mais qui permettent d'avancer.
02:47Conflit constructif, dirait Marie-Porcure Follette.
02:50Enfin, maintenir son indépendance.
02:52Tout à fait.
02:53Donc là, c'est le dernier point, c'est-à-dire le graal.
02:55Je vais pouvoir m'imposer en tant que collectif comme partie prenante légitime pour discuter
02:59stratégie avec la direction de l'entreprise, en disant qu'il faut qu'on intègre plus
03:03fortement dans notre cœur de métier, dans notre business model, ces enjeux.
03:07Et donc c'est tout à fait difficile parce qu'il faut que l'agenda un peu radical
03:10porté par ces collectifs qui disent « on ne va pas assez vite et on ne va pas assez
03:13fort » soit entendable par la direction.
03:15Donc, il faut traduire ces revendications d'une certaine façon sous une forme qui
03:20soit business compatible et en même temps, il faut maintenir un aiguillon qui permet
03:24quand même de stimuler le fait d'aller un peu plus loin et de faire un peu différemment.
03:28Donc, il faut trouver la bonne position entre ces deux extrêmes pour pouvoir mener ce dialogue
03:34avec la direction et que celui-ci soit à terme générateur de changement.
03:38Bien sûr, l'innovation finalement, au fond, c'est toujours une forme de transformation
03:41et de transgression.
03:42Et de transgression.
03:43Donc, finalement, toutes ces quatre lignes de crête, on les retrouve, on pourrait presque
03:47les généraliser.
03:48Pourquoi pas ?
03:49Extrêmement intéressant.
03:50Merci à vous Stéphane Fezzé.
03:51Merci Jean-Philippe.

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