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Avec l'ouverture du procès du chauffard, la création d'un "homicide routier" revient sur le devant de la scène. Examinée à l'Assemblée nationale, puis stoppée par la dissolution, la proposition de loi doit revenir au Parlement. Éric Pauget, député des Alpes-Maritimes, nous explique ce que cette nouvelle infraction changerait. 

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Transcription
00:00Vous aviez co-écrit la proposition de loi qui vise à définir le terme d'homicide routier.
00:05Concrètement, qu'est-ce que ça changerait ?
00:08Alors d'abord, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que ce terme d'involontaire actuellement dans notre code pénal,
00:13il apparaît comme une double peine pour les victimes et les familles de victimes.
00:16La sémantique même d'involontaire a la tendance à affaiblir et à banaliser la gravité des faits.
00:23Donc ça, il faut bien avoir conscience.
00:25Et la deuxième chose que je voudrais rappeler, c'est de dire que c'est la célèbre citation de Camus.
00:30Vous savez, mal nommer les choses, c'est rajouter du malheur au monde.
00:32Et bien, c'est exactement ça.
00:34C'est-à-dire que mal nommer la gravité d'un fait, c'est rajouter du malheur aux victimes.
00:41Et donc, nous, avec mon ex-collègue Anne Brunira et en ayant beaucoup travaillé avec Yannick Allénaud,
00:46on veut changer la loi, on veut changer le code pénal en créant une infraction indépendante et autonome
00:52dans le code pénal qui viendra s'intercaler entre le chapitre des homicides involontaires et le chapitre des homicides volontaires
00:59et qui s'appellera un homicide routier.
01:02C'est-à-dire qu'on estime qu'à partir du moment où quelqu'un a volontairement consommé de la drogue,
01:07volontairement consommé de l'alcool, volontairement dépassé les vitesses autorisées,
01:13on ne peut pas se satisfaire de la notion d'involontaire.
01:17Et donc, c'est en ce sens que ce texte de loi, il est important
01:20parce que c'est quelque chose d'assez novateur dans notre droit français, dans le code pénal.
01:24– Éric Pogey, ce n'est pas qu'une question de sémantique ?
01:29Est-ce que la loi derrière change en termes, par exemple, de punition, de peine ?
01:36– Alors, le quantum des peines, ce n'est pas le plus important
01:39parce qu'à travers les auditions qu'on a menées, les études qu'on a menées,
01:43il s'avère que le quantum maximal est très rarement prononcé par les juges.
01:47Pour ce type d'affaires, en moyenne, c'est entre 24 et 36 mois qu'il est prononcé,
01:51quand on sait qu'ils ont cours entre 5 ans, 7 ans et 10 ans au maximum.
01:55Donc, nous, notre idée, ce n'est pas vraiment de renforcer du quantum
01:59à partir du moment où il est très rarement prononcé,
02:01c'est d'aider la justice, aider les magistrats à mieux juger
02:05et avoir une qualification beaucoup plus précise.
02:07Et en ce sens, les juges et les magistrats pourront mieux juger
02:12et ont fait le pari qu'ils prononceront des peines plus fortes et plus fermes.
02:16Mais le plus important, ce n'est pas ça.
02:17Le plus important, c'est vis-à-vis des victimes.
02:19On parle aujourd'hui de l'ouverture du procès d'Antoine Allénaud.
02:22On est deux ans après les faits.
02:25Depuis deux ans, la famille Allénaud vit l'enquête,
02:28elle vit l'instruction, elle prépare ce procès
02:30et sans arrêt, on leur parle de ce terme d'involontaire.
02:34Je peux vous assurer que pour être très proche d'eux
02:36et pour beaucoup travailler avec les familles de victimes,
02:38c'est une double peine qui est terrible,
02:40qui ne leur permet pas de faire le deuil de ce qui s'est passé.
02:42Ça veut dire que votre objectif, c'est aussi de remettre les victimes,
02:46les familles des victimes au cœur de la justice ?
02:48L'ADN même, l'essence même de ce texte de loi,
02:51c'est un texte qui est fait pour les victimes et pour les familles de victimes
02:55pour que malheureusement, quand on a ce drame horrible
02:59de perdre un enfant dans ces conditions,
03:01sans arrêt, le système judiciaire ne leur rappelle pas cette notion d'involontaire.
03:05Parce que je le disais au début de mes propos,
03:07ça banalise, ça affaiblit la portée des faits.
03:10Et ça, c'est tout à fait insoutenable quand on a perdu un enfant.

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