Avec Bruno Fuligni, Auteur « Le Génie Gourmand » (INPI) & Serge Nadaud, Grossiste et Président de la CNTF (Confédération Nationale de la Triperie Française)
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00:00Métro, partenaire des restaurateurs et commerçants indépendants, vous présente...
00:05Sud Radio 10h-11h, Vergniaud fait le marché.
00:09Bonjour les amis, et bon dimanche à vous tous.
00:12Alors ce matin, on va remplir notre cabas du marché de plein d'inventions incroyables.
00:18Et oui, figurez-vous qu'on parle souvent de produits alimentaires,
00:22on parle pas souvent des ustensiles, des ustensiles dans le sens le plus large,
00:27de tout ce qui est utilisé autour de la cuisine et des produits alimentaires pour les transformer.
00:34Puisque au cours de l'histoire de l'alimentation,
00:37la transformation des aliments a occupé une grande place.
00:40Et ce matin, on s'adresse à un auteur spécialiste de ce sujet.
00:46Sud Radio, Vergniaud fait le marché.
00:49Mesdames et messieurs, j'ai avec moi aujourd'hui un génie, un génie gourmand.
00:53C'est comme ça, non pas qu'il se nomme, mais c'est comme ça que s'appelle son livre.
00:57Le génie gourmand, le génie gourmand, bonjour Bruno Fulini.
01:00Bonjour.
01:01Bruno Fulini, alors vous êtes un personnage assez étonnant,
01:05on va dire dans le paysage politique français, puisque vous êtes un haut fonctionnaire.
01:10C'est-à-dire que vous êtes au service de nos politiciens, au sens le plus large.
01:16De la République.
01:17De la République, voilà, vous êtes dédié à l'usage de la République.
01:21Et en même temps, vous êtes un auteur extrêmement prolixe,
01:25puisque vous avez publié combien d'ouvrages Bruno ?
01:2830 livres.
01:2930 livres, et vous n'êtes pas vieux en plus.
01:31De plus en plus quand même, chaque jour un peu plus.
01:35Voilà, dans la fleur de l'âge, 30 livres, c'est déjà une belle bibliothèque.
01:40Parce que, est-ce que c'est votre métier d'être écrivain avant tout ?
01:43J'ai toujours écrit, j'ai toujours aimé écrire, et puis aussi j'ai toujours cherché la petite bête.
01:48C'est-à-dire fouiller un peu, autrefois dans les tiroirs de mes grands-parents,
01:52aujourd'hui dans les archives de toutes sortes d'institutions.
01:55Et je vous assure que quand on commence à chercher, on trouve des trésors,
01:58on trouve des choses extraordinaires.
02:00Et c'est ce qui m'a mis sur la piste de ces inventeurs,
02:04puisque figurez-vous qu'il existe en France une institution publique
02:08qui s'appelle l'Institut National de la Propriété Industrielle.
02:11L'INPI ! L'INPI, mais oui !
02:13L'INPI, en fait, conserve les originaux des brevets déposés en France
02:18depuis la Révolution française.
02:20Il y a eu une loi en 1791 qui a créé le brevet d'invention,
02:24avec un directoire des brevets auprès duquel on pouvait déposer tous ces traits de génie.
02:29D'où le titre du livre, c'est pas moi le génie,
02:32c'est cette intelligence des Français, de tous ces inventeurs,
02:38certains très célèbres, d'autres complètement oubliés.
02:41C'est très touchant parce qu'il y a plein d'artisans,
02:45des boulangers, des pâtissiers, des bouchers, des confiseurs
02:49qui ont eu des idées et qui les ont fixées sur le papier,
02:52souvent qui ont fait des dessins parfois magnifiques
02:55pour expliquer leur invention et pour préserver leur droit, bien sûr, sur ces inventions.
03:00Et tout cela, ce sont au total 8 millions de documents,
03:04des brevets, des marques de fabrique aussi que l'INPI collecte.
03:08Et voilà, je me suis jeté dans ce corpus-là qui est incroyable,
03:12qui est assez négligé des historiens, c'est plutôt des avocats
03:15qui font des recherches d'antérieures marques.
03:17C'est vrai que les historiens ne pensent pas forcément à regarder ces documents-là.
03:22Or, ils sont extraordinaires.
03:24L'année dernière, j'avais publié un premier livre,
03:26Le génie humain, sur les brevets dans toutes les disciplines,
03:30les premiers engins volants, les premiers deux roues, les premières automobiles.
03:34Mais évidemment, en France, il y a beaucoup de brevets
03:37qui ont trait à la bouffe, la bonne bouffe ou la bouffe industrielle.
03:41Il y a un petit peu de tout, il y en a pour tous les goûts.
03:43Mais il y a un très grand nombre de brevets sur tout ce qui peut permettre
03:47de préparer, conserver, transformer les aliments, voire de créer des aliments nouveaux.
03:53D'autant que vous, vous avez eu un pied, comme vous le disiez, dans la République.
03:58Vous êtes encore un rédacteur assidu de l'Assemblée nationale,
04:02il faut des gens pour écrire, pour compiler tous ces textes et les mettre en forme.
04:07Et puis, vous êtes un gourmand.
04:09Vous n'êtes pas obsédé, comme je le suis,
04:12mais vous êtes en tout cas intéressé au premier chef, à la gastronomie,
04:16à tout ce qui se consomme.
04:17Et du coup, au cours de votre oeuvre, je dirais,
04:21c'est ponctué de livres qui ont trait, effectivement, à l'alimentation.
04:25Moi, je veux citer, par exemple, parce que vous connaissez pour ça,
04:29qui est une sorte de biographie des plus grands mangeurs
04:33ou des plus grandes mangeuses de notre histoire.
04:36Notre histoire et pas seulement la nôtre, d'ailleurs.
04:38Ça remonte à l'Antiquité, du monde.
04:40Et alors, un livre que j'adore chez vous, c'est
04:45où vous avez été fouillé un petit peu, en définitive,
04:48dans les menus de bord et les découvertes des explorateurs.
04:53C'est ça, tous les récits de grands voyageurs,
04:56fourmis de repas, de recettes.
04:59Alors, forcément, un peu bizarre quand vous êtes sur une île lointaine
05:02ou au fin fond de la jungle,
05:04ou que vous êtes le premier à entrer en territoire tibétain.
05:07Évidemment, il n'y a pas de restaurant, il n'y a pas d'hôtel.
05:10Vous vous débrouillez comme vous pouvez.
05:12Et lorsque vous rencontrez en particulier les populations locales,
05:15évidemment, c'est très mal vu de refuser.
05:18Bien sûr, jusqu'aux anthropophages.
05:20C'est ça bien le problème.
05:22Effectivement.
05:23Et donc, dans les Gastronomes de l'Extrême,
05:24je m'étais amusé à rassembler des récits, c'est une anthologie,
05:28des récits de ces voyageurs du XVIIIe, XIXe, XXe siècle
05:32qui ont été confrontés à des expériences culinaires étonnantes,
05:35parfois concluantes, parfois un petit peu difficiles,
05:39il faut bien le dire,
05:40les plus effroyables étant, contrairement à ce qu'on peut croire,
05:43celles du Grand Nord.
05:45Il y a des récits de Paul-Émile Victor, par exemple,
05:49confrontés aux habitudes alimentaires des Inuits,
05:53qu'on appelle encore Esquimau à son époque,
05:55ou aussi les premiers voyageurs qui entrent en contact avec les Lapons
06:00sont un tout petit peu surpris quand même par, par exemple,
06:03ces viandes qu'on laisse faisander des mois sur des tas de pierres.
06:06C'est encore un Falland, à mon avis, le plat le plus repoussant
06:10qui est le requin pourri.
06:12Et ça, je dois dire que j'ai goûté pas mal de choses dans le monde,
06:16mais ça, là, je crois qu'on dépasse les bornes.
06:18Donc, je peux comprendre que dans le Grand Nord,
06:20parfois, c'est difficile à supporter.
06:22Mais revenons à votre génie gourmand, Bruno Fulligny.
06:25Alors, toute cette liste, cet inventaire incroyable du génie
06:31des créateurs et des inventeurs en matière de produits alimentaires,
06:36à mon avis, elle est, je dirais, très sous-tendue
06:40par le besoin de progresser, et notamment dans la conservation
06:44des aliments avant de les traiter.
06:46Pour moi, le grand génie, ça a été Nicolas Apert.
06:49Avec l'apertisation, vous en pensez quoi, vous ?
06:51Oui, bien sûr. Nicolas Apert, c'est l'homme qui a déposé
06:54le brevet de la boîte de conserve en 1823,
06:58il y a un petit peu plus de deux siècles.
07:00C'est tard, quand même, dans l'histoire de l'humanité.
07:03C'est récent. À l'échelle de l'histoire humaine,
07:05c'est extrêmement récent, mais c'est une révolution.
07:07Vous avez raison, ça a tout changé.
07:09À partir du moment où on peut conserver durablement
07:11des aliments périssables, évidemment, ça change complètement la donne,
07:15non seulement pour la conservation, mais pour la diffusion des aliments.
07:18Et à partir du moment où on a la boîte de conserve,
07:20on va pouvoir manger des aliments très loin de leur lieu de production.
07:25Nicolas Apert, il faut le dire, est aussi un bienfaiteur, un philanthrope.
07:30La loi révolutionnaire créant le brevet d'invention
07:34comportait un article qui autorisait, et autorise toujours d'ailleurs,
07:38à faire don de son invention à l'humanité.
07:41Il en a fait don, et il est mort dans la misère, le pauvre homme,
07:44alors que derrière lui, d'autres industriels...
07:48Je pense par exemple à Arsène Sopiquet, voilà un nom bien connu.
07:52Arsène Sopiquet s'est emparé de l'invention quelques générations plus tard.
07:56Lui, il a inventé la petite clé qui permet d'ouvrir si facilement la boîte de conserve,
08:02car celle de Nicolas Apert est une boîte de conserve un peu cuirassée,
08:05pas très facile à utiliser, en tout cas à l'échelle d'un ménage, d'une famille.
08:11Alors que Sopiquet, Arsène de son prénom, va démocratiser la chose,
08:15va diffuser ses sardines en particulier à une très grande ampleur.
08:19Avec la petite languette qu'on tourne, grâce à cette clé.
08:22Autre innovation d'Arsène Sopiquet, il comprend que la boîte de conserve,
08:27bien sûr c'est un outil pour conserver, mais c'est aussi un support.
08:32Avant même que le mot marketing n'existe, il va orner ce support,
08:38comme c'est un support métallique, il peut avoir une certaine brillance,
08:41et donc il va faire des boîtes extrêmement belles, avec des labels du style
08:46sardines des lords, sardines des diplomates, bref, on a l'impression de déjeuner
08:51à Buckingham Palace alors qu'en fait on ouvre une boîte de sardines Sopiquet.
08:54Et vous, vous n'avez pas fait la sardine des députés, non ?
08:57Vous ne l'avez pas créée celle-là ? Non, elle n'est pas venue.
08:59Après les lords et les diplomates...
09:01Mais il y a une sardine du progrès qui existe, qui a été déposée à l'Unipi.
09:05Alors peut-être que la grande invention, en tout cas en matière de conservation,
09:10après l'apertisation ou la stérilisation des aliments, c'est peut-être le froid.
09:16C'est-à-dire l'arrivée du réfrigérateur, et notamment domestique.
09:20Alors la réfrigération, c'est le brevet carré qui a changé également beaucoup de choses.
09:26Alors bien sûr dans la sphère domestique, mais pensons aussi au commerce.
09:29Bien sûr, les chambres froides.
09:31Les chambres froides et les bateaux, frigos, qui permettent de transporter du poisson.
09:36Vous savez, le débat actuel sur le Mercosur n'est pas tout à fait neuf.
09:40Déjà au XIXe siècle, évidemment, les éleveurs français s'inquiètent de l'arrivée de la viande argentine,
09:45des carcasses entières dans des bateaux frigos.
09:48Ça c'est possible à partir du moment où on maîtrise les techniques de la réfrigération.
09:52C'est-à-dire que, même si on tient, et vous y tenez, j'y tiens, aux traditions en gastronomie,
10:00en fait, nos traditions sont assez récentes parce qu'un certain nombre d'inventions ont complètement réinventé
10:07toute la chaîne culinaire et gastronomique.
10:10Et au fond, les aliments, même les plus traditionnels, dont nous pouvons nous délecter,
10:15sont préparés, conservés, diffusés, de manière qui n'a plus rien à voir avec ce qui avait lieu au XVIIe ou au XVIIIe siècle.
10:25On suppose qu'au moment des naissances, au moment des inventions, la population a peur de la nouveauté
10:32comme on peut avoir peur aujourd'hui du micro-ondes ou comme on a eu peur de la congélation.
10:36Oui, ou comme, vous savez, les français ont eu peur des pommes de terre.
10:40Ah oui, alors là, c'est un vaste sujet.
10:43Mais effectivement, c'est une innovation qui n'est pas très bien passée au début.
10:48Ce tubercule qu'on arrachait du fin fond de la terre, qui venait d'un autre continent,
10:53était hautement suspect, voire un petit peu diabolique.
10:56Donc, les ustensiles, c'est comme les aliments, il faut le temps de les digérer dans notre société.
11:01De les assimiler, exactement.
11:03Restez avec moi, Bruno Fulini, on va progresser dans la lecture de votre livre
11:07Le génie gourmand, pour aller peut-être vers du plus anecdotique, du plus extraordinaire. Dans une minute.
11:12Métro, partenaire des restaurateurs et commerçants indépendants, vous présente...
11:17Sud Radio, 10h-11h, Fergnoffel marché.
11:21Mes amis, avec Bruno Fulini, ce matin en studio pour la sortie de son livre,
11:26Le génie gourmand, en collaboration avec l'INPI, l'Institut National de la Propriété Intellectuelle.
11:32Industriel.
11:33Industriel, pardon.
11:34Qui conserve, en fait, tous les brevets depuis la naissance de cet institut.
11:40Depuis 1791, première loi qui crée le brevet d'invention,
11:45tous les brevets déposés sont conservés par une institution qui s'appelle maintenant effectivement l'INPI,
11:50qui a porté des noms différents dans l'histoire, mais c'est le même fonds d'archives.
11:54Ce sont 8 millions de documents, soit des brevets, soit des marques de fabrique.
11:59Alors, ce qui est intéressant, vous dites 1791, autrement dit, dès la Révolution Française,
12:05on a donc une révolution, je dirais, nationale, la République naît,
12:12et en même temps, je veux dire, les brevets, c'est-à-dire la possibilité de protéger sur le plan industriel,
12:19c'est la révolution industrielle naissante.
12:21Exactement, et les deux font corps, en quelque sorte, c'est-à-dire que les révolutionnaires français,
12:25les législateurs, puisque nous parlions d'Assemblée Nationale,
12:29les législateurs considèrent, c'est écrit dans la loi de 1791,
12:33comme un droit de l'homme de pouvoir déposer et protéger ses inventions.
12:38Et donc, il y a l'idée à la fois de protéger les droits et donc la propriété de l'inventeur,
12:42mais pour que la société et la collectivité en profitent.
12:45Donc le brevet est public, simplement si vous l'utilisez, si vous l'exploitez,
12:49vous payez une redevance au déposant.
12:52C'est aussi simple que ça, mais c'est génial, ça change tout.
12:55Parce qu'avant la révolution, tout reposait sur l'arbitraire royal,
12:58c'est-à-dire que vous pouviez inventer tout ce que vous vouliez,
13:02vous en étiez dépossédé très facilement, et seul pouvait l'exploiter,
13:06dans le cadre d'un monopole, la personne qui obtenait une patente royale.
13:10Mais la patente n'était pas forcément décernée à l'inventeur.
13:13Bien sûr que non, il y avait sûrement des privilèges qui étaient réservés à certains grands de ce royaume.
13:19Et là, tout un chacun, en définitive, peut faire œuvre de génie civil.
13:24Et aujourd'hui encore, c'est-à-dire que chacun d'entre nous, français ou étranger,
13:28peut déposer ses inventions auprès de l'INPI.
13:32Un étranger peut le faire en France ?
13:34Bien sûr, et un français peut le faire à l'étranger,
13:36parce que vous êtes protégé dans le ressort de l'organisme qui collecte les brevets.
13:41Donc il faut faire attention, quand vous inventez quelque chose,
13:44il ne faut pas le déposer uniquement dans un pays,
13:46parce que sinon vous risquez de vous faire voler au-delà des frontières.
13:50C'est intéressant ce que vous dites, parce que moi ça m'est arrivé au cours de ma vie
13:54de déposer des marques, peut-être, ou effectivement des process.
13:59On ne se prémunit pas assez contre les attaques de l'étranger.
14:04Alors ça coûte cher de déposer à l'étranger.
14:06Ça a un coût, forcément.
14:08Donc il faut bien le calculer au moment où on se dit qu'on veut diffuser un produit ou une marque,
14:13savoir si on aura intérêt à élargir à l'Europe ou à d'autres pays du monde.
14:19Bruno Fellini, venons-en à votre livre « Le génie gourmand »,
14:22qui est vraiment une somme d'astuces et de génie, comme ça porte son nom,
14:27c'est-à-dire vraiment d'intelligence en matière d'ingénierie.
14:31Moi j'ai été fasciné quand j'étais gosse, et je pense que vous c'est pareil,
14:35par à la fois tous ces battleurs devant les grands magasins
14:39qui vous vendaient des objets souvent inutiles,
14:41mais avec une telle verve qu'on puissait pas les acheter.
14:44Et puis plus sérieusement, le fameux concours Lépine,
14:48qui est une mine de trésors de cet ordre.
14:52Si vous voulez, depuis la fin du XVIIIe siècle,
14:55vous avez toutes sortes de bricoleurs de génie,
14:58ou aussi de praticiens, des cuisiniers,
15:02des gens qui sont aux prises avec toutes sortes de corvées répétitives
15:06dans les différents métiers de bouche,
15:08et qui imaginent l'ustensile qui va tout changer.
15:11Alors des fois c'est très ambitieux,
15:14par exemple il y a un extraordinaire ensemble
15:17qui s'appelle le Factotum Limonadier Cuisinier.
15:20C'est un gros engin qui vous permet de préparer tout un repas avec un seul foyer.
15:25C'est-à-dire qu'on cuit à la fois les entrées, la volaille,
15:29on fait chauffer le café, etc. avec un seul feu.
15:32Donc une grande économie d'énergie.
15:34On vient de réinventer le air fryer,
15:36qu'ils ont maintenant dans tous les grands magasins,
15:39un mini four à tout faire en quelque sorte.
15:41Et puis après il y a des ustensiles beaucoup plus anecdotiques,
15:44mais qui sont franchement réjouissants,
15:46et qui souvent aussi m'intéressent en tant qu'historien,
15:48parce qu'ils reflètent le contexte d'une époque.
15:50Je vous donne quelques exemples.
15:52Il y a un monsieur Coquet, c'est son nom,
15:54qui fait la guerre de 1870-71.
15:58C'est très désagréable, pense-t-il, de transporter des couverts.
16:02Ça peut vous blesser, ce n'est pas pratique dans une poche.
16:05Donc il invente les couverts Coquet, auxquels il donne son nom,
16:08mais c'est un jeu de mots parce qu'ils sont dans une coque.
16:10Ce sont des petits couverts qui se replient à l'intérieur d'une coque ovale
16:13qui, elle, ne peut pas vous blesser.
16:15En fait, il a inventé le couvert de camping.
16:17Dans un contexte plus guerrier, il y a un siècle et demi,
16:20il met au point ce qui est vraiment l'ancêtre de tous ces petits couverts
16:23tellement pratiques qu'on en porte lorsqu'on va pique-niquer.
16:27Pendant 1889, c'est la grande exposition universelle à Paris.
16:31Le clou de l'exposition, c'est la tour Eiffel.
16:33Il y a un monsieur Chaubert qui invente le moulin Chaubert.
16:37C'est juste un moulin à poivre qui a la forme de la tour Eiffel.
16:40Vous avez une petite tour Eiffel qui est posée sur votre table.
16:42C'est très décoratif.
16:43C'est tout à fait, évidemment, dans l'air du temps, en 1889.
16:46Et si vous tournez le sommet de la tour, vous avez du poivre qui tombe dans votre assiette.
16:51C'est génial, j'adore l'idée.
16:52C'est super.
16:53Aujourd'hui, on ne pourrait plus le faire.
16:55Vu que les droits d'image de la tour Eiffel se moneillent et gèrent.
17:01C'était déjà le cas à l'époque.
17:02Ah oui ? Eiffel était déjà passé par là ?
17:05Oui, tout à fait.
17:06Il y a également des brevets Eiffel, évidemment, à l'IMPI.
17:09C'est un sacré homme d'affaires, Eiffel.
17:11On l'oublie.
17:12Un génie.
17:13Redoutable, redoutable.
17:15Et puis dans les ustensiles, bizarre et rigolo.
17:18Moi, mon préféré, il se trouve que je porte la barbe et la moustache.
17:22Évidemment, comme vous, je suis un petit peu jugé parti, mais quand même.
17:27Vous n'aimez pas les tasses à chocolat ?
17:29Non, mieux que ça.
17:30La cuillère de Gustave Schilck, qui est l'inventeur.
17:34On suppose lui aussi moustachu et sans doute barbu.
17:37C'est un amateur de soupe.
17:39Mais évidemment, la soupe, quand on a une moustache abondante, c'est un peu salissant.
17:43Ce n'est pas très propre.
17:44Ce n'est pas formidable devant les dames, etc.
17:46Et donc, il invente une cuillère avec un petit couvercle qui se rabat.
17:50C'est-à-dire que vous puisez la soupe.
17:52Et puis lorsque la cuillère approche de la moustache, il y a un petit couvercle qui la recouvre
17:56pour que vous puissiez l'introduire dans le gosier sans vous salir.
17:59Excusez-moi, Bruno, mais alors là, je vous prends au mot,
18:02il m'avait semblé apercevoir ça dès le 18e, 17e pour avaler des potions trop amères
18:10où, effectivement, on couvrait la cuillère, on avait juste le bout du bec.
18:14C'est possible, il y a eu une sorte de seringue aussi, des choses comme cela.
18:18Ça, c'est moyen.
18:20Le clister buccal.
18:22Très sympa, effectivement.
18:24Et alors, toutes ces inventions, est-ce qu'il y a trace de leur commercialisation
18:30dans les registres de l'INPI ?
18:33Dans les registres, non.
18:34Dans les registres, on dépose le brevet, on dépose la marque.
18:38Mais parfois, il y a des publicités qui sont adjointes ?
18:42Vous avez fait des recherches dans ce sens ?
18:44Lorsque vous déposez une marque, pas un brevet,
18:46mais lorsque vous déposez une marque,
18:48vous déposez également toute la typographie, les visuels,
18:52l'univers graphique, ce qu'on appellerait aujourd'hui le logo,
18:54le terme est totalement anachronique.
18:56Et donc, vous avez comme ça de gros registres avec en pleine page
19:00des centaines et des centaines de marques, de dessins, de logos,
19:04des choses vraiment très réjouissantes.
19:06En particulier, à partir du moment où on réussit à imprimer en couleur,
19:10à la fin du 19e siècle,
19:12souvent avec un peu de brillance ou un petit peu d'encre dorée,
19:16on a des choses absolument magnifiques pour magnifier toutes sortes
19:20de pâtés, de saucisses, de fromages, de tous les produits de la terre,
19:24et encore plus tout ce qui est dessert, sucrerie, douceur,
19:28dont nos grands-parents, évidemment, étaient très friands,
19:30peut-être plus que nous encore.
19:32Votre évocation, elle est très empreinte d'une certaine nostalgie.
19:36Ça se sent quand même le 19e siècle, c'est-à-dire la révolution industrielle,
19:41l'espèce de possibilité de tout un chacun,
19:45dans son petit atelier ou dans son garage,
19:49ou simplement dans sa cuisine, d'inventer des objets.
19:51Après, j'imagine que plus on avance dans l'époque,
19:55et dès qu'on passe au 20e siècle,
19:57ça devient des processus plus industriels, de recherche,
19:59et des laboratoires qui vont déposer des brevets.
20:02Oui, et puis les brevets sont moins beaux aussi,
20:04parce que petit à petit, les choses se formalisent,
20:07et ce sont des formulaires à peu près tous identiques,
20:09avec des dessins de type dessin industriel.
20:11Donc on n'a plus ce côté un petit peu artiste, un petit peu fou du 19e siècle.
20:17Après, on a parfois des inventeurs très modestes
20:21qui vont devenir de grands industriels.
20:23Je pense par exemple à un petit boulanger de Nanterre
20:27qui avait eu l'idée de recuire ses invendus,
20:31donc les pains invendus, il les débité en tranches
20:33et il les cuisait pour qu'ils soient croustillants.
20:35Ce monsieur s'appelait Eudebert,
20:37et il a déposé le brevet de la biscotte.
20:39Il a breveté à la fois le nom de biscotte et le procédé.
20:42La biscotte, je rappelle que c'est biscotti,
20:44ça veut dire deux fois cuit.
20:46Les Italiens le savent bien.
20:48Exactement, et du coup il a créé à Nanterre,
20:51en partant de sa petite boulangerie un peu miteuse,
20:53il a créé une énorme industrie
20:55qui a employé plus de 1000 personnes,
20:57et effectivement un véritable empire
20:59qui s'est développé jusqu'à la fin des années 50.
21:02Incroyable.
21:04Pour autant, c'est la marque du XXe siècle.
21:08Sans le brevet, il n'était sans doute pas le seul boulanger
21:12à cuire ses invendus pour en faire quelque chose.
21:15Soit pour les croquer lui-même, les tartiner le matin,
21:17soit pour les proposer à sa clientèle.
21:19Mais lui, son vrai trait de génie,
21:21c'est d'avoir breveté la chose,
21:23d'avoir considéré que c'était en soi une invention.
21:25Parce qu'il n'était peut-être pas le seul à griller son pain.
21:27Bien sûr, je pense que beaucoup de boulangers faisaient ça.
21:30Mais lui, l'a breveté, a fait de son nom une marque,
21:34et à partir de là, a bâti un véritable empire industriel.
21:38Grâce à des droits qu'il avait acquis en déposant un brevet.
21:41Donc voyez, on peut quand même faire fortune avec du pain rassis,
21:44c'est quand même un encouragement pour tous.
21:46Dans une période d'antigaspies comme la nôtre.
21:48Restez avec nous, on va découvrir encore d'autres merveilles
21:50dans ce livre Le génie gourmand de Bruno Fellini.
21:53On se retrouve tout de suite après ça.
21:55Métro, partenaire des restaurateurs et commerçants indépendants,
21:58vous présente.
22:04Le génie gourmand, c'est ce qui nous occupe ce matin
22:07en compagnie de l'auteur de ce livre, Bruno Fellini,
22:11qui est avec nous pour parler un peu de l'ingéniosité
22:16des inventeurs français en matière d'alimentation
22:19et de produits alimentaires, et également de cuisine.
22:22Mais Bruno Fellini, la cuisine, c'est devenu difficile aujourd'hui
22:27parce qu'on n'a pas le droit à l'INPI de déposer une recette.
22:31Enfin, on n'a pas le droit.
22:33On pourrait le faire, mais ça n'a pas de sens.
22:35De toute façon, c'est refusé, parce qu'il y a quand même un examen.
22:38Aujourd'hui, si vous envoyez à l'INPI simplement la liste des ingrédients
22:42et le temps de cuisson, ça ne sera pas pris comme brevet.
22:46Il faut qu'il y ait un process.
22:48C'est ça. Il faut inventer soit un objet, un instrument,
22:51soit un procédé nouveau qui change tout,
22:54ce qu'ont su faire certains grands chefs.
22:56C'était plus souple dans le passé,
22:58et donc on trouve parfois de véritables recettes.
23:01Mais ça n'est plus possible aujourd'hui.
23:03Et ça m'a amusé aussi de retrouver ces recettes et de les publier,
23:06parce que j'étais oublié, et franchement, certaines font plutôt saliver.
23:09Alors, on a un grand chef inventeur, en tout cas de recettes,
23:13et pas seulement, dans notre histoire, début du XXe siècle,
23:17Auguste Escoffier, qui a laissé son nom d'ailleurs à des recettes,
23:22et à une école, et à des procédés, comme vous le disiez.
23:27Qu'est-ce qu'il a créé, Auguste Escoffier ?
23:30Escoffier, c'est vraiment un homme qui est un innovateur dans l'âme.
23:34Il a profondément rénové même la cuisine elle-même,
23:37l'art du menu, il a beaucoup écrit.
23:41Et alors, dans les archives de l'INPI, on trouve d'abord de lui,
23:45à ses débuts, une machine sympathique,
23:48qui d'ailleurs a été rééditée récemment.
23:50C'est une machine à tourner les légumes et les fruits,
23:53c'est-à-dire à les peler, en fait.
23:55Ah, le truc pour peler les pommes, on pique une pomme dessus,
24:00et il y a une lame, en fait.
24:02Il y a une petite lame qui tourne, et c'est très intelligemment fait,
24:04et de façon très élégante et sans fatigue,
24:06parce qu'évidemment, dans les cuisines, c'est franchement la tâche pénible
24:09de peler les patates et les fruits.
24:11Oui, c'est pas très marrant.
24:12C'est pas très marrant.
24:13Eh bien, avec cette machine, on pouvait peler rapidement des fruits.
24:15Donc, c'est Escoffier qui l'a déposé,
24:18et non seulement il a décrit l'appareil,
24:20mais il l'a dessiné, et le dessin est vraiment très très beau.
24:23Et puis, il a déposé aussi des préparations alimentaires.
24:25Alors, Escoffier, en particulier, pendant toute une période de sa vie,
24:28était assez travaillé par l'idée de rapprocher
24:31les saveurs fruitées et les saveurs lactées.
24:34Et il a déposé un brevet extraordinaire
24:37pour une double crème parfumée aux fruits, je cite,
24:40que les gourmets apprécieront à leur table
24:43comme entremets sucrés dont le parfum est savoureux et suave.
24:47Ça, c'est en 1893.
24:49Il vend bien sa sauce.
24:50Et il faut savoir que sur cette voie-là, l'année suivante,
24:53en hommage à la célèbre cantatrice Nelly Melba,
24:56il a l'idée de rapprocher comme cela une crème glacée
24:59de, comment dire, d'une pêche.
25:02Et ça doit devenir la fameuse pêche Melba.
25:04C'est lui aussi qui l'a créée.
25:06Et dans ses écrits,
25:08Escoffier nous engage à ne pas craindre, en fait,
25:12le progrès scientifique et technique.
25:14Il écrit, par exemple,
25:15« La cuisine, sans cesser d'être un art, deviendra une science. »
25:19Donc là, vous voyez, c'est tout le positivisme,
25:22le scientisme, l'optimisme très grand de la belle époque
25:25où on pense que par la science,
25:27eh bien, on va nécessairement progresser, avancer,
25:30y compris en matière culinaire et gastronomique.
25:33Alors, c'est intéressant parce que ça fait,
25:35je fais une petite digression,
25:37ça fait appel, effectivement, à une nouvelle façon de cuisiner,
25:40le fait d'approcher les produits lactés des fruits
25:43parce qu'on sait que l'acidité, l'acidité des fruits,
25:47elle est très nocive sur la conservation de la crème,
25:50notamment, elle va la faire tourner, etc.
25:52Donc, c'est une manière de dire,
25:54on maîtrise tellement qu'on peut désormais utiliser
25:58des purées de fruits avec des crèmes glacées
26:00ou des crèmes non glacées, d'ailleurs.
26:01Oui, ça nous paraît banal,
26:02mais c'était un petit exploit, effectivement, à l'époque.
26:04Un petit exploit à l'époque, pour pas que ça devienne aigre.
26:06Voilà.
26:07Alors, Auguste Escoffier,
26:09c'est un exemple pour beaucoup des chefs
26:13qui émaillent votre livre
26:15parce qu'en définitive, il décomplexe le cuisinier
26:19qui est considéré quand même comme un manuel.
26:23Et ça en fait une personnalité de la culture gastronomique
26:29qui se permet, du coup, d'inventer.
26:32Pour Escoffier, d'abord, le cuisinier est un artiste.
26:35Simplement, c'est un artiste qui ne doit pas se priver
26:38de la technologie, qui ne doit pas se priver
26:41des outils nouveaux, des moyens nouveaux
26:43que lui fournit le génie de ses contemporains.
26:46Et donc, à partir de là,
26:48ça change, bien sûr, la façon de faire la cuisine.
26:51Mais soyons, élargissons un petit peu le propos.
26:54Toutes ces brevets, toutes ces inventions,
26:56elles nous montrent en sens inverse
26:58comment la psychologie d'une époque agit sur la cuisine.
27:01Nous ne mangeons pas aux mêmes heures
27:03et au même rythme que nos ancêtres.
27:05Par exemple, les soupes.
27:08Pendant très longtemps, la soupe,
27:10elle m'y tenait très longtemps, pendant des heures,
27:12parfois pendant des jours.
27:14Au XIXe siècle, on se dit que c'est trop long,
27:17qu'on ne peut pas, qu'on n'a pas les moyens,
27:19que ce n'est pas possible.
27:20Et avec un inventeur qui est un chimiste
27:22qui s'appelle Liebig, on va inventer...
27:25Un Allemand, j'imagine.
27:26Un Allemand.
27:27Alors au départ, il a fait ce concentré de viande
27:29qui est une sorte de bouillon hyper concentré
27:31pour sauver la fille d'un ami
27:33qui était en villégiature chez lui
27:35et qui était tombée gravement malade,
27:36qui ne pouvait plus s'alimenter.
27:37Et il lui a sans doute sauvé la vie
27:39en l'alimentant avec des petites cuillerées
27:41de ce liquide extrêmement reconstituant,
27:44extrêmement concentré.
27:45Mais après, ce chimiste a compris
27:48qu'il y avait plein d'applications
27:50qui se sont développées
27:51et les Français ont considéré
27:53que s'ils avaient perdu la guerre de 1870-71,
27:56c'est parce que les troupes allemandes
27:58avec le Liebig préparaient leur soupe
28:00en quelques minutes,
28:01alors que les troupes françaises
28:02perdaient des heures et des heures
28:04à faire la tambouille.
28:05C'est pas incroyable ça ?
28:06Et parfois même à chercher les légumes
28:07et les quelques bêtes qu'ils pouvaient mettre
28:09dans la marmite.
28:11Exactement.
28:12Et à partir de 1870-71,
28:14on a du coup toute une série de brevets
28:16pour faire des soupes instantanées,
28:18des soupes déshydratées,
28:21des concentrés de ceci et de cela,
28:24de façon à pouvoir produire des soupes
28:26très rapidement.
28:27Ça veut dire qu'on a un autre rapport au temps.
28:29Ça veut dire que, que ce soit pour la cuisine
28:31ou pour la consommation,
28:32le temps du repas,
28:33alors au XIXe siècle,
28:34ça reste encore raisonnable,
28:35on n'en est pas encore à ces repas à la va-vite
28:37sur le pouce comme on les fait aujourd'hui,
28:39mais on sent bien que le rapport au temps,
28:41les moyens et la disponibilité
28:43qu'on va consacrer à la cuisine évoluent.
28:45Et ces brevets sont très intéressants là-dessus.
28:48Ils nous montrent la répartition des tâches aussi
28:50entre les hommes et les femmes.
28:52Ils nous montrent également
28:54les ambitions qu'on peut avoir.
28:56Est-ce qu'on est capable,
28:57avec un seul instrument,
28:59de nourrir un grand nombre de personnes ?
29:01Ce qui fait évidemment créer,
29:03comment dirais-je,
29:04des économies d'échelle
29:05et permet de servir des repas chauds
29:07à moindre coût.
29:08Bref, toutes ces préoccupations
29:10sont présentes dans ces brevets.
29:12Bruno Fulini, vous êtes un gourmand,
29:14avant d'être un auteur
29:16extrêmement prolixe.
29:18Eh bien, ce matin,
29:20je vous annonce que nous sommes,
29:22je suppose que vous êtes au courant,
29:24nous sommes dans le mois des produits tripiers
29:26en France.
29:28Les tripiers qui sont une profession,
29:30pas en voie d'extinction,
29:32mais en tout cas en voie de raréfication.
29:34Et j'ai avec nous
29:36le président de la Confédération nationale
29:39de la triperie française,
29:41Serge Nadeau. Bonjour Serge.
29:43Oui, bonjour Assange.
29:44Merci d'être avec nous.
29:45Alors, vous êtes à la fois, je dirais,
29:47très actif sur le marché de Rungis,
29:49parce qu'il y a encore un endroit
29:51où on peut trouver de la belle triperie,
29:53c'est le marché de Rungis.
29:55Et puis, vous êtes président de cette confédération.
29:57Alors, je disais, un petit peu en perte de vitesse,
30:00combien reste-t-il
30:02de tripiers en France aujourd'hui,
30:04d'officines spécialisées
30:06dans la triperie ?
30:08Des officines, comme vous dites, spécialisées
30:10en produits tripiers, il n'en reste pas énormément.
30:12Il reste des tripiers spécialisés
30:14qui sont surtout
30:16implantés sur les marchés.
30:18Des boutiques de tripiers pures,
30:20il n'y en a plus.
30:22Après, sur tous les grands marchés parisiens,
30:25vous trouvez des tripiers détaillants.
30:27Après, vous trouvez également
30:29des produits tripiers chez tous vos bouffés,
30:31en vente-distribution,
30:33en restauration, etc.
30:35La totalité
30:37de la production des produits tripiers
30:39en France est consommée.
30:41Et on est même obligé de passer par l'importation,
30:43étant donné que nous sommes
30:45gros consommateurs de produits tripiers.
30:47Les Français sont gros consommateurs de produits tripiers.
30:49Parce qu'ils cuisinent.
30:51Parce que largement, le produit tripier,
30:53c'est pas que la tripe, oh là que non !
30:55Parce que généralement, c'est des produits
30:57qui se cuisinent, qui se préparent.
30:59C'est des produits qui demandent
31:01un peu de préparation, un peu de savoir-faire.
31:03Ça demande un petit peu de temps.
31:05Et c'est des produits qui font partie
31:07des grandes références
31:09de la gastronomie française.
31:11On trouve dans les grands classiques
31:13le foie de veau, la langue de bœuf,
31:15la tête de veau, des produits nobles
31:17comme le riz de vin.
31:19Et tous ces produits sont consommés
31:21surtout en gastronomie
31:23et en restauration.
31:25Surtout quand on sait ce que ça représente
31:27comme pourcentage de la bête
31:29un riz de veau,
31:31enfin les deux, celui de gorge et de cœur,
31:33les pommes de riz de veau, comme on dit.
31:35Eh bien, figurez-vous
31:37qu'il faut souvent l'importer.
31:39Parce qu'on est gros consommateurs,
31:41on est très friands des riz de veau, par exemple.
31:43C'est un peu l'abat noble, le riz de veau.
31:45C'est l'abat noble, oui, tout à fait.
31:47C'est l'abat noble.
31:49On approche tout doucement des fêtes
31:51de fin d'année et donc
31:53la demande va commencer
31:55à démarrer
31:57et devenir de plus en plus forte.
31:59Et notamment dans la restauration.
32:01Parce qu'aujourd'hui, la répartition
32:03entre le grand public
32:05et les restaurateurs,
32:07vous pouvez l'estimer à peu près ?
32:09Est-ce que le principal
32:11des produits tripiés
32:13sont traités en restauration ou
32:15est-ce que ça va encore dans les foyers ?
32:17La grosse majorité des produits tripiés
32:19sont traités en restauration.
32:21La restauration,
32:23c'est notre vitrine.
32:25Un consommateur va manger
32:27un produit tripié
32:29chez son restaurant, chez le Bistro du Point.
32:31Après, il va peut-être avoir envie
32:33de faire la même recette
32:35chez lui à la maison.
32:37Ça va lui donner des envies, des idées.
32:39Moi, ça me cause en tout cas.
32:41Restez avec nous, Serge Nadeau.
32:43On va se parler un petit peu
32:45de ce large panier, ce large éventail
32:47de produits tripiés que nous propose
32:49le menu français.
32:51C'est un petit coco-éco, mais ça fait du bien.
32:53Métro, partenaire des restaurateurs
32:55et commerçants indépendants,
32:57vous présente...
32:59Sud Radio, 10h-11h,
33:01Fergnaud fait le marché.
33:03Toujours ce matin avec Bruno Fulini,
33:05l'auteur du Génie Gourmand.
33:07On en a parlé en première partie d'émission,
33:09mais c'est aussi un gourmand,
33:11un gourmet.
33:13Et notamment de ces produits
33:15qu'on appelle les produits tripiés,
33:17puisque novembre est le mois des produits tripiés
33:19et qu'il faut les aider, les tripiés.
33:21C'est pas une profession
33:23qui tient le devant de la scène.
33:25Et c'est dommage, parce qu'on a un éventail
33:27de produits absolument merveilleux.
33:29Et ce matin, avec Serge Nadeau,
33:31le président de la Confédération nationale
33:33de la triperie française,
33:35on évoque un petit peu
33:37ces produits qui sont,
33:39vous le disiez juste avant la pub,
33:41plus souvent en restauration
33:43que dans les foyers. Mais c'est peut-être aussi
33:45parce qu'on cuisine de moins en moins,
33:47en tout cas dans les jeunes générations, Serge.
33:49C'est sûr que
33:51la jeune génération
33:53consomme un petit peu moins de produits tripiés,
33:55mais surtout est friand
33:57de bistronomie.
33:59Et donc c'est pour ça un petit peu qu'on cherche à revisiter
34:01tous ces produits, à proposer
34:05des solutions pour consommer
34:07tous ces nouveaux produits.
34:09La sauce de veau, on la cuisine en tempura.
34:11Il y a un truc qui est sympa,
34:13on fait des tatakis de foie de veau, c'est assez surprenant.
34:15Des tatakis de foie de veau ?
34:17Alors en fait, c'est ce qu'on appelle le foie de veau cuit rosé,
34:19comme on devrait le faire.
34:21Snacké avec graines de sésame, sauce soja.
34:23C'est super savoureux
34:25et c'est surprenant. Et des fois,
34:27on ne sait même plus comment manger le foie de veau.
34:29Dites-moi Serge Nadeau,
34:31quand on parle de tatakis,
34:33ça devrait être pratiquement
34:35la cuisson naturelle
34:37du foie de veau. Ce côté un peu rosé
34:39dedans, c'est comme pour le rognon,
34:41mais je dois dire que ça fait peur à certains
34:43d'avoir ce côté légèrement rose,
34:45voire même
34:47presque cru à cœur.
34:49Presque cru à cœur ? Vous savez,
34:51les Libanais sont friands de foie d'agneau,
34:53ils le mangent presque cru aussi.
34:55Ah oui, ça c'est le goût libanais.
34:57Je ne sais pas, on parle de foie d'agneau,
34:59certainement.
35:01D'ailleurs, élargissons un petit peu le sujet,
35:03Serge Nadeau,
35:05les produits tripiés,
35:07c'est souvent confondu avec les tripes.
35:09Pour ceux qui ne sont pas
35:11des amateurs assidus.
35:13Alors que c'est un très large éventail
35:15d'abord d'animaux,
35:17ce sont des races animales
35:19très différentes, puisqu'on peut manger
35:21évidemment des produits tripiés,
35:23comme vous le disiez, d'agneau, de veau,
35:25de bœuf, ou de vache.
35:27Et puis, on peut élargir
35:29même aux canards, par exemple.
35:31Est-ce que le canard fait part
35:33d'un cœur de canard ou un gésier ?
35:35Ça fait partie des produits tripiés
35:37ou pas vraiment ?
35:39Ça fait partie de la volaille,
35:41mais de toute façon, oui, un cœur de canard,
35:43un gésier, ça va être amené
35:45aux produits tripiés également.
35:47Mais nous, spécialistes
35:49produits tripiés, on n'est pas
35:51sur la volaille.
35:53On est sur le quatre pattes.
35:55Dites-moi d'ailleurs,
35:57produit tripié, ça veut dire quoi ?
35:59Ça veut dire que ce n'est pas un muscle
36:01rattaché à un os ?
36:03Écoutez, produit tripié, on va dire que
36:05toutes les parties de l'animal
36:07qui ne sont pas rattachées à la carcasse
36:09sont des produits tripiés.
36:11Vous parlez de muscles, dans les produits tripiés,
36:13on trouve également l'onglet
36:15et la rampe.
36:17Et le cœur, qui est un muscle aussi !
36:19Le cœur est un muscle, mais l'onglet et la rampe,
36:21parfois, on pense manger un steak,
36:23manger un morceau de nom, mais finalement,
36:25quand on mange l'onglet de la rampe, c'est un produit tripié.
36:27Eh oui, parce qu'il n'est pas rattaché
36:29à la carcasse, c'est-à-dire à un os,
36:31par des tendons. Il est flottant,
36:33on pourrait dire, dans la cavité
36:35abdominale ou thoracique.
36:37Bruno, qu'est-ce que c'est vos
36:39produits, vos abats,
36:41les abats que vous aimez particulièrement ?
36:43Déjà, basiquement, la tripe.
36:45Bien sûr, la tripe à la mode de camp, mais aussi
36:47la tripe à la niçoise, qui n'est pas assez connue,
36:49qui est fabuleuse. Ou à la parmesan,
36:51c'est merveilleux, les Italiens.
36:53Et j'allais le dire, à la florentine.
36:55Aux oignons !
36:57Très très finement.
36:59Après, je suis aussi un amateur de lyonnaiserie,
37:01et donc le tablier de sapeur, par exemple.
37:03Le gras double.
37:05Tout ça, ça me parle.
37:07Le cœur, aussi. Alors, aussi bien
37:09la bête salade
37:11de cœur et foie de volaille,
37:13mais bien sûr, il y a le prince, c'est le cœur
37:15de veau farci. Et ça, on peut le faire assez facilement
37:17chez soi, il faut être patient, il faut savoir coudre.
37:19Eh oui, recoudre.
37:21Il faut être un peu chirurgien.
37:23Mais je vous assure que c'est absolument sublime,
37:25délicieux et pas très compliqué.
37:27Serge Nadeau, on a parlé des
37:29lyonnaiseries, comme disait Bruno Fulini.
37:31C'est-à-dire, par exemple, le gras double.
37:33Alors, le gras double, c'est une appellation
37:35pour une préparation de tripes,
37:37de bœuf. Ça a
37:39une mauvaise presse, parce qu'il y a le mot gras.
37:41Gras double, ça évoque le fait
37:43que c'est gras, alors qu'il faut le dire, les tripes,
37:45c'est super maigre et super diététique,
37:47en plus.
37:49Tout à fait, oui. Les tripes, c'est
37:51super maigre, super...
37:53En plus, c'est plein de protéines.
37:55Et puis, la tripe, c'est pas l'intestin, c'est l'estomac,
37:57en général, les estomacs.
37:59C'est un
38:01aliment super intéressant,
38:03pour trouver
38:05une alimentation équilibrée et saine.
38:07On trouve dans les tripes,
38:09c'est-à-dire dans l'appellation tripes de bœuf,
38:11en général,
38:13ce qu'on trouverait dans l'andouille
38:15et l'andouillette pour le cochon. C'est à peu près
38:17le même morceau. C'est un peu comparable.
38:19Et du coup,
38:21c'est du muscle.
38:23Du muscle à fibre longue, du muscle blanc,
38:25il n'y a pas de sang à l'intérieur, mais
38:27c'est du muscle, donc c'est maigre.
38:29Je le répète souvent, parce que
38:31cette appellation gras-double, elle fait peur.
38:33Alors que le tablier de sapeur est beaucoup
38:35plus gras que
38:37le gras-double à la lyonnaise.
38:39Mais on peut parler aussi, par exemple,
38:41de quelque chose qui a aussi un peu
38:43mauvaise presse, mais c'est normal.
38:45Je pense que les enfants sont impressionnables
38:47et si on
38:49leur fait manger de la cervelle
38:51trop tôt, par exemple,
38:53ça peut faire peur, d'autant que la cervelle,
38:55c'est pratiquement que du gras. Alors là, pour le coup,
38:57c'est pas très diététique.
38:59La cervelle, c'est un peu plus gras, mais après,
39:01il y a tellement d'autres produits, il y a tellement de richesses
39:03à travers les produits tripiés.
39:05Qu'est-ce que vous aimez, vous, chez vous ?
39:07Qu'est-ce que vous faites fréquemment ?
39:09Moi, j'aime tout, mais fréquemment,
39:11fréquemment, je suis fréquemment
39:13à Ridevaux et toute la famille se régale.
39:15Mais après, une bonne
39:17daube avec de la joue de bœuf.
39:19Ah, la joue de bœuf, mais oui !
39:21Voilà aussi un morceau tripié
39:23qu'on n'imagine pas, parce que c'est quand même
39:25bien un muscle, là, pour le coup.
39:27Il n'y a rien de plus savoureux, de plus moelleux qu'une joue de bœuf.
39:29Ou une joue de porc, d'ailleurs.
39:31On peut le dire, parce que le copain
39:33cochon, il est pas mal loti aussi,
39:35en la matière.
39:37On se régale avec la joue de porc,
39:39une joue de porc à la bière,
39:41c'est délicieux.
39:43Plus difficile et plus difficile à placer un dimanche
39:45matin, si les enfants nous écoutent,
39:47les rognons blancs, c'est-à-dire
39:49au fond, les testicules et notamment
39:51d'agneaux.
39:53C'est plus délicat, c'est un peu plus délicat.
39:55Mais c'est très bon, ce rognon blanc.
39:57Mais vous le savez,
39:59vous parliez de promotion des produits tripiés,
40:01de vitrine des produits tripiés en restauration.
40:03En bistronomie,
40:05il y a de plus en plus de chefs
40:07qui font ce qu'on appelle, nous,
40:09des planches canailles.
40:11Ah, j'aime bien l'appellation !
40:13Pourquoi pas des testicules
40:15ou une mamelle poêlée
40:17à l'apéritif
40:19sur le comptoir.
40:21De la tétine, comme on dit.
40:23Sur le bord du comptoir,
40:25avec un groupe de copains,
40:27ils vont se régaler et en plus, ils vont faire le buzz.
40:29Ou de copines, parce qu'il ne faut pas
40:31genrer. Les abats, c'est pour tout le monde.
40:33On est bien d'accord.
40:35Et on a les vins,
40:37on a les breuvages qui vont bien avec, en général,
40:39avec grande modération. Obligé,
40:41bien entendu. Mais, rappelons-le,
40:43parmi ces morceaux,
40:45il y a quand même cet onglet, ce fameux onglet,
40:47qui est un morceau à griller,
40:49simplement, pas besoin de le cuisiner.
40:51Ah, ça se cuisine,
40:53ça se snack.
40:55Ça se poêle, ça se snack.
40:57Donc, il ne faut pas avoir peur
40:59d'aller sur son létal
41:01au marché, sur l'étal du
41:03tripié ou du boucher qui laisse une large place.
41:05Il faut aller voir son tripié, il faut aller voir son boucher,
41:07lui demander des produits tripiés.
41:09Il faut également aller sur le site
41:11des Tripiés de France,
41:13pour avoir des idées recettes.
41:15Il y a plein d'idées recettes, des fiches recettes
41:17assez originales sur des produits revisités.
41:19Allez-y,
41:21sur le site Tripiés de France.
41:23Et puis, depuis
41:25deux ans, on a créé ce qu'on appelle
41:27la Brigade des tripes. Donc, on a essayé de référencer
41:29environ 500 restaurants
41:31en France qui sont passionnés de produits tripiés.
41:33La Brigade des tripes, j'aime bien l'appellation.
41:35Il y a un côté martial et puis un petit peu
41:37républicain, là encore.
41:39Ça fait...
41:41On a référencé 500 restaurants
41:43qui sont amoureux de la gastronomie
41:45et des produits tripiés. Ça nous permet
41:47d'avoir une belle vitrine,
41:49de mettre en avant ces produits chez
41:51nos amis restaurateurs.
41:53Et ça fonctionne super bien.
41:55Alors, Bruno Fulini, ça donne
41:57envie, pour le déjeuner du dimanche,
41:59d'aller se...
42:01Moi, un beau fouet de veau
42:03à la Vénitienne, je ne suis pas contre.
42:05Vous voyez ce que je veux dire ? Épinards
42:07ou aux oignons. Quelle merveille.
42:09Déglacé avec un vinaigre de framboise.
42:11Repas de famille du dimanche midi
42:13ou en semaine,
42:15vous êtes les bienvenus au Vauquittet
42:17à Rungis.
42:19Ça, c'est chez vous, ça, le Vauquittet.
42:21Le Vauquittet, c'est chez nous. C'est un restaurant qui est spécialisé
42:23en produits tripiés.
42:25Je vous remercie,
42:27Serge Nadeau, parce qu'il faut
42:29emmener les enfants.
42:31Il faut les faire venir aux produits tripiés.
42:33C'est un particularisme
42:35assez français, d'utiliser vraiment
42:37tout cet éventail de produits.
42:39Et merci de nous avoir rappelé
42:41qu'on était dans le mois des produits tripiés.
42:43C'est le moment d'essayer. Il faut passer
42:45au-delà de ces réticences, parce que souvent,
42:47on les a mal éduqués, nos petits.
42:49Merci, Bruno Fuligni, d'être venu
42:51nous parler du génie gourmand
42:53des Français. C'est tout l'objet
42:55de cette émission, vous l'avez bien compris. Voilà, les amis.
42:57Si vous étiez occupés pendant cette émission
42:59à prendre des notes et que vous n'avez pas eu le temps,
43:01vous pourrez l'écouter à nouveau en podcast
43:03sur sudradio.fr, et même,
43:05même, regarder sur notre
43:07chaîne YouTube. Ah oui, ça vaut le coup, parfois.
43:09Je vous laisse avec les infos de 11h.
43:11Après, vous retrouverez, comme toujours,
43:13Alexandre Devecu, en toute vérité.
43:15Il est l'heure pour moi d'aller me poêler
43:17un petit onglet avec quelques échalotes
43:19émincées, ou même un beau riz de veau.
43:21Alors, croustillant dehors, bien moelleux
43:23à l'intérieur. Voilà, je salive.
43:25Allez, bon dimanche à tous.
43:31Le soutenir des restaurateurs et commerçants indépendants.