Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, le 16 décembre 2024 sur franceinfo.
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00:00Mais ça pose quand même la question de la volonté de cette Assemblée de réduire effectivement les déficits.
00:06Oui, cette semaine, l'ancien ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a été entendu par les députés.
00:11Ils ont parlé d'instabilité politique, et bien il les a tous renvoyés leurs responsabilités.
00:15Cette Assemblée taxe, dépense, censure.
00:20Elle vote toutes les dépenses nouvelles, manière un peu baroque de redresser des comptes.
00:27Elle supprime toutes les économies en 7 jours.
00:31Avec la censure, vous avez fait dérailler à nouveau la France.
00:36Et vous dites vouloir rétablir les comptes publics, hypocrisie.
00:40Vous comprenez son coup de gueule à Bruno Le Maire ?
00:42Écoutez, je ne veux pas commenter ça. On dit parfois que la meilleure défense, c'est l'attaque.
00:46Non mais la question de fond, c'est effectivement avec une Assemblée fragmentée à ce point, c'est difficile de faire des économies.
00:52Je suis fondamentalement démocrate, et je crois fondamentalement au rôle du Parlement.
00:57Donc l'Assemblée, elle est celle que le peuple a choisie.
00:59Il faut faire avec elle. Et il faut la convaincre.
01:02Il faut l'entraîner. Il faut dialoguer.
01:04Il faut parvenir à dire comment, effectivement, il est d'intérêt général de réduire la dette.
01:09Ça, peut-être, cette pédagogie n'a-t-elle pas été faite.
01:11Par ailleurs, il y a des choses importantes, sur le plan technique, je les reprends.
01:15Je considère que nous avons assez largement failli dans notre capacité à prévoir.
01:21Prévoir la croissance, prévoir les recettes, prévoir les dépenses.
01:25Et je pense qu'il faut réintroduire là-dedans de l'indépendance.
01:28Si on a d'un côté le volontarisme du politique, et de l'autre côté une administration qui n'a pas l'impression d'être écoutée,
01:34on arrive à des dérives.
01:36Et c'est ça qui s'est produit.
01:38Je serai moi aussi auditionné par cette commission.
01:40Je prendrai un autre ton, et j'essaierai d'expliquer pourquoi les choses sont passées comme ça.
01:43Et j'ai une proposition très concrète à faire.
01:48Je préside un autre organisme qui s'appelle le Haut Conseil des Finances Publiques,
01:51qui donne des avis sur les projets de la finance.
01:53Je propose, devant vous, que le Haut Conseil soit saisi systématiquement des prévisions de croissance,
01:59de recettes et de dépenses, et qu'il donne un avis qui aille un peu plus loin que ce qu'il fait aujourd'hui.
02:04C'est-à-dire qu'au fond, il tamponne, il valide la prévision de croissance.
02:07Et à ce moment-là, on entrerait dans un système que les anglo-saxons appellent le comply or explain.
02:11Vous dites par exemple à l'administration, je ne suis pas d'accord avec votre chiffre.
02:13Alors à ce moment-là, soit elle prend celui que donne le Haut Conseil,
02:16soit elle explique pourquoi elle ne le prend pas.
02:18Là, nous sommes dans une boîte noire, sans transparence, et c'est très mauvais pour la démocratie.
02:22Et surtout, ça donne des résultats à la fin qui ne sont pas bons,
02:25parce que des erreurs de prévision ces deux dernières années,
02:27je n'entre pas dans le détail des responsabilités, ce n'est pas mon job.
02:31Mais il y en a eu, et elles ne doivent pas se reproduire.
02:34C'est massivement, et c'est très important.