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Pour financer leurs expositions, participer aux grandes foires ou faire face aux imprévus du marché, les acteurs du monde de l’art sont confrontés à des problématiques de trésorerie uniques. Ces défis exigent un accompagnement bancaire adapté à leurs besoins spécifiques. Stéphane Mathelin-Moreaux, senior advisor au sein de la banque privée NEUFLIZE OBC et expert du marché de l’art, est l’invité d’Art & Marché pour explorer les solutions bancaires dédiées à ces professionnels.

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00:00Pour financer leurs expositions, participer aux grandes foires ou alors faire face aux
00:08aléas du marché, les acteurs du monde de l'art rencontrent souvent des problématiques
00:12de trésorerie spécifiques.
00:14Cela nécessite un accompagnement bancaire sur mesure.
00:18Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir Stéphane Matelin-Moreau.
00:20Bonjour Stéphane.
00:21Bonjour Sybille.
00:22Alors vous êtes senior advisor au sein de la banque privée Neuf Lise au BC, expert
00:26du marché de l'art.
00:27Nous allons décrypter les besoins financiers de ces professionnels et explorer les solutions
00:31qui leur sont proposées.
00:33Tout d'abord, alors le département destiné à accompagner ces professionnels a 25 ans.
00:39Est-ce que vous pouvez nous expliquer en 2000 pourquoi est-ce que vous avez ressenti ce
00:42besoin de créer ce département alors que d'après ce que j'ai compris, c'était plutôt
00:47une tendance générale le contraire ?
00:49Le contraire.
00:50Une forte crise a été intervenue à la fin des années 80, donc dans les années 90 à
00:5495, tout le marché a été gelé au niveau de l'art, cette bulle internet en fait, enfin
01:00cette bulle de l'art contemporain, il y avait aussi internet à l'époque, mais qui a explosé
01:05en fait et toutes les banques qui étaient spécialisées dans ce secteur ont décidé
01:08d'arrêter.
01:09Oui.
01:10Donc quand j'arrive en 2000 donc chez OBC qui ensuite a fusionné six ans plus tard
01:14avec Neuf Lise pour devenir Neuf Lise OBC, quelques marchands d'art, commissaires priseurs
01:21et galéristes en art contemporain, en gros une douzaine, étaient centralisés dans un
01:25portefeuille que j'ai repris et finalement c'est en les rencontrant au cours de l'année
01:312000 que l'un d'entre eux m'a dit vous devriez vous spécialiser dans l'art comme vous êtes
01:37spécialisé dans le domaine du cinéma, donc utilisez ces savoir-faire de niche et spécialisez-vous
01:44et ce que j'ai fait.
01:45Donc au fil des années, puisque maintenant ça remonte à 25 ans déjà, eh bien au fil
01:51des années aujourd'hui le résultat c'est que nous accompagnons 300 professionnels,
01:56galeries, antiquaires, maisons de vente aux enchères.
01:58Quels sont les profils de tous ces clients et les domaines artistiques ouverts ?
02:03Voilà, alors déjà l'activité c'est une activité de banque commerciale classique,
02:07nous gérons les flux, la trésorerie et nous pouvons les financer, financer leurs investissements
02:14ou co-financer leurs stocks.
02:17Après le profil, donc nous allons pour ce qui concerne les marchands de l'antiquité
02:22jusqu'à l'art contemporain.
02:23Fine arts, alors après les segments, les sous-segments c'est le fine arts, la sculpture,
02:31les arts premiers, donc en gros un peu tout.
02:35Et les critères ensuite, effectivement parce qu'il faut bien, lorsqu'on accompagne une
02:39sorte de clientèle, il faut surtout que nous sommes peu nombreux à une petite banque,
02:43notamment aux banques de réseau, et bien nous allons les segmenter selon les critères
02:48suivants.
02:49D'une part, je dirais la moralité et la réputation, ce qui est logique.
02:54Quand vous choisissez les clients, c'est des dossiers que vous recevez, souvent vous
02:59êtes sollicités et donc là vous devez répondre oui ou non, est-ce que vous avez accompagné
03:04ce client ?
03:05Nous sommes souvent sollicités, donc la recommandation je dirais que c'est quand même le principal
03:09vecteur, la principale source aujourd'hui d'alimentation de notre clientèle, de notre
03:15portefeuille, mais parfois il y a quand même des galeries, notamment étrangères qui m'intéressent
03:20et à ce moment-là je vais essayer de les approcher d'une manière ou d'une autre, et
03:24souvent effectivement par relation.
03:26Bien sûr.
03:27Et donc après quand elles vous le sollicitent, vous avez plusieurs critères ?
03:31À ce moment-là, les critères sont les suivants, moralité, réputation, ensuite le professionnalisme,
03:37c'est le plus important.
03:38Si on est sur le marché primaire, c'est-à-dire une galerie d'art contemporain qui représente
03:43des artistes, le professionnalisme c'est la capacité du marchand d'art, du galeriste
03:50à trouver l'artiste d'une part, et ensuite très important de le conserver.
03:55Parce que malheureusement une petite ou moyenne galerie, quand je dis petite et moyenne ce
04:00n'est pas péjoratif, c'est en termes de taille, arrive à faire connaître un artiste
04:07et à le développer, et souvent après vous avez les grandes galeries qui ont plus de
04:10moyens, plus de réseaux, qui ont accès aux foires internationales, et qui du coup seront
04:15tentées par le faire venir au sein de leur clientèle.
04:18Et enfin, le troisième grand critère, c'est la solvabilité et la taille de l'entreprise.
04:26Alors que de la galerie, comme on est encore une fois peu nombreux, on va miser un certain
04:31niveau de minimum de flux à gérer.
04:33Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi le marché de l'art, en tout cas les acteurs
04:37du marché de l'art, ont des besoins financiers propres, qui leur sont propres ?
04:41Alors, pour ce qui concerne un marchand, les besoins financiers, c'est, alors si on est
04:48sur le marché secondaire, c'est-à-dire l'achat et la revente simplement, et bien je dirais
04:53qu'aujourd'hui dans l'art contemporain et l'art moderne qui constitue chez nous 80%
04:58des flux en fait, et bien pour un marchand, ce qui est compliqué à constituer et à
05:04financer, c'est un stock, car le stock vaut de plus en plus cher sur des artistes connus.
05:08Le stock, c'est en fait la capacité de l'art ?
05:10Le stock, c'est-à-dire les œuvres d'art qui font partie de l'inventaire d'une galerie.
05:13Et à ce moment-là, on co-finance ce stock en prenant en garantie éventuellement même
05:19des œuvres du stock, et ce qui permet aux marchands d'avoir de la trésorerie pour
05:26saisir des opportunités d'achat.
05:28Voilà, parce qu'en fait, c'est vraiment un défi de trésorerie.
05:32Un défi de trésorerie, comme toujours dans ces métiers.
05:34Alors ça, c'était le marché secondaire, et sur le marché primaire, c'est-à-dire
05:39la représentation d'artistes, et bien s'il s'agit de sculptures ou d'une performance
05:44importante, le coût est important, l'artiste n'a pas les moyens forcément de les financer,
05:50c'est donc la galerie qui prend le relais, et à ce moment-là, nous, nous pré-finançons
05:54en fait la représentation future, sachant que la galerie sera rémunérée le jour où
06:00les œuvres sont vendues.
06:01Bien sûr.
06:02Et donc vous, vous devez avoir une visibilité sur ces projets.
06:05Visibilité sur la sortie, bien sûr.
06:06C'est ça.
06:07Le dénouement de l'opération.
06:08Et est-ce qu'il y a des projets, justement, plus réguliers que vous accompagnez ? Vous
06:14avez dit que vous accompagnez principalement des galeries d'art contemporain, des premières
06:18mâchées.
06:19Oui.
06:20Et vers quel projet se tourne la plupart des clients que vous accompagnez ?
06:24Alors les projets, les autres, peut-être les autres segments, parce que nous accompagnons
06:31les galeries, mais aussi, comme je vous le disais, les maisons de vente, qui sont des
06:35intermédiaires, eux, de flux, donc il y a moins de financement, sauf des investissements
06:39plutôt matériels.
06:40Et donc là, nous les accompagnons, alors après, les autres personnes, les autres acteurs
06:47du marché, ce sont les architectes-décorateurs, aussi, où nous sommes présents, les fondations
06:53privées et tout ce qui est métier d'artisanat.
06:56Après, les projets spécifiques, on peut être sollicité, ça peut te mettre un projet
07:03parfois public, c'est assez rare quand même, mais on intervient plutôt sur des acteurs
07:07privés, ou un projet public dont le commissariat est assuré par exemple par un professionnel
07:14qui lui est privé et que nous pouvons accompagner dans le financement de manière ponctuelle.
07:20Est-ce que vous avez différentes manières d'accompagner financièrement tous ces projets ?
07:27Quel type d'accompagnement est-ce que vous proposez ?
07:30Alors, je dirais qu'on va en citer deux, c'est-à-dire, le moyen le plus simple.
07:37Au vu d'un bilan, car nous avons quand même une analyse bilancielle, c'est quand même
07:42un secteur financier, donc on peut mettre en place un découvert, c'est un moyen simple
07:49d'utilisation où là, je dirais qu'on ne va pas faire une analyse très approfondie
07:55mais suffisante, on analyse le risque et le client, avec ce découvert, fait ce qu'il
08:01veut, je dirais, gère sa trésorerie et il rembourse, il l'utilise.
08:06C'est quelque chose de fluctuant, un découvert.
08:08Après, le deuxième type d'accompagnement financier, c'est bien sûr un crédit qui
08:13lui va être en général sur 2-3 ans, voire plus, légèrement plus, et qui lui va accompagner
08:19un vrai projet, par exemple, d'acquisition d'un esthète, c'est-à-dire un artiste qui
08:24meurt, les héritiers veulent vendre, c'est ce qu'on appelle l'esthète et à ce moment-là,
08:29le galeriste a intérêt à acheter l'ensemble de l'héritage et là, évidemment, c'est
08:36un gros morceau à financer d'un seul coup et nous pouvons, du coup, l'accompagner sur
08:40plusieurs années et nous rembourse le crédit de manière régulière.
08:43Et là, donc, ça fait 25 ans que vous avez créé ce département, est-ce que vous avez
08:46vu des évolutions au sein des demandes de vos clients ? Est-ce que, je ne sais pas,
08:53peut-être que le numérique a changé beaucoup de choses ? Est-ce que vous voyez dans votre
08:57accompagnement, est-ce qu'il y a eu des gros changements majeurs ?
08:59Moi, les gros changements que j'ai pu voir en 25 ans, c'est déjà qu'à l'époque, j'ai
09:04démarré plutôt avec des marchands d'art ancien, c'est-à-dire avec le mobilier 18e,
09:11avec les tableaux anciens et qu'aujourd'hui, je dirais que ce marché-là, c'est quand
09:16même beaucoup de contractés avec une baisse de valeur et aujourd'hui, je dirais que la
09:21majeure partie de nos flux, comme je le disais un peu tout à l'heure, c'est l'art contemporain
09:25et moderne.
09:26Deuxième constat, quand j'ai démarré, c'était plutôt l'Europe, une certaine élite européenne
09:33et américaine qui achetait des œuvres.
09:35Aujourd'hui, le marché s'est totalement mondialisé et les moyens digitaux, effectivement, ont
09:40accéléré ce phénomène puisqu'aujourd'hui, tous les continents, en gros, alors à leur
09:44tour, on sait qu'aujourd'hui, la Chine, ça a beaucoup diminué, la Russie pour les raisons
09:49qu'on connaît aussi.
09:50Bon, puis ça reviendra d'une manière ou d'une autre alors que les États-Unis, suite
09:54à septembre 2001, les Américains bougeaient moins, ils achetaient moins et puis ils sont
09:59revenus en puissance depuis maintenant plusieurs années.
10:02Et du coup, tout ça se compense.
10:04Oui, donc vous avez vraiment des acteurs internationaux.
10:06On a des acteurs internationaux et surtout les clients de nos clients sont souvent très
10:11internationaux.
10:12Et j'imagine que vous avez engrangé tout un savoir-faire avec tous ces clients.
10:18Est-ce que vous avez aussi une fonction de conseil que vous apportez peut-être à toutes
10:24les autres personnes privées que vous accompagnez ?
10:27Alors, là, je vous ai parlé d'un département dédié aux professionnels de l'art et nous
10:31avons au sein de la banque un autre département qui s'appelle tout simplement Neuflis Arts
10:37et qui, lui, consiste à effectivement conseiller nos clients au niveau privé à faire des
10:42inventaires et à les accompagner aussi à leur présenter lorsqu'ils recherchent une
10:48oeuvre d'art spécifique comme nous avons une clientèle chez nous quand même fortunée
10:53et de gens qui collectionnent des oeuvres d'art, on les met en rapport s'il y en a
10:57un qui veut vendre et l'autre qui veut acheter.
10:59En général, on connaît bien nos clientèles et pour ceux qui achètent, on sait ce qu'ils cherchent.
11:04Et donc du conseil en acquisition aussi ?
11:06Alors en acquisition, on n'est pas advisor puisque ça c'est quand même un autre métier
11:11mais on peut les orienter, on peut leur donner des idées notamment à la vente lorsqu'il
11:15s'agit que lorsqu'on a géré malheureusement beaucoup de successions, on les oriente sur
11:20les enchères, sur les ventes privées, on les entoure d'une manière générale et
11:26à ce titre-là, nous avons aussi un autre département d'ingénierie, évidemment patrimoniale,
11:31qui va les guider sur le plan des orientations juridiques et fiscales.
11:35Et bien merci beaucoup Stéphane Matelamoro, je rappelle que vous êtes senior advisor
11:39au sein de la banque privée Neuflis OBC et vous êtes aussi expert du marché de l'art.
11:44Merci beaucoup d'avoir été avec nous et merci à vous tous et toutes de nous avoir suivis.
11:48C'était Arrêt Marché.
11:56Au revoir.

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