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00:00Europe 1 Soir Week-end, 19h21, Pascal Bellator-Dupin.
00:05Je suis dans ce studio avec Charlotte Dornella, journaliste au JDD,
00:08monsieur le directeur adjoint de la rédaction de Marianne,
00:11Adrien Matou, bravo, franchement, écoutez, je vous félicite.
00:17Je voudrais qu'on revienne un instant sur les mots de la maman de Lilibelle,
00:22qui était dans ce studio tout à l'heure.
00:24Si vous avez suivi l'émission, sa fille de 14 ans est morte d'un coup de couteau il y a plus de 4 ans.
00:29Elle s'est interposée entre deux bandes rivales qui s'affrontaient pour protéger un petit garçon de 7 ans
00:34et elle a pris un coup de couteau et elle est décédée des suites de ses blessures.
00:37Il y a eu le procès. Conséquence de ça, le meurtrier de Lilibelle est condamné à 10 ans de prison
00:45alors que le parquet avait demandé 18 ans parce que les faits ont été requalifiés.
00:49Le parquet parlait de meurtre et les faits ont été requalifiés par la cour,
00:53domicile, volontaire, involontaire, ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner, sur mineur.
01:02Voilà, pour être tout à fait précis, je vois le regard de Charlotte, il ne faut pas que je me trompe.
01:05Je voudrais qu'on réécoute les mots de la maman qui a interpellé Gérald Darmanin, le garde des Sceaux,
01:09et je voudrais avoir votre sentiment d'en parler juste après.
01:11Une maman qui a perdu sa fille d'un coup de couteau dans le ventre
01:16et qu'on me dise aujourd'hui que ce n'est pas un meurtrier,
01:19comment il faut faire pour être considéré comme un meurtrier ?
01:22Imaginez nos ados aujourd'hui, il faut en faire plusieurs ?
01:26Monsieur, je vous supplie de m'écouter.
01:28Je compte sur votre appui, votre soutien, qu'on fasse appel.
01:32Moi, je ne peux pas faire appel, vous le savez bien, mais je pense que le tribunal peut le faire.
01:38Donc, je vous demande ce soutien pour toutes les mamans depuis quatre ans, ce qu'on vient de subir.
01:43Et je demande aussi à toutes les mamans qui soient avec moi,
01:46qui soient fortes comme moi parce que j'en ai besoin.
01:49Et je demande au garde des Sceaux de prendre en considération ma demande.
01:54Voilà, ce sont des mots très forts d'une maman qui est bouleversée, bien entendu.
01:59Elle a du mal à comprendre, mais pardon.
02:03Décidément, il y a une semaine, ce sont les mots de la maman de Lully Belle.
02:09Évidemment, elle a du mal à comprendre pourquoi son fils,
02:13elle le disait pendant l'interview, n'a pas été qualifié de tueur ni de meurtrier.
02:17Elle a du mal à comprendre ça. Elle a du mal à comprendre que finalement,
02:20ce jeune mineur s'en sorte avec dix ans.
02:26Il a déjà fait, peut-être, ses électroniques trois ans, donc ça fera sept ans.
02:30Et elle ne comprend pas la maman qui a perdu sa fille d'un coup de couteau.
02:33Charlotte Dornelas.
02:34En fait, il y a plusieurs choses parce qu'il y a d'abord une mère qui a perdu sa fille dans des circonstances abominables.
02:39Et je pense vraiment que quelle que soit la peine prononcée par la justice,
02:45sa douleur à elle, comme on l'habitue de dire, ces parents-là, ils ont pris, eux, perpétuité.
02:51Et aucune peine n'équivaudra jamais à la mort de sa fille dans des circonstances aussi injustes.
02:56C'est absolument évident et honnêtement, c'est un crève-cœur d'entendre ses parents réagir absolument tous de la même manière,
03:03exprimer une incompréhension réelle devant la manière dont procède la justice.
03:08Et j'utilise vraiment ce mot à dessein.
03:10C'est vraiment la procédure judiciaire qui provoque un nombre d'incompréhensions immenses.
03:16Et d'ailleurs, les gardes des sceaux successifs ont reconnu que la place de la victime dans notre procédure pénale n'est pas forcément ajustée.
03:24Donc ça, c'est évident que cette mère-là, on ne peut que la comprendre, l'écouter et comprendre à la fois sa douleur et son incompréhension.
03:30Ensuite, il y a la question de l'évolution de la qualification.
03:33En effet, et cette mère, elle a eu un mot très fort parce qu'elle a dit mettre un coup de couteau dans le ventre d'une jeune fille qui est en face de soi.
03:40Si ce n'est pas un meurtrier, du coup, c'est quoi un meurtrier ?
03:44Oui, mais c'est une très bonne question, ça.
03:46Vous posez la même question.
03:48C'est quoi un meurtrier, alors ?
03:50En fait, ce qui génère l'incompréhension, c'est surtout qu'à l'issue de l'enquête,
03:54l'acte est qualifié de meurtrier, l'accusé est poursuivi pour meurtre.
04:01Ça arrive à la cour d'assises qui a les moyens de requalifier, elle a le droit en effet de requalifier.
04:06L'avocat général, le procureur, défend la qualification de meurtre.
04:10Donc on se dit, nous, ici, là, on n'a pas le dossier entre les mains, on n'a pas suivi le procès.
04:14C'est toujours un peu compliqué parce qu'un procès, quand vous suivez un procès, vous comprenez l'évolution, l'oralité des débats, ça change beaucoup de choses.
04:21Les avocats de la défense demandaient la requalification.
04:25L'avocat général soutient la qualification pour meurtre et la cour d'assises décide de requalifier en...
04:33Un meurtre sans intention de la donner.
04:37La question de l'intention, elle est très compliquée.
04:39Parce qu'en effet, le problème, et beaucoup de pédopsychiatres le disent,
04:43chez ces jeunes-là, il y a parfois une incompréhension de la conséquence des actes.
04:48C'est le seul à avoir un couteau quand même.
04:50Justement, vous avez une bande qui arrive, ils s'insultent sur les réseaux sociaux,
04:55ils prennent le train, ils viennent pour en découdre avec une bande, finalement ils en trouvent une autre,
05:00ils s'affrontent, et au lieu d'échanger des coups de poing, il y en a un qui sort un couteau,
05:03et qui en plus frappe la jeune fille qui venait, enfin la toute jeune fille, qui venait s'interposer entre les deux.
05:09Et le gamin il arrive, il dit oui j'ai mis un coup de couteau mais je voulais pas tuer.
05:12Et beaucoup de pédopsychiatres vous disent, ils n'ont pas conscience que donner un coup de couteau...
05:17Non mais, moi je suis pas en train d'excuser ou de comprendre, je suis juste en train de vous dire,
05:22il y a un tel degré d'absence d'empathie chez certains de ces jeunes, qu'ils ne comprennent pas.
05:28D'où la nécessité de la sanction extrêmement claire.
05:32C'est-à-dire que la justice dise clairement, qu'en effet utiliser un couteau et mettre un coup de couteau,
05:37c'est prendre le risque de tuer, au minimum.
05:40Donc que cette conséquence soit connue.
05:42Donc c'est dans cette distinction, enfin c'est cette distinction que l'on retrouve dans la requalification,
05:47et je comprends que cette maman soit dans l'incompréhension totale devant la requalification,
05:52qui a l'air d'être une manière de minimiser en effet les faits.
05:56Et par rapport à ça, et je termine parce que je suis un peu longue...
05:59Oui, Adrien Amatou voudrait s'exprimer.
06:01Mais simplement, à la base, il y a autre chose qui s'ajoute à ça je pense,
06:05c'est que s'il y a meurtre, il en court 20 ans au maximum,
06:08s'il y a homicide sans intention de le donner, il en court 10 ans au maximum,
06:13donc il a pris la peine maximale par rapport à la requalification des faits.
06:17Le vrai problème, c'est qu'aujourd'hui vous prenez 10 ans, au bout de 5 ans vous pouvez faire une demande de libération.
06:22Il y a ça aussi qui compte dans la tête.
06:24On se dit 10 ans, ok, ça fait 5 ans.
06:26Et là, en effet, ça devient incompréhensible.
06:28Donc il y a beaucoup de questions qui s'ajoutent les unes aux autres
06:31et qui à la fin génèrent une incompréhension réelle et légitime
06:35devant la manière dont la justice est rendue,
06:37et qui dépassent en effet le choix du juré, en l'occurrence à la Cour d'Assise.
06:41Monsieur le directeur adjoint de Marianne, avez-vous un...
06:44Non mais franchement, c'est vrai que cette affaire est choquante.
06:47Bien sûr, les explications de Charlotte sont très intéressantes.
06:50On est évidemment en empathie avec la maman de Lili Bell,
06:54parce que même si effectivement rien ne remplacera sa fille,
06:57et donc forcément la peine change peu de choses,
06:59il y a toujours cette question maintenant,
07:03vu que les peines sont systématiquement aménagées,
07:06on se dit, il ne prend pas 10 ans, il prend 5 ans,
07:08et vu qu'il est en prison depuis 3 ans, dans 2 ans il est dehors.
07:10Et ça forcément, ça crée une immense incompréhension, une immense colère.
07:14Il ne restera plus que 7 ans.
07:16Après, sur le fond, il faut quand même se poser la question de la multiplication de ces rixes.
07:20Celle-ci a eu lieu en Essonne.
07:22J'ai vu que l'Essonne concentrait un quart des rixes de tout le pays entre jeunes.
07:27On est toujours jeunes entre guillemets,
07:29parce que ce ne sont quand même pas des jeunes lambdas qui pratiquent ça.
07:34Les statistiques montrent deux choses.
07:37Il n'y a pas forcément une augmentation du nombre de rixes ou du nombre de bandes.
07:40En revanche, les membres de ces bandes sont de plus en plus jeunes.
07:43Et là où on se battait à coups de poing,
07:46c'est un peu une image d'épinal mais les lousons noirs, c'est ça,
07:49c'est les voyous qui se battent à coups de poing.
07:51Maintenant, il est très courant d'utiliser des armes blanches ou des mortiers d'artifice.
07:56Et effectivement, il y a l'air d'avoir une absence totale de conscience
08:00des conséquences possibles de ces rixes.
08:03On a l'impression qu'ils se battent avec des couteaux
08:05sans comprendre qu'un coup de couteau, ça peut entraîner la mort.
08:07Et à mon avis, il y a quand même une question de fond au-delà de cette procédure
08:11qui est complexe parce qu'on n'a pas le dossier, parce qu'on n'a pas suivi le procès.
08:14Il y a quand même une question de fond qui est
08:17qu'est-ce qu'on fait avec ces jeunes qui pensent visiblement
08:21que se battre à coups de couteau, c'est quelque chose d'anodin,
08:23c'est un loisir comme un autre.
08:24Je vais aller un petit peu plus loin.
08:25D'après le témoignage de Betty, la maman de Lily-Belle,
08:29la mère de l'auteur du coup de couteau, on va l'appeler comme ça,
08:34était parfaitement courante que son fils avait un couteau dans son sac.
08:38Elle lui disait, super, c'est pour te défendre.
08:41Il y a un problème, il faut sanctionner le port de couteau
08:45beaucoup plus sévèrement.
08:47C'est un cercle vicieux.
08:49C'est un cercle vicieux.
08:50Si vous savez que tout le monde a un couteau, vous préférez en avoir un.
08:53Mais moi, ça me paraît complètement lumière.
08:56Vous préférez en avoir un ?
08:57Si vous savez que tout le monde autour de vous a un couteau
08:59et que vous risquez d'être dans un règlement de compte,
09:01vous préférez avoir une arme.
09:02Ce n'est pas du tout une manière d'excuser ou de relativiser la gravité
09:05du fait de se balader avec un couteau.
09:07Mais c'est vrai que ça me paraît complètement lumière
09:09de penser que c'est normal d'avoir un couteau dans son sac
09:12quand on est un jeune.
09:14Absolument, et ce que vous disiez sur la mer ne m'étonne pas
09:18parce que ça arrive très souvent, en effet,
09:20quand il y a des mineurs accusés dans des affaires
09:25où des couteaux ont été sortis,
09:27souvent les parents étaient au courant, en effet,
09:29ils disaient que c'était pour se défendre.
09:31En l'occurrence, c'était pour se défendre,
09:33mais à chaque fois, ils sont quand même au tribunal
09:35parce qu'ils ont attaqué avec un couteau.
09:36C'était pour attaquer une personne qui était complètement vulnérable
09:38et c'est en défense qu'on le fout.
09:40Donc l'excuse, entre guillemets, ne tient pas.
09:43Mais ce qui est très intéressant,
09:45c'est en effet ce que disait Adrien sur la question des statistiques.
09:48Il n'y a pas plus de faits,
09:50il n'y a pas plus de mineurs, par exemple,
09:52dans les procédures pénales
09:54depuis ces dernières années.
09:56Il y en a même un petit peu moins ces dernières années.
09:58En revanche, les peines qui sont prononcées
10:00sont beaucoup plus lourdes
10:03et plus récurrentes chez les mêmes profils.
10:06Ce qui veut dire que vous avez en réalité,
10:08même avec un taux fixe de faits,
10:10des faits beaucoup plus graves
10:12chez des gens de plus en plus jeunes.
10:14Donc voilà quel est le problème.
10:15Quand on nous dit qu'il n'y a pas d'augmentation de la violence,
10:17si, elle se situe là, la violence.
10:19Ce n'est pas beaucoup plus rassurant.
10:20Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas plus de faits
10:22qu'ils sont beaucoup plus graves.
10:24Et il y a de plus en plus, par exemple,
10:26de violences sexuelles entre mineurs.
10:28Il y a de plus en plus d'atteintes aux personnes
10:30par des mineurs
10:32et les victimes des mineurs sont essentiellement des mineurs.
10:34Donc déjà, il y a un devoir de protection de l'État
10:36envers la population de manière générale,
10:38mais encore plus envers les mineurs.
10:40Et il y a une inconséquence dans les décisions
10:42qui sont prises. Je vous prends un exemple.
10:44Vous savez, la dernière réforme
10:46du Code pénal des mineurs
10:48a décidé, dans la droite lignée
10:50de ce qui se faisait depuis 1945,
10:52de préférer l'éducatif,
10:54de faire primer l'éducatif sur le répressif.
10:56Dans une opposition qui est discutable,
10:58mais passons, prenons-les au mot.
11:00Donc ils disent
11:02qu'il faut multiplier les mesures éducatives
11:04avant d'en arriver aux
11:06mesures répressives.
11:08Sauf que, qu'est-ce qui s'est passé cet été ?
11:10Une réduction du nombre d'éducateurs
11:12de la protection judiciaire de la jeunesse.
11:14500 postes d'éducateurs supprimés.
11:16Avec des mineurs de plus en plus violents.
11:18Résultat, un mineur
11:20qui a une mesure éducative aujourd'hui, il voit son éducateur
11:22en moyenne, une fois par mois,
11:24une heure. Vous voyez l'état de ces mineurs ?
11:26Vous voyez le profil de ces mineurs ?
11:28C'est une conséquence politique
11:30complètement dingue en réalité.
11:32Il est 20h44, vous allez entendre les mots
11:34de Jean-Luc Mélenchon qui ont été prononcés à Toulouse
11:36il y a 2-3 heures. Vous allez me dire si vous êtes bien d'accord
11:38avec lui. Il parle de français
11:40de souche, Jean-Luc Mélenchon.
11:42Ça ne pose pas de problème dans la bouche de Jean-Luc Mélenchon.
11:44Je pense que ça aurait été tenu par quelqu'un d'autre.
11:46Je ne sais pas.
11:48On a publié un grand article dans le Marianne de cette semaine
11:50sur le communautarisme de la France insoumise.
11:52Ah ! Très bien !
11:54Adrien a tout à la parole dans une seconde.
11:56Le directeur adjoint de Marianne.
11:58J'écris encore des articles comme celui-là qui est co-écrit.
12:00Formidable ! 20h45.

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