Camille George reçoit Olivier Schiller, président de SEPTODONT et vice-président du METI
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00:00Bonjour à tous, de retour sur le plateau L'Opinion la Géphi, ici au 32ème rencontre de
00:14l'AMRAE à Deauville, j'ai le plaisir d'accueillir Olivier Schiller. Olivier Schiller bonjour.
00:18Bonjour Camille. Alors vous êtes président de Ceptodon et vice-président du METI,
00:23le Mouvement des entreprises de taille intermédiaire. Expliquez-nous un petit peu ce
00:27qu'est le METI et surtout ce qu'est une ETI en France. Alors le METI est le syndicat qui
00:33représente les entreprises de taille intermédiaire, donc entreprises dont les salariés,
00:37l'effectif salarié y compris entre 250 et 5000. Nous sommes un acteur important de l'activité
00:43économique française puisque nous représentons 25% des emplois salariés et près de 40% des emplois
00:48industriels car nous produisons beaucoup en France, nous avons moins délocalisé que les
00:53grands groupes. Nous irriguons aussi les territoires, nous avons des usines présents
00:56sur la plupart des territoires, donc on est un acteur économique important en France. Nous
01:03contribuons à l'équilibre du commerce extérieur et aussi à la réindustrialisation du pays.
01:07Quels sont les principaux risques auxquels sont confrontés les ETIs françaises ?
01:11Aujourd'hui le moral des chefs d'entreprise, des patrons d'ETI n'est pas très bon parce qu'il y a
01:19des risques importants qui pèsent sur notre activité. Nous subissons une concurrence très
01:22vive de la part des Etats-Unis avec la politique de Joe Biden, la politique de l'Ira qui maintenant
01:27est amplifiée par Trump. L'Asie également et la Chine est très agressive, on le voit dans
01:32l'industrie automobile, donc nous devons faire face à cette industrie, à cette concurrence très
01:36forte. Nous devons faire face aussi au coût de la transition environnementale, nous sommes tous
01:40très impliqués dans ces transitions, mais c'est onéreux. Nous subissons des coûts de l'énergie
01:44qui sont également plus élevés que ce qu'on trouve dans les autres continents et la France
01:50subit un peu la double peine puisque nous avons en plus des coûts de production qui sont supérieurs
01:55en France à ce qu'il y a dans les pays qui nous entourent, par exemple l'Allemagne. On a chiffré
02:00l'écart à 8% de valeur ajoutée, 100 milliards d'euros par an, avec des taxes de production qui
02:04n'existent pratiquement pas dans d'autres pays, des charges sociales qui sont beaucoup plus
02:08importantes. C'est vrai qu'aujourd'hui il y a un vrai risque de désindustrialisation de l'Europe,
02:11comme ça a été souligné dans le rapport Draghi, et un risque encore plus important de
02:15désindustrialisation de la France. Donc un contexte fiscal assez complexe et difficile pour les
02:22ETI. Qu'en est-il du contexte réglementaire ? Vous êtes contre la CSRD, la directive qui touche
02:33au reporting extra-financier des entreprises. Pourquoi ? Expliquez-nous ce qui vous heurte.
02:39Alors, nous ne sommes pas contre le principe d'un reporting extra-financier light, qui permet,
02:46avec quelques indicateurs, d'expliquer la politique de l'entreprise en matière d'environnement,
02:51de gouvernance, en matière sociale. Tout ça, ça nous paraît quelque chose de logique avec
02:55quelques indicateurs. Mais ce qui a été émis par les frags, dans le cadre de la directive CSRD,
03:02c'est une espèce de monstre où il y a plus de 1000 indicateurs. Pour chaque indicateur,
03:08il faut faire une analyse de double matérialité. Comment est-ce que l'entreprise impacte son
03:13environnement ? Inversement, comment est-ce que l'environnement impacte l'entreprise ? Là,
03:17ça permet de faire un filtre et de conserver quelques centaines d'indicateurs. Et pour chacun
03:22d'eux, quand ils sont quantitatifs, il faut quantifier, voir la tendance, proposer un plan
03:27d'action pour améliorer les performances de l'entreprise. Et puis, quand ce n'est pas
03:31quantitatif, juste un narratif. C'est déjà lourd pour les grands groupes qui disposaient déjà à
03:36un reporting straffinancier, notamment pour les sociétés cotées. Mais pour les entreprises
03:40indépendantes, pour les ETI familiales, c'est une marge qui est quasiment infranchissable. Et tous
03:44les moyens que nous allons mettre en œuvre pour faire ce reporting straffinancier ne vont en rien
03:49améliorer les performances environnementales de l'entreprise. Nous préférerions mettre en œuvre
03:54ces moyens pour justement accélérer notre transition environnementale, pour respecter
03:58les accords de Paris, dont 10,5 millions pour les émissions de CO2. Donc cette réglementation CSRD
04:04n'est absolument pas adaptée à la réalité des ETI françaises aujourd'hui. Donc c'est une
04:09directive qui n'est pas du tout assez opérationnelle. Qu'est-ce qu'il faudrait faire pour la simplifier ?
04:14Alors il faut absolument revoir la CSRD, notamment toute la partie normative. Je crois que tout le
04:22monde est d'accord aujourd'hui avec cet objectif. Il y a une nouvelle directive Omnibus qui va être
04:28générée par l'Europe le 26 février. Donc nous, ce qu'on souhaiterait idéalement, c'est de ne plus
04:33être soumis à la CSRD pour les ETI, donc au sens français du terme, c'est-à-dire jusqu'à 5.000
04:38salariés. La notion d'ETI, je crois, va être identifiée au niveau européen, mais avec un
04:44plafond entre 1.000 et 1.500, ce qui ne semble pas suffisant. Mais si tant est que nous soyons
04:54effectivement impactés par cette CSRD, au lieu d'avoir plus de 1.000 indicateurs, il faudrait
04:59qu'on en ait quelques dizaines, si vous voulez. Je vais vous donner un exemple. On a mis en place
05:04un crédit avec un pouls bancaire, avec des banques, avec des fonds de dette diétiques. Il a fallu
05:12identifier des indicateurs pour montrer les performances de l'entreprise en matière de RSE.
05:18On a identifié trois indicateurs, les émissions de CO2, la consommation d'eau et l'égalité homme-femme
05:24dans les postes de direction. Pourquoi consommation d'eau ? Parce que nous sommes les leaders mondiaux
05:28dans le domaine de l'injectable, ce qui permet de ne pas avoir mal aux dents quand on est chez le dentiste.
05:32Donc avec trois indicateurs, on arrive à avoir une bonne idée des performances environnementales
05:36de l'entreprise, et en matière aussi de RSE. Donc peut-être que trois, ce n'est pas suffisant,
05:41peut-être qu'il en faudrait 10, 15, mais pas plus de 1.000, c'est démentiel.
05:46D'accord, donc plus de rationalité, plus de pragmatisme.
05:49Absolument. Alors si on parle de réglementation, ça n'est pas fini, puisque maintenant il y a une
05:56nouvelle directive qui sera peut-être transposée, l'ACS 3D, devoir de vigilance. Là aussi, ça part
06:03d'un bon sentiment, si vous voulez. On a tous été horrifiés par ce qui s'est passé au Bangladesh,
06:07à Rana Plaza, quand le système s'est effondré et a tué des centaines de salariés. C'est quelque
06:11chose d'épouvantable qu'il faut absolument éviter. Mais l'ACS 3D demande à ce que l'entreprise
06:17vérifie qu'en interne, elle est parfaitement conforme aux droits de l'homme. C'est pratique,
06:23ça conforme. Ça, évidemment, aucun problème, il faut absolument le faire. Ensuite, il faut vérifier
06:27que les fournisseurs aussi respectent ça. Et les fournisseurs des fournisseurs. Donc là aussi,
06:32on arrive à une usine à gaz qui est totalement disproportionnée par rapport aux moyens d'une
06:39ETIS. Donc s'il faudrait, si vous voulez, en résumer, ce qu'il faudrait, c'est arrêter toutes
06:47ces nouvelles réglementations. Et au contraire, comme le font nos amis américains, nos amis
06:52chinois, mettre en œuvre au niveau européen une vraie politique de réindustrialisation.
06:56Très bien, je crois que le message est passé. Merci beaucoup, Julien Chiller, d'avoir écouté.