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00:00Voilà, propos recueillis par Noé Chaillot à Strasbourg pour Europe 1 et au-delà de la question du droit du sol relancé.
00:05François Bayrou, lui, veut un débat très large sur l'immigration et l'identité.
00:09Il faut se questionner, dit-il, sur ce que c'est qu'être français, les droits et les devoirs que cela implique.
00:15Bonjour Philippe Fontana.
00:16Bonjour madame.
00:17Avocat et essayiste, alors il y a beaucoup de choses sur lesquelles on pourrait vous faire réagir.
00:21Mais d'abord, puisque vous êtes un homme de loi, est-ce que l'on peut toucher comme ça au droit du sol dans l'Hexagone ?
00:28Oui, parce que c'est une pure question législative.
00:32Alors évidemment, vous me direz que le Conseil constitutionnel pourrait s'en mêler.
00:36Mais le Parlement pourrait décider de modifier le droit du sol, même s'il est en vigueur en France depuis la moitié du XIXe siècle.
00:46Ce n'est pas intangible, il n'y a pas besoin de modifier la Constitution pour revenir sur ce droit du sol qui est automatique.
00:54A l'inverse de ce que disait Elisabeth Borne d'ailleurs, ministre de l'Education nationale, qui disait que c'était anticonstitutionnel.
01:00Bon écoutez, j'avais déjà eu l'occasion de m'exprimer il y a un an sur votre antenne sur la question de la réforme du droit du sol à Mayotte.
01:10Certains m'avaient dit qu'il fallait passer par une réforme de la Constitution.
01:15On voit bien aujourd'hui que l'Assemblée nationale a voté une proposition de loi émanant de la droite républicaine pour modifier ce droit du sol.
01:23Donc vous voyez bien qu'il suffit que le Parlement, d'abord l'Assemblée nationale, et on verra si le Sénat le vote dans les mêmes termes,
01:29peut modifier le droit du sol sans passer par une réforme de la Constitution.
01:33Donc que madame Borne, qui n'est pas juriste, ne n'intervienne pas sur ce point technique.
01:39Est-ce que vous envisagez, est-ce que vous imaginez, Emmanuel Macron, proposer un référendum d'ailleurs sur le sujet ?
01:46On a entendu là des Français qui étaient plutôt enclins à supprimer le droit du sol dans l'Hexagone.
01:53Écoutez, ce n'est pas une question d'imagination, c'est une question de réflexion.
01:58Depuis 1987, avec l'instauration de la Commission sur la nationalité française à l'initiative de Jacques Chirac, qui était alors Premier ministre,
02:07on se pose la question de savoir comment déterminer si une personne née sur le territoire national a vocation ou pas automatiquement à devenir française.
02:19C'est ce que sentent confondument nos compatriotes.
02:22Ce n'est pas parce qu'on est sur le territoire que l'on devient automatiquement, qu'on en acquiert automatiquement la nationalité.
02:30Il faut adhérer à l'histoire de ce pays, à son devenir.
02:35Obtenir une nationalité, qu'elle soit française ou d'un autre pays, c'est adopter une partie de l'identité de ce pays.
02:45C'est en faire sienne.
02:46Or, quand on relit l'article 21-7 du Code civil, on s'aperçoit que toute personne qui est née en France de parents étrangers
02:54obtient automatiquement la nationalité française dès sa majorité et peut même le demander par anticipation.
03:01Donc on sent bien que le hasard de la naissance sur un territoire ne permet pas de connaître avec certitude l'adhésion de la personne à l'histoire qui a façonné ce territoire
03:14et à la volonté de faire, entre guillemets, communauté avec la majorité de ses habitants.
03:21Et c'est ça qui est embêtant.
03:22La deuxième conséquence de l'acquisition de la nationalité française, c'est que vous ne pouvez pas, une fois que l'étranger devient français,
03:29ou vous pouvez le faire seulement de manière très difficile en matière de terrorisme, vous ne pouvez pas le déchoire facilement de cette nationalité.
03:36Déjà, vous voyez bien que lorsqu'une personne étrangère, on veut la faire quitter le territoire national,
03:43on se heurte à des difficultés, on va y arriver, ne vous inquiétez pas, mais on se heurte à des difficultés quasiment insurportables.
03:49Vous imaginez bien qu'une fois que la personne est devenue française, elle va vous répondre que non, elle a le droit.
03:57Or, aujourd'hui, l'État se heurte aux droits de l'individu.
04:02Et c'est ce qui amène certains politiques à parler, et certains de nos compatriotes, à parler de français de papier.
04:09Non, l'adhésion à un pays, elle se fait par un ensemble de sacrifices, elle se fait par des marques de volonté.
04:19Si je vais vous dire une question, vous m'avez parlé d'imagination, moi je vais vous parler d'amour.
04:25L'étranger qui veut devenir français, pour moi, c'est un acte d'amour.
04:30Il a envie de s'intégrer à la communauté nationale, et de faire partie de ce grand ensemble qui nous surmonte.
04:36On adhère, on aime son pays, c'est une question de sentiments.
04:41Là, vous voyez, ce n'est plus de l'imagination.
04:43Et nul doute que nous aurons beaucoup de débats sur le sujet.
04:46Merci beaucoup Philippe Fontana, avocat et séiste.
04:48Vous avez publié La Vérité sur le droit d'asile aux éditions de l'Observatoire en 2023.