Anne Fulda reçoit Elizabeth Gouslan pour son livre «À la recherche d’Isabelle Adjani» dans #HDLivres
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00:00Bienvenue à l'heure des livres, Elisabeth Gouselan, alors on est très heureux de vous recevoir, vous avez déjà écrit de nombreux livres, vous êtes une biographe surtout,
00:08vous avez portraituré Ava Gardner, Sarah Bernard, Jean-Paul Gaultier, et là vous venez de publier A la recherche d'Isabelle Adjani, un livre qui est paru aux éditions L'Archipel,
00:18un livre qui se présente sous la forme de lettres écrites par une fan à Isabelle Adjani, qui est sa cadette de 5 ans.
00:27Alors on la suit ainsi de sa naissance jusqu'à aujourd'hui, est-ce que c'est, vous avez appelé ce livre A la recherche d'Isabelle Adjani, est-ce que c'est une manière de clin d'œil à Proust et à la facette littéraire d'Isabelle Adjani qui a joué beaucoup derrière une littéraire,
00:43ou est-ce une manière de dire qu'Isabelle Adjani on ne l'attrape pas comme ça, d'ailleurs visiblement vous ne l'avez pas rencontré pour le livre, c'est un choix ?
00:51Non, la double question correspond à une double réponse, en effet un clin d'œil à Proust parce que je vous fais une confinance, mon fils s'appelle Swan et j'imagine que comme vous,
01:01ces 7 tomes de la recherche du temps perdu sont un livre de chevet pour nous les journalistes, les auteurs, et oui parce qu'on n'attrape pas Isabelle Adjani, à la fois c'est le paradoxe,
01:13la personnalité excessivement publique est totalement secrète et j'ajoute que le livre commence en 1974, la narratrice que j'invente qui pourrait être de vous ou moi,
01:24qui s'appelle Anna et qui est une lycéenne de banlieue en Seine-Saint-Denis en classe de 3e, découvre éblouie sur la scène de la comédie française cette jeune femme de 18 ans
01:37qui joue Ondine, rôle écrasant, Ondine de Giraudoux et devient pour cette petite spectatrice banlieusarde une espèce de phare dans la nuit, une espèce de confidente de papier,
01:48une espèce de grande sœur imaginaire et à partir de là, de 1974 à 2024, elle va inlassablement écrire, je ne dirais pas à son idole, à quelqu'un qui l'inspire et du reste à la fin des années 70
02:02quand Adjani surgit, il n'y a pas d'identification pour notre génération, ce livre est aussi la chronique d'une génération, il y a les héroïnes de Sauter, les femmes de Truffaut,
02:13mais elles sont déjà un petit peu âgées et très connues, Adjani représente une espèce d'idéal féminin, de jeunesse, de fraîcheur qui colle complètement à l'ère du temps
02:23et qui je suppose nous accompagne au moins deux ou trois générations, pour deux ou trois générations d'entre nous.
02:29Alors on la découvre, elle commence à 14 ans, elle joue dans un téléfilm, le petit Bounia, ensuite il y a le conservatoire, la comédie française, elle apparait, elle éblouit, elle impressionne,
02:40c'est une espèce d'ovni en fait, elle est non seulement belle, très belle, mais elle est jouée, elle semble pouvoir tout jouer, est-ce que c'est une surdouée ?
02:48Oui, c'est une surdouée, dès la deuxième lettre, Anna s'intéresse à Radioscopie de Jacques Chancel, qui est un passage absolument phare du livre et de la vie d'Adjani,
02:58où elle est interviewée par cet intervieweur chevronné qu'était Jacques Chancel et où elle fait preuve d'une éloquence, bon je crois qu'il faudra lire le livre pour voir les phrases,
03:08qu'à 18 ans, cet autodidacte qui n'a pas le bac, mais qui est pétri de littérature, sort, c'est-à-dire qu'en Chancel, elle lui demande qu'est-ce que l'expérience, elle cite Henri Michaud, et on est sciés,
03:20et en effet Henri Michaud, le poète abstrait, Ossou Mescaline, celui de Monsieur Plume, cette jeune fille qui était excessivement douée en classe, vous avez raison Anne,
03:28oui, nous la ressentons, et elle, elle n'aime pas ça, elle ne veut pas être cantonnée à ce rôle d'intellectuelle, mais nous la ressentons tout de suite comme une intellectuelle ultra sensible et ultra douée.
03:42Et quand on lit l'interview qu'elle donne à Jacques Chancel, que vous retranscrivez dans le livre, ce qui frappe aussi c'est sa maturité, en fait.
03:50Voilà, cette espèce d'ultra précocité et qui colle complètement...
03:54Qui ne s'explique pas avec sa vie personnelle, sa propre vie quand même.
03:58Oui, c'était une solitaire, c'était une écorchée vive, elle n'avait rien pour accomplir cette trajectoire fulgurante, que moi je compare à celle de Sarah Bernard, puisque je viens de faire un livre sur Sarah Bernard,
04:08et elle m'a semblé tout aussi mythique, tout aussi un classique français que Sarah Bernard.
04:14C'est-à-dire, à 18 ans, jouer ondine et l'école des femmes, obtenir l'approbation du public, du français, des critiques, et finalement devenir une égérie, comme vous disiez, dans la gifle,
04:25car peu de temps après, ce film très générationnel sort sur les écrans, et fédère des admirateurs et des admiratrices, et des sosies d'Isabelle Hedjian.
04:34Alors ce qui est amusant, c'est qu'elle apparaît comme l'actrice française idéale, alors qu'elle a des racines pour le moins mêlées entre son père algérien et sa mère allemande.
04:46C'est deux histoires assez lourdes d'ailleurs à porter l'une et l'autre.
04:50Oui, j'ai écrit qu'elle était issue de deux grandes pétoches françaises, de deux grandes hantises françaises.
04:55Elle est le produit minéral, cristallin, limpide et transparent de deux grandes terreurs françaises.
05:03Et voilà pourquoi elle est solitaire, pourquoi cette HLM de banlieue à Gennevilliers, où elle grandit, ne la prédestine pas au sunlight.
05:10Donc c'est comme un petit prince de Saint-Exupéry qui arrive et qui nous enchante tous.
05:15On l'a tellement aimée qu'il a fallu un moment la lyncher. Je ne sais pas si vous voulez en venir là.
05:20Alors justement, on n'a pas vraiment le temps d'évoquer effectivement cette fameuse rumeur qui l'a touchée, qui l'a détruite au moment de Sida, des années Sida sur lesquelles vous revenez.
05:32Vous revenez aussi sur sa carrière incroyable, malgré tout, au cinéma.
05:38Elle s'est construite une oeuvre et à l'arrivée, on ne sait pas qui c'est.
05:42On a envie de dire elle qui a d'ailleurs écrit sur Marilynne il n'y a pas longtemps.
05:46Est-ce que c'est notre Marilynne à nous ? C'est ma dernière question.
05:48Alors je lui laisserai cette référence car pour moi ce n'est pas Marilynne.
05:51Pour moi c'est Adèle Hache, c'est la reine Margot, c'est Camille Claudel, c'est quelques tomes de La gare des Michards et c'est une héroïne excessivement littéraire.
06:00En tout cas je vous conseille de lire ce joli livre, ça s'appelle À la recherche d'Isabelle Adjani, c'est paru aux éditions L'Archipel.
06:05Merci beaucoup Elisabeth Gousselant.
06:07Merci Anne Flisa.