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00:00France Info Soir, l'invité, Aurélie Herbemont.
00:06Bonsoir Franck Aliziot.
00:08Bonsoir.
00:09Vous êtes député Rassemblement National des Bouches du Rhône.
00:12A 20h le chef de l'Etat va prendre la parole en pleine incertitude sur le sort de l'Ukraine.
00:17Et à la veille d'un sommet européen sur la défense, qu'est-ce que vous attendez du chef de l'Etat ce soir ?
00:22Pas grand-chose à part de la communication.
00:25Or la diplomatie c'est pas un jeu, la diplomatie c'est sérieux.
00:29C'est d'ailleurs ce qu'il a été reproché à M. Trump et M. Zelensky avec cette interview...
00:34Cette altercation vendredi soir.
00:37Voilà, cet échange qui est devenu une altercation très médiatique, trop médiatique.
00:42La diplomatie ne se traite pas comme ça.
00:45Et là, on pourrait faire la même reproche au président de la République.
00:49On sait très bien que ce soir, à part la communication, à part une forme de dramatisation médiatique,
00:57c'est-à-dire que la situation est sérieuse.
01:00Pas suffisamment pour nécessiter une allocution solennelle du chef de l'Etat selon vous ?
01:04Ça pourrait être fait à l'issue d'un conseil des ministres, par un porte-parole.
01:09Cette affaire est en cours de traitement, j'espère de résolution.
01:15Ça fait trois ans que nous demandons une conférence de paix par la voix de Marine Le Pen, de Jordan Bardella.
01:24Aujourd'hui, tout le monde convient que ce serait la solution.
01:27Là, les États-Unis veulent le faire, mais sans l'Ukraine, ce qui paraît un peu hasardeux.
01:32Mais à quoi va servir l'intervention médiatique du président de la République ?
01:37Tenir les Français informés de la situation, des évolutions ?
01:40Il peut y avoir de l'inquiétude chez les Français, on le constate ces dernières semaines.
01:43Les Français sont informés par vous, les médias, par tout le monde.
01:49C'est de la communication, c'est un coup de communication.
01:53Vous reprendriez les termes du vice-président du RN, Sébastien Chenu, qui dit carrément
01:57« Emmanuel Macron prend les Français pour des imbéciles ».
02:00Je ne sais pas s'il prend les Français pour des imbéciles.
02:02C'est une intervention inutile.
02:06Le président de la République, aujourd'hui, devrait s'exprimer avec d'autres dirigeants.
02:14Il y aura un sommet européen demain.
02:15Pour avoir une position forte.
02:17Ce sommet européen sera intéressant.
02:20Et à la limite, l'idée aurait été d'en rendre compte aux Français à l'issue de ce sommet européen.
02:25Mais aujourd'hui, ils n'en prendront rien.
02:27Demain, ils auraient peut-être appris quelque chose de la part de leur président de la République.
02:30Franck Aliziot, est-ce que le désengagement des États-Unis dans la protection de l'Europe
02:35implique d'accroître nos efforts de défense en France et donc nos dépenses en la matière ?
02:40Déjà, ce désengagement dans le conflit ukrainien, pour le coup,
02:46est un petit peu, les décisions qui ont été prises, Marine Le Pen l'a dit,
02:49un peu brutale et brusque.
02:52Marine Le Pen a dit, effectivement, hier, que c'était brutale la décision de Donald Trump.
02:56Voilà.
02:57Je le répète en son nom, c'est brutal.
03:00Il aurait pu y avoir un certain délai de manière à ce que les Ukrainiens puissent s'organiser.
03:05Mais on ne comprend pas bien, Franck Aliziot, d'ailleurs, la ligne du Rassemblement National
03:08face à Donald Trump.
03:10Hier, Marine Le Pen dit, effectivement, que cette décision de suspendre l'aide américaine est brutale,
03:14que cette brutalité est condamnable.
03:16Mais ce week-end, au lendemain de l'altercation entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump,
03:20elle disait que ce n'était pas très grave et elle relativisait, elle banalisait cet événement.
03:24Qu'est-ce qui s'est passé ?
03:25Elle a rappelé une réalité.
03:27La diplomatie est toujours un rapport de force d'une manière ou d'une autre.
03:32Elle a toujours considéré que l'exposer médiatiquement, la diplomatie,
03:36ça se fait en coulisses.
03:38Après, ça s'explique.
03:40Mais le fait de le faire médiatiquement et de manière très démonstrative comme ça,
03:44ce n'est pas la manière de faire de Marine.
03:46Elle ne l'aurait pas fait comme ça en tant que chef d'État.
03:48On a l'impression que vous hésitez sur votre relation face à Donald Trump.
03:51Non, justement. Ce que vous considérez comme une hésitation, ça s'appelle l'équilibre.
03:54On a une position équilibrée.
03:56Nous ne nous alignons pas sur la ligne Trump, la ligne américaine.
04:01Jordan Barnella a déjà dit que ça pouvait être un modèle, Donald Trump.
04:04Non, nous cherchons une voie.
04:06En l'occurrence, on parle de diplomatie, de relations internationales.
04:10En l'occurrence, nous cherchons une voie française.
04:12Une voie d'équilibre, une voie équidistante, une voie qui va vers la paix.
04:18Peut-être aussi parce que le trumpisme n'a pas forcément bonne cote dans l'opinion publique française.
04:24Malgré vos proximités idéologiques avec le président américain.
04:27On n'a jamais changé.
04:28On aurait pu, pendant la campagne ou le lendemain de la victoire,
04:32trouver que parce qu'il avait gagné et parce que tout le monde en parlait dans les médias,
04:36alors Trump était formidable.
04:37Le communiqué de Jordan Barnella et de Marine Le Pen au lendemain de cette victoire
04:41était un communiqué tout en réserve, en saluant la victoire de Donald Trump,
04:46mais en ne devenant pas pour autant les groupies de Donald Trump.
04:51Contrairement peut-être à d'autres personnalités politiques,
04:54je pense à Eric Ciotti ou Eric Zemmour,
04:56qui revendiquent plus une proximité avec Donald Trump.
05:00Je reviens à mes questions sur les dépenses de défense.
05:04Est-ce que cet après-midi, le ministre des armées dit qu'il faudrait 100 milliards annuels
05:09pour durcir notre modèle d'armée ?
05:11Je rappelle que pour l'année 2025, c'est 50 milliards.
05:14Est-ce que 100 milliards, c'est le bon étiage pour vous, pour la défense française ?
05:18Tout le monde parle des 3% de PIB.
05:213% de PIB, c'est un vrai objectif, c'est un bon objectif.
05:25Le souci, c'est que c'était l'objectif affiché dans le programme
05:29d'un certain Jean-Marie Le Pen en 2007.
05:32C'est dire qu'on remonte loin.
05:34La situation n'était pas la même qu'aujourd'hui ?
05:37Eh bien oui, mais gouverner, c'est prévoir.
05:39Donc vous soutenez le gouvernement dans sa volonté ?
05:41La défense, c'est le premier des devoirs d'un gouvernement vis-à-vis de son peuple.
05:45Si on avait été écouté aux affaires plus tôt,
05:48aujourd'hui, nous aurions atteint cet objectif.
05:51C'est tout ce que l'on reproche à ces gouvernements
05:54qui ont minimisé, qui ont essayé de faire des économies
05:57pendant des années sur la défense.
05:59Parce qu'évidemment, la défense, c'est la grande muette.
06:02Donc elle ne porte pas et elle ne peut pas se défendre
06:05comme d'autres groupes peuvent le faire.
06:07Il y a un deuxième problème sur l'Europe de la défense.
06:10Vous le savez, c'est que nous sommes passés...
06:12La présidente de la commission propose un plan pour réarmer l'Europe
06:16de 800 milliards d'euros, ça vous soutenez ou pas ?
06:18Le problème, c'est qu'il faut souligner les véritables soucis.
06:22Les véritables soucis, c'est que depuis une dizaine d'années,
06:25l'Europe de la défense, elle recule.
06:27Plus on en parle, plus elle recule.
06:29Dans les années 2015-2020,
06:32les achats militaires étaient des importations
06:37venant des Etats-Unis pour un tiers.
06:42Sur les années 2020-2025, c'était la majorité.
06:47Un tiers la majorité.
06:48C'est-à-dire qu'on a reculé.
06:50On achète toujours plus américain au lieu d'acheter européen.
06:53Or là, le préalable...
06:54Vous vous dites que ces 800 milliards doivent être utilisés
06:56pour acheter du matériel européen ?
06:57Évidemment, c'est le préalable.
06:59Pour avoir une défense entre Européens.
07:01Pas une défense européenne, au sens, dans les mains de la commission de Bruxelles.
07:05Mais une défense des Etats européens.
07:07Des Etats européens, des Européens, des Etats-nations européennes, tout à fait.
07:10Franck Alizio, sur la dissuasion nucléaire,
07:12vous êtes résolument hostile au Rassemblement national
07:15à ce que la France en fasse profiter le reste du continent.
07:17Pourquoi ?
07:19Mais parce que la dissuasion...
07:21S'il y a quelque chose qui doit rester national,
07:23c'est la dissuasion nucléaire.
07:25Mais c'est le président français qui garderait le doigt sur le bouton.
07:29C'est-à-dire de donner la décision à d'autres.
07:32Le peuple français a lourdement investi,
07:34s'est lourdement sacrifié pour l'atteindre.
07:36C'était une victoire immense de la France sous le général De Gaulle.
07:41Donc évidemment que ça doit rester complètement dans la main de la France.
07:46Et je dirais même s'il doit y avoir une évolution doctrinale
07:49sur l'usage de notre force nucléaire,
07:51alors je pense que ce serait un sujet légitime à poser aux Français,
07:57à débattre publiquement.
07:59Peut-être pas par référendum, je ne sais pas.
08:01Mais en tout cas, c'est quelque chose qui ne peut pas être aujourd'hui,
08:04en fin de mandat, par un président, soyons honnêtes,
08:08qui n'est pas au mieux de sa forme politiquement,
08:11avoir une telle réorientation d'une doctrine qui n'a pas bougé depuis maintenant plus de 50 ans.
08:16Mais la décision, encore une fois, d'emploi de l'arme nucléaire
08:18resterait à la décision finale de la France.
08:21Oui mais alors au final, on ne comprend pas ce que veut le président.
08:25Une démonstration de force de la France finalement,
08:27d'être peut-être capable d'assurer la sécurité de ses voisins.
08:31Non, je ne perçois pas comme ça.
08:33Je perçois ça encore une fois, pardonnez-moi,
08:36comme de la communication, comme un effet de communication.
08:41Le président, depuis longtemps, aurait dû soutenir cette idée de conférence de paix,
08:48ne pas laisser ça dans la main des Américains.
08:50Mais sur la question nucléaire, Franck Alizeau,
08:52est-ce que vous faites semblant de ne pas finalement comprendre ce qui est mis sur la table ?
08:57En réalité, il n'y a pas de changement particulier.
08:59Le général de Gouin même avait dit que les intérêts vitaux français
09:04étaient aussi au Benelux et en Allemagne.
09:05Permettez-moi de faire la différence entre le général de Gouin et Emmanuel Macron.
09:11Et de me souvenir qu'Emmanuel Macron, avant d'être président d'une certaine commission à Thalie,
09:15avait dit que peut-être qu'il fallait abandonner une partie de l'effort nucléaire français,
09:20y compris militaire, ce qui était très grave.
09:24L'homme qui a pensé ça, aujourd'hui, j'ai des doutes.
09:27De même qu'il a déjà évoqué le partage de notre siège au Conseil de sécurité des Nations Unies.
09:33Et là aussi, ça m'inquiète.
09:35Quand vous avez quelqu'un qui a de telles idées,
09:37forcément, vous êtes très circonspect quand il commence à parler d'évolution de la doctrine nucléaire dans notre pays.
09:42Mais ça veut dire, Franck Alizeau, très clairement que pour le Rassemblement National,
09:45les intérêts de la France ne vont pas jusqu'à assurer la protection,
09:48par exemple, de nos voisins de l'Est, de la Pologne ou des Etats baltes.
09:52Mais on ne peut pas s'engager comme ça aussi légèrement, j'ai envie de dire.
09:58Naturellement, nous avons des alliés.
10:01Je vous rappelle que nous appartenons à une organisation qui s'appelle l'OTAN.
10:04Qui aujourd'hui, d'ailleurs, par défaut, j'ai envie de dire,
10:07parce que c'est le choix des Européens, est la véritable défense européenne.
10:11Alors que la France a longtemps défendu, et Marine Le Pen est sur cette ligne,
10:15qu'on aurait pu avoir un véritable pôle de défense européenne au sein de l'OTAN,
10:20afin de mieux défendre ses intérêts.
10:21Peut-être que ça va advenir à la faveur de la situation géopolitique actuelle.
10:24Oui, mais alors, combien de temps perdu ?
10:27Il a fallu que les Américains nous claquent la porte au nez, nous disent bye bye,
10:31vous nous coûtez trop cher, pour enfin prendre nos responsabilités.
10:35Que de temps perdu.
10:36Alors que, par définition, les intérêts de la France étaient aussi les intérêts des pays européens.
10:43Et que nous étions disposés à faire ce chemin.
10:45Et il n'a pas été emprunté.
10:47Il a été abandonné, tenté par Nicolas Sarkozy, tenté par Jacques Chirac.
10:50Et à chaque fois, ça a fini en quenouille, pardonnez-moi l'expression.
10:54Merci Franck Aliziot.
10:55Merci à vous.
10:56Et merci Aurélie Erbemont.
10:57On se retrouve à 19h30 pour notre édition spéciale avant l'allocution d'Emmanuel Macron sur l'Ukraine et la défense européenne.
11:02Ça se sera suivant évidemment en direct à 20h sur France Info.