Mardi 6 mai 2025, retrouvez Élisabeth Moreno (Ancienne ministre issue de la société civile) dans TEMPS LONG, une émission présentée par Lucas Jakubowicz.
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00:00Bonjour à tous, bienvenue sur Temps Long, l'émission politique de Be Smart for Change et Décideur Magazine.
00:14Ceux qui connaissent la politique le savent, ceux qui la connaissent un peu moins le pressentent.
00:19Mais en tout cas, une chose est sûre, c'est que composer un gouvernement, c'est quelque chose de super difficile.
00:25C'est une sorte d'expérience chimique, il y a plusieurs ingrédients qu'il faut bien respecter, qu'il faut bien doser, sinon ça explose.
00:35Quels sont les ingrédients nécessaires pour former son gouvernement ?
00:38D'abord, il faut des gouvernements paritaires.
00:40Il faut un mélange de générations, avec des jeunes nouveaux droits longues, et puis des vieux briscards qu'encadrent un peu tout le monde.
00:46Il faut aussi, évidemment, représenter tous les partis politiques qui soutiennent le gouvernement,
00:51et en plus, à l'intérieur de ces partis politiques, il faut représenter toutes les sensibilités.
00:56Il faut aussi des gens qui viennent de toutes les régions de France.
00:59Par exemple, le gouvernement de Gabriel Attal avait été critiqué, parce que plus de la moitié de ses membres étaient nés à Paris ou en Petite Couronne.
01:07Et enfin, cerise sur le gâteau si j'ose dire, il faut un mélange de professionnels de la politique et de personnes qui viennent de la société civile.
01:16Personnels de la société civile sont vierges de tout engagement, s'engagent.
01:21On a un bel exemple aujourd'hui sur le plateau avec Elisabeth Moreno.
01:25Bonjour.
01:25Bonjour, Lucas Jakubowicz.
01:27Alors, vous avez été ministre déléguée pendant deux ans dans le gouvernement de Jean Castel.
01:32Je ne veux pas commettre d'impair, je vais vous demander de dire exactement le terme de votre étiquette et de votre portefeuille.
01:39Alors, j'ai eu la chance et le bonheur de porter le ministère qui était en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes, la diversité et l'égalité des chances.
01:49Vous veniez du privé et vous êtes arrivée en politique.
01:52Oui.
01:53Vous avez forcément travaillé avec des professionnels de la politique.
01:57Pour vous, quelle est la différence au quotidien entre une personne qui vient de la société civile et un vrai pro de la politique ?
02:04Je crois que, et je vais prendre l'exemple qui est le mien parce que c'est celui que je connais le mieux,
02:12moi j'ai été dirigeante de grandes entreprises dans la technologie, j'ai été patronne de ma propre entreprise à l'âge de 20 ans
02:20et malgré les beaux succès que j'ai pu avoir dans le monde de l'entreprise, je n'ai jamais servi 68 millions de personnes.
02:28Parce que s'il y a une différence majeure entre le monde de l'entreprise et le monde de la politique,
02:35c'est que dans le monde de l'entreprise, vous servez des clients et dans le monde politique, vous servez des citoyens,
02:44vous servez un État, vous servez une nation.
02:47Et ça, ça donne une vision sur les responsabilités qui vous incombent, qui sont extrêmement importantes.
02:54Moi, j'ai beaucoup travaillé pour des entreprises internationales où le temps long, c'était un trimestre.
03:02Je pense que quand on fait de la politique aujourd'hui, le temps long, ça devrait être des décennies.
03:07Et la différence majeure entre, je crois, un chef d'entreprise et un professionnel de la politique,
03:14c'est que le professionnel de la politique est là pour durer le plus longtemps possible.
03:18Il est là pour porter la voix et les intérêts de son parti, la voix et les intérêts d'un président, d'un ministre.
03:29Et il est là, normalement, pour porter la voix d'un pays et construire la réussite de ce pays sur le temps long.
03:38Ça n'est pas le cas en entreprise.
03:39En même temps, si on regarde et si on est un peu cynique ou réaliste,
03:43une personne qui va être cadre supérieur dans un grand groupe du CAC 40 va durer plus longtemps qu'un ministre, surtout en ce moment.
03:50Ah ben, surtout en ce moment, oui, ça c'est le moins qu'on puisse dire.
03:54Mais moi, je crois que la politique ne devrait pas être un métier.
03:57Je pense que les gens qui font de la politique pendant 10, 20, 30, 40 ans,
04:01à un moment donné, vous êtes totalement biaisés.
04:03J'entends beaucoup de Français dire que les politiques sont déconnectées de la réalité.
04:10Moi, qui viens du terrain, qui ai passé toute ma vie sur le terrain dans le monde de l'entreprise,
04:16j'ai commencé par la toute petite porte et j'ai monté les échelons, les uns après les autres.
04:21Je n'ai pas pris d'ascenseur social.
04:22Souvent, on me dit « mais vous avez pris l'ascenseur social ».
04:24Non, moi, je n'ai pas vu l'ascenseur.
04:26Je n'ai vu que les marches des escaliers.
04:28Je connais toutes les difficultés qu'on peut rencontrer dans la vie parce que je les ai vécues individuellement.
04:35Quand vous êtes en politique, vous êtes dans un vase clos.
04:38Vous êtes dans un monde qui est différent du monde du citoyen lambda.
04:44Quand j'entends un gamin dans les quartiers populaires qui me dit,
04:48à qui je dis « mais tu sais, il faut vraiment que tu ailles voter, tu es en majorité maintenant, tu dois le faire »,
04:52et qui me dit « mais non, ce n'est pas mon monde, madame »,
04:54ça veut dire qu'il y a des personnes aujourd'hui qui estiment qu'il y a un monde politique,
04:59qu'il y a un monde de l'entreprise, qu'il y a un monde associatif,
05:01alors que tout ça, ça devrait être un cercle vertueux.
05:05En fait, c'est totalement en silo et ça ne fonctionne pas.
05:08Vous, quand vous êtes arrivé au gouvernement, vous avez remarqué
05:11que certains responsables politiques étaient déconnectés de la population, des préoccupations.
05:17Ah oui. Ah ben oui.
05:19Évidemment. Mais c'est l'une des choses qui m'a frappée en tout premier lieu.
05:22Et je ne vous parle même pas des gens à qui on va poser la question sur un plateau de télé
05:27pour leur dire quel est le prix d'une baguette.
05:29Ce n'est pas ça, connaître la vraie vie des Français.
05:32Ce sont des gens qui, en restant à Paris cinq jours sur sept,
05:38en n'allant pas dans les territoires ultramarins,
05:41en n'allant pas dans les quartiers populaires,
05:43en n'allant pas dans les zones rurales,
05:45pensent savoir ce qui se passe dans ces endroits-là.
05:48Ce n'est pas vrai.
05:49En fait, parfois, pour pouvoir parler de certaines situations,
05:53il faut pouvoir les vivre dans sa chair.
05:55Et on a beaucoup de politiques qui sortent des mêmes écoles,
06:00qui viennent des mêmes milieux,
06:01qui font des barbecues ensemble le week-end,
06:03qui partent en vacances ensemble et qui sont dans un vase clos.
06:07Et quand vous êtes dans un vase clos,
06:09vous ne pouvez pas comprendre forcément ce qui se passe
06:11à l'extérieur de ce vase.
06:13Et ça, c'est un vrai sujet,
06:14parce que comment voulez-vous résoudre les problèmes
06:17de 68 millions de Français,
06:19si vous n'en connaissez qu'à peine 20 millions ?
06:22Alors, deux remarques.
06:23Une, on va dire, taquine,
06:25et une qui est plutôt réaliste.
06:26On commence par laquelle ?
06:28Taquine.
06:28Taquine.
06:29Vous dites que les responsables politiques professionnels
06:32sont déconnectés du peuple,
06:33mais en même temps, quand on est un cadre dirigeant
06:34dans une grande entreprise,
06:36on est aussi quelque part un peu déconnecté.
06:38On est souvent soit à Paris, soit dans les grandes métropoles.
06:40On ne connaît pas ce qu'on appelle la France périphérique.
06:43Alors, vous voyez, moi, quand j'étais PDG de Lenovo, par exemple,
06:49les dix plus gros clients de l'entreprise,
06:52je les voyais tout le temps.
06:54Pourquoi ?
06:55Parce que c'était ma manière à moi
06:57de rester connectée à ce qui se passait sur le terrain.
07:01Parce que ces clients-là me disaient
07:03ce qui, parfois mieux que mes équipes,
07:06parce que vous savez,
07:07les équipes ont parfois tendance à vous dire
07:08ce que vous avez envie d'entendre.
07:11Parce qu'ils veulent protéger leur job,
07:12parce qu'ils ne veulent pas qu'on leur tape sur les doigts
07:14s'ils apportent de mauvaises nouvelles.
07:15C'est pareil en cabinet, d'ailleurs.
07:17C'est tout à fait pareil en cabinet.
07:18Et la meilleure manière pour moi
07:20de rester connectée à mon business et au terrain,
07:23c'était d'aller moi-même voir ses clients,
07:26de les entendre me dire ce qu'on faisait de bien,
07:29de ce qu'on faisait de manière ridicule,
07:31ce qui ne servait à rien, etc.
07:33Mais les clients, c'était qui ?
07:34C'était les cadres dirigeants
07:35ou c'était vraiment les sites de production ?
07:36Ah non, moi je dis les locaux.
07:37Ou les usagers ?
07:38Mes clients, c'était les directeurs d'achat,
07:41c'était les patrons de sites,
07:42c'était les opérations,
07:44c'était les personnes qui utilisaient
07:45nos produits au quotidien.
07:47C'était ça, mes clients.
07:48En fait, quand vous êtes chef d'entreprise,
07:49aujourd'hui, vos différents types de clients,
07:51ce sont vos employés,
07:53parce que vous êtes quand même...
07:53On a tendance à l'oublier,
07:55mais le rôle d'un dirigeant,
07:56c'est de s'assurer,
07:57de satisfaire à la fois ses employés
07:59qui vont représenter son entreprise,
08:01de satisfaire les clients
08:02parce que si vous n'avez pas de clients,
08:03votre entreprise n'existe pas,
08:05de satisfaire votre écosystème
08:06parce que personne ne réussit seul
08:08et que si vous n'avez pas un écosystème
08:10qui vient compléter les produits
08:11et les services que vous vendez,
08:12vous ne pouvez pas réussir.
08:14Et c'est tout ça qui fait
08:15que vous restez connecté au terrain.
08:17Donc oui, parfois,
08:18il peut y avoir des chefs d'entreprise
08:19qui peuvent être déconnectés de la réalité,
08:22mais de l'expérience que j'ai vécue
08:24entre le monde de l'entreprise
08:25et le monde politique,
08:27c'est beaucoup plus facile pour un dirigeant
08:29de se raccrocher à la vie réelle.
08:32Parce que je peux vous dire
08:33que quand vos chiffres tombent
08:34de 20 ou 30%,
08:35vous avez plutôt intérêt
08:36à être connectés à la réalité
08:38pour les faire remonter.
08:40En politique,
08:41le temps de l'élection,
08:42le temps du mandat,
08:44fait tout.
08:45Et c'est ça qui est terrible en vérité.
08:47Parce que vous ne travaillez
08:48qu'avec cette échéance
08:49de la prochaine élection.
08:50Quand on parlait de la déconnexion
08:51aussi de la classe politique,
08:52est-ce que vous avez noté
08:53une différence entre ceux
08:54qui sont vraiment des élus locaux,
08:56de terrain,
08:57qui ont été maires de petites villes,
08:58députés et qui sont devenus
09:00ensuite ministres ?
09:01Et ceux qui sont entrés en politique
09:03au moment où le cumul des mandats
09:05n'était plus possible ?
09:06Ah oui, ça c'est certain.
09:08Je me souviens que je suis allée
09:10au Congrès national des maires
09:12et j'avais passé un moment
09:14extraordinaire
09:15parce que, notamment,
09:18les maires,
09:19M-A-I-R-E,
09:21sont les personnes
09:22qui, au quotidien,
09:25vont résoudre
09:26les difficultés
09:27de leurs concitoyens.
09:29C'est un trottoir cassé.
09:32On ne va pas aller voir
09:33le président de la République.
09:35C'est le maire
09:35qui va le résoudre.
09:36Je me souviens
09:37d'un maire
09:37avec qui je parlais
09:38des questions
09:39de violences conjugales
09:41dans les zones rurales
09:42parce qu'on n'a que 50%
09:44de la population française
09:45qui vit...
09:46Non, à peine.
09:47On a 30% de la population française
09:49qui vit dans les zones rurales
09:50mais 50% des féminicides
09:53et des violences
09:54les plus dramatiques
09:56sont dans les zones rurales.
09:58En particulier
09:59parce qu'il y a
09:59beaucoup d'armes à feu.
10:01Eh bien, il me disait,
10:02vous savez,
10:03quand une femme est victime
10:05de violences conjugales
10:06dans mon village,
10:07c'est moi qu'elle vient voir
10:08parce que je suis son dernier salut.
10:10Parce qu'elle a honte
10:11d'en parler autour d'elle
10:12et que je suis quelque part
10:14un ami de la famille
10:15qui va pouvoir aider
10:17parfois à résoudre
10:18ces problèmes-là.
10:19Donc oui,
10:19les élus locaux,
10:21de mon point de vue en tout cas,
10:23ont un rôle fondamental
10:24à jouer
10:25dans le bon fonctionnement
10:26de leur village,
10:27de leur ville
10:28et heureusement d'ailleurs
10:30qu'ils sont là.
10:30Et après,
10:31la politique nationale,
10:32elle est tout aussi importante.
10:34Ce sont juste
10:34des rôles
10:35et des responsabilités différents.
10:37Souvenez-vous
10:38de cette enquête
10:38qui avait été faite
10:39en pleine Covid.
10:40je ne sais plus
10:41qui avait posé
10:42la question
10:42à nos concitoyens.
10:45En qui avez-vous confiance ?
10:47C'était le maire.
10:48C'était le maire.
10:48Et le maire était arrivé
10:50en tout premier lieu.
10:51Et c'est pour ça,
10:52d'ailleurs,
10:53puisque on est...
10:55Allez,
10:56ça fait quoi ?
10:5680 ans
10:57que les femmes
10:58ont le droit de vote
10:58et qu'elles sont devenues
11:00éligibles,
11:01mais on a encore
11:02si peu de femmes
11:03qui sont
11:04dans les postes
11:05d'élus locaux.
11:06Et c'est fondamental
11:07parce qu'on verrait
11:08combien les femmes
11:09peuvent elles aussi,
11:11et on le voit déjà
11:11pour celles
11:12qui sont en responsabilité,
11:15nous avons,
11:16les femmes
11:16et les hommes,
11:17des choses
11:17à apporter
11:18à nos concitoyens.
11:19En ce moment,
11:20il y a certaines voix
11:20qui s'élèvent
11:21pour dire
11:21qu'il faut arrêter
11:22le non-cumul
11:22des mandats,
11:23ça ne marche pas,
11:24ça déconnecte
11:25la classe dirigeante,
11:26vous êtes de cet avis.
11:26Oui, moi je pense
11:28qu'au plus proche
11:30du terrain
11:30vous êtes,
11:32au plus proche
11:32de vos concitoyens
11:34vous êtes,
11:34au mieux
11:35vous pouvez résoudre
11:36leurs difficultés.
11:38Alors,
11:38on va raisonner un peu
11:39en termes managériaux,
11:40vous étiez cadre dirigeante,
11:42vous arrivez
11:42dans un ministère,
11:44est-ce que vous avez,
11:45c'est un peu du jargon,
11:46mais implémenté
11:46des méthodes du privé
11:47dans un ministère
11:49et si oui,
11:49lesquelles ?
11:50Vous l'imaginez bien,
11:51moi j'étais vice-présidente
11:53du groupe Hewlett-Packard
11:54pour un continent
11:55de 54 pays
11:57le vendredi
11:58et le lundi
12:00je suis annoncée
12:01au gouvernement.
12:03À quoi vous vous raccrochez
12:04dans ces moments-là,
12:06au-delà de vos valeurs,
12:08au-delà de ce en quoi
12:09vous croyez,
12:10à quoi vous vous raccrochez
12:12si ce n'est pas
12:13à votre expérience passée ?
12:15Donc, évidemment
12:16que pour survivre
12:18dans ce monde
12:19qui est quand même
12:20un peu darwinien,
12:22j'ai utilisé
12:23ce que j'avais appris
12:24dans le monde
12:25de l'entreprise.
12:26C'était quoi
12:26comme hard skills
12:27ou soft skills ?
12:28Les deux d'ailleurs,
12:30il y a les soft skills
12:31et les hard skills.
12:33La chose la plus importante
12:34d'abord,
12:35c'est savoir vous entourer.
12:36Moi,
12:36quand je suis arrivée
12:37en politique,
12:38je n'avais ni réseau,
12:39ni parti,
12:41j'étais un oiseau
12:42tombé de son nid
12:43et j'avais conscience
12:45que si je ne constituais
12:46pas une équipe
12:47de confiance
12:48autour de moi,
12:49ce serait extrêmement difficile.
12:51La deuxième chose,
12:52c'est les alliés
12:54que vous allez avoir
12:55parce que que ce soit
12:56dans le monde
12:57de l'entreprise
12:58ou dans le monde politique,
13:00vous ne pouvez pas
13:02porter des réformes importantes,
13:04vous ne pouvez pas
13:05faire voter
13:06des lois importantes
13:07si vous n'êtes pas
13:08entouré de personnes
13:09qui ont les mêmes
13:09intérêts que vous.
13:11Et moi,
13:11j'ai eu la chance
13:12de travailler
13:12avec des associations,
13:14des associations
13:14qui sont engagées
13:16sur les questions
13:16d'égalité femmes-hommes,
13:18de diversité
13:19et d'égalité des chances
13:19depuis des années.
13:21Les associations féministes
13:22ont été extrêmement utiles
13:23pour faire passer
13:24des lois,
13:25notamment la loi
13:25sur les quotas
13:26que beaucoup de gens
13:29ne voulaient pas
13:29avoir passées
13:30parce que beaucoup
13:31pensent que les quotas,
13:32c'est aller contre
13:33la méritocratie,
13:35mais non,
13:35ça n'est pas vrai.
13:36Les quotas,
13:37c'est favoriser
13:38la place des femmes
13:38dans l'entreprise,
13:39là c'est encore
13:40extrêmement difficile.
13:41Quand je fais voter
13:42la loi
13:43pour lutter
13:44contre les thérapies
13:45de conversion
13:45des jeunes personnes LGBT,
13:49eh bien,
13:50j'ai travaillé
13:51avec l'association
13:52Rien à guérir
13:54parce que pourquoi
13:55si vous ne travaillez pas
13:57avec les personnes
13:58expertes
13:59du sujet
14:00dont vous parlez,
14:02vous ne pouvez pas
14:02trouver
14:03les arguments
14:04qui vont rassembler
14:06plutôt que diviser.
14:07Donc,
14:08créez votre équipe,
14:10trouvez les alliés
14:11et avoir une stratégie,
14:14c'est fondamental.
14:15L'entreprise ne fonctionne
14:16qu'avec,
14:17une fois que vous avez
14:18votre vision,
14:19il faut que vous construisiez
14:20avec votre comex,
14:21avec votre codire,
14:23la stratégie
14:23qui va vous permettre
14:24d'atteindre votre objectif
14:25et la politique aussi,
14:26sauf que ça n'est pas
14:27la même stratégie.
14:28Moi,
14:28j'étais convaincue
14:29en arrivant en politique
14:30que le gouvernement,
14:33c'est une équipe
14:33soudée au service
14:35d'une cause commune.
14:37On parle d'ailleurs
14:37de l'équipe gouvernementale
14:38et depuis une dizaine d'années,
14:40il y a un terme
14:41qui revient souvent,
14:41c'est le séminaire gouvernemental.
14:43Et ça,
14:43c'est vraiment issu
14:44du champ electrical
14:45du monde de l'entreprise.
14:47Eh bien,
14:48que n'a été ma surprise
14:49quand j'ai constaté
14:51que le terme
14:52équipe gouvernementale,
14:54en fait,
14:55est un terme
14:56complètement biaisé.
14:57il n'y a pas d'équipe
14:59gouvernementale.
15:01Il y a des femmes
15:02et des hommes
15:03qui vont représenter
15:05des intérêts
15:06parfois divergents
15:08au sein même
15:09d'un gouvernement.
15:10Mais dans le codire
15:10d'un grand groupe aussi.
15:12Attention,
15:13moi,
15:13quand j'étais patronne
15:15de mon entreprise,
15:17il y avait une chose
15:18qui était fondamentale
15:19pour que quelqu'un
15:20réussisse
15:21dans l'entreprise.
15:23Il fallait que l'entreprise
15:24réussisse.
15:25vous ne pouvez pas,
15:26si vous êtes
15:27directeur financier,
15:29directrice commerciale,
15:31vous êtes patron
15:32des ressources humaines,
15:33vous êtes président
15:34de l'entreprise,
15:35pour que tout le monde
15:36réussisse
15:37et que tout le monde
15:37grandisse,
15:38il faut que l'entreprise
15:39grandisse.
15:40En politique,
15:42pour que vous réussissiez,
15:43il faut parfois
15:44que votre collègue tombe.
15:46C'est schizophrénique.
15:47Moi,
15:47je n'avais pas,
15:48venant du monde
15:49de l'entreprise,
15:50alors il y a beaucoup
15:50de politique dans le monde
15:52de l'entreprise,
15:52ne nous trompons pas.
15:53Je ne suis pas en train
15:54de dire,
15:54je ne fais pas d'angélisme
15:55et je sais les rapports
15:57de force et les rapports
15:58de pouvoir qu'il peut y avoir
15:59dans le monde
15:59de l'entreprise.
16:00Il n'en est pas moins
16:01que la seule manière
16:03pour que tout le monde
16:04réussisse dans l'entreprise,
16:06c'est que l'entreprise
16:06elle-même réussisse.
16:08En politique,
16:08parfois,
16:09pour que vous réussissiez,
16:10il faut que vos collègues
16:11tombent.
16:13Les collègues qui sont
16:15quand vous dites « je suis arrivé
16:16en politique et j'ai dû
16:17constituer une équipe »,
16:18est-ce que vous avez pris
16:19des gens à vous
16:20ou est-ce qu'on vous a imposé
16:21des profils un peu politiques
16:23où on dit « ça,
16:24c'est tel élément de langage
16:25qu'il faut dire »,
16:26c'est telle posture
16:26qu'il faut avoir ?
16:27On m'a recommandé
16:29des personnes.
16:31D'autres personnes
16:32se sont recommandées
16:34elles-mêmes.
16:34Oui.
16:36Mais la grande difficulté
16:39que j'ai rencontrée,
16:40c'est que lorsque je suis
16:42arrivée au gouvernement,
16:43je suis arrivée
16:46à la faveur
16:47d'un remaniement
16:47et les meilleurs
16:49avaient déjà été choisis.
16:52Et donc,
16:53il a fallu
16:53que j'aille chercher
16:54des personnes
16:55soit qui avaient quitté
16:56la politique,
16:57soit des personnes
16:58qui n'avaient pas trouvé
16:59le job de leur rêve.
17:00Et dans ce cas-là,
17:02ce n'est pas facile
17:02parce que tout le monde
17:05n'a pas les mêmes intérêts.
17:06Et je trouve ça
17:07regrettable
17:09parce que du coup,
17:10vous avez à l'intérieur
17:12d'un cabinet
17:12des luttes
17:15fratricides
17:16pour savoir
17:17qui va tirer
17:18son épingle du jeu
17:19lors d'un potentiel
17:20futur remaniement.
17:22Ça, vous avez connu ça ?
17:23Bien sûr que j'ai connu ça.
17:24Ce qui n'était pas le cas
17:24dans le privé.
17:25Ah ben non.
17:26Moi, mon équipe,
17:28mes équipes,
17:29parce que j'ai eu
17:30plusieurs équipes,
17:31que ce soit
17:32chez HP,
17:34que ce soit
17:34chez Dell,
17:35que ce soit
17:35chez Lenovo,
17:37des équipes avançaient
17:38toutes dans la même direction,
17:39même s'il pouvait y avoir
17:40des mésententes
17:42mais l'objectif commun
17:44était là.
17:45Et dans ce cas-là,
17:45est-ce que vous avez fait
17:46une sorte de team building
17:47pour mettre les choses à plat
17:48et dire écoutez,
17:48on va tous tirer
17:49dans la même direction ?
17:50Bien sûr.
17:50Vous êtes, entre guillemets,
17:51laissé manger
17:52par des profils politiques ?
17:54Un peu des deux
17:55parce que quand je suis arrivée,
17:57je n'avais pas d'expérience
17:58en politique.
17:58Donc, j'étais obligée
17:59de regarder
18:01les autres faire
18:02et je devais
18:03composer
18:04avec les conseils
18:05que l'on me donnait.
18:07mais même à ce niveau-là,
18:09vous vous rendez compte
18:10que les conseils
18:11qui vous sont donnés
18:12ne sont pas toujours
18:13dans votre intérêt.
18:14Ils sont parfois
18:15dans les intérêts
18:17de certaines personnes
18:18qui servent
18:18les intérêts
18:19d'autres personnes
18:20mais tout cela,
18:21vous ne le découvrez
18:22qu'après coup.
18:23C'est Game of Thrones.
18:24C'est Game of Thrones.
18:25C'est exactement ça.
18:27Et c'est un jeu
18:28d'échecs,
18:30c'est un jeu
18:31de rapports de force,
18:33de rapports de pouvoir,
18:35de manipulations,
18:36d'influence
18:38auxquelles
18:39je n'étais pas
18:40forcément habituée
18:41dans le monde
18:41de l'entreprise
18:42puisque moi,
18:42mon seul objectif...
18:43Ça prend du temps
18:43de travail en plus.
18:44Ah mais ça prend
18:45une énergie colossale.
18:47C'est-à-dire que
18:48l'énergie
18:50qui est dépensée
18:52dans les luttes
18:54politiques,
18:56c'est autant d'énergie
18:56que vous ne mettez pas
18:58au service
18:59de nos concitoyens.
19:00Entre guillemets,
19:00si on fait une comparaison,
19:02quelle est la pire
19:02perte de temps ?
19:03C'est les réunionnites
19:04en entreprise
19:05ou c'est faire
19:06de la politique politicienne
19:07quand on est ministre ?
19:09Je dirais que
19:12l'un et l'autre
19:13sont aussi délétères.
19:18Et je dirais
19:19que les réunionnites
19:21aigües
19:22qui peuvent exister
19:23dans le monde
19:24de l'entreprise
19:25sont probablement
19:28moins dangereuses
19:29que la politique politicienne.
19:31pourquoi ?
19:32Quand vous faites
19:33des réunionnites aigües,
19:35ça n'impacte
19:37que l'efficacité
19:37de votre entreprise.
19:39Vos chiffres,
19:40vos performances,
19:41vos résultats.
19:42Quand vous passez
19:43plus de temps
19:43et d'énergie
19:44à faire de la politique
19:45politicienne
19:46qu'à vous occuper
19:47des concitoyens,
19:48ça donne le résultat
19:49que nous vivons aujourd'hui.
19:50J'ai eu la chance
19:51de discuter avec des personnes
19:52qui viennent du secteur privé
19:53et qui sont arrivées
19:54en politique,
19:55qui peuvent être
19:55au centre,
19:56à gauche,
19:57à droite.
19:57Ils m'ont tous dit
19:58la même chose.
19:59Il y a quelque chose
20:01qui m'a fait péter un plomb.
20:02C'est la première fois
20:03que quelqu'un arrive,
20:04me donne une feuille
20:05et me dit
20:05ça, c'est les éléments
20:06de langage
20:07que vous allez devoir dire.
20:09Est-ce que vous,
20:09vous avez été aussi
20:10confronté à ces éléments
20:11de langage,
20:12des trucs vraiment horribles
20:13qu'on est obligé
20:14de recracher
20:14et comment on réagit
20:15face à ça ?
20:16Ça a été
20:17l'un de mes plus gros défis.
20:19Parce que, voyez-vous,
20:20moi, quand je suis rentrée
20:21en politique,
20:23je n'ai pas changé
20:24la personne que j'étais.
20:27Je suis arrivée
20:28et d'ailleurs,
20:28je pense qu'on est venu
20:29me chercher
20:30pour les convictions
20:32qui étaient les miennes,
20:33pour les engagements
20:34qui sont les miens
20:35depuis que je suis
20:36à l'université,
20:37pour ce que je pouvais porter
20:39et apporter,
20:41justement,
20:41avec mon expérience
20:42du monde de l'entreprise,
20:43de la société civile,
20:45du monde associatif,
20:46etc.
20:47Et à peine
20:48vous avez passé
20:49le Rubicon,
20:52qu'on veut vous transformer
20:53en quelque chose
20:54que vous n'êtes pas.
20:54Et moi,
20:55je suis quelqu'un
20:57d'assez spontané
20:58dans mes prises de parole.
21:01J'incarne ce que je dis.
21:03Je ne dis pas les choses
21:04parce qu'il faut les dire.
21:05Je les dis parce que
21:06j'y crois.
21:07Et quand on vous met
21:08un papier sur la table
21:09et qu'on vous dit
21:10voilà ce qu'il va falloir
21:11que vous disiez,
21:12et parfois des choses
21:13auxquelles vous ne comprenez
21:14rien d'ailleurs,
21:15mais comme on a le temps
21:16de rien en politique
21:17et que tout va très,
21:19très, très vite,
21:19et bien vous êtes obligés
21:21de vous adapter
21:21à ce qu'on vous propose.
21:23Donc ça, pour moi,
21:24ça a été l'une des choses
21:26les plus difficiles.
21:27Et vous savez quoi ?
21:29Je pense que l'une des raisons
21:30pour lesquelles
21:30les gens se désintéressent
21:32de plus en plus
21:33de la politique,
21:34c'est que ces éléments
21:35de langage,
21:37à force de prudence,
21:39parce que ce sont
21:39des éléments de langage
21:40qui vous protègent,
21:42qui protègent le gouvernement,
21:43qui protègent un parti,
21:45parce qu'il ne faut rien dire
21:46qui déborde
21:47ou qui dépasse,
21:47parce que les réseaux sociaux
21:49font qu'aujourd'hui,
21:51tout est dénaturé.
21:53Et donc,
21:53il ne faut trouver
21:54que des phrases
21:55qui, quitte à ce qu'elles ne veulent
21:57rien dire,
21:59mais il ne faut utiliser
22:00que des éléments de langage
22:02qui ne fâchent personne
22:03et qui ne se retournent pas
22:05contre nous.
22:06Et c'est terrible.
22:07Moi, je l'ai vécu personnellement.
22:09J'ai porté des messages
22:10que je trouvais
22:11extrêmement importants,
22:13mais comme je les ai vécus
22:16et ça vous tombe dessus,
22:18parce que, évidemment,
22:20l'opposition va le prendre,
22:22le distordre
22:23et le transformer
22:24pour vous faire dire
22:25des choses que vous n'avez pas dites.
22:26Donc, les éléments de langage
22:28sont à la fois nécessaires
22:29parce que sinon,
22:30on vous crée des bad buzz
22:31en permanence
22:32et on ne s'intéresse pas
22:33à la profondeur
22:35des sujets
22:35que vous défendez.
22:38Et en même temps,
22:38ils sont délétères
22:39parce qu'ils vous empêchent
22:41de dire ce qui doit être dit.
22:43Je crois que c'est Camus
22:44qui disait que mal nommer les choses
22:46s'est ajouté
22:47au malheur du monde
22:49et je pense que c'est
22:50ce qui se passe aujourd'hui
22:51en politique.
22:52Alors, il y a aussi
22:52beaucoup de personnes
22:53qui viennent du secteur privé
22:54ou en tout cas
22:55qui ont des postes
22:55à responsabilité
22:56dans les entreprises
22:57qui se disent
22:58« moi, en fait,
22:58j'aimerais bien m'engager ».
23:00Mais après,
23:01quand c'est fini,
23:01parce que par nature,
23:02c'est éphémère,
23:03est-ce que l'engagement politique
23:04n'est pas un handicap
23:05à la reconversion ?
23:07Alors, d'abord,
23:09j'encourage chaleureusement
23:11ces personnes-là
23:12à s'engager en politique
23:13parce qu'on a besoin.
23:15On a besoin des gens
23:16qui viennent de la société civile
23:18pour apporter un regard différent.
23:21Je pense que quand le président
23:22de la République
23:22a eu cette idée en 2017,
23:25elle était nécessaire et utile.
23:27Bon, malheureusement,
23:28il n'y en a pas beaucoup
23:29qui sont restés.
23:30D'ailleurs, ce serait intéressant
23:31qu'on se pose la question
23:32de savoir pourquoi.
23:34Pourquoi de toutes les personnes
23:35issues de la société civile,
23:36on ne se retrouve finalement
23:38qu'avec des barons de la politique.
23:40Ce serait intéressant
23:40de se poser la question.
23:43Et ensuite,
23:45vous savez,
23:45moi, j'ai quitté
23:46une position
23:47extrêmement confortable
23:50que j'ai mise
23:51des années à construire
23:52à la force du poignet.
23:56Et je l'ai quittée
23:57parce que j'avais envie
23:58de servir mon pays,
23:59parce que j'avais envie
24:00de servir des causes
24:02qui me tenaient à cœur,
24:03parce que j'avais envie
24:03de rendre possible
24:05ce qui était
24:06souhaitable.
24:08Le problème,
24:09c'est qu'on sait
24:09quand on arrive,
24:11mais on ne sait jamais
24:11quand on repart.
24:13L'autre problème,
24:14c'est que vous n'avez
24:14aucune couverture.
24:16Aucune.
24:17Vous avez,
24:18quand vous quittez
24:18le gouvernement,
24:19vous avez trois mois
24:20d'accompagnement.
24:25Mais trois mois,
24:26qu'est-ce que c'est
24:27que trois mois ?
24:28Je n'avais jamais été
24:29au chômage de ma vie.
24:31Jamais.
24:31Et du jour au lendemain,
24:33alors que pendant deux ans,
24:35j'ai travaillé quasiment
24:36sept jours sur sept,
24:3724 heures sur 24,
24:39du jour au lendemain,
24:39vous n'avez plus rien.
24:41Et est-ce que je regrette ?
24:42Non.
24:42Je ne regrette absolument pas
24:44parce que c'est probablement
24:45la plus belle mission
24:46de toute ma vie.
24:48Est-ce que professionnellement,
24:49c'est dur ?
24:49Est-ce que finalement,
24:51c'est un ligne en plus
24:52à son CV ?
24:53Est-ce que c'est valorisé ?
24:54Est-ce que c'est partir
24:55avec une épine en pied
24:56de s'engager ?
24:57Les deux.
24:58Les deux.
24:59Parce que les gens,
25:01beaucoup de personnes
25:02sont admiratives
25:03du fait que vous ayez
25:05été ministre
25:05parce qu'ils savent
25:06combien c'est dur.
25:07Moi, je suis sortie
25:08du gouvernement en me disant
25:09« Maintenant,
25:10je peux tout faire.
25:11Vu ce que j'ai vécu,
25:12je pense que je peux tout faire. »
25:15Parce que c'est extrêmement
25:16difficile
25:17et que ça demande
25:18énormément de résilience,
25:21de courage,
25:21de travail,
25:22etc.
25:25Vous n'avez pas...
25:27Alors, certains politiques
25:28malins préparent
25:29leur sortie.
25:31Moi, j'ai mis tellement
25:32d'énergie à faire
25:33tout ce que je pouvais faire
25:34au gouvernement
25:35que je n'ai pas pensé
25:37à préparer ma sortie.
25:38Donc, vous vous retrouvez
25:39du jour au lendemain
25:40sans boulot.
25:43J'avais cette conversation
25:44avec ma sœur
25:45et je lui disais
25:45« Mais qu'est-ce que ça change
25:48pour toi ? »
25:49Je lui dis « En fait,
25:50à chaque fois que j'ai changé
25:51de job dans le privé,
25:52il n'y avait que mes amis
25:53et ma famille
25:54qui étaient au courant
25:55et qui me demandaient
25:55des nouvelles.
25:56Là, vous avez des journalistes
25:57qui vous demandent
25:58ce que vous allez faire,
25:59vous avez des personnes
26:00qui ne vous connaissent pas,
26:01qui vous envoient des messages
26:02pour vous dire
26:03« Et alors,
26:04qu'est-ce que vous faites maintenant ? »
26:05Et ça vous met
26:05une pression incroyable.
26:07Mais est-ce qu'il y a aussi
26:07des chasseurs de tête
26:08qui disent « Écoutez,
26:09votre profil nous intéresse ? »
26:11Il y a une curiosité
26:12qui est parfois saine
26:13et parfois malsaine.
26:15Moi, je me souviens
26:15d'une anecdote.
26:17Comme je viens du monde
26:18de l'entreprise
26:18et que j'ai une expérience
26:19assez développée,
26:21je vais voir
26:22les quatre plus grands cabinets
26:24de la place de Paris,
26:25mais que je connaissais d'avant.
26:27Et je me souviens
26:28d'une conversation
26:29que j'ai avec l'un
26:30de ces chasseurs de tête
26:31et je lui dis
26:31« Écoutez,
26:32je n'ai pas forcément
26:33envie de retourner
26:33travailler tout de suite
26:34dans un grand groupe.
26:36Je vais prendre
26:37quelques mandats administratifs
26:38et utiliser cette expérience
26:40que j'ai gagnée
26:41dans mes 30 ans
26:42d'expérience
26:43dans la vie
26:43de l'entreprise
26:45et mes deux ans
26:45dans la politique publique
26:47pour accompagner
26:48le développement
26:48de certaines entreprises.
26:50Et je me souviens,
26:51mais ça m'a tellement frappée,
26:53il me dit
26:53« Oui, mais ça va être difficile,
26:56Mme Moreno,
26:57parce que vous n'avez jamais été
26:58dans un conseil d'administration. »
27:00Les bras m'en sont tombés
27:01et je lui ai répondu
27:02« Mais je n'avais jamais
27:03non plus été ministre,
27:04je n'avais jamais été
27:05vice-présidente,
27:06je n'avais jamais été
27:06directrice générale. »
27:08Parce qu'en fait,
27:09les chasseurs de tête
27:10ont tellement de préjugés,
27:13de biais,
27:13de stéréotypes
27:14qu'ils ne voient pas
27:17plus loin
27:18que,
27:20j'ai presque envie de dire,
27:21le bout de leur nez.
27:22Alors,
27:22pour répondre à votre question…
27:23Vous êtes rentré chez Sanofi ?
27:24Oui,
27:25mais certainement pas
27:26par un chasseur de tête.
27:27Mais d'ailleurs,
27:28de toute ma carrière,
27:29parce que j'ai un profil
27:30tellement atypique,
27:31je suis issue
27:32de l'immigration,
27:34d'un milieu défavorisé,
27:36j'ai grandi
27:37dans les cités
27:38de l'Essonne,
27:40aucun chasseur de tête
27:42à part Stéphane Chabert
27:44ne s'est dit un jour
27:45que je pouvais avoir
27:46une bonne intelligence
27:47et la capacité
27:48de diriger une entreprise.
27:50Parfois,
27:51il faut,
27:51il faut des gens
27:53un peu audacieux
27:54qui voient un peu plus loin
27:56que juste ce qui est écrit
27:57sur votre CV
27:58ou ce à quoi vous ressemblez
27:59pour vous donner votre chance.
28:01Donc,
28:01je m'en arrête là
28:02juste pour vous dire
28:03que est-ce que ça aide
28:04d'avoir été ministre ?
28:05Oui et non.
28:06Parce que des personnes
28:07se disent que ça peut
28:08leur ouvrir les portes
28:09des politiques publiques
28:10et d'autres vont se dire
28:11« Oh là là là là là là,
28:12je n'ai certainement pas envie
28:14de m'encombrer
28:14de quelqu'un
28:15qui a été en politique. »
28:17Il nous reste quelques secondes.
28:18Quel message
28:19vous voudriez passer
28:20à un jeune cadre dirigeant
28:21qui aimerait s'engager
28:22en politique
28:22mais qui hésite ?
28:24Allez-y.
28:25Allez-y.
28:26Parce qu'on a besoin de vous,
28:27on a besoin de vos talents,
28:28on a besoin de vos compétences,
28:29on a besoin de vos manières
28:31de voir le monde.
28:32Et soyez prêts
28:33à apprendre.
28:34Arrivez avec humilité,
28:36apprenez
28:36et apportez à la politique
28:38ce dont elle a besoin
28:38parce que notre pays
28:39a besoin de vous.
28:40Ce sera le mot de la fin.
28:41Merci beaucoup Elisabeth Moreno.
28:43Merci de votre invitation.
28:44Sous-titrage Société Radio-Canada