Bruno Retailleau est l'invité de Amandine Bégot

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Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 08 février 2023

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00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL il est 7h42, excellente journée à vous tous qui nous écoutez.
00:10 Amandine Légault vous recevez donc ce matin Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat.
00:14 Bruno Retailleau, il y avait un petit peu moins de monde dans les rues hier pour ces manifestations contre la réforme des retraites mais la mobilisation
00:20 reste forte, soutenue aussi par une majorité de français. Vous restez vous convaincu que c'est une bonne réforme qu'il faut la faire ?
00:26 Bien sûr, il n'y a aucune raison que je retourne ma veste.
00:29 D'ailleurs beaucoup d'hommes et de femmes politiques aujourd'hui devraient réécouter en se rasant le matin la belle chanson de Jacques Dutronc.
00:34 Moi j'ai toujours plaidé pour que le travail puisse
00:37 payer justement et on a deux lames qui sont, deux tranchants qui sont terribles. D'abord on va accumuler 150 milliards d'euros
00:45 pour les régimes de retraite dans les dix prochaines années et ensuite il y a un fait démographique.
00:49 Le fait démographique c'est qu'il y a toujours moins de cotisants
00:52 pour toujours plus de pensionnés. Alors comment on fait ?
00:55 On reste seul en France, ce que je voudrais dire moi pour ceux qui s'inquiètent encore pour cette réforme et c'est parfaitement normal
01:00 qu'elle puisse inquiéter. C'est que quand cette réforme va prendre son plein effet en 2030, nous aurons en France
01:07 l'âge de départ le plus précoce d'Europe. Nous aurons le régime notamment de pénibilité, de carrière longue le plus
01:14 avantageux de tous les pays d'Europe. Alors qu'est ce qu'on fait ? Est-ce qu'on continue à appauvrir les français ?
01:18 Est-ce qu'on continue à faire en sorte que la France dégringole ? On parlait il y a quelques instants du manque de compétitivité.
01:25 Vous savez si on veut demain améliorer le pouvoir d'achat des français, le niveau de vie, c'est pas avec des chèques en bois de l'État,
01:30 c'est notamment par la production. Plus produire et pour plus produire il faut plus travailler et on sera beaucoup plus indépendant aussi de l'étranger.
01:38 Vous parliez de ceux qui retournent leur veste, vous pensez j'imagine notamment à Aurélien Pradié, député LR du Lot ?
01:44 En tout cas ce que j'observe, puisqu'il y a eu des débats entre nous vous savez il y a quelques mois,
01:49 on était concurrent pour l'élection LR, je me souviens parfaitement qu'il plaidait pour
01:54 45 annuités. 45 annuités ça veut dire qu'à 20 ans partait à 65 ans. Puis brutalement il faudrait que 43 annuités.
02:00 Non, moi je pense que le courage en politique c'est de tenir une ligne de constance.
02:05 Et vous lui dites quoi ce matin ? Stop, tais-toi ?
02:07 Je lui dis rien du tout, il est majeur,
02:09 simplement je dis à ma famille politique comme au gouvernement,
02:12 il faut que cette réforme soit une vraie réforme. Et ma crainte aujourd'hui au moment où je vous parle, c'est que bien sûr qu'il faut
02:18 repousser d'ailleurs l'architecture de la réforme qu'a choisi le gouvernement, c'est très largement celle que nous avons fait voter depuis plusieurs années au Sénat.
02:26 Mais ce que je dis c'est qu'attention, cette réforme elle devait dégager des marges de manœuvre
02:30 de 17 milliards. Aujourd'hui je pense que sur les 17 milliards on a dû en consommer
02:35 à mon avis 6 ou 7 ou 8. Trop de concessions ?
02:39 Je pense qu'il faut faire attention. En tout cas il faut, en réalité on sait parfaitement que lorsqu'on dégage des marges de manœuvre,
02:45 c'est pas pour faire mal aux français, c'est pour donner des nouveaux droits. Par exemple moi j'ai toujours plaidé pour que les petites retraites
02:51 soient augmentées et ça c'est positif.
02:53 J'habite un milieu rural, j'en ai marre de voir des gens qui ont bossé toute leur vie beaucoup plus que 35 heures et parfois 45,
02:59 46, 47 annuités,
03:01 gagner des retraites de misère, ça j'en ai marre. Mais pour ça il faut travailler plus, il faut gager des nouveaux droits
03:07 sur le travail. Nous on n'est pas des faux monnayeurs en générosité.
03:11 Ce qu'on veut donner aux gens, les nouveaux droits, et bien on le gage sur le travail.
03:16 - Ce que vous dites c'est que le risque avec toutes ces concessions c'est quoi ? De tuer la réforme ?
03:19 - Bien sûr, mais bien sûr puisque le trou en 2030 c'est autour de 12 milliards ou 13 milliards, il y a plusieurs hypothèses,
03:25 peu importe, dans le meilleur des cas. Et là on est parti à mon avis pour être à nouveau en 2030
03:33 en négatif.
03:35 - Je reviens sur Aurélien Pradié, il dit "c'est pas normal de demander à ceux qui ont commencé à travailler à 16 ou 18 ans de
03:41 travailler 44 ans quand ceux qui commencent à 30 ans pourront partir après 43 ans de cotisation".
03:46 Il dit "c'est injuste".
03:49 - Non mais aujourd'hui ce que je veux vous rappeler...
03:51 - C'est injuste, vous êtes d'accord avec ça ?
03:53 - Non, ce que je veux vous rappeler aujourd'hui c'est que dans les dispositifs carrière longue,
03:55 et notamment pour ceux qui commencent plus tôt, notamment pour les apprentis, c'est 45 annuités.
04:01 Demain personne ne travaillera, aura à travailler pendant 45 annuités, ce sera moins.
04:06 43 ou 44. Ce que je veux dire par ailleurs c'est qu'il y a une forme aussi d'injustice.
04:11 Puisque les étudiants, certes ils ne cotisent pas, mais ceux qui travaillent beaucoup,
04:14 qui font des écoles prépa et qui bossent par exemple 70 ou 80 heures par semaine, eux n'auront pas ces dispositifs.
04:20 Donc on peut toujours trouver des injustices. Je pense qu'il faut approcher ce système
04:25 en essayant de le rendre plus juste, c'est le cas pour les petites retraites. Moi j'aurais aimé, vous voyez, que plutôt qu'on s'intéresse
04:31 à ce que je considère déjà en France comme un régime
04:33 qui est plutôt favorable par rapport aux autres pays étrangers, c'est aux mères de famille. Parce qu'il y a une dimension
04:38 familiale et que dans un régime de retraite par répartition,
04:41 il y a la démographie qui est en réalité le juge de paix. Et je pense aujourd'hui que les perdantes de notre système
04:48 de répartition, pas la réforme je pense améliore, mais peut-être pas suffisamment, nous le verrons au Sénat, ce sont les mères de famille qui doivent interrompre.
04:55 Il y a un certain nombre qui perdent effectivement l'avantage de leur...
04:58 - Bien sûr, et on sait très bien que celles qui interrompent le plus souvent leur carrière, ce ne sont pas celles qui ont le plus de formation, vous le savez.
05:06 - Bruno Retailleau, une vingtaine de députés LR pourraient ne pas voter ce texte, 20 sur 62, ça fait quand même beaucoup.
05:12 Est-ce qu'ils seront sanctionnés s'ils ne votent pas ce texte ?
05:15 - Ecoutez... - Vous le souhaitez ?
05:18 - Non, je ne suis pas aux sanctions, on n'est pas à l'école,
05:20 je crois que ça n'est pas ça. Je pense que ce qui se joue, voyez, c'est la droite et ses contradictions.
05:26 - Ce qui se joue, c'est aussi l'avenir de votre parti. - Exactement. Je pense qu'on peut mourir de nos contradictions.
05:30 Je le dis à l'antenne, je n'ai pas l'habitude de faire la langue de bois, je pense qu'on en est là.
05:34 Pour moi, je pense que la ligne LR, ça ne peut pas être une ligne Radsock,
05:37 ça n'a aucun sens. Pour moi, être de droite, c'est pas seulement être un peu moins à gauche que la gauche. Et si on doit avoir une utilité,
05:44 quel besoin dans le débat, quel besoin ont les Français d'une droite qui dirait demain "oui mais travaillez plus, c'est horrible, c'est
05:52 abominable", quel besoin ont ces Français d'avoir une droite qui dirait "non, non, il n'y a pas besoin de veiller à l'argent public, on peut toujours
05:59 plus dépenser". Il n'y a pas besoin de ça. On a Mélenchon, on a Le Pen. Quel besoin auraient les Français de dire qu'il faut une
06:04 immigration massive ?
06:06 On a, pour régulariser,
06:08 M. Darmanin ou M. Macron. Ce que je veux dire, c'est que cette réforme des retraites, tout est lié, y compris la question
06:13 de l'immigration. Je veux vous rappeler que M. Delvois, en 2019, lorsqu'il était haut-commissaire aux retraites, avait eu cette déclaration
06:20 en 2050, pour l'Europe, il faudra sans doute, pour alimenter la machine économique,
06:24 50 millions d'immigrés en plus. On a un choix aujourd'hui. Le choix, il est clair, c'est un modèle de société.
06:30 Voulons-nous essayer de protéger notre modèle social ? Voulons-nous nous appauvrir ou, avec une plus forte quantité de travail,
06:37 reprendre le chemin de la prospérité ? Voulons-nous, oui ou non, avoir une immigration massive ou
06:42 contrôlée, comme le fait d'ailleurs le pays du Danemark, comme le Danemark, son immigration ?
06:47 - Laurent Wauquiez doit parler, prendre la parole. C'est un truc trop discret. - Non mais il faut en tout cas que tous nos grands leaders
06:53 puissent s'exprimer. Il l'a fait, je pense, il y a quelques semaines, mais je pense que toutes les voix sont importantes.
07:00 - Il faut qu'il siffle à la fin de la récré ?
07:02 - Non, ce n'est pas à lui de siffler. - Pardonnez-moi de parler comme ça, mais...
07:06 - Non, je pense aujourd'hui... - S'il doit représenter la droite. - Moi, j'appelle chacun à sa responsabilité.
07:11 Il a indiqué qu'il était favorable à cette retraite, mais je pense que toutes les grandes voix doivent se faire entendre,
07:17 parce que ce qui se joue, c'est important. Je disais que, évidemment, que la retraite,
07:20 chacun s'inquiète parce que ça a une conséquence individuelle,
07:25 mais tout se joue dans la retraite. La prospérité, le modèle social, la question de l'immigration.
07:29 Comme je vous le disais, il faut savoir quelle France, demain, on veut. Une France qui dégringole
07:34 ou une France qui va se retrouver chez les manches pour offrir à nos jeunes générations
07:37 une perspective qui soit meilleure que celle qu'on a aujourd'hui d'un déclassement.
07:41 - Et toute dernière question, Aurore Berger, la présidente du groupe Renaissance à l'Assemblée, a appelé les sénateurs à abandonner leur régime
07:47 spécial de retraite, comme l'ont fait les députés. Vous y êtes favorable ?
07:50 - Écoutez, à chaque fois, et ce sera le cas, à chaque fois qu'il y a une réforme, eh bien,
07:56 on la transposera dans notre système. C'est-à-dire qu'on reculera, par exemple,
08:00 l'âge de départ de deux années. Ce que je veux dire, c'est que ça n'est pas un régime spécial.
08:06 C'est un régime autonome. - Avec une double cotisation, une surcotisation qui vous permet d'être autonome.
08:11 - Les députés cotisent moins. Nous, on cotise 20%. Les députés, 14%. Ça fait 350 euros que les députés économisent par mois
08:20 plutôt que de les mettre de côté pour leur retraite. - C'est donc normal que vous touchiez plus ?
08:24 - Mais c'est un régime. C'est un régime autonome et il est équilibré. On n'a pas besoin de l'argent de l'État pour l'équilibrer, nous,
08:30 contrairement à l'Assemblée nationale. Pourquoi ? C'est tout simplement que depuis plus d'un siècle, on a mis côté, grâce à
08:36 la cotisation des sénateurs. Et c'est vrai que la moyenne d'âge de départ, c'est 72 ans. Et du coup, on reste un peu moins longtemps en retraite
08:43 que la population en moyenne. Donc, c'est une sorte... - Ça vous agace ces attaques, justement, contre les retraites des sénateurs ?
08:50 C'est quoi, des magots ? - Non, c'est une forme d'anti-parlementaire. C'est facile. On va dire demain, mais attendez, un sénateur, ça touche beaucoup trop.
08:57 - Ça touche combien, un sénateur ? - 6000 euros. Mais vous savez, beaucoup, comme moi et d'autres, en faisant le choix de l'engagement public,
09:05 on sait qu'on a renoncé à un train de vie. Je pense que, par rapport à la promotion et à mes amis dans le privé, ils touchent deux, trois fois plus que moi.
09:14 C'est tout. Mais c'est pas... Moi, je ne me plains pas. On le fait parce qu'on l'aime, parce qu'on a un idéal, parce qu'on est encore habité par un idéal.
09:20 Et c'est, je crois, dans la vie d'un homme et d'une femme, essayer de rendre une existence utile, je crois que c'est le plus beau cadeau qu'on puisse se faire.
09:27 Et voilà. Donc, je ne veux pas dire qu'on est meilleur que les autres, mais aimer la France, son pays, vouloir faire avancer les choses,
09:33 c'est ce qui nous est donné. C'est difficile au quotidien, croyez-moi, actuellement, dans la vie politique, c'est encore plus difficile.
09:38 Mais il faut s'accrocher à cette flamme tous les matins.
09:40 Merci beaucoup.
09:41 [SILENCE]

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