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00:00 Bonsoir à toutes et à tous, dans l'Invité Éco ce soir je reçois le patron de Michelin,
00:04 Florent Ménégauve, bonsoir.
00:06 Bonsoir Isabelle Raymond.
00:07 Vous avez publié hier les résultats financiers de l'entreprise pour 2022 et on peut dire
00:11 que le bonhomme, bi-bindhomme, s'en sort pas mal vu le contexte d'inflation, vu la
00:16 hausse des coûts de fabrication que vous subissez, on va y revenir évidemment.
00:20 Vos bénéfices sont en hausse, votre chiffre d'affaires dépasse aussi son niveau d'avant
00:24 Covid d'avant 2019 avec pourtant des volumes de vente qui sont en baisse dans le même
00:30 temps.
00:31 Est-ce que ça veut dire Florent Ménégauve que vous gagnez plus d'argent sur chaque
00:34 pneu que vous vendez ?
00:35 Alors en synthèse oui, concrètement oui.
00:39 Maintenant derrière cette idée il y a énormément de travail de toutes les équipes, c'est
00:45 aussi la reconnaissance par nos marchés et nos clients que nos produits sont des satisfaçons.
00:52 Et donc un chiffre d'affaires qui est en hausse, un volume de vente qui est en baisse,
00:56 des bénéfices qui sont en hausse aussi ?
00:58 Oui, ils sont en hausse, ça c'est le fruit d'un travail continu que nous menons maintenant
01:03 depuis plusieurs années et nous avons continué cet effort malgré toutes les crises que nous
01:10 venons de traverser puisque l'année 2022 a été quand même tout à fait particulière
01:14 et nous avons été servis en matière de crise.
01:16 Et donc en parlant de crise, il y a évidemment notamment la hausse des coûts de fabrication.
01:23 Qu'est-ce qui vous concerne particulièrement ? Les matières premières, l'énergie,
01:27 tout ça à la fois ?
01:28 Alors en fait nous avons quatre facteurs de hausse.
01:32 Le premier c'est les matières premières, le second c'est la logistique.
01:36 Vous avez le transport maritime qui a coûté beaucoup plus cher et qui maintenant dans
01:41 les prix se détendent.
01:42 Ça s'est un petit peu résorbé.
01:43 Ça va mieux.
01:44 Le transport terrestre qui est toujours tendu, il y a un manque de conducteurs de camions
01:51 en Europe et aux États-Unis.
01:54 Un troisième facteur qui est la hausse très forte de l'énergie, ça, ça concerne principalement
01:58 l'Europe et ça, ça me préoccupe plus structurellement.
02:02 Et puis ensuite, vous avez un quatrième facteur d'inflation qui est l'inflation sur les salaires
02:08 puisque derrière, après plusieurs périodes consécutives d'inflation, il faut que les
02:14 salaires montent et donc ça, ça fait quatre facteurs d'inflation qui ont lourdement pesé
02:19 sur nos coûts cette année.
02:21 Et donc vos coûts de fabrication, ils ont augmenté de quel ordre ?
02:24 Sur l'année, 2,7 milliards.
02:27 Donc c'est assez considérable.
02:29 C'est l'équivalent de 10% de notre chiffre d'affaires.
02:31 Est-ce que vous aviez anticipé une hausse aussi importante ?
02:34 En fait pas du tout.
02:35 En 2021, si on se remet en octobre 2021, nous pensions que la hausse de l'ensemble de nos
02:44 coûts serait de l'ordre de 400 millions d'euros.
02:47 En février, nous avons vu apparaître la guerre en Ukraine, la hausse des coûts de l'énergie
02:53 qui a explosé.
02:55 Nous avons vu aussi les matières premières, les perturbations logistiques, etc.
02:59 Donc là, nous avons prévu 1,2 milliard de hausse.
03:03 On est passé de 400 millions à 1,2 milliard.
03:06 Et puis à la fin de l'année, le résultat c'était 2,7 milliards de hausse.
03:10 Donc bien au-delà de ce que vous aviez imaginé.
03:12 Cette hausse des coûts de fabrication, comment est-ce que vous l'avez répercutée sur le
03:16 client final ? En gros, le pneu, il a augmenté de combien ?
03:19 Alors le pneu sur deux ans.
03:23 On va prendre deux ans parce que c'est la bonne période pour évaluer toutes ces périodes
03:28 d'inflation.
03:29 Nous avons malheureusement été obligés d'augmenter nos prix huit fois.
03:31 Et les augmentations ont eu lieu suivant les types de pneumatiques.
03:37 Nous fabriquons des petits pneus et des très gros pneus pour des engins spécialisés
03:41 comme des engins, les voitures de boue de bois.
03:45 Et là-dessus, les hausses se sont esclenées entre 15% et 40% pour certaines catégories
03:53 de pneus.
03:54 Et est-ce que c'est cette hausse qui va jusqu'à 40% qui explique la baisse des ventes ?
03:59 Alors, pas vraiment, puisque la baisse des ventes est plutôt expliquée à l'ordre
04:06 1 par d'abord les marchés des constructeurs automobiles qui continuent à avoir des difficultés
04:13 d'approvisionnement et de production et donc de vente sur un certain nombre des marchés.
04:20 Puis la deuxième cause, c'est plutôt les difficultés d'approvisionnement que nous
04:26 avons eues et donc nos difficultés à produire et donc nos difficultés à servir les marchés.
04:31 Enfin, la troisième cause, c'est le fait que nos circuits de distribution avaient déjà
04:37 fini leur restockage et donc on a maintenant à faire face à un niveau de demande qui
04:42 est un peu plus faible que celui qu'on a connu au moment où il fallait satisfaire
04:45 la demande plus le restockage.
04:47 Le constructeur américain Ford a annoncé il y a quelques heures la suppression de 3 800
04:52 postes en Europe.
04:53 Est-ce que selon vous, c'est un effet immédiat du plan d'aide massif aux relocalisations
04:58 aux Etats-Unis du président américain Joe Biden, le fameux IRA ?
05:02 Alors, d'abord, ce que je voulais dire, c'est que l'industrie est toujours une
05:06 activité comme un corps vivant qui doit s'adapter en permanence à son environnement.
05:10 Je n'ai pas d'informations particulières sur ce qui s'est passé chez Ford.
05:15 Par contre, ce que je crois comprendre dans ce que j'ai pu lire, c'est que c'est
05:21 plus un ajustement lié à des problématiques de compétitivité et puis au fait que sur
05:26 le marché européen aujourd'hui, les marchés sont toujours difficiles et donc ils ont connu
05:32 des baisses de vente importantes.
05:34 Les marchés sont difficiles et l'augmentation du prix de l'énergie est toujours là.
05:38 Est-ce que vous avez des inquiétudes, justement, pour la suite en France, en Europe ?
05:44 Et ce sera ma dernière question.
05:45 Oui, sur l'industrie, il est certain que la hausse du prix de l'énergie peut avoir
05:50 des conséquences industrielles si cette hausse était durable.
05:54 Michelin, c'est une trentaine d'usines en Europe, dont la moitié en France aujourd'hui.
05:59 C'est ça.
06:00 Et donc derrière, il est certain que nous serons obligés de nous adapter parce que
06:04 le prix de l'énergie en Europe est trois fois plus élevé qu'aux États-Unis, deux
06:08 fois plus élevé qu'en Asie.
06:10 Et donc derrière, ça ne peut pas durer éternellement, notamment parce que chez nous, nous exportons
06:16 massivement à partir de l'Europe.
06:18 Ça veut dire quoi, s'adapter ?
06:20 Ça veut dire qu'il est probable qu'on soit amené à repenser notre configuration
06:24 industrielle en Europe pour ces raisons-là.
06:26 À quel horizon ?
06:28 Ça prend du temps.
06:30 Ce type d'opération prend du temps.
06:32 Donc ce que j'ai dit déjà au gouvernement et puis aux personnes qui m'ont posé la
06:36 question en disant, chez Michelin, nous sommes capables de contenir une hausse de l'énergie
06:42 pendant plusieurs mois.
06:44 Maintenant, si ça durait plusieurs années, là, ça serait différent.
06:47 Merci beaucoup, Florent Ménegau, directeur général de Michelin.
06:50 Invitée, go de France Info ce soir.