Philippe Vigier : "Sur 250 députés de la majorité, au moins 245" voteront la réforme des retraites

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Philippe Vigier, député Modem d'Eure-et-Loir et membre de la commission mixte paritaire qui vient d'adopter le texte final de la réforme des retraites, est l'invité de 6h20. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-jeudi-16-mars-2023-1060234
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00:00 Il est 6h20, l'épilogue approche pour la réforme des retraites, dernière étape du parcours législatif,
00:05 le vote des parlementaires aujourd'hui sur la version finale du texte qui a été élaboré hier en commission mixte paritaire.
00:11 Vous étiez dans cette commission, Philippe Vigier, bonjour.
00:13 Bonjour.
00:14 Député Modem d'Eure-et-Loire, la dernière mouture de la réforme vous convient-elle à 100% ?
00:19 Vous savez, un texte ne convient jamais à 100%.
00:21 Ce que je veux vous dire, c'est que ce texte n'est pas celui du gouvernement, ce n'est pas celui de l'opposition,
00:24 ce n'est pas celui des Républicains.
00:26 Par définition, comme il y a une majorité relative à l'Assemblée et comme il est sorti ce qu'on appelle une commission mixte paritaire composée de 7 députés et 7 sénateurs,
00:34 il y a eu des apports qui ont été faits par les uns et par les autres.
00:36 Je vais prendre quelques exemples, par exemple pour les femmes.
00:39 C'est un sujet qu'on a beaucoup porté aux groupes démocrates.
00:41 Les femmes qui avaient souvent des craies arrachées, qui avaient eu une retraite à taux plein à 67 ans,
00:46 n'étaient pas pris en compte pour les enfants nés avant 2012,
00:50 l'intermédiatité perçue pendant la maternité, donc ça les pédalisait fortement.
00:54 C'est corrigé.
00:55 Pour les femmes, il y aurait une surcote également de 5% à partir de l'âge de 63 ans.
01:00 Donc c'est une deuxième avancée.
01:01 Si on regarde les carrières longues, on a créé ce fameux index qui a coulé beaucoup d'encre,
01:06 qui permet de savoir dans les entreprises quel est le niveau d'emploi des seniors.
01:09 Nous sommes les derniers pays d'Europe.
01:11 Un tiers simplement des seniors travaillent.
01:13 Nous avons créé un contrat senior où il y a le gouvernement qui n'était pas favorable, on l'a imposé avec les sénateurs,
01:18 qui va partir sur une forme d'expérimentation pendant une année, qui va donner la main aux partenaires sociaux pour en fixer les conditions.
01:25 Et puis il y a les fameuses carrières longues sur lesquelles il y a eu un accord qui a été assez difficile, c'est vrai,
01:30 puisque tous ceux qui ont démarré avant 21 ans cotiseront pendant 43 ans, pourront partir à partir de 43 ans de cotisation.
01:38 - Alors sur les carrières longues justement, parce que j'ai vu, c'est pas très très clair,
01:41 est-ce que c'est écrit noir sur blanc que tous ceux qui ont démarré avant 21 ans travailleront 43 ans et pas un mois de plus ?
01:49 - Non, ils pourront travailler quelques mois de plus en fonction du mois de naissance de l'année où ils sont nés.
01:56 Pourquoi ? Parce qu'en fait, l'autorisation qui est permis par ce texte-là maintenant, c'est de partir après 43 ans.
02:02 Donc vous avez 43 ans, vous pouvez partir. Simplement, si vous êtes né en janvier ou si vous êtes né en décembre,
02:06 vous êtes d'accord qu'il y a 11 mois qu'ils sont écoulés. Donc c'est vrai qu'il pourrait y avoir 43 ans et deux trimestres.
02:11 Mais c'est quelque chose qui est une avancée sociale par rapport à la loi Touraine.
02:14 Tout le monde a tout oublié sur les carrières longues.
02:16 Avant, il arrivait de cotiser jusqu'à 180 trimestres pour pouvoir partir à la retraite.
02:21 - Et est-ce qu'il y aura une décote ?
02:23 - Pour ceux qui auront... Oui, il pourrait y avoir une petite décote s'il manque quelques mois,
02:27 parce que justement, ils sont nés à la fin de l'année. Je vous dis les choses très clairement.
02:30 - C'est quoi une petite décote ? C'est vraiment léger ?
02:33 - Oui, ce sera vraiment léger. En tout cas, ce sera beaucoup plus faible que ceux qui vous promettent la retraite à 60 ans.
02:39 Je pense par exemple au parti de Marine Le Pen où on dit que vous travaillez 40 ans, vous avez une retraite à taux plein.
02:43 C'est pas vrai. Jamais le niveau de retraite a été d'ailleurs annoncé par le Rassemblement national.
02:48 Vous savez, si on fait une réforme de retraite, c'est pas pour ennuyer les Français.
02:51 C'est parce qu'on sait que ces systèmes de répartition auxquels nous tenons est déséquilibré.
02:54 Il manque 15 milliards d'euros, plus déjà 30 milliards que met chaque année au pot l'État.
02:59 Mais ceux-là ont été gommés. Et puis, il y a une démographie qui est, comme vous le savez, déficitaire.
03:02 Parce que vous avez par exemple le nombre d'actifs qui est en train de diminuer chaque année,
03:07 et le vieillissement qui s'accentue. Donc il faut bien qu'à un moment,
03:10 on aille chercher que le financement complémentaire. Mais un dernier mot.
03:13 Pour les 64 ans, simplement, si Français sur 10 sont concernés,
03:17 par exemple les carrières très actives, comme les policiers, comme les gardiens de prison,
03:21 continueront, ils travailleront pas jusqu'à 64 ans, ça n'est pas vrai. On leur demande deux ans d'effort.
03:26 Philippe Vigier, la réforme va maintenant être soumise une dernière fois aux parlementaires.
03:29 Est-ce que les 51 députés Modem vont la voter ? Est-ce que c'est sûr ?
03:34 Il y aura au moins 50 députés Modem qui vont la voter. Probablement une abstention.
03:37 Je crois que c'est plutôt... Mais il faut tenir compte du parcours de chacun.
03:40 Et comme les députés macronistes, est-ce que vous aussi, au sein du Modem,
03:44 vous allez voir les LR un à un pour essayer de les convaincre ? Est-ce que vous faites ce travail, vous aussi ?
03:48 Écoutez, on se parle, bien sûr, mais je vais vous dire une chose très simple.
03:51 Vous avez confiance ou pas ? Il y a 250 députés de la majorité,
03:54 il y a au moins 245 qui seront au rendez-vous en votant favorablement.
03:58 Après, moi je suis pas en train d'aller chercher Pierre Peau ou Jacques.
04:02 Le travail c'est de savoir si ou non cette réforme, il faut la faire ou pas.
04:04 Vous savez, pour les députés républicains qui d'ailleurs, en CMP, ça s'est très bien passé.
04:08 D'ailleurs, je tiens à dire à vos auditeurs que c'était pas le bazar.
04:11 Il y a la CMP, la France Insoumise, ils étaient là. On a eu des vrais débats approfondis.
04:15 Eh bien, les députés républicains qui ont tous soutenu les candidats à la présidentielle,
04:18 qui étaient favorables à une retraite à 65 ans, comment vont-ils faire pour un système que nous allons voter hier,
04:24 que nous avons validé hier ? C'est quoi ? C'est la loi Touraine accélérée.
04:27 Voilà ce que nous avons voté hier, avec des corrections.
04:29 Est-ce que par prudence, vous souhaitez que le gouvernement actionne le 49-3 ?
04:32 Est-ce que l'essentiel, c'est que cette réforme passe coûte que coûte ?
04:35 Il faut que cette réforme passe, mais moi, je ne désespère pas et je souhaite, je vous le dis très clairement,
04:39 je souhaite que l'on puisse voter cet après-midi. 49-3...
04:42 Quitte à ce que la réforme soit rejetée, donc ?
04:44 Ecoutez, moi je suppose...
04:45 Il faut prendre le risque.
04:46 Je pense qu'il faut prendre le risque.
04:47 Vous savez, Nicolas Sarkozy, alors qu'il a fait la réforme constitutionnelle, il a gagné d'une seule voix.
04:51 La vie politique, c'est aussi prendre des risques.
04:53 La vie politique, lorsque vous présentez à des élections, vous n'êtes pas sûr de gagner.
04:55 Quelquefois, vous gagnez de quelques voix.
04:57 Et puis chacun devra se compter et devra dire ce qu'il fait.
05:01 Parce que si c'est le 49-3, vous ne saurez pas ce que réposait les uns et les autres.
05:04 C'est tellement facile de rentrer ensuite en circonscription et de dire "non, non, non, le vote a été bloqué".
05:09 La gauche et les syndicats, eux, ils réclament une consultation citoyenne.
05:12 Ils disent qu'elle concerne tous les Français, que c'est trop important et qu'il faut les consulter.
05:16 Vous en pensez quoi ?
05:18 La même gauche du Parti Socialiste du gouvernement, qu'est-ce qu'elle a fait en 2015 ?
05:22 Est-ce qu'elle est revenue en arrière sur la réforme d'Eric Wörth de 2010 qui a prévu de reluire à 62 ans ?
05:27 Jamais.
05:28 Elle a même fait pire.
05:29 Elle a mis en place la loi Touraine qui prévoit 43 années de cotisation en 2030.
05:34 Vous savez, la gauche, ils ne sont pas du tout unis.
05:35 C'était une alliance électorale, on a bien vu.
05:37 Et les députés socialistes ont tous voté cette loi Touraine à l'époque.
05:40 Donc pas de consultation citoyenne, vous êtes contre ?
05:43 Non mais moi je ne suis pas du tout opposé aux consultations citoyennes.
05:46 Au contraire, lorsqu'il y a eu la privatisation de l'aéroport de Paris, j'ai fait partie des signataires.
05:50 Donc vous voyez, ce n'est pas le sujet.
05:53 Ce que je veux dire simplement, c'est qu'à un moment ou à un autre, on a une légitimité.
05:57 Elle peut être contestée.
05:58 Moi j'entends les manifestants.
05:59 D'abord, il y a eu tellement de mauvaise communication du gouvernement sur cette réforme.
06:02 Lorsqu'on a dit que les femmes étaient oubliées, c'est là où il y a le plus d'avancées.
06:05 Lorsqu'on a dit que les carrières longues, on ne faisait rien.
06:07 Oui, personne n'a rien fait depuis tant d'années.
06:09 Alors ce contrat senior, cet index dont je parlais tout à l'heure, les taux d'accident du travail, maladie professionnelle,
06:14 c'est un amendement important que nous avons porté avec le groupe, avec Christophe Blanchet en particulier,
06:18 parce que les seniors sont pénalisés dans les entreprises.
06:21 Nous avons porté, il y a des avancées.
06:22 Oui, on demandera des efforts en plus, mais il y a des avancées.
06:25 Vous avez parlé d'une mauvaise communication du gouvernement.
06:27 Vous trouvez que le président et le gouvernement ont mal géré cette réforme ?
06:29 Non, je trouve qu'on aurait pu s'y prendre mieux.
06:31 Regardez sur les femmes, les erreurs de communication qui ont été faites.
06:33 Regardez sur les 1 200 euros, où beaucoup plus de personnes semblent être concernées.
06:38 Mais c'est une réforme tellement compliquée, tellement technique, tellement difficile,
06:41 qu'il faut vraiment en maîtriser tous les éléments de manière à apporter la vraie information.
06:45 Plusieurs sondeurs et politologues qu'on a reçus sur France Inter,
06:48 mais aussi des syndicats, s'inquiètent des conséquences à long terme de l'adoption de cette réforme,
06:53 avec cette forte contestation sociale dans des enquêtes.
06:56 On voit aussi que le niveau de confiance dans les institutions est au plus bas.
06:59 Est-ce que vous ne craignez pas cette défiance d'une partie des Français à long terme ?
07:02 Et dans les prochaines échéances électorales ?
07:04 Un échec de la réforme, c'est le fait qu'on ait coupé le lien avec les partenaires sociaux.
07:08 D'ailleurs, nous, nous avons porté en nombre d'amendements.
07:10 Il faut renouer le dialogue, vous voyez.
07:12 - Et comment on fait ? - Un seul exemple.
07:14 On a proposé une clause de revoyure, en clair, de faire un bilan de cette réforme dans 4 ans.
07:18 J'ai porté cet amendement, d'ailleurs il est passé en commission mixte paritaire,
07:21 on a même un peu tordu le bras au gouvernement.
07:23 Il y aura un débat à l'Assemblée, au Sénat,
07:25 il y aura un débat avec les partenaires sociaux,
07:27 il y aura un rapport qui sera fait par la Cour des comptes,
07:29 par le Conseil supérieur de retraite, de manière à ce qu'on sache les choses.
07:32 Vous voyez, sur la pénibilité, il faut remettre les syndicats dans la boucle.
07:35 Sur l'affaire des contrats seniors, je l'ai dit tout à l'heure rapidement,
07:38 il faut mettre les syndicats dans la boucle, on a besoin du paritérisme.
07:40 Un dernier mot sur les syndicats, vous savez qu'ils cogèrent, agirent carco.
07:43 Vous savez à quel âge on part avec une retraite complémentaire à tout plein ?
07:47 A 64 ans, ce sont les syndicats qui l'ont décidé.
07:49 Donc moi je les respecte.
07:51 - Philippe Vigier, député modem d'Eure-et-Loire, vous étiez l'invité du 5-7.

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