Philippe Dunoyer : "On a jusqu'à la fin de l'année pour parvenir à un accord" en Nouvelle-Calédonie

  • l’année dernière
Nouvelle-Calédonie : Rencontre à Paris entre les indépendantistes, les non-indépendantistes et le gouvernement : Philippe Dunoyer député Renaissance de la 1ère circonscription de Nouvelle-Calédonie est l'invité de 6h20. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-jeudi-07-septembre-2023-5549100
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00:00 On s'intéresse maintenant à l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.
00:03 Indépendantistes et non-indépendantistes se sont retrouvés autour d'une même table.
00:07 Hier c'est assez rare qu'ils discutent tous ensemble.
00:09 Réunion Amatignon et Beauvau qui va se poursuivre jusqu'à demain.
00:13 Vous en faites partie, Philippe Dunoyer, bonjour.
00:15 Bonjour.
00:16 Député Renaissance de Nouvelle-Calédonie, vous vous êtes contre l'indépendance.
00:19 D'abord, expliquez-nous les enjeux de ces discussions.
00:23 Pourquoi vouloir revoir le fonctionnement institutionnel de la Nouvelle-Calédonie ?
00:27 Un statu quo n'est pas possible ?
00:29 Non, ce n'est pas possible parce que l'accord de Nouméa qui a été décidé, voté en 1998
00:34 et qui est constitutionnalisé prévoyait qu'après les trois référendums, on se réunisse
00:39 autour d'une table pour examiner la situation ainsi créée, c'est le terme utilisé, et
00:43 négocier un autre, nouvel avenir institutionnel.
00:47 Donc l'obligation de discussion est prévue par l'accord de Nouméa, il est constitutionnalisé
00:51 je dirais, et après les trois référendums, maintenant le temps presse.
00:54 Et alors comment ça s'est passé hier ? Est-ce que vous avez pu vraiment parler ensemble ?
00:58 Pas encore, il faut être honnête.
01:01 Vous étiez ensemble dans la même pièce, mais vous n'avez pas parlé ensemble, c'est ça ?
01:04 Oui, enfin on se parle, les rapports sont tout à fait cordiaux, mais pas au sens de
01:08 négociation.
01:09 C'était une réunion qui était dédiée par le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer
01:12 à la présentation d'un document qui sert de base de travail et avec lequel tout le
01:17 monde est reparti.
01:18 D'abord pour en prendre connaissance, ensuite certainement pour le martyriser puisque c'est
01:21 sa vocation.
01:22 Mais le plus important c'est d'abord de formaliser la volonté collective à ce stade
01:27 de toutes les formations politiques avec l'état de travailler sur ce document.
01:30 Maintenant on a la fin d'année pour parvenir à un accord.
01:33 Et elle est là cette bonne volonté ? Vous sentez effectivement que…
01:35 Oui, oui, bien sûr c'est compliqué, il n'y a pas de génération spontanée, au
01:40 consensus il se construit pas à pas.
01:42 Mais le pas d'hier était un pas essentiel, on est sortis, même si elles sont toujours
01:46 importantes de réunions strictement bilatérales, maintenant on a le cadre plénier, complet,
01:50 et les enjeux et la perspective, on a tout ce qu'il nous faut.
01:53 Il y a différents gros chantiers, on va en prendre deux notamment, les principaux.
01:57 Le droit à l'autodétermination, c'est ce qui est prévu notamment dans le document
02:03 dont vous nous parliez.
02:04 Ça veut dire quoi exactement ? Droit à l'autodétermination, ça veut dire nouveau
02:07 référendum ?
02:08 Pas obligatoirement, mais effectivement par construction on peut imaginer que les Calédoniens,
02:13 puisque c'est deux dont il s'agit, seraient consultés à nouveau par référendum.
02:17 L'enjeu c'est plutôt de savoir quand, dans quel délai, et sur quel type de questions
02:22 on vient d'expérimenter trois référendums avec une question binaire.
02:25 Oui ou non, restez…
02:27 C'est ça, voulez-vous ou ne voulez-vous pas que la Nouvelle-Calédonie accède à
02:30 la pleine souveraineté, les Calédoniens l'ont rejetée par trois fois, mais n'ont
02:33 pas encore dit ce qu'ils voulaient.
02:35 Au plan international, cet exercice, il peut déboucher sur quatre types de sorties potentielles,
02:40 donc un référendum sur un projet plutôt que sur une question binaire est préférable.
02:44 Et vous c'est ce que vous préférez, vous ne voulez pas de nouveau une question oui
02:47 ou non à l'indépendance ?
02:48 Non, je pense que si on peut l'éviter, il faut absolument le faire.
02:51 Parce qu'on ne l'a pas dit, mais ils ne reconnaissent pas le troisième référendum
02:54 qui a eu lieu, pour eux il ne compte pas, il n'est pas légitime, et c'est pour
02:58 ça qu'ils en réclament un autre.
02:59 Voilà, mais c'est un autre, enfin c'est le même sujet, mais là ils veulent refaire
03:03 un troisième.
03:04 Alors que là on est parti sur une question, maintenant que les trois ont eu lieu parce
03:06 qu'ils ont eu lieu, que le résultat soit contesté ou contestable, c'est l'affaire
03:10 de chacun, mais la question c'est, puisque ce droit est reconnu par la Constitution française,
03:14 il est reconnu au plan international, comment est-ce qu'on peut le rénover ? C'est
03:17 l'enjeu, et sous quel délai pour donner un peu de visibilité aussi aux Calédoniens ?
03:21 Mais ça veut dire quoi le but ? C'est d'avoir un peu plus d'autonomie encore,
03:24 que la Nouvelle-Calédonie ait plus d'autonomie ?
03:26 Alors ça c'est un autre thème, c'est un autre thème sur lequel on est amené à
03:30 travailler, le Président de la République et le Ministre de l'Intérieur nous y incitent
03:34 depuis quelques semaines, c'est la thématique de l'émancipation du territoire, c'est
03:37 le terme qui est utilisé, comment est-ce qu'on peut faire que cette collectivité
03:40 déjà très largement autonome continue d'avoir un peu plus d'autonomie ? C'est
03:45 la trajectoire d'émancipation et à l'issue de laquelle on peut imaginer l'exercice
03:49 du droit à l'autodétermination, en tout cas sa rénovation.
03:51 Alors le point qui fâche, c'est le dégel du corps électoral, pour que tous nos auditeurs
03:57 comprennent bien, en fait tous les habitants de Nouvelle-Calédonie ne peuvent pas voter
04:00 aux élections provinciales par exemple qui vont avoir lieu l'an prochain.
04:03 Combien d'électeurs sont exclus aujourd'hui de ce suffrage ?
04:05 Un peu plus de 40 000.
04:07 Donc aujourd'hui ce sont les électeurs qui résident en Nouvelle-Calédonie avant 1998,
04:12 c'est ça, qui peuvent voter ?
04:13 Oui, en résumé, c'est un petit peu plus compliqué mais c'est ça l'idée.
04:16 On va le faire simple.
04:17 C'est gelé depuis 1998 et toutes les personnes qui sont arrivées, qui se sont installées
04:20 depuis 1999 sont majoritairement exclues du droit de vote.
04:25 Et pour vous il faut ouvrir le corps électoral ?
04:28 Oui absolument, parce que ce sont des restrictions d'abord tout à fait exorbitantes du droit
04:31 commun électoral, ensuite parce qu'elles n'étaient validées par le Conseil constitutionnel
04:35 et la Cour européenne des droits de l'homme que parce que l'accord de Nouméa était
04:38 provisoire.
04:39 Nous sortons là progressivement de l'accord de Nouméa et donc il nous faut, pour ces
04:43 raisons là et puis aussi parce que le droit de vote est un droit fondamental qu'il faut
04:47 reconnaître aux personnes qui sont installées durablement sur le territoire ou a fortiori
04:50 nées sur le territoire.
04:51 Il y a 12 000 natifs qui sont exclus de ce droit de vote.
04:54 Bon voilà, donc on se rend bien compte que les modalités actuelles ne sont pas satisfaisantes.
04:58 Il y a un accord, je dirais, de principe sur ce dégel.
05:02 La question est de savoir quelle va être la durée, parce que la question se portera
05:06 sur la durée suffisante de résidence au bout de laquelle elle sera glissante.
05:10 Donc plus personne ne sera définitivement exclu de ce droit de vote mais il y aura une
05:13 durée d'attachement à ce territoire qui permettra d'acquérir le droit de vote aux
05:15 élections provinciales.
05:16 Et sur tous les points là qu'on vient de balayer, vous avez quand même un calendrier
05:19 serré, il y a des échéances à respecter.
05:21 Il y a ces élections provinciales dont on vient de parler, il y a le président Emmanuel
05:24 Macron qui a dit que cette révision constitutionnelle, elle était pour le début de l'année prochaine.
05:28 Donc il vous reste quelques mois, c'est jouable en quelques mois ?
05:30 Et il ne faut pas traîner.
05:31 Il ne faut pas traîner.
05:32 Effectivement si on regarde le planning à l'envers, une révision de la constitution
05:38 au premier trimestre 2024, ça implique nécessairement qu'avant la fin de l'année, on trouve
05:41 cet accord et j'insiste, de manière consensuelle.
05:44 Il faut absolument que nous parvenions à un consensus local, à un équilibre.
05:48 C'est la matrice de l'histoire institutionnelle calédonienne depuis 1988.
05:51 C'est l'enjeu parce que si on n'aboutit pas à ce consensus…
05:54 C'est ce que je voulais dire, s'il y a échec, il se passe quoi ?
05:56 Ça ne se passe jamais bien chez nous.
05:57 Ça ne se passe jamais bien chez nous.
05:59 On a quand même eu une période de guerre civile entre 1984 et 1988.
06:03 On en est sortis deux fois, 88-98, avec des accords ou au prix d'accords consensuels.
06:08 Donc c'est la réunion de la dénarchance en ce moment ?
06:10 Oui, ce sont les trois mois qu'il nous faut utiliser pour obtenir ce consensus.
06:15 Merci Philippe Dunoyer, député Renaissance de Nouvelle-Calédonie.
06:18 Vous étiez en direct de France Inter.

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