Méga-bassines : Témoignage déchirant d’un agriculteur de Sainte-Soline au micro de Sud Radio

  • l’année dernière
Parlons Vrai chez Bourdin avec Emmanuel Villeneuve, agriculteur de Sainte-Soline.

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##NOEPISODE##
Transcript
00:00 10h33, témoignage pour commencer cette émission,
00:03 témoignage d'Emmanuel Villeneuve qui est agriculteur à Sainte-Sauline.
00:07 Emmanuel Villeneuve, bonjour.
00:09 - Bonjour.
00:10 - Merci d'être avec nous. 150 hectares à Sainte-Sauline que vous exploitez avec votre fils. C'est cela ?
00:17 - C'est bien ça.
00:18 - C'est bien ça. Il y a deux semaines, sur vos terres en partie, pas que sur les vôtres d'ailleurs,
00:24 affrontement entre manifestants contre les mégabassines, la mégabassine de Sainte-Sauline,
00:29 et force de l'ordre. J'ai vu et je vous ai écouté, Emmanuel Villeneuve, 15 jours après, vous êtes toujours...
00:44 Quel mot pourrais-je employer pour qualifier votre sentiment ?
00:47 - Il y a plusieurs sentiments. Il y a un écœurement, parce que nous essayons de travailler intelligemment,
01:02 nous essayons de protéger notre environnement. Vous savez, ça fait 60 ans que je vis sur cette commune,
01:08 mes parents y ont vécu, mon fils s'installe. On a à cœur de préserver notre territoire,
01:14 et puis tout ce projet de réserve de substitution, justement, vise à nous permettre de vivre notre métier
01:21 tout en respectant l'environnement. Puisque je le rappelle, il faut que ce soit très clair dans l'esprit des gens,
01:27 l'eau est prélevée au moment où elle est en abondance pour la laisser disponible quand, en été, la pénurie se fait sentir
01:36 et que les milieux risquent d'être dégradés si on continuait d'en prélever.
01:40 Donc on est bien dans le partage de l'eau, contrairement à ce qui est dit, et surtout pas l'accaparement,
01:47 puisque la prendre l'hiver quand elle est en abondance, on n'a pas d'incidence sur le milieu, quoi qu'on en dise.
01:54 - Oui, vous n'allez pas puiser... - C'est très réglementé, ces prélèvements.
01:57 - Oui, vous n'allez pas, Emmanuel Villeneuve, vous n'allez pas puiser dans les nappes phréatiques alors qu'il n'y a pas d'eau dans les nappes.
02:03 - Exactement, exactement, c'est très réglementé. Si l'hiver était trop sec, on ne pourrait même pas pomper.
02:08 On a même imaginé que ça pouvait arriver une année sur dix.
02:11 - Oui. Donc, pour vous, agriculteur, ces mégabassines, 7 mégabassines est indispensable.
02:19 Que cultivez-vous, Emmanuel Villeneuve ?
02:23 - Justement, sur notre exploitation, on a mis qu'il y ait une exploitation de polyculture et élevage,
02:28 puisqu'on fait également de l'élevage de volailles. On a mis plusieurs cultures en place pour...
02:33 Je vais essayer d'être simple pour que ce soit bien compris par les non-initiés.
02:38 On essaye d'avoir plusieurs cultures en alternance sur les parcelles, d'une année sur l'autre.
02:45 Ça permet de faire de l'agronomie et ça permet de mieux maîtriser tout ce qui peut être les parasites de nos cultures.
02:51 Le fait d'alterner les cultures au lieu de faire la répétition de la même culture.
02:55 - Je comprends. - Or, pour faire cette alternance,
02:58 on fait ce qu'on appelle dans notre jargon des cultures d'hiver et des cultures de printemps.
03:04 Les cultures de printemps, c'est principalement le soja, le maïs,
03:08 les pois protéagineux pour l'alimentation animale, voire humaine,
03:13 et puis éventuellement d'autres petits contrats qui pourraient venir si on avait la sécurisation de l'eau.
03:19 Et tout ça, ça nous permet d'utiliser moins de produits phytosanitaires.
03:24 Le fait de faire cette alternance, on maîtrise mieux les mauvaises herbes,
03:27 on maîtrise mieux les champignons qui sont néfastes à nos cultures,
03:31 et on maîtrise mieux également les insectes, on a moins de dégâts à nos cultures.
03:35 Ce qui nous paraît, c'est pour ça qu'on veut absolument en défendre ce modèle-là,
03:40 parce que justement, c'est bien l'attente de la société qu'on utilise moins de phytosanitaires.
03:45 - Oui. - Si on n'a pas cette alternance,
03:48 si on n'a pas la possibilité de mettre en place des cultures de printemps,
03:51 ou si les récoltes de cultures de printemps sont trop mauvaises,
03:55 on va les abandonner, et on va revenir justement à une rotation simplifiée,
04:00 avec des répétitions fréquentes de cultures qui, au contraire,
04:03 certes, nous feront mettre un peu plus d'infants, mais nous permettront de vivre.
04:08 Et peut-être qu'au lieu de vivre à deux sur l'exploitation,
04:12 on sera amené à plus pour une seule personne.
04:15 - Moins d'utilisation de phytosanitaires, moins d'utilisation d'eau,
04:20 vous pratiquez une agriculture raisonnée.
04:23 Et quand vous voyez tous les militants de l'environnement
04:27 sur vos champs, sur vos terres, comment réagissez-vous ?
04:32 - Vous l'avez vu, je suis dégoûté. Ils n'essaient pas de nous comprendre,
04:37 ils utilisent le mensonge, ils nous dénigrent.
04:39 La plupart de ces gens-là qui sont venus n'ont jamais entamé le moindre dialogue avec nous.
04:46 Jamais. Je ne comprends pas qu'on puisse avoir une opinion sur un sujet
04:50 qu'on ne maîtrise pas et avec lequel on n'a pas essayé de dialoguer avec les gens.
04:55 Ce projet, il a germé dans nos têtes il y a pratiquement une vingtaine d'années.
04:59 Il s'est construit petit à petit avec toutes les parties prenantes.
05:03 Avec l'administration, avec... Pardon.
05:06 - Allez-y, c'est pas grave, c'est pas grave. C'est la joie du direct. Allez-y.
05:12 - Avec les associations environnementales, les associations de consommateurs,
05:16 les associations de pêche, tout le monde a été mis autour de la table.
05:20 Certains ont... Il y a eu quelques couacs, c'est un fait,
05:24 mais dans l'ensemble, tout le monde a participé.
05:26 Donc on ne comprend pas aujourd'hui qu'on vienne nous attaquer
05:29 en disant "il faut tout remettre à plat".
05:31 Ça a mis des années à se construire, il y a eu une enquête d'utilité publique.
05:35 C'est pas quelque chose qui s'est fait en deux ans ou en une année.
05:40 Ça n'a pas germé seulement dans la tête des agriculteurs.
05:43 C'est un projet de territoire qui est unique en France et en Europe.
05:46 - Est-ce que vos terres ont été saccagées, Emmanuel Villeneuve ?
05:49 - Alors, personnellement, nous, on a très peu de dégâts
05:52 puisqu'on s'est retrouvés à l'opposé de l'arrivée des manifestants.
05:57 - Oui.
05:58 - Mais j'ai beaucoup de compassion pour...
06:05 J'ai beaucoup de compassion pour mon collègue,
06:09 mon collègue jeune agriculteur, par exemple,
06:12 qui a subi des dégradations sur son exploitation.
06:16 Et qui vient de s'installer avec ses parents,
06:21 qui est en élevage de caprin, en élevage de chèvre,
06:23 qui pratique un peu la même agriculture que je vous ai décrite.
06:27 - Oui, une agriculture raisonnée, encore une fois.
06:30 Parce qu'il faut arrêter d'opposer sans cesse
06:34 les militants de l'environnement et les agriculteurs.
06:38 Il va bien falloir comprendre que chacun doit avoir sa place dans notre société.
06:43 - Bien sûr.
06:44 - Emmanuel Villeneuve.
06:45 - Bien sûr.
06:46 - Ça vous a fait... Je vous ai vu en larmes.
06:48 Je vous ai vu en larmes dans les vidéos.
06:50 Ça vous a fait mal au cœur.
06:52 - Oui, ça m'a fait mal au cœur pour toutes les raisons que je vous ai dites.
06:55 Nos familles sont...
06:58 Sincèrement, nos familles sont traumatisées.
07:00 Mon épouse a beaucoup de mal à supporter ça
07:04 parce qu'elle sait comment on travaille,
07:05 elle sait ce qu'on veut faire.
07:07 Mes enfants qui ne sont pas dans le métier,
07:09 mes deux autres enfants qui ne sont pas dans le métier,
07:11 ont du mal à aussi accepter ça.
07:14 Ils ne comprennent pas, ils savent comment je suis,
07:17 ils savent ce qu'on veut faire, moi et mon fils.
07:19 On est dans l'incompréhension la plus totale.
07:22 On est dégoûté aussi de voir que
07:27 beaucoup de gens se sont préoccupés des manifestants
07:29 et c'est légitime, la Ligue des droits de l'homme, je comprends.
07:33 Mais personne jusque-là s'est intéressé à nous depuis,
07:36 que ce soit aux manifestations d'octobre ou celles de maintenant.
07:40 Ça fait deux fois qu'on subit des pressions.
07:43 Il y a des menaces à peine voilées,
07:46 des dégradations.
07:48 On vit un traumatisme,
07:50 on n'est pas habitué à ça,
07:53 ce n'est pas notre mode de vie de subir ça.
07:56 - Vous êtes menacé, Emmanuel Luneuve ?
07:59 - Oui, on est forcément menacé,
08:02 puisqu'on a des dégradations.
08:04 Alors on n'est pas menacé physiquement, personnellement,
08:06 encore que c'est limite parfois,
08:08 parce qu'on reçoit quand même quelques lettres anonymes,
08:10 parfois, qui sont quand même douteuses.
08:13 Mais on essaye de passer au-dessus,
08:15 mais oui, on vit quand même dans une certaine inquiétude,
08:18 parce qu'on ne sait pas jusqu'où ça peut aller.
08:21 Bien sûr, les manifestants se sont heurtés
08:23 aux gendarmes qui protégeaient la réserve.
08:25 Mais s'ils n'avaient pas été là,
08:27 qu'auraient fait les manifestants ?
08:28 Vers où auraient-ils été ?
08:29 Ils avaient à cœur de vouloir de la destruction
08:31 et de provoquer un conflit.
08:33 Et je suis d'autant plus écoeuré
08:35 que même des collègues agriculteurs
08:38 viennent se battre contre nous,
08:40 et nous sommes dégradés.
08:42 Et ils ne condamnent pas les exactions.
08:44 Là, je suis scandalisé.
08:46 Je le sens, je le sens.
08:48 Est-ce qu'un agriculteur, je vais être indiscret,
08:50 mais il faut dire la vérité,
08:52 est-ce qu'un agriculteur comme vous
08:54 gagne très bien sa vie ?
08:56 Écoutez, je n'ai pas grand-chose à cacher.
09:00 Moi, j'arrive à 60 ans.
09:02 Il y a un peu plus de 40 ans que je suis dans le métier.
09:04 Aujourd'hui, bon an, mal an,
09:06 si je faisais une moyenne,
09:08 je suis un petit peu au-dessus du smic,
09:10 mais c'est tout, quoi.
09:12 C'est pas venu de dingue, quoi.
09:14 - Voilà, je tenais à le préciser.
09:16 Parce que, je tenais à le préciser.
09:18 150 hectares, ça ne veut pas dire
09:20 « richissime ».
09:22 150 hectares, quand on pratique
09:24 une agriculture raisonnée comme vous le faites,
09:26 ça ne veut pas dire que...
09:28 Ça ne veut pas dire qu'on est un...
09:30 Quelqu'un de...
09:32 de protégé, de...
09:34 Non, vraiment.
09:36 Je suis content, Emmanuel Villeneuve,
09:38 que vous soyez clair.
09:40 Et que vous soyez franc.
09:42 Un peu plus du smic pour travailler tous les jours.
09:44 Je dis bien pour travailler tous les jours.
09:46 - Oui, c'est ça, si je faisais une moyenne, c'est ça.
09:48 - C'est ça, je le sais.
09:50 Et je suis content de vous avoir donné la parole,
09:52 parce qu'on vous oublie.
09:54 Parce qu'on ne pense pas...
09:56 On a pensé aux manifestants,
09:58 on a pensé aux forces de l'ordre,
10:00 on a engagé des débats autour du maintien de l'ordre,
10:02 des dégâts.
10:04 À celles et ceux qui travaillent sur le territoire.
10:06 Et qui sont au quotidien,
10:08 sur la terre.
10:10 Et qui exploitent et qui vivent grâce à cette terre.
10:12 Merci, Emmanuel Villeneuve.
10:14 Merci beaucoup.
10:16 - Merci de m'avoir donné la parole.
10:18 Ça nous aide à...
10:20 à surmonter ce qu'on supporte actuellement.
10:22 - Oui, mais j'imagine.
10:24 Est-ce que... J'ai une dernière question.
10:26 Est-ce que vous, agriculteur du coin,
10:28 vous vous réunissez,
10:30 est-ce que vous allez engager, je ne sais pas moi,
10:32 des initiatives ?
10:34 - Oh, non, non.
10:36 Nous on souhaite...
10:38 J'espère que tous mes collègues sauront
10:40 effectivement se retenir.
10:42 Parce que bien sûr qu'à force,
10:44 il y a de l'énervement.
10:46 Et nous, ce qu'on souhaite, c'est que chacun
10:48 garde son calme dans notre métier.
10:50 Bon, on se réunit,
10:52 mais plus pour justement
10:54 évacuer,
10:56 essayer d'évacuer un peu ce traumatisme.
10:58 Et puis ne pas tomber
11:00 dans le piège de la...
11:02 de la vengeance ou de quelque chose comme ça.
11:04 C'est surtout...
11:06 - Certains y pensent...
11:08 - On est prêts à s'asseoir
11:10 autour d'une table pour discuter du projet.
11:12 Non pas le rediscuter,
11:14 mais l'expliquer.
11:16 Rediscuter, pour moi, c'est hors de question.
11:18 Ça fait 20 ans qu'on travaille dessus.
11:20 On ne va pas recommencer à zéro.
11:22 C'est hors de question.
11:24 - Dites-moi, certains pensent...
11:26 Laissent aller leur colère,
11:28 certains de vos collègues.
11:30 - Pour le moment,
11:32 je pense que ça a été...
11:34 Je pense que ça a été maîtrisé. Pour le moment, à ma connaissance,
11:36 il n'y a pas eu de débordement
11:38 de la part de mes collègues. - Bien.
11:40 Merci beaucoup, Emmanuel Villeneuve. Merci.
11:42 - Merci à vous. - Merci. 10h44,
11:44 Sud Radio. On entend toutes les voix.
11:46 On a beaucoup parlé, effectivement, des manifestants,
11:48 des forces de l'ordre, et là, il était bon
11:50 d'écouter les agriculteurs de Saint-Sauline.
11:52 Et l'un de ces agriculteurs, Emmanuel Villeneuve.
11:54 À tout de suite. Il est 10h45.
11:56 Vous êtes sur Sud Radio. Je vous rappelle
11:58 qu'on peut écouter cette émission,
12:00 la réécouter.
12:02 Elle est disponible en podcast sur
12:04 sudradio.fr et sur notre application
12:06 Sud Radio. 10h45,

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