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Vendredi 14 avril 2023, BE SMART reçoit Agnès d’Anthonay (Directrice des affaires publiques et du développement durable, Kronenbourg)

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00:00 - Et j'accueille maintenant Agnès Dantonnet, bonjour. - Bonjour.
00:09 - Vous êtes directrice des affaires publiques et du développement durable chez Cronenbourg, brasserie française qui appartient au groupe In Vivo.
00:17 C'est 25% du marché de la bière en France, c'est ça ? Quelque chose comme ça ?
00:21 - Oui, quasiment, mais la brasserie Cronenbourg appartient au groupe Carlsberg.
00:26 - D'accord, et c'est Carlsberg qui fait 25% ? - Et en fait, Cronenbourg en France occupe à peu près 25% du marché de la bière.
00:35 - C'est ça. Donc on va rappeler quand même avant toute chose que la bière et l'alcool sont à consommer avec modération,
00:40 mais ce qui nous intéresse c'est qu'il y a l'une de vos marques, puisqu'il y a effectivement plusieurs marques, dont 1664,
00:45 qui met aujourd'hui en avant une filière d'orge responsable tracée en France.
00:49 Donc moi je voudrais bien comprendre ce que c'est concrètement qu'une filière responsable est tracée.
00:55 - Alors peut-être juste avant de répondre précisément à cette question,
00:58 donc effectivement la marque 1664 est la première marque du portefeuille de Cronenbourg
01:04 et représente environ 10% du marché de la bière en France.
01:07 Quand on parle de filière d'orge responsable tracée, en fait tout l'enjeu qu'on a eu c'était de regarder
01:14 quel poids aujourd'hui qu'elle représentait l'agriculture, d'abord dans notre empreinte carbone,
01:19 et plus globalement, je pense que le sujet crucial c'est de quelle agriculture a-t-on besoin
01:26 pour continuer à assurer la durabilité de toute notre filière d'approvisionnement dans un contexte de réchauffement climatique,
01:31 dans un contexte aussi de paupérisation du revenu des agriculteurs.
01:37 Donc en fait c'est vraiment à l'origine, ce sont ces questions qu'on s'est posées.
01:41 Et on a travaillé pour cela avec le fournisseur de Cronenbourg, donc qui est effectivement le groupe Soufflé,
01:47 qui est notre fournisseur depuis plus de 30 ans, en essayant de construire avec eux un nouveau modèle
01:53 qui ne s'oppose pas forcément aux pratiques anciennes.
01:56 Je pense que c'est très important quand on parle de pratiques agricoles de ne jamais opposer les modèles.
02:00 On pense aujourd'hui qu'il y a des choses qui doivent évoluer et qu'il y a des agriculteurs qui ont déjà engagé
02:05 une transition de leur pratique pour aller vers moins d'un tranche chimique,
02:11 pour préserver la biodiversité des sols, pour réduire l'empreinte carbone liée à l'exploitation des parcelles agricoles.
02:19 Donc en fait on est vraiment parti de là.
02:22 Et avec Soufflé, qui avait déjà une expérience sur une filière blé, on leur a demandé s'il était possible
02:27 de construire une filière autour de l'orge, sachant que pour la première marque de notre portefeuille,
02:32 l'enjeu que nous on avait c'est d'avoir un impact maximum.
02:34 Quand tout à coup vous arrivez à entraîner quasiment 10% du marché de la bière sur une filière d'orge,
02:40 ça veut dire que l'impact, vous êtes vraiment en train de le construire.
02:45 Donc sur quoi on s'est intéressé ? En fait sur des pratiques dites agroécologiques.
02:49 L'agroécologie en fait c'est un principe, donc on ne va pas forcément rentrer dans le détail,
02:53 puis d'abord je ne suis pas une experte du sujet, mais ce sont des pratiques agricoles qui visent,
02:58 je dirais si on devait faire les choses assez simplement, qui visent d'un côté à réduire l'empreinte carbone,
03:03 de l'autre à restaurer la biodiversité des sols.
03:06 Donc la biodiversité c'est vraiment tous les micro-organismes qui sont dans le sol,
03:10 et qui visent aussi à permettre au sol de mieux capter l'eau au moment de la pluie.
03:16 C'est vraiment des grands principes.
03:17 Et pour ça, il y a des nouvelles pratiques qui peuvent se mettre en place.
03:20 Je vais vous en citer quelques-unes, comme par exemple d'avoir ce qu'on appelle du paillage,
03:24 c'est-à-dire que vous recouvrez les sols.
03:26 Il y a aussi des rotations de culture qui sont privilégiées.
03:30 Pour introduire de la biodiversité, ça peut être de mettre en place des nichoirs.
03:34 Donc il y a tout un ensemble de pratiques agricoles qu'il faut mettre en place,
03:39 qui nécessitent des investissements, et qui se construisent dans la durée.
03:43 Et surtout aussi, ce qui est intéressant, c'est que la démarche est très pragmatique.
03:47 C'est-à-dire que l'agriculteur c'est celui qui sait le mieux ce qui correspond à son sol,
03:51 et ce qu'il peut faire ou pas.
03:53 Donc l'enjeu aussi c'est d'accompagner et d'être vraiment dans une démarche de progrès continu.
03:57 C'est pour ça qu'on a démarré l'Aine pour les cultures 2023,
04:01 donc avec les premières plantations en 2022.
04:05 Et qu'on s'est fixé pour l'objectif d'arriver à 100% d'orges pour 1664
04:11 issus de ces pratiques agroécologiques en 4 ans, c'est-à-dire à horizon 2026.
04:15 Donc on a commencé avec 45 agriculteurs, pour monter jusqu'à 250 agriculteurs en 2026.
04:20 Et en 2026, on aura couvert environ 5000 hectares, 25 000 tonnes d'orges.
04:25 Et donc une filière tracée, c'est que derrière on permet au consommateur,
04:30 via une application, de télécharger le QR code,
04:35 et de pouvoir remonter jusqu'à la zone où l'orge a été cultivé.
04:41 Mais est-ce que ça va aller jusqu'au champ ? Est-ce que je vais savoir dans quel champ ?
04:47 Alors on ne va pas jusqu'à la parcelle.
04:49 Ça ne va pas forcément jusqu'à la parcelle, mais vous allez jusqu'à une proximité de parcelle,
04:54 parce qu'ensuite chaque agriculteur met sa production en commun avec d'autres.
04:59 Donc vous arrivez à remonter assez loin dans la filière, mais pas jusqu'à la parcelle proprement dite.
05:05 Est-ce que je vais avoir des portraits de l'agriculteur, par exemple ?
05:08 Est-ce que c'est ça l'idée ? Est-ce que je vais avoir des petits témoignages de l'agriculteur ?
05:13 Absolument. Et donc c'est déjà disponible sur l'application.
05:16 Donc il y a quelques agriculteurs qui ont accepté de témoigner, et d'expliquer ce qu'ils faisaient.
05:22 Aussi de redonner, je dirais, de la visibilité au métier d'agriculteur.
05:26 Et c'est d'ailleurs eux qui parlent le mieux des pratiques qu'ils mettent en place.
05:30 Donc ça, vous y avez accès absolument à travers l'application.
05:33 Comment vous avez fait pour techniquement monter cette application et pouvoir comme ça suivre le fil ?
05:42 Parce que j'imagine que c'est quand même compliqué.
05:44 Vous brassez je ne sais pas combien de tonnes d'orge chaque année.
05:48 Donc comment vous faites pour savoir que sur telle bouteille, vous allez pouvoir récupérer telle zone ?
05:53 Il y a forcément une technologie derrière ?
05:56 Alors il y a une technologie, ce n'est pas nous qui l'avons fait, clairement.
05:59 Ce n'est pas notre métier.
06:01 Donc on s'est appuyé sur une technologie qui nous a été proposée par le groupe Soufflé, qui s'appelle Cristal Chen.
06:06 Et qui, alors après, très sincèrement, je n'ai pas l'expertise pour rentrer vraiment dans le détail digital qui permet de faire ça.
06:15 Mais aujourd'hui, vous avez la capacité en tout cas d'isoler des lots.
06:19 C'est pour ça que dans l'application, vous devez entrer un numéro de lot.
06:23 Parce qu'en fonction de là où votre bière, vous allez l'acheter, la bière ne va pas être fabriquée à partir du même orge que si vous avez acheté votre bière ailleurs.
06:36 Donc en fait, vous remontez, vous rentrez votre lot.
06:38 Et ensuite, c'est tout le système de la traçabilité qui permet de remonter jusqu'à l'exploitation.
06:43 J'ai bien dit l'exploitation et pas forcément la parcelle où l'orge a été cultivé.
06:47 Donc ça, c'est des technologies qui sont en train de se développer, qui sont effectivement très nouvelles.
06:53 Donc là, on a lancé nos packagings en cours de déploiement.
06:59 Mais effectivement, vous êtes obligés de vous appuyer sur des experts en matière de digital.
07:04 Vous avez dit que vous souhaitiez monter jusqu'à 100% en termes de traçabilité.
07:10 Comment est-ce que vous allez faire ça ?
07:13 Vous avez donné un chiffre tout à l'heure que je n'ai pas retenu, sur le nombre d'agriculteurs.
07:19 Comment vous les entraînez avec vous ? Comment vous les motivez sur ces questions-là aujourd'hui ?
07:25 En fait, encore une fois, c'est le groupe Soufflé qui a la relation directe avec les agriculteurs.
07:30 Ce qu'ils vous disent, et on a aussi eu des échanges avec certains agriculteurs, c'est que déjà, certains se sont engagés eux-mêmes.
07:39 Plus parfois, pour des raisons de conviction, que les pratiques vont devoir évoluer de toute façon,
07:45 et qu'on est en train de redéfinir de nouveaux standards.
07:49 Il y a un gros focus aujourd'hui qui est donné sur le lien entre pesticides, perte de biodiversité.
07:54 On parle, on n'arrête pas, c'est dans l'actualité, mais le manque d'eau.
07:58 Donc on voit bien de toute façon aujourd'hui que pour que l'agriculture continue à nourrir la population,
08:04 il y a des pratiques qui doivent évoluer. Ça prendra du temps.
08:07 Donc il y a des agriculteurs qui eux-mêmes ont déjà fait, on va dire, le chemin.
08:13 Donc en fait, l'enjeu n'est pas tellement de les convaincre, parce qu'il y en a en fait pas mal qui sont contents de pouvoir avoir des débouchés.
08:22 Parce qu'en fait, le gros sujet dont on parle, c'est aussi celui, à un moment donné, du coût de la transition et qui finance.
08:28 Parce que forcément, quand vous adoptez des nouvelles pratiques, vous devez aussi investir dans de nouveaux équipements.
08:34 Parfois, accepter une perte de rendement aussi ?
08:36 Il peut y avoir des pertes de rendement, absolument. Et que tout ça a un surcoût.
08:40 Et toute la question, c'est qui doit financer le surcoût ? Jusqu'où en fait, comment on construit une chaîne de valeur qui permet de prendre en charge le surcoût ?
08:48 Sachant que l'agriculteur, forcément, il en met aussi, il investit lui-même au départ.
08:54 Et que des industriels comme nous, nous, on va aussi accepter de payer plus cher et d'avoir des contrats qui prennent en compte une partie du surcoût.
09:03 Après, sur la construction de notre marque, nous, dès le départ, le souhait, c'était de ne pas vouloir, en tout cas, répercuter ça dans le prix final consommateur.
09:13 Oui, c'était la question que j'allais vous poser.
09:14 Parce que là, en tout cas, nous, on l'a fait à la fois par conviction, par aussi, l'engagement du groupe Carlsberg,
09:21 qui a pris un engagement très fort qui est Horizon 2040, que tous les ingrédients qui composent les bières du groupe Carlsberg,
09:29 partout dans le monde, soient issus de pratiques d'agriculture régénérative.
09:33 Donc, finalement, on a mis le pied à l'étrier.
09:37 Après, il est évident que dans un contexte d'augmentation très fort de l'inflation et de l'augmentation des coûts,
09:45 ce sujet va certainement être de plus en plus sensible.
09:48 Et il faut qu'on soit aussi intelligent pour trouver peut-être des mécanismes de financement
09:54 qui permettent d'avoir une vraie solidarité sur le financement de son surcoût.
09:58 Parce que l'agriculteur ne peut pas seul porter tout cela.
10:01 Donc, chaque maillon de la chaîne doit être investi dans cette transition des pratiques agricoles.
10:07 – Par les transitions des pratiques agricoles, il y a un secteur qui souffre un peu en ce moment, c'est celui du bio.
10:13 Vous, est-ce que, dans le portefeuille chez Carlsberg, vous avez de la bière bio ?
10:19 Et comment est-ce que vous vous adressez ce sujet ? Est-ce que c'est quelque chose que vous regardez aussi ?
10:24 – Oui, on a lancé des références en bio, mais qui étaient des petites extensions.
10:29 On avait d'ailleurs lancé une 1664 bio et votre question est intéressante,
10:33 parce qu'à un moment donné, on s'est posé aussi la question,
10:35 finalement, est-ce qu'on va lancer une référence avec des pratiques agroécologiques ?
10:40 Et en fait, la décision qu'on a prise, c'est de faire cette transition sur l'intégralité de la marque,
10:46 et non pas de sortir une référence spécifique.
10:48 Nous, la conviction qu'on a, c'est que les standards sont en train de changer.
10:51 Le bio, donc, répond à un cahier des charges.
10:55 – Avec une transition qui, pour le coup, est beaucoup plus longue,
10:58 c'est deux ans, je crois, en termes de transition.
11:00 – Oui, c'est une transition qui est longue, c'est sur certains,
11:04 il n'y a pas forcément un consensus aujourd'hui sur toutes les pratiques
11:09 qui sont issues de l'agriculture biologique.
11:11 Une des questions, c'est notamment la substitution de pesticides chimiques
11:16 par des pesticides qui seraient plus naturels.
11:22 Je pense que nous, ce qui nous intéresse, et encore une fois,
11:25 ce qui est fondamental, c'est de jamais opposer les modèles.
11:28 Nous, ce qui nous intéresse dans les pratiques agroécologiques,
11:31 c'est que déjà, vous n'êtes pas enfermés, il n'y a pas un cahier des charges,
11:35 il y a un cahier des charges, mais qui n'enferme pas.
11:38 – Qui est plus souple.
11:39 – Ce cahier des charges, en fait, on le fait aussi évoluer
11:42 en fonction de la réalité des choses.
11:44 – C'est-à-dire ?
11:46 – En fait, en fonction de… parce qu'un agriculteur,
11:48 il y a des pratiques qu'il peut tester et qui ne fonctionnent pas.
11:52 Donc à un moment donné, ce qui ne fonctionne pas,
11:54 vous devez changer les choses.
11:56 Donc en fait, et on sait aussi qu'en fonction des terroirs,
11:59 en fonction du sol, il y a des pratiques qui fonctionnent
12:01 et d'autres qui vont moins fonctionner.
12:03 Donc en fait, les pratiques agroécologiques,
12:05 c'est vraiment des pratiques qui visent un progrès continu
12:10 et qui sont basées vraiment sur énormément de pragmatisme.
12:13 On va dire que la finalité, elle est connue.
12:16 C'est d'arriver en fait, véritablement, à réduire,
12:20 comme je le disais, les intrants, restaurer la biodiversité.
12:24 L'agroécologie ne s'interdit pas d'utiliser des pesticides
12:28 si on en a besoin, si à un moment donné,
12:30 il y a un produit qui est nécessaire pour la transition,
12:33 on peut l'utiliser.
12:34 Donc en fait, c'est plus ouvert peut-être que l'agriculture biologique
12:37 et peut-être que dans l'agriculture biologique,
12:39 c'est un modèle qui est basé sur un gros investissement
12:43 de l'agriculteur et par un prix consommateur aussi bien plus élevé.
12:47 Et en fait, la question qui s'est posée aujourd'hui
12:49 avec l'inflation, c'est qu'à un moment donné,
12:51 le bio, comme ça coûte plus cher d'acheter bio
12:55 que d'autres produits, il y a aussi eu l'impact
12:58 de l'inflation qui est passé par là.
13:00 L'idée derrière cette démarche que vous avez engagée,
13:03 c'est quoi ? C'est de créer plus de transparence,
13:05 de répondre à de nouvelles attentes,
13:07 de créer un lien de proximité, même s'il est via une appli
13:12 entre le producteur et le consommateur.
13:14 Comment est-ce que vous voyez les choses ?
13:15 Oui, et je crois que c'est de reconnecter la chaîne en fait.
13:17 C'est aussi de... En fait, tout ce qu'on mange
13:20 est issu de pratiques agricoles.
13:22 Et peut-être que les systèmes, en tout cas alimentaires,
13:27 notamment dans nos sociétés très industrialisées,
13:30 ont beaucoup déconnecté le consommateur
13:33 de la réalité de ce qu'il consomme.
13:35 Et je pense que ce type d'appli, c'est juste de reconnecter.
13:38 C'est de reconnecter un consommateur
13:39 avec toute la chaîne amont.
13:41 Finalement, nous, on est un intermédiaire.
13:42 Après, on utilise ces matières premières,
13:44 on utilise ces ingrédients, on les transforme, on les vend.
13:46 Mais il est essentiel aussi que le grand public
13:49 se reconnecte véritablement à l'agriculture.
13:52 Et c'est ça aussi qui redonnera de la valeur à l'alimentation
13:55 et qui redonnera de la valeur à tout le travail
13:57 que font les agriculteurs.
13:58 Et je pense que la vision qu'on porte, au-delà...
14:01 Alors, bien évidemment, comme je le disais précédemment,
14:03 elle est très liée à la question du climat
14:05 et à la question de quel modèle agricole
14:08 pour continuer à pouvoir avoir une terre nourricière.
14:13 Mais il passe aussi énormément par reconnecter cette chaîne
14:16 qui s'est déconnectée pendant très longtemps.
14:18 Merci beaucoup Agnès Dantonnet.
14:19 Je rappelle que vous êtes directrice des Affaires publiques
14:21 et du développement durable chez Cronenbourg,
14:24 marque du groupe Carlsberg.
14:26 Merci d'avoir été avec nous.

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