[#LeCanapéRouge] Interview exclusive de Me Paulette Oyane Ondo
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00:00 [Musique]
00:28 Madame, mademoiselle, monsieur, bonsoir. Nous recevons ce lundi sur le canapé
00:33 rouge de Gabon Media Time, Maître Paulette Toyanondo. Maître, bonsoir.
00:41 Bonsoir. Comme il est de coutume dans notre émission, la première question que je
00:46 veux vous poser est celle de savoir comment vous vous portez.
00:50 Je vais bien, merci. Et vous-même, vous allez bien ? Ça va, ça va. Alors, comme chaque 17 avril, le Gabon célèbre la journée nationale de la femme,
01:01 quel regard portez-vous sur la situation des droits de la femme ces dernières décennies ?
01:07 J'ai un regard contrasté sur les droits de la femme. Parce que quand on doit analyser si un pays a fait des progrès
01:17 dans, par exemple, le respect des droits, on a deux regards. On regarde ça de manière double.
01:26 La première chose, c'est qu'il existe des instruments, qui sont des instruments internationaux, des instruments africains
01:32 pour les droits de la femme et aussi la législation nationale. Est-ce que ces instruments internationaux,
01:38 le Gabon les a acceptés, les a adoptés, les a ratifiés ? Le principal instrument pour les droits des femmes en Afrique,
01:47 c'est la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatifs aux droits des femmes, qu'on appelle également
01:53 le protocole de Maputo. Ce protocole a effectivement été signé, ratifié par le Gabon. Donc, on peut dire, à ce moment-là,
02:03 puisque l'instrument existe, est devenu gabonais, même si le Gabon ne l'a pas encore internalisé complètement.
02:10 On peut dire que c'est un avancé parce que le texte existe. Et le Gabon lui-même a pris peut-être aussi un certain nombre de textes
02:17 parlant des droits des femmes. Donc, de ce point de vue, au niveau des instruments, on peut dire que oui, ça fait partie des avancées.
02:25 Mais seulement, les instruments ne suffisent pas. Il faudrait que ces instruments donnent des résultats
02:36 et que la femme voit ses droits améliorés. Quels sont les droits des femmes qui ont été améliorés ?
02:45 Quelle est la femme gabonaise qui peut dire que depuis que le Gabon a ratifié le protocole de Maputo,
02:53 parce que le Gabon l'a ratifié en 2011, ce qui est dans le protocole de Maputo, moi, femme gabonaise, vivant dans un village
03:02 au canton Ndiaye, à Mbulungi Bizinsa, à Pana, j'ai vu mes droits améliorés. Ma situation avant 2011 est différente de ma situation après 2011.
03:15 Quelle est cette femme qui peut nous dire ça ? Je ne crois pas qu'il y en ait une seule. Pourquoi ?
03:21 Parce que quand on fait une loi, il y a deux choses qui sont très importantes dans une loi. En fait, trois choses.
03:29 Et ces trois choses-là, c'est une question d'étape. La première étape qu'on doit regarder, c'est l'applicabilité de la loi.
03:39 L'applicabilité, c'est est-ce que quand je prends cette loi, je vais pouvoir l'appliquer ?
03:46 Ça veut dire est-ce que j'aurai les moyens de l'appliquer ? Les moyens de l'appliquer, c'est les moyens humains,
03:52 les moyens financiers, les moyens intellectuels. Parce qu'une loi ne doit pas servir de décor sur un mur, ce n'est pas un diplôme.
04:02 C'est quelque chose qui doit améliorer la vie des gens. Donc on regarde l'applicabilité de la loi.
04:08 Ensuite, après avoir regardé l'applicabilité de la loi, ça c'est des questions qu'on se pose au moment où l'on écrit les lois,
04:14 avant de les voter. On doit absolument régler la question de l'applicabilité.
04:19 Et une fois que la loi a été adoptée et qu'elle a été promulguée, se pose alors la question de l'application de la loi.
04:29 L'application de la loi, c'est est-ce que je vais pouvoir appliquer cette loi à tout le monde, sans distinction ?
04:37 Est-ce que tout le monde sera, j'ai la capacité, moi, état gabonais, de faire en sorte que n'importe qui observe cette loi ?
04:46 Donc vous voyez, l'état gabonais ne se pose pas ces deux questions essentielles.
04:51 Et la troisième question, c'est une fois que la loi est appliquée, quand on a réglé le problème de l'applicabilité,
04:56 quand on a réglé le problème de l'application, on fait des bilans d'étapes, on évalue les lois.
05:01 On se dit, j'ai pris cette loi pour régler tel problème. La loi est appliquée depuis un an, deux ans, trois ans.
05:09 On doit faire le bilan d'étapes, évaluer, est-ce que la loi a atteint ses objectifs ?
05:16 Oui. Comment ? Lesquels ? Pourquoi ? Est-ce qu'il y a des défaillances ?
05:22 Est-ce que la loi n'a pas atteint ses objectifs ? Pourquoi elle ne les a pas atteints ?
05:27 Et on rectifie. Et quelques fois même, on s'en débarrasse. Vous voyez ?
05:33 Je vous dis ça pourquoi ? Parce que le Gabon aime bien faire des lois.
05:38 Est-ce que vous savez qu'il existe ici au Gabon une loi sur l'assistance judiciaire ?
05:43 Les gens ne le savent pas. Mais pourtant, le Gabon s'en prévoit partout dans le monde.
05:49 Mais moi j'ai une loi sur l'assistance judiciaire. Et en plus c'est une vieille loi, elle date des années 80.
05:54 J'étais même encore au lycée Léon Bach, pour vous rendre compte. Donc c'est vieux. J'étais ado.
05:59 Donc cette loi dit qu'au Gabon, une personne qui n'a pas le moyen d'avoir un avocat,
06:08 quel que soit le problème, l'État lui offre un avocat.
06:13 Mais c'est un instrument et il existe au Gabon.
06:18 Mais est-ce que le Gabon a pensé à l'applicabilité ?
06:22 Est-ce qu'on a créé un service d'assistance judiciaire qui fonctionne ?
06:29 L'État a-t-il budgétisé le montant des honoraires qui vont être payés aux avocats qui font l'assistance judiciaire ?
06:39 Parce que l'assistance judiciaire, c'est pas que l'avocat est gratuit. L'avocat est gratuit pour le justiciable.
06:43 Lui ne sort pas de l'argent de sa poche. Mais l'avocat est payé par quelqu'un. L'État.
06:49 Peut-être pas à un niveau d'honoraires que l'avocat aurait demandé.
06:55 Si ça se négocie, l'avocat est le barreau.
06:58 Et puis il y a des avocats qui vivent même de l'assistance judiciaire dans des pays où le Gabon est parti, copier cette loi.
07:07 Donc je veux dire par là que si on parle des droits des femmes au Gabon,
07:14 pour être tout à fait honnête, on va voir qu'il y a beaucoup d'instruments de protection des droits des femmes qui existent,
07:22 que le Gabon a adopté. Et même d'autres qui sont typiquement gabonais, c'est l'adoption des instruments.
07:31 Maintenant il reste l'applicabilité et l'application.
07:37 Je ne parle même pas de l'évaluation. Ne serait-ce que ces deux premiers critères, applicabilité et application, c'est où ?
07:48 Pose problème. Très bien.
07:50 Suivant la stratégie de promotion des droits de la femme et de réduction des inégalités,
07:54 le Gabon a enregistré un certain nombre d'avancées dans la protection des droits de la femme,
07:59 c'est ce dont vous parliez tout à l'heure.
08:02 Mais quel commentaire faites-vous sur la mise en œuvre ? Je veux dire en pratique.
08:07 Est-ce que vous qui êtes avocate, vous avez des cas concrets de mise en œuvre de ces textes-là ?
08:15 Non, aucun. Je n'ai pas de cas concrets de mise en œuvre.
08:21 Prenons par exemple, on dit voilà, une femme peut demander une pension alimentaire pour elle et pour ses enfants.
08:29 Quand une femme a de la chance, elle obtient 50 000 francs.
08:33 Mais pour qu'un homme les paye, ce n'est jamais payé.
08:38 Donc voilà un cas d'application.
08:40 C'est-à-dire que la loi s'applique effectivement.
08:42 Vous pouvez saisir le tribunal pour demander une pension alimentaire.
08:46 Le tribunal peut même vous l'accorder.
08:48 Mais d'abord, le montant est tellement ridicule d'une part, et d'autre part, le montant n'est jamais obtenu.
08:56 Parce qu'il se pose un problème, et là ce n'est pas spécifique aux femmes,
09:00 il se pose un problème général d'exécution de décision de justice au Gabon.
09:05 De telle sorte que le Gabon peine à offrir une justice équitable à ses enfants.
09:14 Parce que même quand vous avez gagné un procès, pour exécuter la décision de justice, c'est tellement difficile.
09:23 Donc on a mis des verrous pour que les exécutions soient tellement difficiles
09:29 que ça revient comme si vous n'aviez pas gagné de procès.
09:33 Très bien.
09:36 Alors sur un tout autre sujet, nous sommes aujourd'hui le 17 avril,
09:42 et l'édition 2023 de la journée nationale de la femme tourne autour du thème
09:47 "Favoriser le renforcement du pouvoir économique des femmes, un pas vers un monde égalitaire".
09:53 Pensez-vous aujourd'hui plutôt que la femme gabonaise occupe une place de choix dans la sphère décisionnelle notamment ?
10:01 Non, je ne le pense pas du tout.
10:03 Et je m'explique.
10:04 Encore une fois, moi je trouve que le Gabon agit toujours mal.
10:09 Il n'y a pas beaucoup de réflexion derrière tout ce que fait le Gabon.
10:14 Le Gabon fait des choses parce que c'est la mode.
10:17 Logiquement, la question qu'on devrait se poser c'est
10:20 si on considère qu'il y a inégalité entre l'homme et la femme au Gabon,
10:28 la première question à se poser c'est pourquoi ?
10:31 De quoi sont nées ces inégalités ?
10:34 Parce qu'il faut traiter le problème à la source.
10:38 Pour traiter les inégalités,
10:41 qu'elles soient vis-à-vis des femmes,
10:43 qu'elles soient dans d'autres pays, vis-à-vis des noirs.
10:46 Quand on doit traiter les inégalités,
10:50 la question que l'on doit d'abord se poser c'est
10:52 qu'est-ce qui a donné naissance à l'inégalité ?
10:55 Tant que vous ne vous posez pas cette question,
10:58 vous pouvez prendre toutes les lois que vous voulez,
10:59 vous pouvez faire tous les discours que vous voulez,
11:01 ça ne donnera rien et ça ne changera rien.
11:04 Donc, voilà un pays, le Gabon,
11:08 où dans cette tradition,
11:11 la femme n'était pas un être inférieur,
11:14 la femme n'était pas un être inégal,
11:17 la femme n'était pas, ni non plus un être supérieur.
11:21 Nos problèmes ne se posaient pas.
11:23 La société avait besoin de la femme
11:25 parce qu'elle avait sa place dans la société.
11:27 C'est une question de place.
11:29 Ce n'est pas une question de supériorité, d'infériorité,
11:31 d'opposition, d'homme-femme,
11:33 parce que c'est là qu'on tend vers ça.
11:35 Comme ça se trouve maintenant en Europe, en Occident,
11:39 où les hommes et les femmes se posent
11:41 et sont en conflit, en conflit dans le genre.
11:45 Moi, je ne veux pas que nous en arrivions là.
11:48 Et c'est pour ça que le Gabon devait arrêter de coupier
11:51 et de penser par lui-même.
11:52 Donc, on doit se dire.
11:54 Ce que nous avons aujourd'hui comme tard,
11:56 dans ce domaine et dans beaucoup de domaines,
11:58 ce sont les tards que le colonisateur nous a légués.
12:01 Le colonisateur a pris ses tards à lui.
12:03 Il est venu ici et il nous a laissé ses tards.
12:06 Mais avant l'arrivée du colonisateur,
12:08 comment nous vivions ?
12:10 La femme avait sa place.
12:12 Elle n'était pas un être inférieur,
12:14 ni un être supérieur.
12:16 Elle avait une place qui était importante
12:19 parce que la société avait besoin d'elle pour fonctionner.
12:23 L'homme avait sa place.
12:25 L'homme n'était pas un être inférieur,
12:28 ni supérieur.
12:30 Mais l'homme avait sa place
12:33 parce que la société a besoin qu'il l'occupe
12:36 pour bien fonctionner.
12:38 Si je vous prends le cas de ma culture,
12:42 moi je suis femme.
12:43 Dans la culture femme,
12:45 la femme est un être complet.
12:48 Ce n'est pas supérieur ou inférieur.
12:50 Mais on considère que la femme,
12:53 Dieu l'a fait de manière complète.
12:56 Et qu'en fait, elle peut même vivre seule.
12:59 Elle va s'en sortir.
13:01 Alors que l'homme n'est pas un être complet à la naissance,
13:07 il va devenir un être complet
13:09 une fois qu'il se serait marié.
13:12 C'est la femme qui va donner sa place à l'homme dans la société.
13:17 Vous voyez non ?
13:19 C'est la femme qui vient en faire un être complet.
13:21 C'est pour ça que je vous ai dit, c'est une question de place.
13:23 On ne peut pas vous dire, on va améliorer vos droits,
13:26 sans d'abord vous donner une place.
13:28 Quelle est votre place ?
13:30 C'est une question de place.
13:31 Quelle est la place que vous occupez dans la société ?
13:33 Le Gabon ne s'est pas posé ces questions là.
13:36 Mais on vous prend des textes,
13:38 et on vous fait des discours,
13:39 et on vous dit que ça a amélioré.
13:41 Ah mais le Gabon est le champion des droits des femmes.
13:44 Mais quelle est d'abord la place de la femme au Gabon ?
13:47 Moi je vous dis, dans la tradition femme,
13:50 la femme était un être complet.
13:52 Et le rôle de la femme était
13:57 de venir, de permettre,
13:59 parce que quand on dit permettre,
14:01 c'est à dire que quand maintenant un homme va se marier,
14:03 en se mariant,
14:05 l'homme devient,
14:07 occupe maintenant une place dans la société.
14:09 Dans le corps de garde,
14:11 quand on envoie,
14:13 les hommes sont au corps de garde,
14:15 ils reçoivent des assiettes de nourriture.
14:17 Tant que vous n'êtes pas marié,
14:19 vous ne recevez pas votre assiette.
14:21 Vous mangez la nourriture envoyée
14:23 à vos frères par leur femme.
14:25 Mais une fois que vous êtes marié,
14:27 votre assiette aussi va arriver au corps de garde.
14:29 Et donc du coup,
14:31 vous avez une place
14:33 qui fait de vous un homme.
14:35 Vous voyez non ?
14:37 C'est une question de place, pas de supériorité ou d'infériorité.
14:39 Donc on devrait d'abord réfléchir à
14:41 le colonisateur,
14:45 nous ayant légué cet état.
14:47 Qu'est-ce que nous faisons ?
14:49 Quelle place,
14:51 quelle société nous voulons construire ?
14:53 D'ailleurs on ne doit pas se poser
14:55 cette question que pour les femmes.
14:57 On doit se la poser d'une manière générale et en toute chose.
14:59 Quelle société nous voulons construire ?
15:01 Dans la société que nous voulons construire,
15:03 voilà comment nous considérons la femme.
15:05 Voilà quelle est la place
15:07 de la femme.
15:09 C'est maintenant à partir de cette place là,
15:11 que tous les droits
15:13 pour lesquels occupe la place
15:15 sont mis en oeuvre.
15:17 Vous comprenez ?
15:19 Mais on ne peut pas dire comme ça,
15:21 il faut combattre les inégalités.
15:23 Mais les inégalités,
15:25 elles sont nées de quoi d'abord ?
15:27 Donc vous voyez qu'on est tout le temps
15:29 en surface et c'est pour ça que
15:31 je vous ai parlé d'applicabilité,
15:33 d'application. Parce que tant qu'on n'a pas
15:35 déterminé le vrai problème
15:37 qui est, quelle est la place de la femme
15:39 dans la société gabonaise ?
15:41 La place de la femme dans la société gabonaise,
15:43 on n'aura rien réglé.
15:45 Justement il y a eu un renforcement
15:47 législatif au niveau
15:49 du code pénal et du code civil
15:51 qui a
15:53 plus ou moins donné
15:55 à la femme
15:57 une certaine égalité
15:59 notamment dans des cas comme
16:01 l'autorité parentale.
16:03 Quel bilan
16:05 pouvez-vous faire ?
16:07 Quelle est la prestation que vous faites
16:09 de ces dernières avancées légales ?
16:11 Encore faut-il
16:13 vraiment bien définir ce qu'on entend
16:15 par l'autorité parentale.
16:17 Quelle est
16:19 l'autorité parentale
16:21 autrefois ?
16:23 Avant,
16:25 c'était que
16:27 l'homme,
16:29 quand par exemple on choisit la religion,
16:31 c'est l'homme
16:33 qui a, si je puis dire,
16:35 le joker, il peut s'opposer.
16:37 C'est pas que la femme ne disait rien.
16:39 Notre enfant,
16:41 on a un enfant,
16:43 mais cet enfant, est-ce qu'on va
16:45 lui demander
16:47 d'être catholique, d'être
16:49 protestant ?
16:51 Quelle est la religion qui nous convient pour notre enfant ?
16:53 Les parents en discutaient.
16:55 Et celui qui avait les meilleurs
16:57 arguments l'emportait.
16:59 La femme n'a jamais...
17:01 Il n'y a jamais vraiment eu d'imposition en réalité.
17:03 Les gens peuvent aussi
17:05 se dire "ah non, non, non, on ne veut pas
17:07 que nos enfants soient chrétiens".
17:09 Ce qui est tout à fait normal.
17:11 Parce que les gabonais n'étaient pas chrétiens à l'origine.
17:13 Les gabonais ont rencontré le christianisme
17:15 au XIXe siècle, même pas au XVIIIe.
17:17 Donc, c'est pas naturel
17:21 le christianisme chez les gabonais.
17:23 Donc, je prends un exemple pour dire
17:25 que l'autorité parentale, c'est dans ce genre de choses-là.
17:27 En quoi
17:31 dire
17:33 à la femme qu'elle peut
17:35 exercer l'autorité parentale
17:37 alors qu'elle l'exerçait déjà,
17:39 est une avancée ?
17:41 En quoi ?
17:43 Est-ce qu'on peut nous dire
17:45 avant cette loi, où un homme
17:47 pouvait faire ce qu'il veut d'un enfant
17:49 né de son mariage
17:51 et la femme n'avait rien à dire ?
17:53 La femme avait déjà des choses à dire.
17:55 Et celle-ci opposait.
17:57 Ça ne se faisait même pas.
17:59 Donc ça, c'est pas des avancées.
18:01 Pour commencer, d'une part.
18:03 D'autre part,
18:05 le code pénal, nulle part au monde,
18:07 n'a donné des avancées
18:09 dans quoi que ce soit.
18:11 La repression
18:13 n'a jamais apporté
18:15 une avancée nulle part.
18:17 Regardez dans les pays
18:21 où il y a la peine de mort.
18:23 Ça réduit le crime ?
18:25 Non.
18:27 Si une personne
18:29 dit "moi, ça je le fais,
18:31 j'irai en prison", il le fait.
18:33 La personne le fait.
18:35 Donc, c'est pas pénal au problème.
18:37 C'est quelque chose qui m'a toujours
18:39 démoralisée au Gabon.
18:41 Sévir, punir.
18:43 Un pays ne peut pas vivre comme ça.
18:47 C'est-à-dire que l'État
18:49 installe la violence
18:51 dans tous les aspects de la vie.
18:53 Quasiment dans tous les aspects
18:55 de la vie gabonnaise.
18:57 Il y a une forme de violence d'une manière ou d'une autre.
18:59 On ne bâtit pas un pays
19:01 comme ça.
19:03 Il faut un peu de compassion.
19:05 Il faut de la bienveillance.
19:07 Il faut de temps en temps un peu de noblesse.
19:09 Ça manque au Gabon.
19:11 Mais on est tout le temps là.
19:13 Côte pénale.
19:15 Et puis en plus, eux-mêmes,
19:17 ils font des choses incroyables
19:19 où on peut condamner quelqu'un avec 10 ans
19:21 de prison avec sursis.
19:23 Donc, eux-mêmes, ils vont prendre des lois
19:25 tellement répressives.
19:27 Mais quand il s'agit de certains intérêts
19:29 à protéger,
19:31 ils ne les appliquent plus.
19:33 C'est l'application.
19:35 Applicabilité et application
19:37 dans un pays.
19:39 C'est très important.
19:41 Vous ne pouvez pas dire à vous,
19:43 le même fait,
19:45 quand c'est A, on lui applique
19:47 ce qui est dit dans la loi.
19:49 Mais quand c'est B, on va moduler.
19:51 On va faire en sorte
19:53 que ça ne soit pas...
19:55 Vous voyez ?
19:57 Quand une justice qui fait que
19:59 tant que c'est...
20:01 Si la personne est
20:03 riche ou pauvre,
20:05 si on s'appelle A ou B,
20:07 les décisions de droit,
20:09 les décisions de justice...
20:11 - La loi de l'individu général est impersonnelle.
20:13 - Voilà.
20:15 - OK.
20:17 Dans un tout autre domaine,
20:19 Maître Oyen,
20:21 vous avez récemment livré une tribune
20:23 sur le fonctionnement de la Cour pénale internationale.
20:25 Pouvez-vous y revenir
20:27 succinctement, pour ceux qui n'ont pas
20:29 eu l'occasion de la...
20:31 - Oui. Alors...
20:33 Il se trouve que moi,
20:35 j'appartiens à l'Alliance internationale des femmes,
20:37 qui est une organisation
20:39 internationale des femmes.
20:41 La première organisation des femmes du monde.
20:43 La femme au monde, c'est la première organisation de femmes.
20:45 Donc,
20:47 on m'a demandé
20:49 une amie indienne,
20:51 elle m'a dit "Ah ben tiens, est-ce que
20:53 tu peux nous faire un topo sur le
20:55 mandat qui a été
20:57 émis contre le président de la Fédération
20:59 de Russie, son excellence
21:01 Vladimir Poutine.
21:03 J'ai fait le texte.
21:05 Il se trouve qu'on s'est
21:07 réveillé, comme ça, le 14 mars, je crois,
21:09 le 17 mars plutôt,
21:11 avec une
21:13 nouvelle absolument sensationnelle,
21:15 que la CPI a émis
21:17 un mandat
21:19 d'arrêt contre le président de la Fédération
21:21 de Russie et
21:23 contre un membre de son
21:25 gouvernement, la commissaire
21:27 aux droits de l'enfant. La commissaire
21:29 russe aux droits de l'enfant.
21:31 Bon, moi ça m'a
21:33 étonnée.
21:35 Donc, il faut
21:37 bien savoir une chose,
21:39 c'est que la CPI
21:41 a été faite sur la base
21:43 d'un traité international, un traité
21:45 onusien, parce qu'il y a deux formes de traités
21:47 internationaux. Il y a les traités internationaux
21:49 qui sont typiquement africains, qui sont faits par
21:51 l'ONU, et les traités internationaux
21:53 qui sont faits par, qui sont plus universels,
21:55 parce que ça va conserver
21:57 plus de 195 pays,
21:59 qui sont
22:01 faits
22:03 par l'ONU. Et c'est le cas
22:05 de la CPI. La CPI a été créée
22:07 sur la base de ce traité. Mais la réflexion
22:09 vient de loin. La réflexion vient
22:11 des crimes qui ont été commis
22:13 pendant la Seconde Guerre mondiale
22:17 par l'Allemagne nazie.
22:19 C'était des crimes de déportation
22:21 et des crimes
22:23 de camp de concentration, et notamment le fait
22:25 de, par exemple, de gazer les juifs
22:27 ou de tuer les gens par le
22:29 travail. C'est-à-dire qu'on te fait travailler
22:31 jusqu'à ce que mort s'en suive.
22:33 Donc, ces crimes
22:35 ont choqué
22:37 le monde occidental,
22:39 alors que le monde occidental lui-même
22:41 les avait commis chez nous, avant.
22:43 Il les commet chez nous depuis
22:45 longtemps, avant la Seconde Guerre mondiale.
22:47 Nous, en Afrique,
22:49 en Namibie, dans beaucoup de pays,
22:51 parce que c'est un camp emblématique,
22:53 il y a eu les premiers camps de concentration,
22:55 il y a eu les premiers cas d'où l'on tue les gens
22:57 par le travail.
22:59 Donc, ces crimes ont choqué et
23:01 ils avaient créé ce qu'on appelle, que tout le monde connaît,
23:03 le tribunal de Nuremberg. Tout le monde connaît le procès
23:05 de Nuremberg.
23:07 Et ce procès de Nuremberg
23:09 a été un tribunal spécial.
23:11 Ça veut dire qu'un tribunal
23:13 spécialement créé pour juger
23:15 de ces crimes-là, donc un tribunal ad hoc.
23:17 Or, il se trouve que les tribunaux
23:19 spéciaux ont une mauvaise réputation.
23:21 On se dit que pour qu'une justice
23:23 soit équitable, on ne doit pas créer
23:25 un tribunal pour spécialement
23:27 juger quelqu'un.
23:29 Un tribunal doit être là pour juger tout le monde.
23:31 C'est quelque chose
23:33 qui avait été reproché à ce tribunal de Nuremberg.
23:35 Donc, les gens ont réfléchi, ils se sont dit
23:37 comme ces crimes se sont commis,
23:39 il ne faut plus que ce genre de crime
23:41 se commette un jour.
23:43 Donc, il faut
23:45 créer un tribunal périm.
23:47 Un tribunal qui n'est pas un tribunal ad hoc,
23:49 un tribunal spécial, un tribunal
23:51 tout à fait officiel, qui est permanent
23:53 et qui est périm.
23:55 C'est comme ça que l'idée de créer la CPI est née.
23:57 À partir de Nuremberg.
23:59 Donc, quand on crée
24:01 maintenant la CPI,
24:03 on le crée par un traité
24:05 qu'on appelle
24:07 le statut de Rome.
24:09 Parce que c'est là que l'idée de créer le tribunal
24:11 a émergé.
24:13 C'est là qu'on l'a adopté.
24:15 Donc, ce traité
24:17 qui crée la CPI
24:19 s'appelle aussi le statut de Rome.
24:21 Vous pouvez dire la CPI, vous pouvez dire le statut de Rome.
24:23 Pour que,
24:25 pour créer un traité,
24:27 pour qu'un traité maintenant fonctionne,
24:29 qu'est-ce qu'on fait ?
24:31 Les États, quand il est adopté
24:33 par les États, on dit oui, nous sommes d'accord,
24:35 nous allons créer le traité. On l'écrit,
24:37 il est adopté. Mais, pour que
24:39 ça marche, il y a
24:41 trois choses à faire. La première chose,
24:43 c'est que les États vont le signer.
24:45 Les États, chaque État va
24:47 signer le traité. Après avoir
24:49 signé le traité, puisque les États qui signent
24:51 le traité, le signent par
24:53 leur tête, l'exécutif,
24:55 la tête de l'État, l'exécutif, signe
24:57 le traité. Mais, pour
24:59 que le traité
25:01 soit,
25:03 ne soit discuté par personne,
25:07 il faut que le peuple
25:09 l'accepte.
25:11 Et le peuple a ses représentants, qu'on appelle
25:13 le Parlement. Donc,
25:15 on amène le traité au Parlement,
25:17 et le Parlement adopte
25:19 le traité.
25:21 Donc, les représentants du peuple
25:23 adoptent le traité.
25:25 Et maintenant, une fois qu'on a adopté le traité,
25:27 on le renvoie
25:29 dans les instances qui s'en occupent
25:31 pour le dépôt, pour que chaque État dise
25:33 vous voyez, j'avais signé, vous avez ma signature
25:35 dans vos registres, j'ai adopté. Voilà
25:37 le document d'adoption, et on
25:39 le dépose là-bas.
25:41 Dans
25:43 cette
25:45 dans
25:47 ce processus,
25:49 il y a des États qui n'ont pas signé
25:51 le traité.
25:53 Il y a des États qui ont
25:55 signé le traité et qui ne l'ont jamais adopté.
25:57 Il y a des États
25:59 qui ont
26:01 signé le traité, qui l'ont
26:03 adopté, et qui
26:05 par la suite sont allés le retirer.
26:07 En disant, oh oh,
26:09 ce que j'ai signé là, je me rends compte que
26:11 c'est un piège. Rendez-moi ma signature.
26:13 Et rendez-moi le dépôt
26:15 de
26:17 de
26:19 de la ratification.
26:21 Je ne suis plus dans votre traité.
26:23 C'est le cas des Philippines.
26:25 Mais il y a aussi des États qui ont signé,
26:27 adopté, mais qui sont partis dire
26:29 attention, moi,
26:31 vous ne devez jamais me poursuivre pour un crime. Quel que soit
26:33 ce que je fais hors des frontières
26:35 de mon pays, ce n'est pas un crime.
26:37 Ces États-là,
26:39 c'est la France et l'Angleterre.
26:41 La France et l'Angleterre ont
26:43 signé le traité, l'ont adopté,
26:45 mais ils sont allés obtenir des aménagements.
26:47 Ce qui fait
26:49 que vous ne pouvez pas poursuivre la France parce qu'elle a fait en Libye.
26:51 Et vous avez des cas terribles.
26:53 Par exemple, les militaires
26:55 anglais, ils vont faire leur
26:57 manœuvre de militaires
26:59 au
27:01 au Kenyan.
27:03 Ils violent des femmes là-bas.
27:05 Qu'est-ce qu'on fait ? On exfiltre en douce
27:07 le militaire violeur. On le renvoie dans son
27:09 Angleterre natale
27:11 et on ne rend pas justice à la femme violée Kenyane.
27:13 C'est terrible
27:15 ce que font certains États.
27:17 Donc, il y a donc
27:19 des États, parmi
27:21 les États qui n'ont pas signé du tout.
27:23 Vous avez la Chine,
27:25 vous avez l'Inde.
27:27 Le raisonnement
27:29 de ces États-là, c'est lequel ?
27:31 La Chine dit, moi,
27:33 je suis la Chine. J'ai été
27:35 le centre du monde. J'ai été un homme
27:37 puissant. J'existe depuis 4 000 ans.
27:39 Je ne vois pas comment
27:41 même si je commets une faute,
27:43 quelqu'un là-bas, là-haut, je ne sais même pas
27:45 comment ça s'appelle, va venir me juger
27:47 moi, Chinois, au nom de quoi ?
27:49 Qui peut me juger du haut de mes 4 000 ans
27:51 d'histoire ? Ça, c'est le raisonnement
27:53 de l'Inde et de la Chine qui
27:55 considèrent qu'ils sont une vieille civilisation
27:57 et que n'importe qui ne peut pas
27:59 les juger. C'est une
28:01 question de dignité.
28:03 C'est une logique de civilisation.
28:05 Et vous avez
28:07 des États
28:09 comme la Chine équatoriale
28:11 qui n'avaient pas signé.
28:13 Parce qu'il faut
28:15 bien vous dire une chose.
28:17 L'Afrique francophone
28:19 avait signé
28:21 par imposition
28:23 le traité de Rome. C'est-à-dire que
28:25 les Occidentaux avaient dit
28:27 à l'Union européenne
28:29 qu'il y avait une délégation
28:31 de l'Union européenne
28:33 chez vous. Vous voulez avoir des
28:35 relations avec l'Union européenne
28:37 et avec, d'après eux,
28:39 les avantages que ça comporte.
28:41 Quand vous signez pour avoir ces rapports
28:43 avec l'Union européenne, vous
28:45 signez également que vous
28:47 reconnaissez ces pays. Donc on a
28:49 fait ça comme package
28:51 aux pays africains de l'Afrique francophone.
28:53 Ce package,
28:55 la Guinée équatoriale
28:57 l'avait refusé. Et donc la Guinée
28:59 équatoriale n'avait pas signé. Résultat.
29:01 Comment ça marche ? Quand vous
29:03 n'obéissez pas à
29:05 des injonctions,
29:07 l'Union européenne a
29:09 beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup d'ONG.
29:11 Qu'elle finance. Ces ONG-là
29:13 sont bras armés.
29:15 Et il suffit
29:17 que les ONG vous fassent une mauvaise réputation
29:19 et c'est ce que vous entendez.
29:21 "Bien, il m'embarque au dictateur."
29:23 En réalité, c'est parce qu'il n'a pas signé.
29:25 Il a été insoumis.
29:27 Parce qu'il n'est plus dictateur que qui ?
29:29 Il n'est plus
29:31 que qui ? Et
29:33 à un moment donné, il avait des coups d'état tout le temps.
29:35 Des gens qui arrivent
29:37 de l'office de Thatcher,
29:39 tout ça. Il avait tout le temps des coups d'état.
29:41 Donc il fallait le déstabiliser.
29:43 Parce qu'il a dit non, non, non.
29:45 Avoir des relations avec l'Union européenne,
29:47 c'est une chose. Mais accepter le package
29:49 de la Cour pénale internationale, il faut que je regarde
29:51 ça de près, que j'analyse.
29:53 Je n'accepte pas le package.
29:55 C'est ce qu'a dit le président.
29:57 Dans cet espace-là,
29:59 la Guinée équatoriale
30:01 est le seul pays qui a résonné comme ça.
30:03 Parmi les gens qui ont signé
30:05 et qui n'ont pas ratifié,
30:07 vous avez
30:09 les Etats-Unis,
30:11 vous avez la Russie, vous avez
30:13 l'Ukraine. Ces pays-là
30:15 n'ont pas signé, ils ont signé,
30:17 mais n'ont pas ratifié.
30:19 Oh, si j'ai pris la peine de vous dire que
30:21 on ratifie, on signe, on ratifie,
30:23 on fait le dépôt, c'est pour dire que
30:25 uniquement les personnes qui ont
30:27 signé et ratifié
30:29 sont justiciables
30:31 de la CPI.
30:33 La CPI ne peut pas
30:35 poursuivre
30:37 un pays qui n'a pas
30:39 ratifié. La CPI
30:41 ne peut pas signer un pays qui n'a ni signé
30:43 ni ratifié.
30:45 Et il y a même eu
30:47 des pays, et la CPI
30:49 ne peut pas non plus poursuivre
30:51 un pays qui a signé et ratifié
30:53 et qui est parti faire des aménagements
30:55 pour dire "moi, vous ne me poursuivrez
30:57 jamais, quel que soit le crime
30:59 que je commets, d'ailleurs moi je ne commets pas de crime.
31:01 Ce que je fais
31:03 hors de mon territoire,
31:05 si ça tue des gens,
31:07 on ne doit pas penser que ça commet un crime.
31:09 Les gens qui résonnent comme ça, c'est la France
31:11 et la Grande-Bretagne.
31:13 Vous voyez, non.
31:15 Donc, on ne les poursuit pas.
31:17 Les Philippines avaient signé, ratifié,
31:19 quand ils arrivent chez eux, ils réfléchissent,
31:21 ils se disent "oh,
31:23 cette affaire, mais ah non non non,
31:25 il est parti à la CPI, il a retiré
31:27 les Philippines ont retiré leur signature,
31:29 ils ont repris leur acte de ratification
31:31 contre le dépôt,
31:33 ils ont retiré.
31:35 Ils ne sont plus membres, ils sont aujourd'hui considérés comme
31:37 n'ayant jamais signé.
31:39 Donc c'est pour dire que le mandat d'arrêt
31:41 est livré contre Vladimir Poutine.
31:43 C'est tellement,
31:47 ça n'a tellement pas de sens
31:49 en droit, je dis bien,
31:51 ce n'est pas valable en droit.
31:53 L'objectif est là,
31:55 dans la communication,
31:57 pour le salir, pour en faire un repoussoir,
31:59 pour en faire un criminel, déjà.
32:01 Alors qu'ils savent très bien
32:03 que la Russie n'est pas justiciable
32:05 de la CPI.
32:07 Voilà qui est clair.
32:09 Alors,
32:11 revenons sur le plan local,
32:13 à l'aube de l'élection présidentielle 2023,
32:15 deux femmes,
32:17 la personne de Lassénie Duboz
32:19 et Hervois Kennegé, ont décidé
32:21 de briguer la magistrature suprême.
32:23 Est-ce que vous pensez aujourd'hui
32:25 la femme gabonaise capable
32:27 d'accéder à la magistrature suprême ?
32:29 Bon, c'est pas une question
32:31 de femmes gabonaises capables ou pas.
32:33 Les hommes au Gabon ne sont pas plus
32:35 capables que les femmes.
32:37 Ce qu'un homme peut faire, une femme peut le faire.
32:39 C'est une question que
32:41 dans le système
32:43 qui est actuellement là,
32:45 le système, parce que nous sommes
32:47 dans un système, les gens ne le savent pas bien.
32:49 Nous sommes dans un système
32:51 qui a été créé depuis l'esclavage
32:53 et qui a engendré
32:55 la colonisation
32:57 et qui a engendré la néocolonisation.
32:59 C'est le même système esclavagiste
33:01 du 16ème siècle
33:03 qui existe toujours aujourd'hui
33:05 et qui est, parce que la néocolonisation
33:07 est le petit-fils
33:09 de l'esclavage, est le fils
33:11 de la colonisation. La néocolonisation
33:13 c'est une nouvelle colonisation, une colonisation
33:15 autrement, une colonisation nouvelle.
33:17 Donc ce système là,
33:19 c'est pas un problème
33:21 qu'est-ce qu'une femme peut gagner
33:23 ou pas. C'est une question
33:25 que ne peut être
33:27 la tête de l'État
33:29 que les gens,
33:31 que le système choisit.
33:33 Est-ce que le système
33:35 va choisir ses femmes ? Je ne sais pas.
33:37 C'est pas une compétition ouverte
33:39 les élections au Gabon.
33:41 C'est quelque chose de déjà préparé
33:43 depuis très longtemps.
33:45 Les gens qui ont mis le système en place
33:47 ont dit, voilà,
33:49 des gens qui doivent garder
33:51 ce système, ils sont des gardiens de ce système
33:53 avec en contrepartie
33:55 des profits personnels.
33:57 Donc,
33:59 les élections au Gabon, c'est pas
34:01 comme on vaut les élections
34:03 et puis chacun va faire ses arguments
34:05 et puis on va gagner, non. C'est que
34:07 la personne qui a mis le système en place, la France,
34:09 avec une partie des Gabonais,
34:11 ils sont là pour que ce système
34:13 reste pérenne et qu'eux-mêmes
34:15 le gèrent.
34:17 Est-ce qu'ils vont décider
34:19 de donner la gestion
34:21 à une de ces deux femmes ?
34:23 On verra bien.
34:25 - Ok, d'accord. Alors,
34:27 la démocratie, un mot
34:29 fort qui vous inspire
34:31 et auquel vous aspirez
34:33 profondément
34:35 pour le Gabon.
34:37 Avez-vous l'impression
34:39 qu'à ce jour, le Gabon
34:41 est gouverné par
34:43 la logique
34:45 d'une démocratie au sens
34:47 d'un gouvernement du peuple
34:49 pour le peuple
34:51 et par le peuple ?
34:53 - Le Gabon n'a jamais été une démocratie
34:57 au sens d'un gouvernement
34:59 du peuple par le peuple.
35:01 Pas plus aujourd'hui qu'ailleurs.
35:03 Le Gabon
35:05 est une
35:07 oligarchie. Je vous dis
35:09 que le Gabon, c'est un système
35:11 qui vient de l'esclavage.
35:15 C'est le même
35:17 qui continue.
35:19 Avec des adaptations.
35:21 Cette fameuse démocratie
35:23 qui a eu lieu
35:25 en 1990,
35:27 selon les dévenants, il faut devenir démocratie, etc.
35:29 C'est simplement parce que Mitterrand,
35:31 qui était
35:33 quelqu'un
35:35 d'extrêmement intelligent, avait
35:37 compris que si on n'a même
35:39 pas ce mot magique, parce que la démocratie
35:41 c'est comme si c'était de la magie
35:43 au pays africain,
35:45 quand les changements se produisent,
35:47 comme ce sont produits parce que tout un monde
35:49 s'est effondré, l'empire soviétique,
35:51 ça a donc bouleversé le monde.
35:53 Ces bouleversements
35:55 risqueraient de mettre en péril
35:57 le système
35:59 oligarchique
36:03 qui profite
36:05 à la France.
36:07 Donc qu'est-ce qu'il fallait faire ?
36:09 Il fallait maintenant
36:11 donner un os à ranger
36:13 aux populations
36:15 en leur disant "on va vous donner de la démocratie".
36:17 Et depuis là,
36:19 on dit aux populations "écoutez, vous êtes allé,
36:21 vous avez librement choisi
36:23 un candidat, alors c'est votre choix".
36:25 Alors qu'en réalité,
36:27 ce n'est pas vrai.
36:29 Il n'y a pas plus,
36:31 dans tous les systèmes politiques qui existent,
36:33 le système
36:35 le plus cynique, c'est la démocratie.
36:37 Parce que la démocratie est le
36:39 seul système où l'on peut
36:41 complètement tricher
36:43 en faisant croire aux gens
36:45 qui le choisissent.
36:47 Alors qu'en réalité, on fabrique
36:49 leur consentement. Alors qu'en réalité,
36:51 on les amène à croire qu'ils choisissent
36:53 alors qu'ils ne choisissent rien.
36:55 Alors qu'en réalité, ce système s'accomode
36:57 absolument de tous les mondes.
36:59 Un même pays,
37:01 si on sort
37:03 d'un pays comme le Gabon,
37:05 vous avez des pays où
37:07 qui se disent démocratiques
37:09 et qui en même temps
37:11 pratiquent le terrorisme,
37:13 qui en même temps pratiquent le fascisme.
37:15 Prenons les Etats-Unis.
37:17 Les Etats-Unis étaient démocratiques,
37:19 ont toujours été démocratiques, non ?
37:21 Mais pourtant, pendant que les Etats-Unis étaient démocratiques,
37:23 ils pratiquaient l'esclavage.
37:25 Pendant que les Etats-Unis étaient démocratiques,
37:27 ils pratiquaient la ségrégation.
37:29 Vous voyez ?
37:31 Et les deux coexistaient sans problème.
37:33 Prenons l'Afrique du Sud.
37:35 L'Afrique du Sud était démocratique,
37:37 mais les Noirs étaient considérés
37:39 comme quasiment des animaux.
37:41 Donc, c'est ça le problème de la démocratie.
37:43 Et quand on en vient chez nous,
37:45 le génie de Mitterrand
37:47 a été qu'il fallait juguler,
37:49 contrôler les populations
37:51 pour que les populations
37:53 ne s'énervent pas.
37:55 Et pour qu'elles ne s'énervent pas
37:57 alors qu'on ne fait rien pour elles,
37:59 alors qu'on les maintient dans la pauvreté,
38:01 alors qu'on leur enlève
38:03 tout ce qui pouvait constituer
38:05 leur capacité de défense.
38:07 Parce qu'avant,
38:09 nous pouvions nous-mêmes nous soigner
38:11 sans aller en prison.
38:13 Avant, les femmes accouchaient,
38:15 il y avait des accoucheuses traditionnelles.
38:17 Et on n'avait pas 500 femmes
38:19 qui meurent par an en couche.
38:21 Combien de personnes ici au Gabon
38:23 sont nées dans une maternité ?
38:25 Moi, je pense que
38:27 jusque dans les années 60,
38:29 il y a beaucoup de gens
38:31 qui sont nés dans les années 60
38:33 ou même dans les années 70
38:35 et qui sont nés dans leur village
38:37 par une accoucheuse traditionnelle.
38:39 Mais on a enlevé tout ça aux populations.
38:41 Pour les fragiliser.
38:43 On leur a enlevé leur capacité
38:45 de leur science.
38:47 On leur a enlevé leur capacité
38:49 à fabriquer leurs propres instruments
38:51 pour manger,
38:53 pour produire de la prospérité,
38:55 pour les orienter
38:57 vers un domaine donné
38:59 où il n'y a rien pour eux.
39:01 Mais comment les maintenir
39:03 dans cet état
39:05 sans qu'ils se révoltent ?
39:07 On leur dit,
39:09 "Mais choisissez vous-même
39:11 vos dirigeants."
39:13 Et on a amené ça à la démocratie.
39:15 Alors que je vous dis
39:17 que le système gabonais
39:19 est un système néocolonial.
39:21 Dans ce système néocolonial,
39:23 on a la France
39:25 et des Gabonais,
39:27 une partie des Gabonais.
39:29 C'est un système bicep
39:31 à deux têtes.
39:33 Une tête est en France
39:35 et l'autre tête est au Gabon.
39:37 La France a dit,
39:39 "Moi, je ne suis plus colonisateur physique.
39:41 Je vais rester colonisateur
39:43 mental,
39:45 colonisateur spirituel,
39:47 colonisateur culturel.
39:49 Seulement, on ne me voit plus.
39:51 Toi, tu restes à ma place.
39:53 Et tu dois te maintenir."
39:55 Donc le problème est
39:57 comment, à chaque fois
39:59 que quelque chose se fait au Gabon,
40:01 les Gabonais doivent savoir
40:03 que la vraie question que les gens se posent,
40:05 les gens du système se posent, c'est
40:07 comment faisons-nous pour maintenir
40:09 le système ?
40:11 Comment faisons-nous pour le pérenniser ?
40:13 Comment faisons-nous pour le conserver ?
40:15 Et tout ce que vous allez
40:17 voir qui est fait, n'est fait
40:19 que dans cet objectif, conserver
40:21 le système. Et
40:23 on utilise les Gabonais
40:25 pour la conservation
40:27 de ce système-là. Quand on leur
40:29 demande d'aller voter, on sait très bien que
40:31 leur vote ne vaudra rien.
40:33 Le Gabon a pris en valeur du même. Vous avez voté ?
40:35 De quoi vous plaignez-vous ?
40:37 C'est le peuple.
40:41 Le peuple est souverain.
40:43 Alors qu'au Gabon, le peuple n'est pas souverain.
40:45 Quand vous regardez la loi
40:47 sur les élections,
40:49 on vous dit,
40:51 et même
40:53 dans la Constitution,
40:55 on vous dit que la souveraineté
40:57 au Gabon, la souveraineté est une
40:59 souveraineté nationale.
41:01 Et après, on fait
41:03 une gymnastique
41:05 et on dit que la souveraineté nationale
41:07 appartient au peuple.
41:09 Ça n'a aucun sens.
41:11 Pourquoi ?
41:13 La souveraineté nationale, qu'est-ce que c'est ?
41:15 La souveraineté nationale,
41:17 c'est dans le régime monarchique
41:19 d'autrefois,
41:21 où c'est l'ensemble d'un certain nombre
41:23 de personnes qui gèrent
41:25 l'État, qui donnent leur avis
41:27 dans la façon d'orienter
41:29 le pays.
41:31 C'est ça la souveraineté nationale.
41:33 C'est une souveraineté institutionnelle.
41:35 Ce sont les institutions qui s'assoient
41:37 et qui donnent leur avis dans la façon
41:39 d'orienter le pays. Et on le regarde par le peuple.
41:41 Mais chez nous,
41:43 on a appris ça, mais on dit que
41:45 cette souveraineté nationale appartient au peuple.
41:47 C'est faux. Parce que la seule
41:49 souveraineté qui appartient au peuple, c'est la souveraineté
41:51 populaire.
41:53 Vous voyez, ce genre
41:55 de détail, les Gabonais ne le réalisent pas.
41:57 Et les gens qui parlent au nom
41:59 des Gabonais, qui les représentent,
42:01 qui les éduquent, qui les orientent, ne le leur disent pas.
42:03 Et vous allez voir tout le temps,
42:05 les gens disent "la souveraineté appartient au...
42:07 le Gabon est un peuple souverain."
42:09 C'est faux. La souveraineté au Gabon,
42:11 elle est nationale, c'est-à-dire qu'elle
42:13 est mâle des institutions qui gèrent
42:15 l'État.
42:17 Mais après, on fait une acrobatie
42:19 juridique et on va dire
42:21 "la souveraineté nationale appartient au peuple."
42:23 Mais enfin, si la souveraineté vient des institutions,
42:25 dites-moi,
42:27 en dehors des élus,
42:29 toutes les personnes qui gèrent
42:31 les institutions sont élus par qui ?
42:33 Pas personne.
42:35 Ce sont des personnes nommées.
42:37 Et pourtant,
42:39 elles participent
42:41 de la décision, de la marche du pays.
42:43 À partir de là,
42:45 la souveraineté nationale peut appartenir
42:47 au peuple commun.
42:49 Vous voyez, non ?
42:51 Donc, il y a beaucoup de choses
42:53 quand on se met à décortiquer
42:55 le Gabon, c'est vraiment très intéressant
42:57 de voir comment
42:59 on roule les Gabonais
43:01 que l'on roule les populations.
43:05 Ça, je veux bien, parce que c'est pas leur rôle.
43:07 Les populations font confiance
43:09 à leur leader.
43:11 Les populations font confiance à leurs élites.
43:13 Mais ces élites-là,
43:15 ne leur disent pas ce que je vous dis aujourd'hui.
43:17 Ne leur disent pas que "mais attention,
43:19 peuple Gabonais, parce que vous allez voir ça partout,
43:21 c'est un peuple souverain,
43:23 c'est faux.
43:25 La souveraineté au Gabon,
43:27 elle est nationale.
43:29 La seule souveraineté qui appartient au peuple,
43:31 c'est la souveraineté populaire.
43:33 Et la souveraineté populaire n'existe
43:35 dans aucun texte au Gabon.
43:37 Ni dans la Constitution,
43:39 ni dans nos textes
43:41 sur les élections,
43:43 les différentes sur les élections.
43:45 C'est toujours la souveraineté nationale.
43:47 Si c'était, par exemple, le cas,
43:49 j'allais vous amener le texte et vous le lire,
43:51 vous allez voir que la souveraineté, elle est nationale.
43:53 C'est-à-dire qu'elle émane
43:55 des différentes institutions
43:57 qui gèrent le pays.
43:59 Et quand ces institutions gèrent le pays,
44:01 ils ne vont pas demander
44:03 l'avis des populations.
44:05 Jamais.
44:07 Donc il n'y a pas de souveraineté nationale au Gabon.
44:09 Donc vous voyez que
44:11 c'est des choses comme ça.
44:13 Quand les Gabonais vont bien le comprendre,
44:15 ils vont voir à quel point on les roule.
44:17 Et une fois qu'ils comprendront
44:19 qu'on les roule,
44:21 ce sera là le début du vrai changement au Gabon.
44:23 Ce qui m'étonne,
44:25 c'est que pourquoi les leaders,
44:27 les gens qui ont un petit bras,
44:31 qui ont les masses derrière eux,
44:33 pourquoi ils ne leur disent pas ça ?
44:35 Pourquoi eux-mêmes,
44:37 ils participent de ça ?
44:39 Ils font croire
44:41 aux gens qui croient en eux
44:43 qu'ils ont la souveraineté,
44:45 alors qu'ils ne l'ont pas.
44:47 Je trouve que c'est très méchant
44:49 de manipuler un peuple comme ça.
44:53 Très bien.
44:55 Alors Maître Yann,
44:57 nous arrivons au terme de cette interview.
44:59 Est-ce que vous avez un mot de fin
45:01 à l'endroit de celles et ceux qui nous ont regardés ?
45:03 Oh, je n'ai pas vraiment de mot de fin
45:07 en particulier. Je vous remercie
45:09 de m'avoir invitée.
45:11 En général,
45:13 je ne connais même pas toute l'exposition
45:15 médiatique.
45:17 C'est quelque chose que je goûte très peu.
45:19 J'espère que l'émission aura été utile.
45:23 J'espère que
45:27 les gens qui vont la regarder
45:29 vont comprendre
45:31 une ou deux choses.
45:33 J'espère avoir été claire.
45:35 C'est mon mot de la fin.
45:37 Merci.
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