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La nouvelle secrétaire de la CGT, Sophie Binet, s'exprime à la suite de l'allocution du président de la République, Emmanuel Macron. 

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Transcription
00:00 Bonsoir Sophie Binet, merci d'être avec le secrétaire général de la CGT, merci d'avoir accepté de réagir ce soir après la locution d'Emmanuel Macron en direct sur BFM.
00:09 Emmanuel Macron qui a dit ses regrets ce soir, regret de ne pas avoir convaincu, de ne pas avoir fait que cette réforme des retraites avait été acceptée.
00:16 Emmanuel Macron qui dit qu'il ne peut pas rester sourd, que personne ne peut rester sourd à la colère, il parle de cette colère et il tend la main d'une certaine manière au syndicat.
00:23 En disant il va falloir qu'on se retrouve, il va falloir qu'on discute de choses très concrètes, travail, usure professionnelle, l'emploi des seniors etc.
00:30 Il vous tend la main, qu'est-ce que vous faites ce soir, qu'est-ce que vous lui dites ?
00:33 Mais le problème c'est qu'il nous tend la main après nous avoir fait un bras d'honneur, c'est-à-dire après avoir promulgué sa réforme dans la nuit de vendredi à samedi,
00:40 alors que solennellement toutes les organisations syndicales lui ont demandé de tirer les leçons de la censure du Conseil constitutionnel,
00:47 en lui disant que la loi sortait abîmée du Conseil constitutionnel, encore plus déséquilibrée qu'avant et qu'il ne pouvait pas la promulguer telle quelle.
00:55 Et nous lui proposions encore une porte de sortie comme nous lui en proposons depuis le début du conflit,
01:00 à savoir par exemple nous lui proposions de revenir devant le Parlement en vertu de l'article 10 de la Constitution
01:06 qui permet d'amener en seconde lecture un projet de loi qui aurait été censuré par le Conseil constitutionnel,
01:11 ce qui aurait permis d'ailleurs d'avoir un premier vote du Parlement étant donné que le Parlement a été empêché de voter.
01:15 Et donc le problème c'est qu'Emmanuel Macron nous claque la porte au nez en promulguant sa loi de nuit en plein week-end,
01:22 et puis tout d'un coup là il nous explique ce soir, il nous parle de dialogue social, il nous explique que sa porte est grande ouverte,
01:28 alors que ça fait trois mois que sa porte est fermée, sachant qu'on le sollicite depuis trois mois pour être reçu pour faire le point sur ce conflit.
01:37 Est-ce que vous dites non définitivement ? Tout à l'heure Laurent Berger disait, il expliquait son délai de décence en disant "le moment viendra où j'irai".
01:45 Est-ce que vous avez le même état d'esprit ? Est-ce que vous vous dites que vous irez un jour à l'Elysée, que vous répondrez à son invitation ?
01:51 Mais nous on ira avec grand plaisir à l'Elysée si Emmanuel Macron retire sa réforme parce qu'aujourd'hui le sujet...
01:57 Si il ne le fait pas c'est jamais ?
01:59 Il ne faut jamais dire jamais, c'est un proverbe classique, mais en attendant la CGT elle prend ses décisions avec les salariés, avec les syndiqués,
02:08 on a une intersyndicale qui décide ensemble, là l'intersyndicale elle a décidé, et c'est assez inédit pour le souligner quand même,
02:14 de ne pas rencontrer Emmanuel Macron s'il promulguait sa loi. Il a promulgué sa loi, c'est vraiment dommage parce qu'il avait 15 jours pour promulguer.
02:22 S'il avait attendu quelques jours pour promulguer, s'il nous avait dit "aujourd'hui, demain, je vous reçois, je ne promulgue pas, je vous reçois pour faire le point avec vous sur l'état du pays",
02:30 là on y serait allés, évidemment. Mais le problème c'est qu'il promulgue et il fait comme si après ce passage en force on pourrait passer à autre chose,
02:38 alors que là nous on n'est pas sur un sujet technocratique, ça a des conséquences concrètes sur nos vies.
02:45 Ce qu'il faut comprendre c'est que là on ne parle pas d'une question abstraite, on parle d'une réforme qui consiste à nouveau les deux ans de vie,
02:52 sur laquelle le président de la République passe en force. Donc c'est pour ça qu'on ne peut pas juste dire "on tourne la page, on passe à autre chose" en attendant.
02:59 Ça veut dire que vous laisserez donc des réunions se faire entre Emmanuel Macron, Laurent Berger et les autres syndicats qui souhaitent y aller,
03:05 qui vont parler usure professionnelle, emploi des seniors, sans vous.
03:09 Non mais là ce n'est pas le sujet de ce soir puisque tous les syndicats...
03:12 Mais ça va être tout le sujet des semaines à venir.
03:14 Non, le sujet de ce soir c'est l'ensemble des syndicats qui se relaient à vos micros pour vous dire tous la même chose,
03:20 c'est-à-dire que nous n'irons pas rencontrer Emmanuel Macron pour parler d'autre chose que du retrait de la réforme, et nous nous sommes mis d'accord là-dessus.
03:27 Demain.
03:28 Demain et jusqu'au 1er mai, c'est dans 15 jours, c'est assez long comme séquence.
03:34 Après le 1er mai vous nous réinviterez et on vous dira ce qui se passe.
03:39 Et si ils vous proposent une grande conférence sociale autour de tous ces thèmes après le 1er mai pour se mettre d'accord sur la loi qui accompagnera la réforme des retraites
03:47 et qui est encore en application à l'automne, est-ce que vous accepterez de participer à cette grande conférence sociale ?
03:53 Moi je ne sais pas faire du syndicalisme fiction.
03:55 Une mobilisation sociale ça se construit au jour le jour.
03:58 Là on a un horizon à 15 jours avec la date du 1er mai où nous appelons l'ensemble des Françaises et des Français,
04:04 l'ensemble des salariés, des jeunes à venir manifester en nombre pour faire de ce 1er mai un 1er mai exceptionnel.
04:10 Il est déjà historique, c'est la première fois que tous les syndicats appellent au 1er mai, ça ne s'est jamais produit.
04:15 Il sera exceptionnel par son niveau de mobilisation.
04:18 Il y aura en plus, je vous l'annonce en exclusivité, de très nombreux syndicats étrangers qui viendront du monde entier
04:24 pour montrer leur solidarité, leur soutien vis-à-vis de notre mobilisation.
04:28 Donc ça sera un 1er mai exceptionnel.
04:30 Et là l'actualité c'est la construction de ce 1er mai.
04:33 Et nous appelons tout le monde à venir manifester.
04:35 Dans quel but, maintenant que la réforme est promulguée, comme vous l'avez très bien dit,
04:39 qu'est-ce que vous pouvez encore espérer ?
04:41 Nous avons deux objectifs.
04:43 Le premier objectif c'est que ce n'est pas parce qu'une réforme est promulguée qu'on ne peut pas la retirer.
04:47 La preuve c'est ce qui s'est passé sur le CPE où 10 jours après la promulgation de la loi,
04:51 la loi n'a pas été appliquée donc c'est toujours possible.
04:54 Ensuite le Conseil constitutionnel doit statuer le 3 mai sur le référendum d'initiative partagée.
05:00 Ça fait partie des portes de sortie que le gouvernement est en train de fermer et qui seraient intéressantes.
05:05 Quand il y a un conflit, un blocage entre tout le pays et l'Elysée,
05:10 un homme tout seul quand même, il faut redire les choses,
05:12 éventuellement le moyen de sortir c'est de revenir devant le peuple pour pouvoir voter.
05:16 Et puis dernier élément de manifestation le 1er mai,
05:19 c'est de dire que la priorité ce n'est pas de reculer l'âge de départ en retraite,
05:24 c'est d'augmenter les salaires, de répondre à la pénibilité au travail,
05:27 de répondre à la crise environnementale, de faire l'égalité femmes-hommes enfin
05:30 au lieu d'en parler tous les jours et de faire l'inverse sur le terrain, etc.
05:33 Madame Binet, deux choses.
05:35 Un, vous y croyez vraiment au référendum d'initiative partagée ?
05:39 On attend la décision le 3 mai.
05:41 Vous pensez que c'est possible que sur le plan constitutionnel,
05:46 le Président, parce que vous vous accrochez à ça finalement,
05:48 c'est peut-être votre dernière porte de sortie.
05:51 Est-ce que vous y croyez ?
05:52 Et deuxièmement, pour rebondir sur ce que disait Maxime tout à l'heure,
05:55 le menu qui a été fixé des discussions,
05:58 est-ce que déjà au moins le menu, en dehors du fait qu'il manque les retraites,
06:02 ça vous convient ?
06:03 Alors sur le référendum d'initiative partagée, nous y croyons vraiment
06:07 comme possibilité de sortie de crise si le pouvoir était intelligent
06:10 et voulait vraiment faire l'apaisement.
06:12 J'ai entendu ces mots dans la bouche d'Emmanuel Macron,
06:14 c'est un mot très important pour nous puisqu'on l'y appelle depuis trois mois.
06:17 S'il voulait apaiser la situation, la solution, une des solutions,
06:20 ça pourrait être de revenir devant le peuple et de dire
06:22 "Ok, on va laisser trancher le peuple".
06:24 C'est un menu constitutionnel.
06:25 Je ne suis pas constitutionnaliste, personne ici sur ce plateau,
06:28 mais le problème du RIP, c'est que, je pourrais le dire de façon un peu provoquante,
06:33 on se demande parfois s'il n'a pas été fait pour ne jamais marcher.
06:36 Parce qu'il est assorti d'une telle masse de conditions
06:38 qui en plus sont contradictoires entre elles.
06:40 C'est-à-dire que pour que ça marche, il faut que ça soit une réforme,
06:43 une réforme qui ne coûte rien aux finances publiques
06:45 et une réforme qui ne porte pas sur des mesures fiscales.
06:48 Donc à partir de là, c'est quand même difficile de satisfaire.
06:51 Et puis une réforme qui ne consiste pas à abroger une loi déjà existante.
06:55 Donc là, on voit qu'on a déjà quatre conditions
06:57 qui sont potentiellement contradictoires entre elles.
06:59 Donc si jamais le RIP n'était pas validé le 3 mai prochain par le Conseil constitutionnel,
07:04 la première leçon qu'il faudrait en tirer,
07:06 c'est que là on a une crise sociale, une crise démocratique,
07:09 on aurait aussi peut-être une crise de régime avec un problème sur un instrument
07:14 qui est supposé aider en cas de crise sociale,
07:16 parce que le RIP a quand même été mis en place suite au gilet jaune,
07:19 pour permettre de sortir des conflits et qui manifestement ne peut pas jouer son rôle.
07:23 C'était 2008 le RIP.
07:25 En tout cas, manifestement ne peut pas jouer son rôle du fait des clauses qui la sortissent.
07:29 Donc ça, ça sera des leçons à tirer.
07:32 Sur votre deuxième question qui est importante aussi,
07:34 la question du menu des réjouissances auxquelles le locataire de l'Elysée nous invite,
07:41 le problème c'est que pour l'instant le menu n'est pas très appétissant.
07:44 D'abord, pour nous, le plat de résistance, ça doit être le retrait de la réforme des retraites.
07:48 Et ensuite, sur le reste des agapes, on nous parle de quoi ?
07:52 On nous parle de la réforme du lycée professionnel.
07:55 Bon, ça je rappelle que ça fait six mois que tous les enseignants de lycée professionnel
07:59 et tous les élèves dénoncent cette réforme,
08:01 je n'ai pas le temps de rentrer dans les détails,
08:02 mais qui consiste à casser la scolarité des élèves, en plus les plus défavorisés,
08:08 qui ont besoin de temps d'enseignement et qui ont besoin de passer du temps en classe.
08:12 On supprime encore plus le temps passé en cours.
08:15 Deuxième chantier dont ils nous parlent, la question du RSA en disant,
08:19 en gros, on va mettre au travail les personnes qui sont sur des minimas sociaux.
08:23 Je rappelle que toutes les organisations syndicales dénoncent cette stigmatisation
08:27 des personnes privées d'emploi qui n'ont pas choisi d'être privées d'emploi, mais qui le subissent.
08:30 – Il a été plus vague que ça le président de la République ce soir.
08:32 – C'était quand même un petit peu ça.
08:34 Troisième chose dont ils nous parlent précises, la question de l'immigration,
08:37 en nous disant qu'il va falloir durcir les choses sur l'immigration illégale.
08:41 Je rappelle que toutes les organisations syndicales disent que quand il y a des travailleuses
08:45 et des travailleurs qui sont en France, ce qu'il faut c'est leur permettre de travailler dignement,
08:48 leur donner des papiers pour mettre fin au dumping social que constitue l'immigration.
08:52 Et par contre, sur ce qui pourrait ressembler à du sucré, à des choses intéressantes,
08:57 moi j'ai entendu des mots-clés, j'ai entendu carrière, revenu, senior, etc.
09:03 – Pénibilité. – Pénibilité.
09:05 – Et pas de limite, pas de tabou dans la discussion, c'est ce que dit le président.
09:08 – Oui, oui, mais là franchement ça ressemble à un miroir aux alouettes.
09:12 Ça fait depuis le Covid que Emmanuel Macron nous parle du monde d'après
09:17 et nous dit "on va tourner la page, on va investir dans les services publics,
09:21 on va développer l'école, développer les hôpitaux,
09:24 on va revaloriser les premiers de corvée, les premières lignes,
09:29 on va enfin mieux les payer, etc."
09:31 Depuis trois ans, on ne voit rien venir et les seules choses qu'on voit venir,
09:34 c'est tout l'inverse puisque c'est cette réforme des retraites
09:37 qui n'est pas nécessaire économiquement et qui est très violente.
09:39 – Il y a eu le Ségur de la santé quand même, qui a permis de revaloriser
09:42 certains salaires à l'hôpital.
09:44 – Oui, d'accord, sauf qu'il ne vous a pas échappé qu'il y a toujours
09:47 une mobilisation massive des soignantes et des soignants
09:49 qui disent que le Ségur n'est pas à la hauteur et n'est pas suffisant.
09:52 – Mais justement, est-ce que ce n'est pas le moment de se saisir de ces sujets
09:55 et de dire "Banco, monsieur le président, on accepte,
09:58 mais vous nous laissez faire, vous nous laissez écrire cette page."
10:01 – Eh bien nous on dit "Banco, on accepte, mais commencez par retirer
10:04 la réforme des retraites" parce que vous voyez bien qu'en passant en force,
10:08 c'est quand même le minimum du respect, là on a dit sur tous les tons
10:13 et à chaque fois de façon extrêmement pacifique et responsable
10:17 que cette réforme ne passait pas, qu'il fallait la retirer
10:20 et là le président de la République passe en force en promulguant sa réforme
10:23 et en faisant comme si 48 heures après on pouvait venir discuter
10:26 de plein d'autres sujets.
10:27 Mais non, ce n'est pas possible en fait, mais pourquoi ?
10:29 Parce que la CGT n'a pas de problème avec Emmanuel Macron,
10:33 la CFDT non plus, nous c'est le président de la République,
10:35 on parle avec lui, il n'y a pas de souci.
10:37 Le problème c'est les Françaises et les Français qui ont un problème
10:39 avec Emmanuel Macron, c'est les salariés qui ont un problème
10:41 avec Emmanuel Macron, parce que sa réforme ne passe pas.
10:44 – Mais Sophie Binet, ce soir dans cette allocution,
10:45 Emmanuel Macron dit d'une certaine manière,
10:47 et redit que cette réforme elle est passée,
10:49 elle va avancer et elle va s'appliquer.
10:51 Mais quand on écoute Laurent Berger, votre camarade de la CFDT si je puis dire,
10:57 lui-même dit aujourd'hui "on n'arrivera pas à faire faire marche arrière
11:01 au président de la République, on n'y arrivera pas".
11:03 Il le dit Laurent Berger, sur les retraites ?
11:05 – Non, sinon pourquoi est-ce qu'on ferait le 1er mai ?
11:08 L'ensemble des organisations syndicales appellent à un 1er mai historique
11:12 et inédit pour retirer la réforme des retraites
11:15 et pour mettre à l'ordre du jour le progrès social.
11:18 Donc la CFDT appelle au 1er mai, c'est bien parce que la CFDT pense,
11:22 et ça fait 10 ans au moins que la CFDT n'avait pas manifesté le 1er mai,
11:25 que ce 1er mai va servir à faire reculer Emmanuel Macron,
11:29 mieux vaut tard que jamais, il est toujours temps de reculer.
11:32 – Sophie Binet, vous disiez il y a quelques jours
11:34 qu'Emmanuel Macron était en train de devenir le président du chaos.
11:37 Selon vous, on va droit vers le chaos aujourd'hui ?
11:39 – Oui, tout à fait, je confirme.
11:41 Moi je suis extrêmement inquiète par la radicalisation du pouvoir,
11:45 par cette pratique verticale et violente du pouvoir
11:49 et par la stratégie du pourrissement qui est celle d'Emmanuel Macron
11:53 puisqu'il opère ce passage en force en pariant sur,
11:57 d'abord le pourrissement dans la rue,
11:59 et donc il y a aussi des consignes qui sont données aux forces de l'ordre, etc.
12:02 Et puis aussi sur la tripartition de la vie politique en se disant que,
12:06 en 2010 Sarkozy quand il passe en force sur la réforme des retraites,
12:09 il l'a payé dans les urnes derrière en 2012
12:11 puisqu'il y a eu une alternance politique et,
12:15 bon après je ne reviendrai pas sur la fin de la séquence
12:18 qui n'a pas été à la hauteur, loin de là, des attentes populaires,
12:21 mais en attendant il y a eu les urnes en parlaient.
12:23 Là Emmanuel Macron il joue sur la tripartition de la vie politique
12:26 et sur le fait qu'aujourd'hui c'est le Rassemblement National
12:29 qui, d'un point de vue politique, profite de la séquence.
12:33 Ce qui est extrêmement grave parce que nous à la CGT,
12:36 nous considérons qu'il n'y a pas pire pour le pays que le Rassemblement National,
12:40 que c'est extrêmement dangereux pour notre démocratie
12:42 mais aussi très concrètement pour les salariés du pays.
12:45 Pourquoi ? Parce qu'au lieu de rassembler les salariés face aux employeurs,
12:51 au gouvernement, le Rassemblement National organise la mise en opposition,
12:54 la division du salariat du monde du travail avec sa politique de préférence nationale.
12:59 Et donc avec sa stratégie politicienne, Emmanuel Macron joue avec le feu
13:04 et trahit encore une fois le mandat sur lequel il a été élu,
13:07 où je rappelle, il a été élu en 2022 pour faire barrage au Front National,
13:12 pas pour mettre en place sa réforme des retraites.
13:14 Vous savez la réponse qu'il a apportée à plusieurs reprises.
13:17 Avant le premier tour il avait mis la retraite, l'allongement,
13:20 enfin le 65 ans avant le premier tour et les députés Renaissance,
13:25 à l'époque La République En Marche, avaient dans leur programme aussi
13:29 d'augmenter l'âge de départ à la retraite.
13:31 Et d'ailleurs c'est peut-être pour ça qu'ils n'ont pas eu la majorité absolue.
13:34 On est bien d'accord. Et c'est pour ça qu'il n'a pas pu faire voter sa réforme à l'Assemblée Nationale.
13:37 Mais reconnaissez qu'il n'avait pas mis dans son programme,
13:39 il n'a pas été seulement élu pour faire barrage au Rassemblement National.
13:44 Tout à fait. Mais donc si on suit votre raisonnement sur lequel je suis d'accord,
13:47 c'est la raison pour laquelle il n'a pas eu de majorité à l'Assemblée Nationale
13:50 et pour laquelle il n'a pas eu de majorité pour faire voter sa réforme des retraites.
13:53 Et donc il devrait en tirer toutes les conséquences.
13:55 Lui n'a pas été élu pour faire cette réforme des retraites.
13:58 Il a été élu par un certain nombre de personnes, et la CGT y a aussi contribué,
14:03 pour faire barrage au Rassemblement National,
14:05 que nous considérons comme un ennemi dangereux pour la démocratie.
14:08 Il n'a pas été élu pour faire cette réforme des retraites.
14:11 Et c'est une trahison très grave.
14:13 Je vous le dis ce soir aussi avec une forme de colère froide.
14:15 C'est très grave ce qui se passe pour la démocratie de notre pays.
14:18 Et c'est aussi très grave pour l'image de la France à l'international,
14:22 qui est complètement écornée par la séquence,
14:24 où aujourd'hui la France n'a plus aucune crédibilité
14:27 à faire la leçon à tous les régimes autoritaires dans le monde.
14:30 Mais il ne vous aura pas échappé qu'à l'international,
14:32 tous nos voisins, l'âge de départ à la retraite, ce n'est pas 62 ans.
14:35 C'est 65, 66, 67. Il doit rester deux pays en Europe, je crois, où on est à 62.
14:41 Non, non, non. La comparaison des systèmes internationaux,
14:43 il faut comparer tout le système, il ne faut pas seulement comparer un seul paramètre.
14:46 Donc les choses ne peuvent pas se faire comme ça.
14:48 Par exemple, en Espagne, c'est 37,5 annuités de cotisation.
14:50 Nous, en France, on est à 42 et bientôt à 43 ans.
14:53 Donc ce n'est pas comme ça qu'il faut comparer les choses.
14:55 Par contre, à l'international, nous, ce que nous disent nos homologues internationaux,
14:58 c'est pour ça qu'ils seront très nombreux à venir le 1er mai manifester avec nous à Paris.
15:03 Ce qu'ils nous disent, notamment par exemple les Allemands,
15:06 ils nous regardent avec des yeux ronds en nous disant
15:08 « Mais ce qui se passe en France, on ne comprend pas.
15:10 Ça ne pourrait jamais arriver chez nous.
15:12 On n'aurait jamais pendant trois mois autant de grévistes et autant de manifestants
15:16 et un gouvernement qui passerait en force.
15:18 Ça ne serait pas possible. »
15:19 Ils n'ont pas le même système politique aussi.
15:20 Voilà, exactement.
15:21 Ils ont une démocratie sociale qui fonctionne
15:23 et un système politique qui est beaucoup moins autoritaire,
15:25 moins vertical et ils n'ont pas une 5e République.
15:27 Et donc il y a la majorité des pays européens où ça ne pourrait pas exister.
15:32 Donc on est sur une forme d'autoritarisme et de radicalisation du pouvoir
15:36 qui aujourd'hui construit une impasse sociale et démocratique qui est grave.
15:38 Nous sommes dans un régime autoritaire ?
15:40 On est dans un régime qui est de plus en plus autoritaire, oui.
15:43 Et avec cette pratique du pouvoir, Emmanuel Macron, c'est très dangereux
15:48 parce qu'en termes de message à l'international,
15:51 la France c'est le pays des libertés, le pays des droits humains,
15:54 le pays des droits sociaux.
15:55 Et donc quand on s'adresse au monde depuis la tribune de l'ONU,
15:59 depuis la tribune de l'Organisation internationale du travail par exemple,
16:02 la France a aussi un devoir d'exemplarité.
16:04 Et aujourd'hui, qui s'offre des mains ?
16:05 C'est quand même le pays qui dépense le plus pour la protection sociale,
16:08 qui a un montant de prélèvements obligatoires très important
16:12 et qui sont quand même reversés pour beaucoup des Français.
16:14 Mais en attendant, c'est le pays qui passe en force contre la mobilisation
16:17 d'une très large majorité de Français et contre l'avis de tous les syndicats
16:21 et donc qui se frotte la main de la séquence.
16:22 Évidemment, la Russie est très contente de la séquence
16:24 parce que comme ça, ils peuvent renvoyer Macron dans ses buts en disant
16:27 "arrêtez de stigmatiser le recul des libertés en Russie, regardez ce que vous faites en France".
16:31 Sauf que la campagne russe, c'est peut-être pas notre affaire aujourd'hui.
16:33 Non mais d'accord, mais en termes d'exemplarité, c'est important
16:37 et c'est pour ça que tous les syndicats du monde,
16:39 enfin beaucoup vont venir le 1er mai à Paris pour nous soutenir,
16:42 pour dire que la France c'est pas rien, ce qui se passe en France c'est pas rien
16:46 et quand en France, on passe en force contre les syndicats une réforme de régression sociale,
16:50 derrière ça tire les droits de tous les travailleuses et les travailleurs
16:53 dans le reste du monde, donc c'est grave.
16:55 Pour en revenir à l'allocution d'Emmanuel Macron,
16:57 il a aussi confirmé Elisabeth Borne que vous avez rencontré jusqu'au 14 juillet.
17:02 Je crois que vous lui aviez dit justement qu'elle ne pouvait pas qu'être infusible
17:05 vous l'avez vu, qu'est-ce qu'elle vous avait répondu déjà ?
17:07 Est-ce que vous pensez désormais qu'elle peut précisément ne pas être qu'infusible
17:13 alors qu'elle est affaiblie mais néanmoins maintenue par le président jusqu'au 14 juillet ?
17:17 Est-ce que ça sert encore à quelque chose pour vous de discuter avec elle à l'avenir par exemple ?
17:21 Oui c'est vrai que quand on l'avait rencontrée, j'avais essayé de faire appel aussi à sa responsabilité
17:26 puisque moi j'étais auparavant secrétaire générale de la sécurité des cadres
17:29 et donc la responsabilité c'est quelque chose qui est important pour nous.
17:32 C'est pas infusible, c'est pas une exécutante, c'est une première ministre devant le pays
17:36 et donc quand on est responsable, on doit aussi être capable de dire, au vu de l'état du pays,
17:40 la solution en responsabilité à prendre, ça serait de ne pas aller au bout sur cette réforme des retraites
17:45 et on a bien compris dans la séquence que la réforme des retraites,
17:48 elle était là par la volonté d'un seul homme, Emmanuel Macron,
17:51 alors que le reste de son gouvernement n'a pas d'appétence particulière pour la réforme,
17:56 il n'y a aucune urgence à faire cette réforme, oui à part Bercy, je suis d'accord avec vous,
18:04 mais sinon il n'y a pas d'urgence à faire cette réforme des retraites
18:08 et qu'il y a toute une possibilité, une palette de scénarios différents pour trouver les 12 milliards d'euros.
18:13 Si Emmanuel Macron nous avait dit "je ne promulgue pas, mais par contre je vous demande
18:17 de nous faire des propositions de financement précises, concrètes, réalistes",
18:21 on serait venu avec grand plaisir et là on aurait pu avoir un dialogue de grande qualité
18:25 pour trouver des solutions ensemble et on était prêt à faire des compromis sur des solutions de financement.
18:29 Outre le retrait, qu'aurait pu annoncer ce soir Emmanuel Macron pour apaiser justement le pays ?
18:37 Outre le retrait, par exemple sur les salaires, là il n'a pas prononcé le mot "salaires",
18:44 il a prononcé le mot "revenus", pour nous ce n'est pas exactement pareil.
18:48 Il y a un problème de salaire en France puisque les prix alimentaires ont augmenté de quasiment 20% en un an
18:54 et les salaires stagnent et donc pour la première fois on a des salaires qui baissent en euros constants,
18:59 qui sont décrochés du coût de la vie avec des millions de travailleuses et de travailleurs
19:03 qui ne peuvent même plus remplir leur frigo.
19:05 Donc s'il avait dit quelque chose de fort sur les salaires, en disant par exemple
19:08 "la proposition de la CGT elle est toute simple, c'est de dire il faut indexer l'augmentation des salaires
19:12 sur l'augmentation des prix", ça existe en Belgique.
19:14 Ça avait déjà été le cas.
19:16 Voilà, ce qui avait été le cas jusqu'en 1983 en France, ça existe en Belgique, ça marche très bien.
19:20 Sauf qu'on dit que c'est une spirale inflationniste quand on indexe...
19:23 C'est ça, sauf que là aujourd'hui en France on a l'inflation sans avoir l'augmentation des salaires.
19:27 On a une inflation plus modeste que les autres pays du monde.
19:30 Oui, 20% sur les prix alimentaires c'est pas modeste.
19:33 Et par contre en Belgique il y a l'indexation des salaires sur les prix
19:37 et il n'y a pas d'explosion inflationniste, les Belges vont bien.
19:40 L'inflation en Belgique est très très importante.
19:43 En attendant les Belges n'ont pas cette perte de pouvoir d'achat qu'aujourd'hui ont les Français.
19:48 Donc vous auriez voulu une indexation des salaires sur les prix.
19:51 Ça par exemple ça aurait été quelque chose.
19:53 S'il nous avait dit concrètement on va parler de ça, là l'oreille aurait peut-être commencé à s'ouvrir.
19:58 S'il nous avait dit concrètement je veux parler de comment est-ce qu'on sanctionne les entreprises
20:02 qui ne font pas l'égalité professionnelle, peut-être que...
20:05 Parce que si on faisait ça, ça permettrait de financer le déficit sur les réformes des retraites,
20:10 l'égalité professionnelle, ça permettrait de solutionner les 12 milliards de déficit.
20:14 Je le redis pour montrer que c'était quand même pas compliqué de trouver ces 12 milliards.
20:18 Il y a toute une série de choses qu'il aurait pu dire,
20:21 mais de façon concrète, pas de miroir aux alouettes comme il a fait là ce soir.
20:25 J'ai envie de vous dire c'est presque poétique tellement c'était creux.
20:30 Il y avait quand même quelque chose un peu de cet ordre là.
20:33 On avait l'impression d'un scénario, d'un grand théâtre qui nous rejouait,
20:38 mais qui était en déconnexion totale par rapport à ce qui se passe dans le pays depuis trois mois.
20:42 On pourrait parler de grand enfumage.
20:44 C'est en décalage complet par rapport aux aspirations des salariés, des jeunes,
20:49 et puis encore plus des personnes qui sont mobilisées et qui, je le rappelle pour certains,
20:52 ont fait 40 jours de grève, ont perdu plus d'un mois de salaire.
20:54 Sophie Binet, on a pendant que vous parlez ces images en direct de Rennes,
20:57 on avait des manifestations, des tensions tout à l'heure du côté de Paris,
21:00 des manifestations aussi à Nantes, à Marseille.
21:03 Vous parliez de cette colère. Le président parle de cette colère ce soir aussi.
21:07 S'il n'y a pas de retrait, cette colère ira où ?
21:11 S'il n'y a pas de retrait, nous on continuera à mobiliser les salariés,
21:19 à en discuter en intersyndical pour obtenir que cette réforme ne s'applique pas d'une façon ou d'une autre.
21:26 C'est-à-dire d'une façon ou d'une autre ?
21:28 Il y a plein de façons de ne pas appliquer une réforme.
21:30 Sur le CPE, on se souvient de Jacques Chirac qui promulgue la réforme
21:34 et puis ensuite fait voter une nouvelle loi qui abroge la disposition sur le CPE.
21:38 Ce soir, vous y croyez encore ? C'est encore votre objectif ?
21:40 Bien sûr, tout à fait. Et d'ailleurs, j'en appelle aux députés à voter.
21:44 Les députés peuvent très bien voter une loi d'abrogation de la réforme des retraites.
21:47 C'est techniquement tout à fait faisable et ça offrirait une solution de sortir de crise.
21:52 Vous imaginez les députés de la majorité allant à l'encontre d'Emmanuel Macron ce soir
21:55 pour voter une loi contre cette loi ?
21:57 En fait, ce que j'imagine très bien, c'est que la majorité est minoritaire.
22:01 C'est ce qu'on a vu dans l'hémicycle et c'est pour ça qu'ils ont été obligés de recourir au 49-3.
22:06 Mais il n'y a pas de majorité alternative non plus ?
22:08 Pas de majorité alternative.
22:09 Quand vous avez un 49-3, vous avez la NUPES qui vote avec le Rassemblement National,
22:14 ce n'est pas une majorité alternative ?
22:15 Pas de majorité alternative pour faire un gouvernement alternatif.
22:18 Par contre, il y a une majorité qui refuse la réforme des retraites
22:21 et c'est pour ça qu'Emmanuel Macron a sorti le 49-3.
22:24 Sinon, il ne l'aurait pas fait s'il était majoritaire dans l'hémicycle.
22:28 Donc ça, nous, on l'a bien regardé et donc on pense qu'il y a aussi des solutions qui peuvent se trouver de ce côté-là.
22:33 Vous ne dites pas comme Laurent Berger qui dit "on ne pourra pas manifester pendant encore six mois".
22:36 Vous dites "on peut tenir encore six mois".
22:38 Vous appelez d'ailleurs à manifester les 20 et 28 avril prochain alors que l'intersyndicale ne le fait pas.
22:45 Non, non, ce n'est pas ça.
22:46 En fait, les 20 et 28 avril prochain, il y a des actions qui sont décidées par les territoires et les professions.
22:53 Par exemple, le 20 avril prochain, c'est les cheminots qui font une journée sans cheminot.
22:57 Le 28 avril prochain, c'est la journée mondiale contre les morts au travail et les accidents du travail.
23:03 J'en profite pour rappeler que la France détient le triste record européen de la mortalité au travail et des accidents du travail.
23:09 C'est pour ça que cette réforme des retraites est d'autant plus scandaleuse.
23:12 Et donc, à l'occasion du 28 avril, il y a une journée qui va être faite par la CGT de la construction
23:18 qui est très concernée par les morts au travail.
23:20 Donc, c'est des actions sectorielles pour rythmer la préparation du 1er mai.
23:24 Mais au-delà, après le 1er mai, comme le disait Aurélie, vous voulez d'autres journées de manifestation pendant encore quoi ?
23:28 Des semaines ? Des mois ? Est-ce qu'au mois de mai, par exemple, il faut continuer à manifester ?
23:31 Non, non.
23:32 Une mobilisation sociale, ça se construit au jour le jour.
23:35 C'est pour ça que je vous disais tout à l'heure du syndicalisme fiction "je sais pas faire".
23:39 On voit que les agendas de rentrée...
23:40 Vous pourriez dire "stop au 1er mai, on arrête, après on passe à autre chose".
23:43 En fait, les décisions, on les prend d'abord...
23:44 Ça, c'est demain.
23:45 Non, c'est dans 15 jours.
23:46 C'est loin, en fait.
23:47 En termes de mobilisation sociale, c'est très loin.
23:49 Les décisions, on les prend en intersyndical et on les prend aussi avec les salariés, avec les syndiqués,
23:55 puisque la mobilisation, moi, je n'ai pas de bouton pour appeler à la manifestation ou à la grève.
23:59 C'est les salariés qui décident de se mettre en grève ou pas.
24:02 Donc, c'est pas nous qui allons décider.
24:03 Est-ce que ce sera votre souhait ?
24:05 C'est fini.
24:06 C'est fini.
24:07 Voilà.
24:08 Vous pouvez répondre à cette dernière question.
24:09 Le souhait, c'est de se mobiliser jusqu'au retrait pour gagner le retrait,
24:12 puisque nous voulons gagner dans cette mobilisation
24:14 et nous sommes confiants sur le fait que nous allons sortir gagnants d'une façon ou d'une autre.
24:18 On doit vous libérer, Sophie Bide.
24:19 Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce soir en direct pour réagir après cette allocution du président de la République.

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