Avec Patrick Buisson, essayiste et ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, auteur de "Décadanse" (Albin Michel)
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NewsTranscription
00:00 Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Patrick Roger.
00:05 Et l'invité ce matin, Patrick Buisson, essayiste et enceint conseiller de Nicolas Sarkozy,
00:10 auteur de « Décadence » aux éditions Albin Michel.
00:13 Bonjour Patrick Buisson.
00:14 Bonjour, merci de me recevoir.
00:15 Oui, où va notre société, notre civilisation, devant votre livre « Décadence »,
00:21 titre avec un jeu de mots tiré de Gainsbourg, Gainsbourg, bien sûr.
00:25 Vous revenez sur ces 60 dernières années et tous les bouleversements qui ont accéléré les choses.
00:30 Vous vous en prenez beaucoup à une société de consommation qui va jusqu'à l'exploitation du corps, je cite, on va y revenir.
00:36 Vous me direz si c'est de la nostalgie, de l'amertume, du pessimisme.
00:39 Au passage d'ailleurs, je le dis aussi pour certains auditeurs, vous parlez des années 50
00:43 et de l'ancêtre d'ailleurs de Sud Radio, Radio Andorre,
00:47 parce que vous parlez évidemment de cet avènement de la radio avant de voir tous les autres.
00:51 Et puis nous allons revenir aussi bien sûr sur l'actualité, l'impopularité d'Emmanuel Macron,
00:56 les clivages dans notre pays, la démographie.
00:58 Commençons donc par la contestation d'Emmanuel Macron à travers la réforme des retraites
01:04 qui se concrétise par les sifflets, les concerts de casserole,
01:08 les sondages que vous connaissez bien, qui mettent le chef de l'État au plus bas,
01:12 comme on l'a vu dans notre balise IFOP hier.
01:14 Comment vous analysez cette période pour le chef de l'État ?
01:17 - On pouvait croire, ou espérer même, que délivrer de la perspective
01:23 d'être jugé par le suffrage universel, il ne peut pas se représenter,
01:27 Emmanuel Macron qui a une approche métapolitique,
01:32 qui veut surplomber les choses, qui se présente comme le disciple de Ricœur,
01:37 aurait pris politiquement le risque d'affronter l'opinion,
01:43 mais avec une véritable vision, c'est-à-dire un projet collectif.
01:47 Un changement de temporalité.
01:49 Sortir du temps court de l'individu, où le politique est préoccupé de rentabilité électorale,
01:56 il va se représenter, il a besoin d'avoir une majorité,
01:59 pour aller vers le temps long de la communauté, de la nation,
02:02 c'est-à-dire faire de grandes réformes, faire un investissement sur le long terme,
02:07 dont les résultats se voient à 20 ans.
02:10 Le investissement dans le capital humain, par exemple, la politique familiale,
02:13 elle donne des résultats 20 ans plus tard.
02:15 Pour celui qui occupe l'Elysée, évidemment, c'est une échéance qui a priori ne l'intéresse pas,
02:19 il ne sera plus là.
02:21 Ce risque politique qui aurait montré qu'on avait affaire à un visionnaire,
02:25 et à un homme qui sait se détacher des contagions électorales par la force des choses,
02:29 il ne l'a pas pris.
02:30 La réforme des retraites en est l'exemple absolu.
02:34 Aujourd'hui, nous payons le krach démographique des années 70-75.
02:40 Le système de répartition, c'est très simple, ce sont les actifs et les cotisants.
02:44 La démographie est la seule science humaine exacte qui nous permet de prévoir,
02:50 et c'est absolument implacable.
02:52 Donc, évidemment qu'il ne sera rien de manifester, gesticuler, d'aller dans la rue,
02:57 les années de retraite perdues, ce sont les enfants que nous n'avons pas eus.
03:02 Or, Emmanuel Macron aurait pu faire une grande réforme
03:05 qui permettait d'enjamber les 20 prochaines années en relançant une politique familiale,
03:09 en revenant par exemple sur le plafonnement des allocations familiales ou du quotient familial
03:14 qu'a fait François Hollande.
03:16 D'ailleurs, on dit de François Hollande que la seule courbe qu'il ait réussi à inverser
03:20 durant son mandat, c'est celle de la natalité.
03:23 - Ça avait déjà commencé avant.
03:25 - Oui, ça a commencé depuis 30 ou 40 ans, mais ça s'est aggravé.
03:29 Le problème, donc, pour Emmanuel Macron,
03:32 eût été effectivement de saisir cette question de la démographie.
03:35 Et ce qu'on disait de la démographie, c'est le destin.
03:38 Bah oui, c'est même le destin de notre régime par répartition,
03:41 pour avoir des résultats à 20 ans.
03:43 Là, en faisant cette réformette,
03:45 il condamne ses successeurs à faire une autre réformette.
03:48 Vous connaissez le calendrier, la dernière c'était Sarkozy en 2010,
03:52 avant il y avait eu Fillon, donc tous les 5 ou 10 ans,
03:55 on n'a pas le courage de traiter le problème de fond.
03:58 Alors qu'on passe à un autre type de régime,
04:00 qui est la capitalisation.
04:01 Mais tant qu'on est sur la répartition,
04:03 la question de la politique démographique est essentielle.
04:06 - Oui, mais sur la politique démographique,
04:07 c'est aussi l'évolution de notre société qui veut ça.
04:10 Avec beaucoup de familles qui, aujourd'hui,
04:14 n'ont plus envie d'avoir autant d'enfants,
04:16 avec des familles qui sont d'ailleurs divisées,
04:19 bien sûr, il y a des divorces,
04:21 et puis des femmes qui veulent peut-être aussi
04:23 un petit peu moins d'enfants pour pouvoir vivre leur vie et travailler.
04:26 C'est ça l'un des grands changements de ces 20 dernières années, non ?
04:31 - Vous avez raison.
04:32 Incontestablement, il y a un changement des mentalités,
04:34 jusqu'aux années 60-70,
04:37 l'intérêt collectif, l'intérêt général, le bien commun,
04:39 primait celui des individus.
04:42 Et il y a eu, on va dire, une privatisation du corps.
04:46 Par exemple, pour les hommes, avec la suppression des services militaires,
04:50 la nation n'a plus le droit de s'emparer,
04:52 c'est-à-dire les hommes, de les envoyer dans des guerres ou dans des conflits.
04:55 Pour les femmes, ça a été la contraception,
04:58 et la loi veille sur l'interruption volontaire de grossesse.
05:02 Mais il n'empêche que, bien sûr,
05:05 le désir d'enfant est moins fort qu'il ne l'était il y a 30 ou 40 ans.
05:10 - Parce qu'il n'y avait pas la contraception, notamment ?
05:13 - Si, la première loi de Wirth, c'est à la fin de 1967.
05:17 - Oui, mais non, j'y ai auparavant, quoi.
05:19 - Ce qu'il faut simplement, c'est de donner les moyens,
05:21 faire l'effort financier nécessaire,
05:24 aux femmes qui veulent des enfants, de les avoir dans de bonnes conditions,
05:27 y compris d'aménager les conditions de vie pour qu'elles puissent, par exemple,
05:30 continuer à travailler.
05:32 Qu'il n'y a pas que la maternité ne soit pas un projet alternatif,
05:35 si vous voulez, au travail. Ça, on ne le fait plus.
05:37 La politique familiale...
05:38 - Pourtant, il y a eu une politique familiale avec, par exemple,
05:40 la possibilité de prendre davantage de congés parentaux, quoi.
05:43 Y compris, même, pour les pères qui peuvent lâcher
05:45 pour que les femmes continuent si elles ont aussi un bon job,
05:48 et si elles préfèrent le garder.
05:49 - Quand on voit ce qu'était une politique familiale,
05:51 au lendemain de la Libération,
05:53 celle qui a impulsé le Conseil national de la Résistance,
05:56 avec De Gaulle, et tout le monde était d'accord là-dessus,
05:59 l'effort financier que nous faisons est totalement insuffisant.
06:03 En 1945, l'allocation de salaire unique
06:06 était pour une femme de ménage ouvrier
06:09 qui restait à élever ses enfants de l'équivalent d'un SMIC.
06:12 Vous vous rendez compte ?
06:13 Nous n'avons pas fait cet effort financier, nous nous y avons renoncé.
06:16 Donc, il ne s'agit pas d'imposer la maternité comme un devoir social,
06:20 comme c'était le cas avant, l'équivalent du service militaire pour les hommes,
06:23 il s'agit de donner aux femmes qui ont envie d'avoir des enfants
06:26 les moyens et les conditions de les avoir,
06:28 sans sacrifier une vie professionnelle.
06:30 Et ça, ce choix-là, nous lui avons tourné le dos.
06:33 - Oui, alors Patrick Buisson, vous dites que la démographie
06:35 met la France en danger, en quelque sorte, c'est ça,
06:38 et notamment sur le système des retraites,
06:40 est-ce que c'est l'immigration qui peut sauver la France alors ?
06:42 - Alors, écoutez, j'ai été très frappé en préparant "Décadence",
06:45 en travaillant sur ce livre,
06:47 j'ai dépouillé, j'ai lu tout le débat,
06:51 en novembre-décembre 1974,
06:54 au moment de l'adoption de la loi Simone Veil
06:57 sur la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse.
07:02 On est à six mois après l'élection de Giscard,
07:06 Giscard a battu le candidat gaulliste Chabond-Helmas,
07:09 et les députés gaullistes, il n'a pas dit sous la Chambre,
07:11 qui constitue sa majorité, sont très réticents à l'égard de Giscard,
07:16 et ils sont d'emblée hostiles au projet de Simone Veil.
07:20 Ils sont emmenés par Michel Debré, l'ancien Premier ministre du général de Gaulle,
07:25 et j'ai été frappé du fil rouge de l'intervention de tous les députés gaullistes dans ce débat,
07:31 Michel Debré le premier.
07:34 Quand Simone Veil présente son projet de loi,
07:36 pour essayer d'amadouer l'électorat conservateur de droite,
07:39 les gaullistes si vous voulez,
07:41 elle dit naturellement, ce projet, mon projet,
07:44 va être accompagné d'un autre projet,
07:46 relançant une grande politique familiale,
07:49 pour venir à l'aide des femmes en difficulté, en détresse, etc.
07:52 Cette partie du projet de Simone Veil, n'aura jamais lieu.
07:57 Il n'y aura aucune loi de soutien aux familles,
08:01 qui vienne compenser la loi sur l'IVG.
08:04 Et que disent les gaullistes à la tribune ?
08:06 Que dit Debré ?
08:07 Le concept de grand emplacement n'existe pas à l'époque,
08:10 c'est Camus qui l'inventera 50 ans plus tard.
08:14 Debré dit la chose sûre de Madame, vous faites une erreur historique.
08:18 Mais Anthony qui souhaitait, de vrai, une politique familiale,
08:20 à côté de la loi sur l'IVG.
08:22 Vous faites le choix, ou nous faisons le choix,
08:25 de vieillir et de diminuer,
08:27 il fait allusion au taux de natalité, au taux de fécondité,
08:30 alors que les peuples à nos portes,
08:32 il parle de la Méditerranée et du Maghreb,
08:34 ont fait le choix de rajeunir et de croître.
08:37 - On fait le choix ou sans le choix,
08:39 puisque bon, il y avait moins de contraception, etc.
08:44 aussi dans ces pays, quoi.
08:46 Et puis il y avait un dynamisme aussi.
08:49 - La religion était très prégnante.
08:51 - Alors la religion est très prégnante.
08:53 - Donc le problème se pose dès ce moment-là,
08:55 il y a une prise de conscience que cette loi,
08:59 de même que les lois sur la contraception,
09:01 notamment la deuxième loi Veil,
09:03 vont avoir un impact sur la fécondité,
09:05 et sur la démographie,
09:07 et que par conséquent, il faudrait rééquilibrer.
09:10 Ce rééquilibrage n'a jamais été fait.
09:12 Et nous payons aujourd'hui les conséquences
09:14 de cette absence de politique familiale.
09:16 - Donc ce que vous dites, il faudrait relancer une politique familiale, quoi.
09:19 - Il faut relancer une politique familiale,
09:21 si on veut rester dans le régime de répartition.
09:24 Pour financer notre modèle social,
09:27 les cotisants, ce sont les actifs.
09:29 Plus il y a d'actifs, moins le problème financier se pose.
09:32 - On va y revenir après 8h30 aussi avec vous,
09:34 en détail, sur toutes ces questions sociétales.
09:37 Juste pour rester aussi, à un moment donné, Patrick Buisson,
09:39 sur la politique.
09:41 Vous dites que le pays est à droite, majoritairement.
09:44 Est-ce qu'il est piloté par quelqu'un de droite,
09:47 Emmanuel Macron, ou pas aujourd'hui ?
09:49 Et est-ce qu'il doit y avoir...
09:51 On a parlé de Nicolas Sarkozy,
09:53 vous avez entendu le buzz,
09:55 qui pourrait revenir Premier ministre.
09:57 Est-ce que tout ça, c'est possible ?
09:59 C'est du domaine du réalisable ?
10:01 - Je ne sais pas, parce que je ne suis pas dans la tête
10:03 du président de la République, ce que je constate,
10:05 qui est quand même une contradiction majeure.
10:08 Cet homme est intelligent, cet homme est cultivé,
10:10 enfin une culture qui est peut-être pas la culture...
10:13 l'ancienne culture humaniste,
10:15 qui était celle de mon enfance et de mon adolescence,
10:17 mais c'est un homme incroyablement très intelligent.
10:20 Il est élu, il connaît les réalités,
10:24 il a des conseillers qui lui montrent les chiffres.
10:26 Par un électorat qui s'est considérablement droitisé,
10:28 par rapport à 2017.
10:30 Il est allé chercher beaucoup de voix de Fillon,
10:32 mais même des voix dans l'électorat de Marine Le Pen.
10:35 Le Québec a voté Marine Le Pen en 2017,
10:37 se sont portées pour au moins 15% sur Macron.
10:41 - Des conservateurs un petit peu.
10:43 - Voilà, avec une demande où les itèmes
10:47 de la sécurité, de la souveraineté,
10:50 de la demande de leadership, d'autorité exécutive,
10:53 sont aussi forts, si non plus forts,
10:55 que dans l'électorat du Rassemblement National.
10:57 Donc il ne peut pas ignorer que cet électorat s'est droitisé.
11:00 Trois électeurs sont quatre de Macron,
11:02 sont d'anciens électeurs de droite.
11:04 A partir de là, quelles conclusions en tire-t-il ?
11:07 Il y a l'élection législative,
11:09 où son parti n'a pas la majorité.
11:11 - Il a une majorité, mais c'est relatif.
11:14 - La majorité relative.
11:16 Qu'est-ce qu'il va faire ?
11:18 Il va sortir du gouvernement
11:20 ceux qui incarnaient qu'ils étaient des marqueurs de droite,
11:22 il va remplacer Blanquer par Papendaille,
11:25 et il va remplacer Jean Castex,
11:27 que j'ai connu dans une autre vie,
11:29 en 50 ans, Nicolas Sarkozy,
11:31 homme de terroir,
11:33 par une techno qui a fait tous les cabinets
11:35 des gouvernements socialistes.
11:37 Je trouve ça curieux.
11:39 - Il voulait aller vers l'ALR Vautrin,
11:41 et puis il y a eu des problèmes au passage.
11:43 - Oui, mais en tout cas, le choix qu'il fait à ce moment-là,
11:45 c'est que ses seules ressources politiques sont à droite.
11:47 - Il a quand même des piliers,
11:49 Le Maire d'Armanin...
11:51 - Le seul marqueur de droite véritablement aujourd'hui,
11:53 c'est d'Armanin.
11:55 Il n'y en a pas d'autres.
11:57 - Bruno Le Maire, oui, sur le plan de la politique économique,
11:59 d'ailleurs, on voit quand même que Bruno Le Maire
12:01 a pris conscience de l'ère du temps,
12:03 compte tenu des propos qu'il tient sur la fraude sociale,
12:05 et qu'il n'aurait pas tenu
12:07 il y a 6 mois.
12:09 Mais il a une absence de vision stratégique.
12:11 Donc il sera peut-être contraint
12:13 aujourd'hui, une alliance avec la droite,
12:15 mais il ne l'a pas voulu, il ne l'a pas organisé,
12:17 et dans un rapport de force
12:19 qui ne lui est plus aussi favorable qu'il ne l'aurait pu être.
12:21 - Et hypothèse,
12:23 mais imaginons quand même cette hypothèse.
12:25 Nicolas Sarkozy, Premier ministre d'Emmanuel Macron,
12:27 ça vous l'imaginez ? Vous connaissez bien
12:29 Nicolas Sarkozy.
12:31 - Oui, quand on était président de la République,
12:33 c'est difficile de redevenir
12:35 Premier ministre, mais on disait aussi
12:37 à l'époque où Nicolas Sarkozy était président
12:39 qu'il était aussi en même temps
12:41 Premier ministre, ce qui créait des problèmes avec
12:43 François Fillon. Nicolas Sarkozy
12:45 est un homme d'action qui aime
12:47 être dans la décision
12:49 et dans l'exécution.
12:51 Donc psychologiquement, ça peut parfaitement
12:53 s'envisager, maintenant politiquement,
12:55 ce serait quand même difficile à assumer.
12:57 - Oui, merci Patrick Buisson, et puis on parlera
12:59 de l'hypothèse aussi Marine Le Pen,
13:01 mais ça c'est à plus long terme dans un instant
13:03 avec vous, et on reviendra sur votre livre
13:05 justement, "Des cadences dans lesquelles
13:07 vous affirmez que la révolution sexuelle
13:09 des années 70
13:11 a provoqué grosso modo
13:13 l'effet inverse d'une libération", c'est ce que vous avez
13:15 dit il y a
13:17 quelques minutes. Nous y revenons avec Eric Nolot,
13:19 Guillaume Bégaud aussi, qui seront là pour vous poser
13:21 des questions, et les auditeurs aussi
13:23 bien évidemment. Il est 8h31, dans un instant,
13:25 une courte revue de presse avec Benjamin Gleize.
13:27 - Matin Sud Radio,
13:29 7h-9h, Patrick Roger.
13:31 - Il est 8h46,
13:33 Patrick Buisson est invité
13:35 avec nous, avec "Des cadences", aux éditions
13:37 Albin Michel. Alors il y a ce que l'on a
13:39 entendu tout à l'heure sur vos prises de position,
13:41 sur la crise de la démographie, mais ce livre
13:43 c'est aussi une plongée quand même dans les
13:45 années 50, 60,
13:47 70, avec tout ce qui a
13:49 changé, la société de consommation,
13:51 vous revenez sur René Guénon, etc., on va pas
13:53 tout détailler, mais il y a beaucoup de choses
13:55 assez formidables. Avant d'y revenir, dans un instant,
13:57 avec Guillaume Bégaud et Eric Nolot,
13:59 et puis les auditeurs qui nous appellent,
14:01 je voudrais quand même un mot de commentaire aussi sur
14:03 Emmanuel Macron. Hier,
14:05 il était donc du côté de
14:07 Gange, dans Leraud,
14:09 on l'a entendu, il y a eu une interview
14:11 exclusive accordée à Jean-Jacques Bourdin, qui était
14:13 là-bas, hier, parce que toute la semaine
14:15 nous étions sur le terrain, dans les
14:17 auditoires, et Jean-Jacques Bourdin lui a posé une question
14:19 très crache, hein, "les français ne
14:21 vous aiment pas". Écoutez ce qu'a répondu
14:23 Emmanuel Macron, et ensuite on commente.
14:25 - Nous sommes un pays unique,
14:27 que j'aime au-delà de tout,
14:29 parce que je lui donne,
14:31 voilà, je dirais ma vie,
14:33 dans les temps heureux comme dans les temps plus
14:35 difficiles, mais c'est nous.
14:37 Et donc,
14:39 il faut tenir dans ces moments-là. Et je ne
14:41 le mettrai pas sur le plan de l'amour,
14:43 c'est pas, vous savez, quand on fait de la...
14:45 quand on prend des responsabilités
14:47 politiques, je pense qu'on cherche à être
14:49 respecté, et
14:51 on cherche à ce que les gens
14:53 aient confiance en vous quand les temps sont difficiles.
14:55 - Est-ce qu'il est authentique
14:57 et sincère quand il dit ça, Patrick Huisson ?
14:59 - Je suis pas là pour sonder les...
15:01 les cœurs, et j'ai pas
15:03 de jugement à porter là-dessus. Simplement,
15:05 c'est tout le problème
15:07 de notre modèle démocratique
15:09 qui ne produit plus de légitimité.
15:11 Il a été élu par 38,5%
15:13 des inscrits. Moi, j'avais essayé de faire
15:15 comprendre à Nicolas Sarkozy
15:17 que le référendum était une respiration
15:19 démocratique, un moyen de
15:21 se relégitimer et une prise de risque.
15:23 De Gaulle l'a fait, il en a fait
15:25 beaucoup, le dernier lui a été fatal.
15:27 Plus aucun politique
15:29 ne veut prendre ce risque.
15:31 Et sur les sujets de société
15:33 comme les autres,
15:35 aucun n'ira au-devant
15:37 de l'expression
15:39 de la souveraineté populaire. - Ah bah peut-être, vous avez
15:41 vu, il y a cette étude, pour l'instant le référendum
15:43 d'initiative partagée... - Sur quoi Macron...
15:45 Moi, j'ai essayé de dire à Nicolas Sarkozy
15:47 que le seul moyen de se relégitimer, c'est d'aller
15:49 sur le terrain, effectivement,
15:51 de la régulation de l'immigration
15:53 avec un référendum présentant des questions simples
15:55 sur le groupement familial,
15:57 sur le droit d'asile.
15:59 Il n'a jamais voulu prendre ce risque
16:01 et il n'a donc pas eu au sein de
16:03 son mandat la capacité
16:05 de se relégitimer. Macron,
16:07 ça va être long pendant 4 ans, sans
16:09 prendre d'initiatives politiques qui permettent
16:11 de dire "je représente le peuple français",
16:13 on voit bien les conditions dans lesquelles
16:15 il a été élu. Vous savez, c'est quand même
16:17 tout à fait paradoxal, les premières enquêtes
16:19 d'opinion qui ont eu lieu après le deuxième tour
16:21 montraient que les Français avaient voté Macron
16:23 et 47 millions de voix avec Marine Le Pen,
16:25 mais que les Français n'étaient pas
16:27 satisfaits du fait d'avoir élu
16:29 Emmanuel Macron
16:31 et on l'a vu
16:33 aux législatives qui ont suivi. - Allez, question avec
16:35 Éric Nolot, Guillaume Biogo. Éric Nolot.
16:37 - Monsieur Buisson, bonjour. - Bonjour.
16:39 - Nous sommes le 21 avril 2023,
16:41 ça fait donc 21 ans, jour pour jour,
16:43 qu'un représentant du Front National
16:45 a accédé au second tour d'une présidentielle
16:47 et moi je suis très surpris de l'aplomb avec lequel
16:49 vous affirmez que jamais Marine Le Pen ne pourra
16:51 être élue, quand les signes
16:53 d'une hypothèse contraire
16:55 ne cessent de s'accumuler.
16:57 D'abord, j'observe qu'en 20 ans, le Front National,
16:59 puis Rassemblement National, est passé de 18%
17:01 à 41%, et vous avez vu que
17:03 dans une législative partielle, en Ariège,
17:05 il y a une forme de front républicain
17:07 tout à fait inédit qui se fort, non plus
17:09 contre le Rassemblement National, mais contre
17:11 la France Insoumise. Plus, tout ce qui se passe
17:13 à l'Assemblée a l'air de profiter, le charivari
17:15 de l'Assemblée a l'air de profiter
17:17 au Rassemblement National. Donc je trouve que votre aplomb
17:19 est contredit par des faits
17:21 d'actualité. - Monsieur Éric Nolot,
17:23 je pense que, effectivement,
17:25 l'ennemi principal a changé.
17:27 Emmanuel Macron avait pris pour cible
17:29 Marine Le Pen à la présidentielle
17:31 et il a désigné
17:33 les Insoumis comme son adversaire,
17:35 ce qui, évidemment,
17:37 a pu débloquer un certain type de comportement
17:39 électoral et explique en partie
17:41 l'élection des 89 députés
17:43 du Rassemblement National.
17:45 Non, ce que vous dites,
17:47 le Rassemblement National n'est pas passé
17:49 de 18% à 41%, 18% c'était le score
17:51 du premier tour, 17% même,
17:53 de Jean-Marie Le Pen en 2002.
17:55 20 ans plus tard,
17:57 20 ans plus tard, au premier tour, on est à
17:59 22,7%. La progression est de 0,3%
18:01 sur 20 ans. - Mais le second tour,
18:03 vous l'évacuez ? - Comment ? - Vous évacuez
18:05 les résultats du second tour ? - Alors, écoutez,
18:07 j'évacue rien, je dis simplement que ce score
18:09 de 41%, c'était le score
18:11 dont Marine Le Pen était crédité
18:13 en 2017 avant son débat calamiteux
18:15 avec Emmanuel Macron.
18:17 Tous les sondages donnaient ce chiffre-là.
18:19 Pendant deux ans, tous les instituts
18:21 nous ont situés, positionnés
18:23 Marine Le Pen entre 45 et 49.
18:25 Et le jour du vote, elle fait 41.
18:27 C'est-à-dire, le jour où elle a le monopole
18:29 de l'opposition à Macron,
18:31 cette opposition est largement
18:33 minoritaire. Deux mois après,
18:35 offre plurielle, si j'ose dire,
18:37 elle n'appuie le monopole de l'opposition.
18:39 On voit que l'anti-macronisme était majoritaire
18:41 dans le pays. C'est une réalité.
18:43 Donc, il y a bien un problème Marine Le Pen
18:45 qui est effectivement, je l'ai expliqué
18:47 sociologiquement, ce qui n'est pas très original,
18:49 ce qu'on appelle le front des retraités.
18:51 17 millions de retraités,
18:53 33% du camp électoral, mais
18:55 45% des votants. Le phénomène
18:57 est apparente. On est pro-raciste très jeune,
18:59 on devient conservateur, on veut protéger
19:01 son balaine. Le système qui finance
19:03 votre pension, on a peur
19:05 de l'explosion des banlieues, du chaos économique
19:07 et Marine Le Pen a ajouté,
19:09 je veux dire, une couche qui est reprendre
19:11 cette théorie ou cette stratégie bloc populaire
19:13 contre bloc élitaire, qui ne correspond pas
19:15 d'ailleurs à la réalité de la sociologie
19:17 du vote Le Pen, qui n'est plus
19:19 aussi populaire qu'il l'a été.
19:21 Et qui donc ajoute cette dimension
19:23 classe contre classe, de lutte des classes
19:25 que même Mélenchon a abandonnée
19:27 pour aller sur les luttes intersectionnelles,
19:29 les minorités.
19:31 Donc je pense que la stratégie de Marine Le Pen
19:33 est une stratégie perdante. Elle croit
19:35 avoir des réserves à gauche. Les deuxièmes
19:37 tours ont montré en 2017
19:39 et 2022 qu'elle n'avait
19:41 pas de réserve à gauche
19:43 et elle délaisse
19:45 le potentiel électoral
19:47 qui se trouve encore à droite
19:49 et qui, à mon avis, est la seule
19:51 équation électorale qui ait
19:53 jamais fonctionné en 2007 avec Sarkozy
19:55 avec le Général en 47
19:57 et en 58. - Oui, Guillaume Bigot.
19:59 - C'est-à-dire l'électorat populaire et l'électorat conservateur.
20:01 - Guillaume Bigot. - Donc,
20:03 si on revient sur
20:05 le score d'Éric Zemmour, qui n'est pas mauvais,
20:07 puisque pour quelqu'un qui ne s'était jamais présenté,
20:09 le score n'est pas mauvais, mais quand même la marge est très haute.
20:11 Il a fait 2 millions, un peu moins de 2,5 millions
20:13 au premier tour. Et Marine Le Pen
20:15 est à 8 millions et plus.
20:17 Et Jean-Luc Mélenchon à 7 millions et quelques.
20:19 En fait, on voit bien que les réserves
20:21 de voix sont chez les
20:23 abstentionnistes. 13 millions, c'est
20:25 colossal. À votre avis, qu'est-ce qui
20:27 pourrait faire en sorte que quelqu'un
20:29 la prochaine fois arrive
20:31 à dégonfler un peu ces abstentionnistes ?
20:33 Est-ce que la clé du succès pour la prochaine
20:35 présidentielle n'est pas chez les abstentionnistes ? - Guillaume Bigot,
20:37 pensez-vous que les abstentionnistes
20:39 constituent une armée de réserves
20:41 pour l'offre politique
20:43 actuelle ? - Mais enfin, ils sont nombreux. - Non, s'ils ne votent pas,
20:45 c'est que cette offre politique ne leur
20:47 plaît pas. - Donc, il faut changer d'avis. - Je ne les
20:49 dis pas. On a un problème de personnel
20:51 politique. En France, c'est notre tradition
20:53 monarchique. Le pouvoir ne s'exerce pas
20:55 par délégation, mais par incarnation.
20:57 Or, l'incarnation,
20:59 depuis 10 ans, 15 ans, 20 ans, elle est
21:01 très faible. On a cru qu'Emmanuel
21:03 Macron avait théorisé, intégré
21:05 la théorie des deux corps du roi,
21:07 qu'il allait porter quelque chose. Il l'a dit, d'ailleurs,
21:09 au départ. Il montre une image
21:11 d'un président en majesté qui porte
21:13 le bien commun, l'intérêt général.
21:15 En fait, il n'en est pas capable.
21:17 Il en a plus que les autres. Cette
21:19 abstention, ce n'est pas le fruit du hasard.
21:21 C'est le désintérêt pour l'offre
21:23 politique. Il n'y a aucune raison qu'elle revienne
21:25 dans le jeu, tant que cette offre politique
21:27 ne changera pas. Et Marine Le Pen fait partie
21:29 de cette offre. - Donc, ce n'est pas qu'une question d'incarnation.
21:31 - Comment ? - Ce n'est pas qu'une question d'incarnation.
21:33 C'est aussi une question d'offre.
21:35 - Qu'est-ce que c'est que l'offre,
21:37 sinon l'incarnation ?
21:39 Vous le savez très bien, à travers une présidentielle,
21:41 on vote plus pour un homme que pour un programme.
21:43 - Un homme ou une femme. - Un homme ou une femme.
21:45 - Oui, oui, oui. Bon.
21:47 Christophe est avec nous, de Montpellier,
21:49 dans les Roses, et veut vous poser une question,
21:51 ou en tout cas une réflexion, Patrick Buisson.
21:53 Bonjour Christophe.
21:55 Bonjour Christophe. Ah.
21:57 Oui, Christophe. - Oui, une réflexion
21:59 à Patrick Buisson,
22:01 par rapport à la démographie.
22:03 Nous sommes déjà, à mon sens,
22:05 beaucoup trop nombreux sur la planète.
22:07 Nous manquons d'eau, nous allons manquer de nourriture,
22:09 d'énergie.
22:11 Je pense que le problème...
22:13 Enfin, on ne peut pas régler le problème avec ceux qui l'ont créé.
22:15 Il faut taxer les robots,
22:17 il faut taxer tout ce qu'on ne fait pas, en fait.
22:19 Là, c'est la course à l'armement,
22:21 on va rentrer dans le mur,
22:23 tous les jours, un peu plus.
22:25 - Donc, que faudrait-il faire ?
22:27 Alors, changer un peu le système économique,
22:29 c'est ça ?
22:31 - Mais quelle est votre question, monsieur ?
22:33 - Oui, oui, oui. C'était une réflexion,
22:35 en disant, il faut arrêter peut-être
22:37 de, finalement, la démographie,
22:39 de faire beaucoup d'enfants,
22:41 parce que notre Terre ne pourra plus en accueillir.
22:43 En quelque sorte, c'est ça, Christophe ?
22:45 - Alors là, c'est une vieille balançoire, je le raconte.
22:47 Dans mon livre, c'est à l'origine de ce qu'on a appelé
22:49 l'éco-féminisme,
22:51 porté par Françoise Daubonne,
22:53 qui est la première à terroriser,
22:55 elle jette un thème sur ce qu'elle appelle
22:57 le lapinisme phallocratique.
22:59 Cette représentation
23:01 du monde plein, elle existe déjà
23:03 il y a 50 ans, avec la même angoisse,
23:05 la même terreur.
23:07 Le problème, c'est qu'à l'époque,
23:09 cela s'applique en fait au tiers-monde,
23:11 alors que la démographie des pays riches occidentaux
23:13 est déjà en chute libre.
23:15 Et donc, il n'y avait pas de problème
23:17 démographique. Au contraire, il y a eu un problème à partir
23:19 du collapsus démographique des années 65,
23:21 70.
23:23 Oui, il y a ce climat
23:25 parfaitement anxiogène,
23:27 cette espèce de
23:29 de multigénisme climatique
23:31 qui voudrait que l'enfant soit en danger,
23:33 que son bilan au carbone soit défavorable,
23:35 et qu'il ne faudrait plus faire un enfant.
23:37 Là, c'est une donnée anthropologique
23:39 lourde, l'enfant c'est l'investissement sur l'avenir,
23:41 c'est la notion de surdurée,
23:43 c'est l'homme qui se projette
23:45 au-delà de sa vie et de son existence.
23:47 Ça vaut pour l'Occident, heureusement, ça ne vaut pas pour tous les peuples,
23:49 et notamment les pays de religion
23:51 musulmane, qui ont une autre appréhension
23:53 de la vie, de ce qu'est l'existence
23:55 et du sens de la vie.
23:57 - Donc on continue tout droit,
23:59 sans rien changer. - Mais qu'est-ce que vous voulez changer ?
24:01 Il y a un moment,
24:03 il y a deux courbes qui vont se croiser,
24:05 c'est en effet l'augmentation démographique
24:07 et la réfaction des ressources.
24:09 Donc il y a un moment, on va se poser,
24:11 moi je ne suis pas pour une forme de malthusianisme,
24:13 ce que vous voulez, des choses radicales,
24:15 mais il me semble que c'est un problème,
24:17 et il me semble même que c'est un problème central.
24:19 - La transition démographique est très entamée.
24:21 - Ce problème se pose depuis à peu près trois siècles,
24:23 il est au cœur du débat avec la même question.
24:25 Et le Club de Rome d'ailleurs
24:27 avait évacué cette question en 1958.
24:29 - Merci Patrick Buisson,
24:31 Décadence, je vous recommande ce livre
24:33 aux éditions Albin Michel,
24:35 il y a énormément de choses et ça replonge évidemment aussi
24:37 dans ces 50-60 dernières années
24:39 avec une responsabilité, d'ailleurs vous l'évoquez aussi,
24:41 des boomers, et qu'est-ce qu'on veut
24:43 pour la suite ? - Ah ça c'est la génération
24:45 qui a tiré l'échelle derrière elle,
24:47 après moi le délit. Autour de Jean Dromand,
24:49 avant moi rien, nos pastes, nos futurs.
24:51 Et c'est ma génération.
24:53 - Elle ne veut pas transmettre.
24:55 - Elle ne veut pas transmettre. Elle a reçu l'héritage.
24:57 Elle a bien profité.
24:59 - Oui c'est ça, évidemment sur la question
25:01 de l'héritage, j'ai la petite phrase de
25:03 Saint-Exupéry, nous n'héritons pas
25:05 de la terre, mais nous l'empruntons
25:07 à nos ancêtres et pour les futures générations.