SMART IMPACT - Le débat du jeudi 11 mai 2023

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Jeudi 11 mai 2023, SMART IMPACT reçoit Marie-Laure Jarry (Directrice générale, Maison Le Goff) et Nicolas Crabot (Cofondateur, Atelier Sarrasin)
Transcript
00:00 Retrouvez le débat de Smart Impact avec Veolia.
00:04 On parle de l'avenir du bio dans ce débat avec mes invités Nicolas Crabaud.
00:16 Bonjour, bienvenue. Vous êtes co-fondateur de Buffon & Co.
00:21 Et puis avec nous en duplex Marie-Laure Jarry, la directrice générale de la maison Logoff.
00:25 Bonjour et bienvenue à vous aussi.
00:27 On va présenter vos activités entreprises respectives pour commencer.
00:30 Buffon & Co, c'est quoi ?
00:32 Alors c'est de la transformation de sarrazin bio avec un modèle particulier de 13 à cheval sur la transition alimentaire et écologique.
00:42 Puisqu'on a recréé une filière de production de sarrazin française,
00:46 puisque le sarrazin venait de l'étranger, pour transformer des produits innovants à base de sarrazin
00:51 qui doivent réveiller un peu la galette traditionnelle bretonne et proposer un produit à base de sarrazin
00:58 un peu comme le quinoa est arrivé dans nos assiettes il y a 10 ans.
01:02 D'accord. Alors justement, sarrazin, on pense galette. Il y a d'autres usages du sarrazin bio.
01:07 Dans quel type de recette on peut le goûter, s'en servir ?
01:11 Alors nous on le propose sous forme de graines, de graines torréfiées qu'on appelle le kasha.
01:16 Donc ça ce sont des modes de consommation venus des pays de l'Est.
01:19 En fait c'est un nouvel format de consommation, ça se cuisine comme un riz.
01:22 Et à partir de ça, de ce kasha, de cette graine décortiquée,
01:26 et bien on peut en faire des mélanges, des mélanges de graines prêtes à l'emploi, utilisées à l'eau bouillante en 10 minutes.
01:32 Voilà, c'est ce qu'on appelle le cœur de repas végétal.
01:35 On en fait aussi des steaks végétaux, des pavés végétaux à base de sarrazin fermenté,
01:41 qui révolutionnent un petit peu le marché du plat central végétal.
01:49 Alors, et puis on va évidemment parler des tendances du marché du bio avec vous.
01:52 Je vois d'abord qu'on découvre la Maison Le Goff, Marie-Laure Jarry, c'est une biscuiterie, c'est ça ?
01:58 Oui, alors nous on fabrique des biscuits et des gâteaux depuis 1950 à Morlaix.
02:03 D'accord, alors le bio c'est quoi ?
02:05 C'est quels engagements, quelle part de votre production aujourd'hui ?
02:09 Alors nous ça reste une petite part parce que dans l'univers du sucré, le bio c'est moins important que dans l'univers des produits bruts par exemple.
02:19 Mais c'est incontestablement l'avenir le bio, surtout quand on pense planète.
02:26 Alors vous dites c'est incontestablement l'avenir alors que voilà il y a des difficultés aujourd'hui qui sont générales,
02:33 qui ne sont pas liées à telle ou telle entreprise sur le marché du bio.
02:36 Est-ce que Marie-Laure Jarry vous le ressentez dans certains de vos produits ?
02:40 Alors nous on le ressent pas vraiment.
02:43 Aujourd'hui nous on a aussi bien du conventionnel clean que du bio et pour le moment on le ressent pas vraiment honnêtement.
02:52 C'est-à-dire qu'on est toujours sur une consommation qui est stable voire en progression sur certains produits.
02:59 Et quand je pense que les problématiques de la bio sont tout à fait conjoncturelles,
03:05 parce que la planète nous obligera à prendre soin de ce que l'on mange bien plus que ce qu'on le fait aujourd'hui,
03:13 nous dans notre bilan carbone 85% de notre impact est lié aux matières premières que l'on achète.
03:20 Donc l'impact il est sur l'agriculture, sur la façon de produire et sur la façon de se nourrir.
03:27 Alors effectivement on est tous d'accord sur l'objectif et l'enjeu et j'espère que les chiffres à venir vous donnent raison sur le côté,
03:35 on va dire, conjoncturel de cet essoufflement du marché du bio.
03:40 Je lisais chez nos confrères du Parisien aujourd'hui en France l'histoire d'un agriculteur qui avait décidé de donner ses poireaux bios
03:48 en faisant un appel sur Facebook pour dire "j'arrive pas à les vendre, venez vous servir".
03:53 Évidemment il y a des centaines de consommateurs qui sont venus chez lui.
03:57 Pourquoi le marché s'essouffle d'après vous Nicolas Crabou ?
04:00 Alors selon moi c'est multifactoriel, donc il y a beaucoup de raisons.
04:04 La première c'est qu'on est dans l'après-Covid, il y a eu le Covid,
04:09 donc il y a eu une montée incroyable de la consommation en bio parce que c'était des magasins de proximité tout simplement.
04:14 Et donc malheureusement les réseaux bio n'ont pas réussi à contenir et à retenir un petit peu ces néo-clients qui étaient arrivés.
04:21 Pour une simple et bonne raison aussi c'est que c'est une activité qui gère plus de 20% de croissance depuis 15 ans,
04:28 donc quand tout va bien on ne s'occupe pas forcément de ce qui ne va pas.
04:31 Et les problèmes sont arrivés avec une bio pas toujours équitable, pas toujours "logique".
04:39 C'est-à-dire quoi une bio pas logique ?
04:41 Une bio qui n'est pas logique c'est une bio qui vient par exemple de l'étranger.
04:44 Donc d'où les projets aussi de relocalisation de filières, d'où l'importance qu'on met nous,
04:49 en tout cas pour ce que je connais dans le Sarrazin, des filières françaises installées sur le territoire, en bio évidemment.
04:57 Et donc ce multifacteur, on peut parler aussi de tous ces pseudo-labels qui sont un peu bio mais pas complètement bio.
05:08 Il y a une confusion évidemment dans l'esprit du consommateur.
05:11 Donc filières venues de l'étranger plus consommateurs qui n'ont pas été retenus,
05:16 donc ça c'est un problème d'offres, de marketing et de réenchantement un petit peu des courses,
05:20 et trois multiplicité des labels, la bio c'est un petit peu perdu.
05:24 En revanche, moi je pense que c'est totalement stratégique la bio, évidemment comme l'a rappelé Mme Jarry,
05:31 pour l'avenir de notre climat, de nos territoires, de nos terroirs.
05:36 Donc vous pensez qu'il y a une tendance de fond, peut-être une rupture conjoncturelle,
05:42 mais que la tendance de fond est plus forte, elle emportera le marché ?
05:45 Alors j'en suis convaincu, et en fait il n'y a pas que moi à le penser,
05:49 et il y a surtout des prérogatives politiques qui sont prises.
05:52 Il y a un objectif en France qui est de passer à 25% de terres agricoles en bio,
05:56 il y a un objectif plus largement européen qui est la même chose, de créer une alternative à l'agriculture chimique.
06:03 On parle d'agriculture biologique, on la compare à l'agriculture chimique, c'est une alternative.
06:07 On ne dit pas de passer toute l'agriculture à 100% bio, on parle déjà de passer à 25%,
06:13 ce sera déjà une partie du chemin, et c'est ça être acteur de la transition écologique.
06:17 Marie-Laure Jarry, le contexte évidemment inflationniste explique en partie cet essoufflement du marché bio,
06:24 du côté des consommateurs, l'inflation, vous en tant que chef d'entreprise, vous la ressentez aussi dans votre activité,
06:32 est-ce que ça freine vos investissements pour accroître la part du bio dans votre activité ?
06:38 Non absolument pas, et comme l'a dit Nicolas Crabaud, au contraire, nous on investit pour développer en GMS local,
06:46 en restauration nos produits conventionnels bien faits, mais aussi pour se développer dans les réseaux bio.
06:54 Et pour compléter ce qu'a dit Nicolas Crabaud, il y a une question de sourcing, il a tout à fait raison,
07:00 il a raison de réinventer, de faire revenir des filières ici en France,
07:06 et je rajouterai que les réseaux bio par rapport à la concurrence grande surface,
07:11 quand les grandes surfaces se sont emparées de la bio, au lieu de muscler leur cahier des charges,
07:16 comme l'a dit Nicolas, sur le sourcing, mais aussi sur le goût, sur l'organoleptique,
07:21 ils ont, pour moi, défini des cahiers des charges assez moyens avec des prix élevés.
07:28 Et effectivement, en temps de crise, ça ne peut pas marcher.
07:32 Et moi je pense que la solution, c'est effectivement un sourcing beaucoup plus clean et français que ce qu'ils ne l'ont fait jusque là,
07:39 mais aussi un niveau de gourmandise dans nos métiers, c'est le KPI numéro 1,
07:44 beaucoup plus développé que ce qu'elle ne l'est aujourd'hui.
07:47 Je reste avec vous Marie-Laure Jarry, vous avez fait le choix d'afficher le Planet Score,
07:52 je veux bien que vous nous rappeliez ce que c'est et pourquoi ce choix.
07:55 Alors le Planet Score, c'est un affichage environnemental qui est basé,
08:00 effectivement on le voit à l'écran, vous avez une note globale en haut,
08:03 et cette note, elle dépend de plusieurs items, donc les pesticides, la biodiversité, le climat et le mode d'élevage.
08:09 Nous, on est rentré en début d'année dans la Convention des entreprises pour le climat,
08:14 et désormais on est pour objectif de définir le modèle de l'entreprise régénérative Maison-Le-Goff à 2030.
08:22 Et pour commencer, désormais, on formule tous nos produits avec la gourmandise et la planète.
08:29 Ça veut dire que pour afficher un Planet Score B, comme vous le voyez là,
08:33 on doit renoncer à certaines matières conventionnelles pour les passer en bio.
08:37 Et c'est pour ça que je pense que la bio a d'autant plus d'avenir,
08:42 c'est que quand tout le monde devra apposer son affichage environnemental,
08:45 pour avoir une note B, nous on a arrêté le beurre conventionnel et on l'a remplacé par le bio,
08:50 dans un produit conventionnel.
08:53 Et on a arrêté le sucre français et on l'a remplacé par du sucre de betterave bio,
08:58 toujours dans un produit conventionnel.
09:01 Je voudrais qu'on revienne sur la question de la souveraineté alimentaire, Nicolas Crabaud,
09:06 avec cette filière, vous avez recréé une filière, c'est ça ?
09:09 Ça nous a paru fondamental, en fait, dans cet acte de transition écologique et alimentaire,
09:14 car 85% en moyenne du bilan carbone d'un produit est issu de l'amont agricole.
09:22 Donc déjà, régler ce problème d'amont agricole, c'est régler une partie du bilan carbone.
09:26 Ensuite, c'est le problème de qualité, de traçabilité.
09:29 Je vais prendre l'exemple du sarrasin que je connais bien,
09:31 70% du sarrasin consommé en France vient de l'étranger.
09:35 C'est une hérésie.
09:36 C'est une hérésie parce qu'on n'est pas sûr de la qualité quand ça vient de Chine,
09:40 où on n'est pas sûr de l'approvisionnement, puisque la moitié des importations venaient d'Ukraine ou de Russie.
09:45 Vous voyez ce que ça peut donner en termes de sourcing matière, de sécurité, d'approvisionnement.
09:50 Donc c'est une hérésie pour notre commerce local,
09:54 nos agriculteurs qui savent très bien faire planter du sarrasin.
09:57 Et en plus, c'est une perte de biodiversité, puisque le sarrasin est une plante dont elle fleurit,
10:03 dont elle ramène des abeilles.
10:05 Donc vous voyez, relocaliser des abeilles...
10:07 Les insectes pollinisateurs aiment beaucoup le sarrasin.
10:09 Absolument.
10:10 Donc relocaliser des filières, c'est bon pour l'économie, c'est bon pour l'emploi,
10:15 c'est bon pour les régions, les territoires, la biodiversité,
10:18 c'est bon pour ce qu'on appelle l'économie circulaire.
10:21 On parlait il y a quelques jours dans cette émission des enjeux d'utilisation de produits phytosanitaires
10:28 dans une maison de champagne.
10:30 Est-ce que c'est une plante qui a besoin de beaucoup d'intrants de produits phytosanitaires, le sarrasin ?
10:34 Alors pas du tout.
10:35 Pas du tout.
10:36 Donc nous, on est en bio, donc ça veut dire qu'on respecte...
10:38 Mais d'une manière générale.
10:39 Mais d'une manière générale, le sarrasin n'a pas besoin ni d'engrais ni de pesticides.
10:43 Je dirais que c'est de toute façon un produit très vertueux, qu'il soit bio ou pas.
10:48 La bio impose un cahier des charges encore plus strict.
10:50 Donc c'est pour ça que nous le suivons.
10:53 Combien de temps ça prend de recréer une filière comme ça ?
10:55 Parce que bon, on sait bien que le temps agricole est long.
10:58 Voilà, c'est exactement ça.
11:00 C'est la décision à une époque d'intégrer le temps long dans notre court terme d'industriel,
11:05 et le temps long agricole, c'est 5 à 7 ans.
11:08 Donc c'est beaucoup de temps.
11:09 C'est la compréhension d'un monde agricole et d'un monde industriel qui ne se connaissent pas forcément au départ.
11:14 Redonner des gages de confiance.
11:16 C'est passionnant, c'est avant tout une aventure humaine.
11:19 Et ça prend du temps, mais je dirais qu'entre 5 et 7 ans, le temps du long terme.
11:26 Et je termine avec vous Marie-Laure Jarry pour quand même dire un mot des emballages.
11:29 Vous faites un gros travail sur les emballages, racontez-nous.
11:31 Oui, juste pour dire, on est un gros consommateur de sarrasin nous aussi, en bio et en IGP Bretagne.
11:37 Vous vous rencontrez alors.
11:38 Dites-moi sur les emballages.
11:40 Alors sur les emballages, on a lancé il y a un peu plus de deux ans maintenant,
11:45 un film composé de 75% de papier pour emballer une partie de notre gamme.
11:50 Et là, on a fait une étude avec Veolia pour démontrer la recyclabilité de ce film.
11:56 Et ce film est recyclable à hauteur de 75%.
12:01 Donc ça c'est une info en avant-première pour Bismarck.
12:05 Et l'idée c'est vraiment de déployer cet emballage sur l'ensemble de nos produits désormais.
12:11 Et surtout de prouver aux consommateurs le niveau de recyclabilité, ce que personne ne fait aujourd'hui quasiment.
12:17 Merci beaucoup, merci à tous les deux et à bientôt.
12:20 Sur Bismarck, on passe à notre rubrique Smart ID, on parle recharge électrique.
12:26 Merci.

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