Lundi 15 mai 2023, SMART TECH reçoit Rémi Bouton (Responsable stratégie, Wiseband) et Bruno Boutleux (Directeur Général, Adami)
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00:00 C'est en réponse à une mission confiée par la Première ministre sur la stratégie
00:08 de financement de la filière musicale en France que le sénateur Julien Bargeton a
00:12 proposé dans son rapport d'instaurer une contribution spécifique des plateformes de
00:17 streaming pour financer précisément le Centre National de la Musique.
00:21 On parle d'une taxe qui pourrait être de 1,5% sur les revenus du streaming musical.
00:27 Quel est l'accueil réservé par les professionnels à cette proposition ? Quels seraient les
00:33 impacts de cette taxe ? Est-ce qu'on risque de voir les abonnements à la hausse avec
00:38 nos plateformes de streaming ? Est-ce qu'on risque de voir baisser les redevances versées
00:43 aux producteurs et artistes pour l'exploitation de leurs catalogues ? On en parle avec Bruno
00:47 Bouteleu, le directeur général de l'ADAMI.
00:49 L'ADAMI, pour rappeler, vous êtes au service des artistes, des auteurs, vous les aidez
00:55 dans la gestion de leurs droits, la défense de leurs intérêts et puis les aide aussi
01:00 financière au projet et accompagnement de carrières.
01:03 Avec vous sur ce débat, Rémi Bouton, pionnier des radios libres, vous êtes le responsable
01:08 stratégie chez Wiseband.
01:09 Là aussi vous êtes au service des artistes et des labels indépendants plus spécifiquement
01:14 pour aider à trouver quoi ? Leur bon modèle économique ?
01:17 Pour les aider à gagner de l'argent avec leur musique.
01:20 Donc ce sont des artistes qui sont souvent eux-mêmes entrepreneurs ou des petits labels
01:24 et on les aide à mettre leur musique sur les plateformes, Spotify, Amazon, etc. et
01:29 donc à générer de l'argent pour développer leur projet.
01:32 Aujourd'hui beaucoup d'artistes sont devenus des entrepreneurs.
01:35 Un groupe d'artistes aujourd'hui c'est une start-up en fait, c'est la même chose.
01:39 Ça va faire son marketing.
01:41 Alors est-ce que vous trouvez ça intéressant ou au contraire désespérant cette proposition
01:46 d'instaurer une taxe sur le streaming musical ?
01:50 Désespérant.
01:51 Pour moi c'est désespérant.
01:53 Alors je ne sais plus quel homme politique disait en France un problème une taxe.
01:56 On a un problème, on crée une nouvelle taxe.
01:59 Sans regarder au fond des choses, pour moi ce rapport ne va pas au fond des choses.
02:04 Ce rapport est simplement la liste des désidératas des différentes professions de la musique
02:10 mais il n'y a pas d'études de fond.
02:11 Il n'y a pas de connaissances au fond de la manière dont se développent les artistes
02:14 aujourd'hui.
02:15 Le métier a fondamentalement changé ces 20 dernières années avec le numérique.
02:19 Aujourd'hui les artistes sont des entrepreneurs.
02:21 D'abord pourquoi aller chercher de l'argent ? Dans quel sens ? Pourquoi en faire ? Je
02:27 pense que la première question doit quand même être là.
02:29 Et ensuite pourquoi aller taxer des jeunes artistes émergents qui arrivent à mettre
02:37 tout seul leur musique en ligne justement et qui n'ont pas accès aux subventions derrière,
02:41 qui n'ont pas accès au CNM derrière.
02:42 Alors Rémi vous dites "aller taxer les jeunes artistes".
02:44 Ce n'est pas ce que propose le rapport.
02:46 Le rapport propose aller taxer les plateformes de streaming musicales.
02:50 Les plateformes de streaming aujourd'hui perdent de l'argent.
02:53 Celles qui font que de la musique.
02:54 Deezer, Spotify perdent de l'argent.
02:55 Les seules qui gagnent de l'argent c'est celles qui font autre chose.
02:58 C'est Apple, c'est Amazon, c'est Google qui se servent de la musique comme produit
03:01 d'appel.
03:02 Celles qui ne font que de la musique perdent de l'argent.
03:04 Comment penser qu'on va leur mettre une taxe et qu'elles ne vont pas la répercuter sur
03:07 les artistes ou sur les consommateurs ? Soit les abonnements vont augmenter.
03:12 Ils n'ont pas augmenté en France depuis 2007.
03:14 Les abonnements n'ont pas augmenté.
03:16 Vous voyez l'inflation qu'il y a eu.
03:17 Là on donne à Deezer et à Spotify une excellente raison d'augmenter les abonnements.
03:20 Donc si le but du jeu c'est d'augmenter le prix de la musique pour les consommateurs,
03:25 pourquoi pas cette taxe est une bonne idée.
03:26 Si le but du jeu c'est d'aider la musique, d'aider les artistes, d'aider la diversité,
03:31 à mon avis il était possible d'aller chercher de l'argent ailleurs.
03:33 Il ne faut pas oublier que la musique est taxée à 20% ce qui n'est pas le cas du spectacle
03:38 vivant, de la presse.
03:40 Il y avait d'autres systèmes de taxes.
03:42 On va parler des autres options évidemment mais déjà on va s'intéresser quand même
03:46 à ce rapport.
03:47 Vous avez été consulté par la Dami ?
03:49 Oui, la Dami a été consultée comme bon nombre de composantes de la filière musicale.
03:55 La filière musicale est consensuelle sur l'idée que la musique enregistrée est probablement
04:02 l'industrie culturelle la moins subventionnée aujourd'hui, par l'État j'entends, moins
04:07 que le cinéma, moins que le livre également.
04:09 Et cette filière musicale aujourd'hui avec l'arrivée du streaming musical elle est confrontée
04:15 à des enjeux stratégiques majeurs, internationaux, comme jamais elle ne l'a été, il y a de
04:19 véritables opportunités, notamment à l'export.
04:22 Donc l'idée d'avoir une taxe qui alimente enfin de manière pérenne cette filière
04:28 musicale est une bonne idée, là-dessus il y a un consensus.
04:31 Après il y a la question du moyen pour y parvenir.
04:34 C'est là où le bas blesse parce qu'en taxant les plateformes de streaming musicales,
04:38 et bien d'une certaine manière ce qu'on donne à Clara, on le reprend à Luciani.
04:42 Et c'est ça qui ne va pas dans la proposition qui nous est faite aujourd'hui.
04:46 Le fait de travailler uniquement sur le champ musical et sur ce qui est a priori aujourd'hui
04:51 l'avenir de la filière musicale, à savoir les plateformes de streaming musicales, qui
04:56 certes brassent aujourd'hui des milliards mais sont encore dans des phases de développement
04:59 économique, ne nous paraît pas être la meilleure des options.
05:03 Alors je ne sais pas si c'est désespérant, mais a priori entre bonne pioche et mauvaise
05:07 pioche, je suis plutôt du côté mauvaise pioche.
05:09 D'accord.
05:10 Expliquez-nous quand même plus précisément, quelle est la mission de ce Conseil National
05:15 du Numérique ? Donc il s'agit visiblement de trouver un financement pérenne.
05:19 Vous nous parlez du Centre National de la Musique ?
05:22 Pardon, le Centre National, le CNM.
05:24 Oui, de la même manière qu'on a depuis 1946 pour le livre et le cinéma un centre
05:29 national qui encadre, qui accompagne ces industries culturelles majeures, avec toute l'importance
05:36 qu'elles ont pour la culture des Français et pour le rayonnement, la souveraineté culturelle
05:41 de notre pays, il y avait également besoin d'un établissement du même type pour rassembler
05:46 la filière musicale et lui assurer des financements qui encore une fois soient pérennes.
05:51 Donc l'enjeu autour d'un centre national y est très important.
05:54 On a besoin de cette institution.
05:55 Elle a trois ans, quelles ont été ses actions ? Est-ce qu'on en a vraiment besoin ?
05:59 Elle a fait un énorme travail durant la crise sanitaire, dans cette période où le monde
06:04 de la culture a énormément souffert, si on n'avait pas eu un centre national comme le
06:08 Centre National de la Musique, je ne suis pas certain que l'action des pouvoirs publics
06:13 en direction du secteur spécifique de la musique aurait été aussi efficace.
06:18 Donc il y a des enjeux importants, mais pas que de financement, je termine juste là-dessus.
06:22 Il y a des enjeux d'observation aussi, de production de données.
06:25 Si le cinéma et le livre vont bien, c'est parce qu'il y a à un moment une autorité
06:30 publique qui a vocation, par la loi, à produire des données économiques objectives sur les
06:36 filières qu'il représente.
06:38 Nous n'avons pas ça dans le domaine de la musique, c'est la vocation première du
06:42 CNM et c'est en cela aussi que l'établissement est essentiel.
06:45 Même regard sur ce centre national ?
06:48 Alors oui, mais là où le bas blesse justement, c'est d'aller chercher de l'argent alors
06:52 qu'on n'a pas encore les données.
06:53 C'est-à-dire que le Centre National de la Musique est encore extrêmement jeune.
06:57 Peut-être faudrait-il aller chercher les données, être capable de mesurer la vitalité
07:03 de la filière musicale, ce qu'on n'est pas capable aujourd'hui de faire, avant de
07:07 savoir où aller chercher l'argent et comment.
07:09 Ça c'est le premier point.
07:10 Le deuxième point...
07:11 C'est-à-dire l'argent pour quoi faire ?
07:13 C'est de l'argent pour quoi faire et comment mesurer l'impact.
07:17 Parce que c'est bien, est-ce qu'il faut des subventions ? Est-ce qu'il faut des partenariats ?
07:21 Est-ce qu'il faut de l'investissement ? Ou comment ? Et comment est-ce qu'on mesure
07:25 l'action du CNM ?
07:27 Pour l'instant, on n'a pas ces outils-là.
07:29 Donc ça c'est le premier point.
07:30 Le deuxième, peut-être à la différence du CNC pour le cinéma ou du CNL pour le livre,
07:37 la musique est une matière extrêmement fluide, extrêmement agile.
07:42 Attention à ce que l'État ne sclérose pas ce monde qui évolue extrêmement vite,
07:49 en cherchant à conserver des anciens modèles et à ne pas savoir accompagner la manière
07:56 dont la musique évolue chaque année.
07:58 On parlait de blockchain tout à l'heure, aujourd'hui vers le Web3.
08:01 Il y a beaucoup d'innovations, beaucoup de choses qui bougent.
08:03 L'État n'est pas forcément toujours suffisamment agile pour ça.
08:06 Donc le CNM peut-être aurait aussi à gagner en agilité.
08:10 Alors si je reviens sur cette proposition de taxe, est-ce que ça vous semble évident
08:15 qu'on va avoir une hausse des abonnements pour les utilisateurs, pour les abonnés ?
08:20 Pas nécessairement.
08:21 En effet, ça ne va pas de soi et c'est la grande inconnue qui est attachée à la proposition
08:26 de ce rapport.
08:27 Malgré tout, le risque existe et il est d'autant plus fort qu'au contraire, il y a quelques
08:33 années lorsque le modèle du streaming a commencé à s'installer, le rapport de force
08:37 était très favorable aux ayants droit parce qu'il détenait les catalogues.
08:42 Et que donc, pour une économie naissante, il fallait se plier aux injonctions des ayants
08:49 droit.
08:50 Vous détenez toujours les catalogues ?
08:51 Bien sûr.
08:52 Mais aujourd'hui, sans l'économie du streaming, la filière musicale n'existe pas.
08:57 Et donc les rapports de force ne sont pas les mêmes.
08:59 Et moi aujourd'hui, je ne suis pas certain que cette taxe streaming ne sera pas répercutée
09:05 à un moment sur les contrats avec les producteurs, les artistes ou les auteurs.
09:09 Ce qui veut dire que l'assiette de la rémunération va baisser.
09:13 Autrement dit, on va d'un côté par la baisse de cette assiette de rémunération, certes
09:18 pour pouvoir financer de nouveaux projets, mais ce sera financé finalement de la même
09:22 main que ceux qui en bénéficieront au final.
09:25 Et donc là, on n'est pas complètement dans le cercle vertueux attendu de la part d'un
09:30 établissement public et d'une intervention publique de l'État.
09:33 Ce que j'entends, c'est que les discussions entre les ayants droit et les plateformes
09:37 de streaming sont très tendues.
09:39 Non, elles sont tendues comme des relations de business.
09:45 Entre des entreprises ou des personnes qui sont sur un même métier, mais qui n'y sont
09:52 pas du même point de vue.
09:54 Donc là, on est dans des logiques commerciales habituelles.
09:57 Là-dessus, pour moi, il n'y a pas de soucis majeurs.
10:00 Mais cette taxe pourrait jouer contre vous finalement dans le rapport de force avec les
10:03 plateformes de streaming ?
10:04 Bien sûr, les plateformes aujourd'hui ne sont pas rentables.
10:06 Dizosh a perdu 160 millions l'an dernier, quelque chose comme ça.
10:11 Donc s'il y a une taxe de 1,75 % sur le chiffre d'affaires en plus, c'est quoi ? C'est 1,75
10:16 % qu'ils vont perdre en plus ? Comment ils vont faire ?
10:20 On veut soutenir l'industrie française, c'est formidable.
10:23 Dizosh, qui fait l'essentiel de son chiffre d'affaires en France, va se retrouver plus
10:26 taxé.
10:27 Il va forcément y avoir besoin de se rattraper.
10:30 Soit j'augmente les tarifs, soit je baisse les rémunérations, ou en tout cas je n'augmente
10:34 pas les rémunérations des catalogues.
10:36 Ça semble à peu près évident.
10:38 Spotify perd aussi de l'argent encore aujourd'hui.
10:41 On va parler de Cobuz aussi, qui est très français.
10:45 Et puis pour moi, il y a le symbole d'aller chercher de l'argent chez les artistes émergents,
10:52 chez les artistes aussi de musiques urbaines, qui en effet font l'essentiel de leur business.
10:57 Parce que chaque artiste a son modèle économique.
10:59 Certains vont gagner de l'argent sur le spectacle vivant, d'autres vont gagner de l'argent
11:03 sur le salarié d'orchestre, d'autres dans l'enseignement, d'autres ça va être le
11:06 streaming, leur ressource.
11:08 Ceux qui émergent, qui arrivent sur le marché, qui gagnent de l'argent grâce au streaming,
11:12 on va prendre de l'argent là et ils ne vont pas le retrouver ailleurs parce qu'ils n'auront
11:17 pas un producteur.
11:18 Ils sont eux-mêmes producteurs.
11:19 Ils vont avoir beaucoup de mal à faire des dossiers de subvention, à récupérer de
11:21 l'argent.
11:22 On va leur mettre beaucoup de bâtons dans les roues.
11:24 Ça va être très compliqué.
11:25 On va leur demander un travail administratif phénoménal de s'inscrire dans 15 sociétés
11:29 de gestion différentes, de remplir 12 000 dossiers pour récupérer un petit peu de
11:33 cet argent là.
11:34 À mon avis, si on veut favoriser la vitalité, il faut plutôt rendre les choses simples
11:39 plutôt que de les rendre compliquées.
11:40 Ce rapport, il a plein de qualités.
11:43 L'inventaire des problématiques est fait mais il a fait un peu trop rapidement l'impasse
11:51 sur les autres solutions.
11:52 La rémunération des artistes sur le streaming, c'est un quart de ce que l'État encaisse
11:57 sur un abonnement de streaming avec 20% de TVA.
12:00 Une dérivation d'une partie de la TVA par exemple.
12:03 Comme l'État semble l'envisager pour financer l'audiovisuel public.
12:06 Ce qui veut dire que c'est possible, aurait été bien plus intéressant et absolument
12:12 un dollar pour la filière musicale.
12:13 Là, c'est vraiment du new money comme on dit.
12:16 Alors que là, la proposition proposée, ce n'est pas vraiment du new money.
12:21 Aller chercher plutôt une dérivation de la TSN, la taxe sur les services numériques,
12:27 qui couvre un champ beaucoup plus large en termes de chiffre d'affaires, était également
12:31 une autre solution.
12:32 Ces solutions ont été trop rapidement...
12:33 Et la redevance pour la copie privée ?
12:34 Alors, la redevance pour la copie privée, elle finance l'établissement public déjà.
12:39 Des organismes comme l'Adami, la SACEM, nous contribuons au financement de l'établissement
12:45 public à travers la redevance pour copie privée.
12:48 Ce n'est pas suffisant aujourd'hui pour financer la filière ?
12:50 A priori non, parce qu'il y a des enjeux, notamment à l'export, qui requirent des moyens
12:56 nouveaux.
12:57 Donc, ça n'est pas suffisant.
12:58 Si c'était suffisant jusqu'à présent dans un contexte qui n'était pas celui du streaming,
13:04 encore une fois, le streaming offre des possibilités, des opportunités énormes pour la musique
13:08 française.
13:09 Il n'y a plus de domination du répertoire américain sur la musique mondiale.
13:13 Cette époque est derrière nous, mais si on veut bien embrasser la nouvelle époque
13:18 où effectivement chacun a sa chance, quelle que soit sa nationalité, grâce au streaming,
13:23 il faut s'en donner les moyens.
13:24 Quel genre d'investissement ça nécessite, ça, de travailler sur l'export de notre
13:28 marché musical ?
13:29 On avait un bureau export de la musique française qui a parfaitement répondu aux attentes dans
13:37 le monde physique et qui, avec les moyens à moyen égo, aujourd'hui, n'est pas en
13:41 capacité de répondre aux enjeux de marketing, d'accompagnement, de promotion, qui doivent
13:48 être colossaux.
13:49 Vous savez, en streaming, c'est des centaines de milliers de titres par jour qui sont uploadés.
13:55 Donc pour émerger dans un magma comme celui-là, il n'y a pas 36 solutions.
14:00 Vous devez mettre des moyens.
14:01 Et donc des moyens en promotion, en marketing, dont la filière ne dispose pas en propre.
14:06 Et comme c'est aussi un enjeu de souveraineté culturelle, ça justifie véritablement l'intervention
14:10 publique.
14:11 Mais encore une fois, le choix qui est fait ne nous semble pas être le meilleur choix.
14:15 Je reviens à ma TSN, à ma TVA, il y avait là des enjeux importants.
14:19 Vous êtes d'accord sur ces autres pistes qu'on aurait dû davantage étudier ?
14:22 Bien sûr, bien sûr.
14:25 Déshabiller Pierre pour habiller Paul, comme on disait autrefois, me semble totalement
14:29 aberrant.
14:30 Pourquoi est-ce que la musique enregistrée reste taxée à 20% quand votre entrée au
14:35 cinéma est à 2,5%, quand la presse est à 2 ou 3% ?
14:38 S'il y a vraiment un besoin, si l'État découvre enfin qu'il faut aider les musiques
14:44 populaires, la première réponse, ce n'est pas de la taxer.
14:48 Franchement, c'est de baisser la TVA et avec cet argent-là, de mener des actions
14:54 d'intérêt général.
14:55 Sur l'export, oui, il y a besoin d'argent, oui, il y a besoin de réseaux, oui, il y
14:58 a besoin de marketing.
14:59 Attention, parce que la souveraineté nationale, s'il sait faire du marketing sur TikTok et
15:03 sur Instagram, ça pose des questions quand même.
15:06 Est-ce qu'avant d'investir dans le marketing, il ne faut pas aussi reposer la question justement
15:11 des médias qu'on a en France ? Par exemple, on a une presse musicale aujourd'hui qui
15:16 est en train de mourir à petit feu.
15:18 Est-ce qu'il ne faudrait pas aider aussi des médias français, des outils français
15:21 plutôt que de financer ?
15:22 C'est-à-dire d'utiliser l'argent public pour la promotion de notre production musicale,
15:27 non pas pour verser cet argent sur des plateformes étrangères, mais déjà utiliser nos propres
15:32 médias ?
15:33 Au moins, se poser la question.
15:35 Ou alors on se dit, en effet, c'est foutu, nous n'avons plus la souveraineté nationale,
15:38 donc on est obligé de défendre nos artistes nationaux sur des plateformes américaines
15:41 et chinoises.
15:42 Mais pour moi, ce n'est pas une réponse.
15:44 Ce n'est pas comme ça qu'on défend notre souveraineté nationale.
15:47 Après, il s'agit de jouer à arme égale aussi avec nos compétiteurs.
15:52 Oui, mais réfléchissons à ce qu'on peut faire, à comment on peut construire éventuellement
15:56 nous-mêmes en Europe ces plateformes-là.
15:59 Ça, je pense que c'est important.
16:00 Et sur l'export, l'autre question, c'est est-ce que la subvention est le seul modèle ?
16:05 Dans d'autres domaines, et vous les connaissez tous, industriels et autres, on a bien sûr
16:09 de la subvention, mais on a aussi de la prise de participation qui va permettre, si jamais
16:15 l'artiste a du succès à l'étranger, de réinjecter de l'argent pour d'autres artistes.
16:20 La subvention, on a investi à fonds perdus, donc chaque année, on va mettre de l'argent.
16:23 Et quand il y a un succès, pourquoi est-ce que le succès ne fait pas revenir un petit
16:28 peu d'argent dans la machine ? Ça serait peut-être aussi des outils de financement
16:32 pour le Centre national de la musique.
16:33 La discussion est close sur ce sujet de taxes ou pas totalement selon vous ?
16:39 Je ne crois pas qu'elle soit close parce que le juge de paix dans tout ça, ce ne sera
16:45 pas le sénateur Bargeton, il le sait, ce sera Bruno Le Maire.
16:49 C'est à Bercy que les choses vont se décider, voire à l'Elysée, parce que les arbitrages
16:55 à rendre sont quand même également hautement politiques.
16:58 Et nous sommes dans un contexte économique aussi extrêmement compliqué où on sait
17:03 que l'heure n'est pas à la création de taxes nouvelles, donc malheureusement le combat
17:12 n'est pas terminé, quelle que soit son issue, on sait que là-dessus nous serons confrontés
17:17 à encore quelques difficultés et encore quelques épreuves à franchir.
17:21 Ce rapport, il y a eu six mois quand même de travail en amont avec la filière, vous
17:29 avez été consulté, alors je ne crois pas que Waisbond…
17:32 Non, on a demandé mais on ne devait pas être dans la liste de faits par le ministère de
17:37 la Culture, donc on n'a pas pu être reçu.
17:40 Mais au final, ce qui est étonnant, c'est qu'il n'y a pas d'unanimité, enfin
17:45 tout le monde ne se réjouit pas du résultat de ce rapport au sein de la filière, donc
17:50 comment vous allez pouvoir agir pour transformer la taxe en une autre option qui vous semble
17:56 plus pertinente ?
17:58 Il y a une chose sur laquelle, comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a un consensus
18:02 absolu, c'est qu'il y a besoin d'un financement pérenne pour un établissement qui a vocation
18:06 à servir cette filière musicale qui recouvre des enjeux culturels importants.
18:11 Et la solution, c'est une taxe qui, comme pour le spectacle vivant, comme pour le cinéma
18:17 qui bénéficie d'un certain nombre de taxes, permet à une filière d'exister.
18:21 Il y a toute une partie de ces filières qui ne peut pas s'auto-financer et qui a besoin
18:27 de financement complémentaire.
18:28 Donc ça c'est quand même un socle important.
18:30 Après sur les modalités, il y a des désaccords, nous nous sommes critiques sur cette taxe
18:35 sur les plateformes de filière musicale.
18:36 C'est ce qu'on a essayé de faire venir, tous ceux qui ont travaillé et qui défendent
18:39 ce rapport Barjeu-Durand-Plateau, mais ça n'a pas été possible.
18:43 Bon, dommage.
18:44 Bon maintenant ça va se jouer dans les cabinets ?
18:47 Oui maintenant tout le jeu c'est dans les cabinets, à mon avis ça va se jouer entre
18:51 Bercy et l'Elysée.
18:52 Il y a à faire vivre cet établissement qui sans ce financement-là aura du mal à remplir
18:58 l'ensemble de ses missions.
18:59 Maintenant on est au pied du mur, il faut trouver une solution.
19:02 Merci beaucoup à tous les deux.
19:04 Merci Rémi Bouton de Wiseband et Bruno Bouteleux de l'Adami.
19:08 Vous nous avez éclairés quand même sur les tenants et les aboutissants de ce rapport.
19:12 On se retrouve juste après une petite pause, on va parler du marché des cryptos.