Olivier Salleron, président de la Fédération française du Bâtiment, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Ce lundi, Elisabeth Borne présente les conclusions du Conseil national de la refondation et des annonces devraient être faites pour tenter d'enrayer la crise du Logement.
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00:00 - Europe 1, il est 6h41, les annonces d'Elisabeth Borne sont attendues ce lundi.
00:04 La première ministre présente aujourd'hui les conclusions du Conseil national de la refondation sur le logement.
00:08 Une vingtaine de mesures devraient être annoncées pour tenter d'enrayer la crise du logement
00:13 dans un climat de forte tension sur le marché immobilier.
00:16 Votre invité Alexandre, c'est Olivier Salron, président de la Fédération française du bâtiment.
00:21 - Bonjour Olivier Salron. - Bonjour.
00:22 - Alors cette fois ça y est, après plusieurs reports, les annonces de la première ministre,
00:27 la synthèse du Conseil national de la refondation sur le logement, est-ce que le compte y est ?
00:31 On a déjà quelques mesures qui ont fuité, on va les aborder une par une dans un instant,
00:37 mais votre sentiment général ?
00:38 - Après 8 mois de travail, il y a plus de 200 personnes, la Fédération française du bâtiment mobilisée comme jamais,
00:43 un mois de report, on attendait vraiment des annonces conséquentes.
00:46 Aujourd'hui c'est la déception, quasiment aucune des annonces et des propositions des professionnels n'ont été retenues.
00:52 Donc oui, on va attendre tout à l'heure cet après-midi pour voir s'il y a 2-3 mesures de plus,
00:57 mais on va se remettre au travail très fortement.
00:59 - Alors visiblement, première chose, il n'y aura pas de mesures fiscales pour relancer l'investissement ?
01:04 - Non, ben écoutez, le fameux PTZ, vous savez... - Le Préatozéro ?
01:08 - Oui, le Préatozéro, déjà pour aider nos primo-accédants, nos jeunes ménages,
01:13 à acquérir un logement pour la première fois, celui-là il est supprimé.
01:17 Alors il est prolongé pour le collectif, pour acheter un appartement,
01:21 à des termes et des ratios dont on ne connaît pas aujourd'hui les teneurs, peut-être cet après-midi.
01:27 Donc oui, première grosse déception, 80% des Français veulent acquérir un logement individuel,
01:34 une maison individuelle, avec terrasse ou pas, mais en tout cas voilà.
01:38 Et puis les avantages fiscaux, ce que l'on appelle des bailleurs privés,
01:43 des gens qui ont les moyens de mettre 200-300 000 euros pour acheter un logement,
01:47 et ensuite pouvoir le louer à des gens plus modestes,
01:49 et bien ceux-là, c'est pareil, le Pinel va mourir de sa belle mort dans quelques mois.
01:56 - Voilà, le dispositif Pinel, qui ouvre droit à une réduction d'impôt sur l'achat d'un logement,
02:01 à mettre en location, ne sera pas prolongé effectivement au-delà de 2025, nouvelle déception pour vous également.
02:06 - Voilà, vous savez, nos concitoyens, un peu comme tout le monde,
02:08 s'ils n'ont pas une petite carotte et puis un retour sur investissement,
02:11 vu déjà aujourd'hui l'inflation et les taux, ils vont se détourner, ils vont aller ailleurs.
02:17 Donc on le sait, ce ne sont pas des niches fiscales, ce sont des avantages fiscaux
02:22 qui ont la vertu de loger des concitoyens modeste et plus modeste.
02:25 Aujourd'hui, on ne veut pas avoir cette dimension politique, tant pis,
02:29 nous les professionnels, en tout cas, on aura prévenu que la catastrophe,
02:33 la bombe sociale, comme le dit le ministre du logement lui-même, il y a déjà huit mois,
02:38 va arriver avec cette casse sociale derrière.
02:41 - On vous écoute effectivement, déception, mauvaise nouvelle pour le secteur du bâtiment.
02:45 Vous mentionniez, Olivier Salron, les primo-accédants,
02:48 les taux d'intérêt rendent l'accès à l'emprunt en général plus difficile
02:52 et particulièrement pour eux, ce sont les premiers recalés,
02:54 60% des primo-accédants se voient refuser le prêt à la banque.
02:59 - Voilà, le Haut Conseil à la Stabilité Financière,
03:01 c'est ceux qui vont donner un peu les critères, les obligations pour nos jeunes ménages ou pas,
03:05 pour pouvoir contracter un prêt, eh bien, ces obligations sont tellement hautes aujourd'hui
03:10 que 60% de nos Français, de nos concitoyens,
03:13 qui poussent la porte d'une agence bancaire sont refusés,
03:15 60% repartent sans leur prêt, c'est la réalité d'aujourd'hui.
03:20 Donc, je n'ose même pas imaginer ce qui va se passer dans les années 2024-2025.
03:25 Nous, les professionnels de la construction et du bâtiment,
03:27 bien sûr, c'est notre activité première, bien évidemment.
03:32 Le logement neuf, c'est 30% de l'activité du bâtiment.
03:35 - Quasiment un tiers de votre activité globale, le neuf, les programmes neufs.
03:38 - Donc, aujourd'hui, il est en chute libre de 30-35%,
03:41 au bas mot, c'est 16 milliards d'euros par an de moins,
03:45 donc, évidemment qu'on va ajuster la voilure,
03:48 si les mesures ne sont pas agrémentées de cet après-midi,
03:51 peut-être un travail parlementaire que nous allons faire nous aussi,
03:54 avec l'ensemble des parlementaires de tous bords,
03:56 pour essayer de redresser la barre.
03:58 - Avec des annulations de vent, de transactions qui s'envolent,
04:02 c'est l'un des autres voyants rouges qui s'allument et que vous pointez, Olivier Salron.
04:06 - Bien sûr, sobriété foncière, ne pas construire, construire c'est mal,
04:09 mère bâtisseur, mère battue, plus réglementation environnementale
04:14 qui renchérit le prix des maisons, crise des matériaux, crise du...
04:17 bon, voilà, psychologiquement aussi.
04:19 - Crise des matériaux, toujours d'actualité ?
04:20 - Oui, tout à fait, c'est-à-dire qu'on est sur un point très haut,
04:23 aujourd'hui, acheter une maison, par exemple, ou un appartement,
04:26 c'est entre 20 et 25% plus cher qu'il y a trois ans,
04:29 donc ça ne passe pas dans les critères de crédit,
04:32 donc on n'achète pas, donc on ne fait pas tourner la machine,
04:35 parce que les gens qui arrivaient à acheter un logement, même modeste,
04:38 ils libéraient du logement social, mais aujourd'hui, le système est bloqué.
04:41 - Vous parlez des maires, il y a un problème de libération du foncier, localement, Olivier Salron ?
04:46 - Oui, il y a des annonces sur le foncier qui sont plutôt pas mal,
04:48 on loue le foncier au lieu de l'acheter, etc.
04:50 Bon, aujourd'hui, ça a été expérimenté,
04:53 il n'y en a que quelques dizaines qui ont mordu à la meçon en France,
04:55 c'est un système anglo-saxon, on va voir ce que ça va donner.
04:58 Mais aujourd'hui, c'est l'urgence, c'est-à-dire qu'il y a pratiquement
05:01 trois millions de nos concitoyens qui ne sont pas logés,
05:04 c'est la Fondation Herbert Pierre qui le dit,
05:05 donc aujourd'hui, ce n'est pas la médecine des plantes,
05:08 la médecine douce qu'il faut annoncer cet après-midi,
05:10 c'est un électrochoc.
05:11 Aujourd'hui, on est très déçus, on n'a même pas le cachet d'aspirine.
05:14 - Bon, sur l'homéopathie, donc, si l'on vous suit, Olivier Salron,
05:17 le chantier de la rénovation énergétique, il faut changer de braquet ?
05:20 - Aujourd'hui, 55% de nos chiffres d'affaires, c'est la rénovation
05:23 de la rénovation énergétique.
05:24 - Énorme chantier !
05:25 - Il faut changer de braquet.
05:26 Aujourd'hui, rien n'est chiffré, on demande une majoration
05:29 de ma prime rénov' pour que nos concitoyens puissent justement
05:32 rénover d'une façon plus globale leur logement.
05:35 Une rénovation globale, ça coûte entre 30 000 et 50 000 euros.
05:38 Quand on a un reste à charge à 2 000, déjà, c'est une aide extraordinaire,
05:42 mais quand on a un reste à charge à 2 000, quand on est un foyer
05:45 très modeste, eh bien, on ne peut pas engager les travaux.
05:48 Donc, il y a une réflexion supplémentaire à passer.
05:51 On a tout mis sur la table.
05:52 Nous, on a fait plus de 30, 40 propositions pendant ces 8 mois.
05:57 Je vous rappelle quand même qu'il y a deux ans, on a participé
06:00 à la commission REPSAMEN qui était là pour lutter sur la crise
06:03 du logement neuf, déjà, il y a deux ans.
06:05 Donc, on ne pourra pas dire qu'on n'a pas prévenu.
06:07 - On entend votre déception, en tout cas, à l'annonce de ces mesures
06:11 sur la crise, pour tenter de régler la crise du logement.
06:14 Le compte n'y est pas, c'est ce que vous nous dites ce matin.
06:16 Merci Olivier Salron, président de la Fédération française du bâtiment.
06:19 Merci à vous.