• il y a 2 ans
Une fois écartée l’explication manichéenne, issue des agences de com’ américaines et répandue dans toute la presse occidentale, d’un conflit lu comme l’agression des "gentils ukrainiens" par de "méchants russes" en mal de territoire, plusieurs lectures sont possibles de cette guerre. Aujourd’hui, l’issue militaire n’est pas encore connue. Cependant, la supériorité d’artillerie des russes et leur maîtrise quasi totale du ciel, sont telles que la victoire ukrainienne semble bien peu probable. Pour le moment, ils tiennent grâce à la colossale capacité de soutien financier américaine, mais pour combien temps ? Mais le plus important est ailleurs : ce conflit se produit au moment d’une métamorphose du monde, et il l’accélère puissamment. C’est de la fin de l’hégémonie occidentale, et de l’avènement d’un ordre beaucoup plus international et multipolaire qu’il s’agit. François Martin, journaliste et essayiste, qui a travaillé dans le commerce international pendant 40 ans présente son dernier ouvrage "l'Ukraine un basculement du monde".

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Transcription
00:00 Le scandale du fonds Marianne a mis en scène le meilleur et le pire de notre époque.
00:04 S'agissant du pire, un ministre, Marlène Schiappa,
00:07 qui joue avec l'argent des contribuables distribué sous couvert de laïcité.
00:11 Au lendemain de l'assassinat de l'enseignant Samuel Paty par un islamiste,
00:15 ce fonds a été créé pour soutenir les acteurs de la lutte contre la radicalisation en ligne.
00:21 En réalité, les fonds serviront à alimenter des caisses d'associations controversées
00:26 comme l'observatoire du conspirationnisme qui tente de mettre hors jeu et de discréditer
00:31 toute personne qui ne validerait pas le point de vue de ses rédacteurs.
00:35 Deux structures, l'union des sociétés d'éducation physique et de préparation militaire
00:39 et reconstruire le commun ont respectivement perçu 355 000 et 330 000 euros.
00:47 Ce sont les deux plus importants bénéficiaires du fonds.
00:50 Ces deux associations ont éprouvé de lourdes difficultés à justifier l'usage de la manne publique.
00:56 En revanche, l'affaire du fonds Marianne a été largement rendue publique
00:59 grâce à la présence de médias alternatifs indépendants.
01:02 La liberté de ton et de traitement de TV Liberté permet aujourd'hui de pointer du doigt
01:07 des scandales et des manipulations qui seraient sans nous passées sous silence.
01:12 En participant au financement de TV Liberté, vous permettez le maintien et le développement
01:16 d'un média à contre-courant qui a déjà 10 ans et qui s'inscrit résolument dans le temps long.
01:22 On compte sur vous.
01:24 [Musique]
01:47 [Générique]
02:05 Chers amis téléspectateurs de TV Liberté, j'ai le plaisir aujourd'hui de recevoir M. François Martin.
02:12 Bonjour.
02:13 Bonjour M. Martin. Ce n'est pas la première fois que je reçois M. Martin.
02:18 Certains d'entre vous s'en souviennent peut-être.
02:20 Je l'avais reçu à l'occasion de la publication d'un de ses ouvrages "Mondialisation sans peur".
02:26 Maintenant, M. Martin, nous gratifie d'un deuxième, enfin, pas le seul, c'est le troisième ouvrage,
02:34 "L'Ukraine, un basculement du monde".
02:36 C'est ça.
02:37 Sujet délicat, sujet difficile, sujet douloureux.
02:40 Sérieusement.
02:41 Dont nous allons parler de façon tout à fait libre et, je le crois, sans parti pris,
02:48 quelles que soient nos analyses.
02:49 Tout à fait.
02:50 J'ai lu avec beaucoup d'intérêt ce livre, même si mes analyses ne rejoignent pas toujours celles de M. François Martin.
02:59 Mais avant de commencer, cher monsieur, j'aimerais qu'une fois de plus vous présentez à nos téléspectateurs.
03:09 Vous avez un parcours extrêmement intéressant.
03:12 Vous êtes journaliste, essayiste aujourd'hui, mais vous avez été diplômé de l'ESSEC.
03:20 L'ESSEC et de l'HEC.
03:21 D'HEC, auditeur à l'IHEDN, je rappelle, pour les téléspectateurs,
03:26 Institut des Hautes Études de Défense Nationale.
03:28 Et de l'INESJ, l'Institut des Hautes Études de la Sécurité et de la Justice,
03:32 qui est le pendant pour les policiers et les magistrats.
03:34 Pour les questions de sécurité intérieure.
03:36 Pour les policiers et les magistrats, absolument.
03:39 Vous avez travaillé pendant 40 ans dans le commerce international.
03:41 Oui, tout à fait. Après avoir vécu à l'étranger pendant 20 ans de ma vie, plus de 20 ans.
03:46 Je suis venu au Congo, avoir vécu au Sénégal, au Maroc, ensuite en Espagne pendant 10 ans, ensuite au Brésil.
03:53 Ensuite, je suis rentré dans une société de commerce international, de l'alimentaire.
03:57 Et j'ai fait ensuite, j'ai fait plusieurs sociétés,
03:59 mais je n'ai fait que du commerce international de l'alimentaire pendant 40 ans sur une centaine de pays.
04:05 Afrique d'abord, Amérique latine, Moyen-Orient, Asie, Europe centrale, entre 88 et 92.
04:12 Donc c'est à ce titre que je connais un petit peu, même si je ne connais pas l'Ukraine.
04:16 J'ai été une fois en Russie, à Rostov-sur-le-Don précisément.
04:19 Mais surtout, je connais bien tous les pays d'Europe centrale que j'ai fait pendant la période avant et après la chute du mur, juste après.
04:26 Donc je sais comment ça fonctionne.
04:28 Et je sais comment fonctionnent les pays corrompus aussi.
04:31 Donc voilà, j'ai une certaine expérience.
04:34 – Votre carrière a été un bon observatoire de la réalité culturelle, sociale et politique de beaucoup de pays dans le monde.
04:43 – Ce qui manque beaucoup à beaucoup de spécialistes qui observent,
04:46 qui observent dans les livres, qui observent sur place,
04:49 mais qui n'ont pas forcément de point de comparaison avec d'autres pays
04:53 où on retrouve les mêmes caractéristiques, même si les cultures sont différentes.
04:57 – Exactement. – Alors vous parlez six langues, vous êtes président du club HEC, Géostratégie.
05:04 – C'est ça, je précise que je ne m'exprime pas au nom du club HEC.
05:07 – Oui bien sûr, vous exprimez. – C'est important de le dire, oui, c'est ça.
05:10 – Et vous avez co-fondé avec Paul Maricouteau l'excellente revue "Le Nouveau Conservateur".
05:16 – Et nous avons en même temps créé un cercle qui s'appelle le Cercle Eleuteria,
05:22 qui est un cercle de réflexion qui réunit un certain nombre de géopoliticiens
05:27 qui, disons, n'étaient pas satisfaits de la façon dont, c'est le moins de le dire,
05:33 la façon dont les médias considéraient l'affaire ukrainienne
05:37 en considérant qu'il y avait une partie de l'échiquier politique international
05:43 qu'on avait interdiction de regarder, en d'autres termes, toute la partie américaine.
05:49 – C'est-à-dire que si les américains ou n'existaient pas, ou n'avaient pas de stratégie,
05:52 ils étaient juste des gens gentils qui essayaient d'aider les pauvres ukrainiens.
05:57 – C'est ça, oui. – Alors je montre que c'est dans le livre que…
05:59 – Dans le livre, évidemment, vous montrez que la réalité, pour le moins, est plus complexe.
06:03 – Très différente. – Plus complexe.
06:05 Alors, si j'aborde votre livre, il y a des choses, beaucoup de choses que vous dites
06:13 qui sont extrêmement intéressantes et qui méritent d'être rappelées.
06:18 Par exemple, vous dites, vous commencez par un fait qui, moi aussi, m'a énormément frappé
06:24 au cours de ma carrière parlementaire, tant à l'Assemblée nationale qu'au Parlement européen,
06:30 c'est que, après la chute de l'Union soviétique, où l'on aurait dû se réjouir,
06:36 après tous les pays d'Europe de l'Est, on leur avait rendu leur liberté,
06:42 même un certain nombre de pays de l'ancien Empire tsariste,
06:46 comme les pays baltes, comme précisément l'Ukraine,
06:49 les pays du Caucase, d'Asie centrale, etc. étaient devenus indépendants.
06:55 Bon, on aurait dû s'en réjouir et entamer, me semble-t-il, une politique de coopération
07:02 pacifique, fructueuse, mutuellement, avec la Russie,
07:08 immense empire, mais peuplée, j'allais dire d'Européens comme nous,
07:14 chrétiens, même un peu différents de nous, bien sûr, mais voilà.
07:18 Et c'est le contraire qui s'est produit. On a continué à vouloir affaiblir la Russie.
07:23 – Ça tient à deux faits, une erreur stratégique et une guerre perdue par Charles de Gaulle, je dirais.
07:29 La première erreur stratégique, c'est considérer que la guerre,
07:32 la Deuxième Guerre mondiale, s'arrête en 1945.
07:36 En fait, elle ne s'arrête pas en 1945 parce que les Américains ont deux ennemis.
07:40 L'un, ce sont les nazis et l'autre, ce sont les soviétiques.
07:44 Et en fait, celui qui les inquiète le plus, c'est les soviétiques.
07:48 Parce que les soviétiques ont une arrière-cour géostratégique extrêmement importante,
07:54 des ressources extrêmement importantes. – Tout comme la Sibérie, bien sûr.
07:57 – Ils ont une idéologie anti-américaine, anti-libérale extrêmement forte.
08:02 Ils sont, à cette époque-là, et ils vont le montrer après, dans les années 50,
08:07 avec les pays du Tiers-Monde, etc. Ils sont beaucoup plus dangereux pour les États-Unis
08:12 que la puissance nazie, qui est une puissance continentale qui n'a pas d'énergie,
08:16 comme vous le savez, puisqu'elle a, quand elle démarre la guerre,
08:19 elle a trois semaines d'essence à partir du charbon.
08:23 Elle a impérativement besoin d'aller chercher d'autres ressources d'énergie.
08:27 – Ou alors en Roumanie, etc. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale.
08:30 La Deuxième Guerre mondiale, c'est terminé.
08:32 – Non, la Deuxième Guerre mondiale, pour moi, s'arrête lorsque les Américains
08:35 ont tué leur deuxième ennemi de l'Union soviétique, c'est-à-dire en 91.
08:39 C'est à ce moment-là que la Deuxième Guerre mondiale s'arrête.
08:42 Et à cet instant même, si vous voulez, la Russie…
08:46 – L'Union soviétique qui était quand même leur allié pendant la guerre, théoriquement.
08:50 – Oui, mais Branca, sur lequel je m'appuie, qui est donc…
08:53 – Éric Branca, oui, journaliste.
08:55 – Éric Branca, qui écrit ce livre absolument formidable,
08:57 montre que les Américains poursuivent pendant toute la guerre,
09:01 en fait, deux stratégies parallèles et concurrentes.
09:04 Une, c'est de combattre les nazis avec les soviétiques,
09:08 et l'autre, c'est de combattre les soviétiques avec les nazis.
09:11 C'est-à-dire qu'ils essayent pendant toute la guerre de retourner les nazis
09:15 pour que les nazis rentrent dans leur camp pour aller combattre les soviétiques.
09:19 Ils n'y arrivent pas parce que Kursk casse la Wehrmacht,
09:23 et d'autre part, parce que Churchill ne veut pas.
09:27 C'est pour ça que Churchill pousse de Gaulle, alors que les Américains poussent…
09:32 – Non, mais c'est l'idée. Les Allemands, à la fin de la guerre,
09:35 beaucoup de dirigeants allemands auraient bien voulu…
09:37 Je préfère parler d'Allemands parce que les nazis,
09:40 c'est une réalité politique, d'être plaisante, c'est bien évident,
09:45 mais beaucoup auraient voulu… – Rentrer dans le camp de l'Ouest.
09:51 – Arrêter les hostilités à l'Ouest et pouvoir se retourner librement contre la Russie.
09:56 Et ce sont les anglo-saxons qui s'y sont opposés.
09:59 – À l'époque… – Je rappelle que Roosevelt, quand même,
10:02 était très pro-soviétique. – À l'époque.
10:05 Mais je reste persuadé, et Branca le montre, qu'en fait, il y a un problème dans le temps.
10:13 Parce que c'est vrai qu'ils cassent le nazisme dans un premier temps,
10:17 mais les soviétiques restent leurs principales ennemies.
10:20 Sauf qu'ils vont le faire progressivement.
10:23 Et ce que je dis, c'est qu'en 1991, lorsque leur deuxième ennemi tombe,
10:29 à ce moment-là, ils ont gagné véritablement la Deuxième Guerre mondiale.
10:33 – Mais ils devraient être rallis. Ils devraient maintenant tendre la main,
10:37 comme ils l'ont fait. – Ça, c'est l'erreur que l'on fait.
10:40 Ça, c'est précisément l'erreur que l'on fait.
10:42 Parce qu'au moment même où la Russie redevient fréquentable,
10:47 à ce moment-là, le mur de Berlin est tombé.
10:50 Donc la possibilité du rapprochement entre la Russie et l'Europe,
10:56 et en particulier entre la Russie et l'Allemagne, devient possible.
11:00 Et à ce moment-là, le risque de l'existence de la Russie devient essentiel pour l'Amérique,
11:09 parce que la possibilité qu'il existe un pôle européen
11:15 avec les industries européennes et avec l'énergie russe est possible.
11:21 Donc ce que je dis dans le livre, c'est que le rapprochement,
11:24 la détente qu'il y a eu à ce moment-là, est stratégique pour les Russes,
11:28 et tactique pour les Américains.
11:31 Elle est stratégique pour les Russes, parce que les Russes ont besoin d'aller à l'Ouest
11:35 pour trouver des marchés, mais elle est tactique pour les Américains,
11:38 parce que les Américains cherchent à détruire la Russie,
11:42 justement pour que ce pôle européen ne se construise pas,
11:46 mais ils ne peuvent pas le faire, parce que la Russie reste le pays du monde le plus nucléarisé.
11:53 Donc ce que je pense, moi, c'est que c'est à cet instant,
11:57 lorsque l'Union soviétique tombe, que la Troisième Guerre mondiale,
12:02 sur le plan géopolitique, commence.
12:04 Parce que comme les Américains ne peuvent pas aller casser la figure aux Russes,
12:09 parce que les Russes sont trop armés, en fait, ils vont monter le système
12:14 consistant à les manger petit à petit.
12:17 – Alors c'est ce que vous dites, vous dites que…
12:19 – Et je me souviens, juste pour terminer ça, que lorsque j'ai créé mon club,
12:23 le premier intervenant de mon club, c'était Hubert Vidrine.
12:26 Et c'était…
12:27 – Je rappelle pour nos téléspectateurs, ancien ministre des Affaires étrangères,
12:32 de François Mitterrand, mais je dois dire, un homme dont j'apprécie souvent les analyses,
12:37 qui sont assez réalistes.
12:39 – Absolument, et je me souviens très bien que c'était donc en 2007,
12:43 juste avant la crise des subprimes, j'avais créé ce club,
12:46 donc on a reçu Hubert Vidrine, et je lui ai posé la dernière question,
12:50 après sur la recomposition du monde, et je lui ai dit,
12:56 qu'est-ce qui ferait baisser la tension entre les Russes et nous ?
13:01 Il a répondu, mais du tac au tac, il a dit,
13:04 je leur donnais une garantie comme quoi l'OTAN ne s'étendra pas plus à l'Est.
13:09 – Absolument, ça c'est ce qui avait été promis,
13:10 – Et on était en 2007 à Gorbatchev,
13:12 – On était en 2007 à Gorbatchev,
13:13 – Voilà.
13:14 – C'est ce qui avait été promis, verbalement, à Gorbatchev,
13:15 et c'est l'inverse qui s'est passé.
13:16 – Donc la chose était très claire, sauf que nous, nous ne la voyions pas,
13:19 mais les autres la voyaient, y compris les Russes.
13:21 – Oui bien sûr, bien sûr.
13:22 Alors là, vous dites qu'à l'égard de la Russie, le monde occidental,
13:28 en particulier les USA, puisque nous sommes sous le leadership de Washington,
13:36 et c'est livré à quatre provocations.
13:39 – Oui, c'est ça.
13:40 – La guerre du Kosovo, on va à la guerre contre la Serbie.
13:46 – Bien sûr, bien sûr, qui était le premier…
13:49 – La Serbie traditionnelle alliée des Russes.
13:51 – Le premier pierre dans le jardin de l'influence russe.
13:54 – Absolument.
13:55 – Alors, ici, les patrons, c'est pas vous, c'est nous.
13:58 Donc c'est une affirmation géopolitique américaine qui était extrêmement mal ressentie.
14:03 – Alors que l'OTAN n'avait aucune vocation à intervenir contre la Serbie.
14:07 – Voilà, bombardés pendant 72 jours, je rappelle, sans discontinuer.
14:11 Donc quand on dit que les Russes bombardent les populations civiles,
14:16 d'ailleurs c'est pas vrai, ils bombardent les objectifs militaires
14:22 et ils bombardent les soldats ukrainiens
14:27 qui ont choisi comme stratégie de se défendre à l'intérieur des villes.
14:32 C'est ça la caractéristique.
14:33 – Oui, oui, je le crois volontiers,
14:36 mais nous n'avons sur ce sujet que des informations absolument unilatérales.
14:39 Alors vous dites, la guerre du Kosovo, l'annonce que la Géorgie et l'Ukraine
14:43 avaient vocation à rejoindre l'OTAN, la non-réponse aux demandes répétées des Russes
14:49 pour un nouveau pacte de sécurité en Europe.
14:52 – Tout à fait, tout à fait.
14:53 – Et enfin l'affaire de Maïdan, c'est-à-dire la manifestation suivie de coups d'État
14:59 et qui a remplacé…
15:00 – Dont on sait très bien que la CIA était partie prenante,
15:03 avec les services secrets polonais, enfin on connaît toute l'histoire,
15:07 sauf qu'on ne la médiatise pas, mais on sait très bien ce qui s'est passé.
15:10 – Je comprends bien.
15:11 – Et ensuite, pardon cher ami, une euthanisation du pays complète après 2014,
15:20 dont on ne parle pas, c'est-à-dire qu'on dit "ah mais il n'est pas parti de l'OTAN",
15:24 c'est comme la Finlande…
15:26 – Ben maintenant c'est officiel.
15:29 – Oui, aujourd'hui, mais c'est-à-dire hier, avant que ça ne soit officiel,
15:32 ces pays-là étaient déjà euthanisés, c'est-à-dire qu'ils s'entraînent avec l'OTAN,
15:38 ils reçoivent les subsides de l'OTAN, au lieu de s'adapter à l'OTAN,
15:41 ça s'appelle le partenariat pour la paix, Ukraine-OTAN.
15:45 Donc on a euthanisé totalement l'Ukraine, d'ailleurs,
15:48 Victor Yanuland a dit qu'ils avaient dépensé d'abord 5 milliards de dollars
15:52 pour faire sauter le gouvernement, gouvernement d'ailleurs dans lequel,
15:56 premier gouvernement dans lequel y mettent, comme ministre des Finances,
16:00 on ne le sait pas, la chef du service économique de l'ambassade américaine à Kiev,
16:06 qui est une américaine, à qui on donne la nationalité ukrainienne,
16:12 le jour de son intronisation, c'est comme si dans le prochain gouvernement Macron,
16:17 on mettait le chef du poste économique de l'ambassade américaine
16:21 comme notre ministre des Finances, et après on dirait,
16:24 nous sommes un pays libre, indépendant et souverain, voilà.
16:28 – Alors vous montrez tout ça très bien, et évidemment vous êtes de ceux qui disent
16:35 que finalement le conflit était larvé par toutes ces provocations,
16:41 – Bien sûr, c'est évident.
16:43 – Qu'il est devenu ouvert et qu'il commence en 2014,
16:47 et qu'à ce moment-là le gouvernement ukrainien prend des mesures,
16:54 enfin contre les populations russophones de l'Est, du Donbass.
16:58 – Il ne prend pas des mesures, il engage une guerre civile effroyable
17:02 qui va durer 8 ans et qui va faire 20 000 morts, c'est bien plus qu'une provocation,
17:07 c'est véritablement une guerre civile.
17:09 – Alors sur tous ces sujets-là, je peux vous suivre,
17:14 il n'en reste pas moins que vous stigmatisez d'ailleurs ceux qui disent,
17:20 je cite, "ce sont quand même bien les russes qui ont envahi l'Ukraine".
17:24 – Je suis absolument contre cette thèse.
17:27 – Vous êtes totalement contre cette formule,
17:29 mais je la reprends quand même un peu à mon compte, je vais vous dire pourquoi.
17:33 Parce que je pense quand même que si Vladimir Poutine s'était contenté
17:39 à la rigueur de reconnaître les républiques de Donetsk, de Lugansk,
17:43 les autonomes du Donbass, et d'attendre éventuellement les attaques de Kiev,
17:52 il ne serait pas apparu comme il apparaît quand même pour le plus grand nombre,
17:57 y compris dans notre pays, comme l'agresseur.
18:00 – Mais il n'est pas l'agresseur, il n'est pas l'agresseur,
18:03 on oublie simplement les 8 ans de guerre civile et les 20 000 morts.
18:07 – Oui mais d'accord, mais… – Cher Bruno…
18:10 – Non mais la guerre civile, excusez-moi, le fait qu'il y ait une guerre civile
18:13 en Ukraine, qu'il y ait un problème en Ukraine,
18:15 ce n'est pas forcément une justification pour d'autres pays d'interveiller en Ukraine.
18:19 – Sauf, cher Bruno, si ce sont des russes qui sont ostracisés,
18:22 qui sont bombardés pendant 8 ans, je veux dire…
18:25 – D'accord, mais quand vous déployez des troupes,
18:30 vous déclarez que c'est une manœuvre tactique, tout de suite autour de Kharkov,
18:35 Kharkiv, peu importe, ou Kiev, dans l'espoir sans doute de faire tomber le gouvernement,
18:41 vous ne limitez pas, vous ne pouvez pas dire que vous vous limitez
18:44 à la protection des populations russophones du Donbass.
18:46 Moi je vais vous dire ce que je pense brièvement.
18:48 – Et je vous répondrai.
18:49 – Je pense que j'adhère à ce que vous dites sur les provocations,
18:54 sur l'attitude de l'OTAN, sur l'erreur, enfin la faute monstrueuse
19:00 qui a consisté à continuer à attaquer la Russie constamment,
19:04 au lieu d'avoir une coopération… j'ai plaidé cela pendant 30 ans,
19:07 ceci étant, je crois que Vladimir Poutine a fait une grave erreur,
19:10 je vous dis très brièvement pourquoi.
19:12 Il ne voulait pas l'OTAN, l'OTAN était en état de morte cérébrale,
19:16 comme disait le président Macron.
19:19 – Je n'ai jamais pensé ça.
19:21 – Jamais l'OTAN n'a été aussi fort, et maintenant des pays qui étaient neutres
19:24 désirent adhérer à l'OTAN, ils ne voulaient pas l'Union Européenne,
19:27 j'ai été au Parlement Européen pendant 30 ans, je peux vous dire
19:30 que l'Union Européenne, elle tenait quand même l'Ukraine à distance,
19:33 respectueuse et amicale, avec une gaffe, en leur disant
19:36 "vous voulez adhérer, c'est très bien, commencez par lire,
19:39 commencez par adopter chez vous la pile de règlements que voilà,
19:43 bon, maintenant on lui rouvre les bras, non seulement à l'Ukraine,
19:46 mais à Moldavie".
19:48 Vladimir Poutine ne voulait pas d'une puissance hostile
19:52 sur son flanc sud-ouest, et considérait que les Ukrainiens
19:56 légitimement étaient des frères des Russes, sinon des frères des cousins,
20:01 et c'est vrai que la plupart des Ukrainiens n'avaient pas d'hostilité
20:05 à l'égard des Russes, maintenant je crois que les choses
20:08 ont substantiellement changé dans ce domaine.
20:10 – Donc je pense que ses buts de guerre étaient réduits à néant
20:16 dans les trois premiers jours de son intervention militaire.
20:19 – Je ne pense pas, je ne partage pas du tout votre avis
20:21 pour un certain nombre de raisons, d'abord parce que je vous ai montré,
20:25 je n'ai pas développé les aspects historiques, je n'ai pas développé
20:28 ce que développe Annie Lacroix-Riz sur l'utilisation par les Américains
20:34 à travers Guélen puis Bandéra, de la déstabilisation de l'Ukraine,
20:39 de l'Est, de l'Ouest, tout ça je n'en ai pas parlé,
20:44 mais on voit qu'il y a un processus, je vous ai parlé de Védrine,
20:48 qui est continu, il y a un certain nombre d'intellectuels russes
20:52 qui avaient écrit il y a 15 ans, des livres disant
20:56 "la troisième guerre mondiale aura lieu et les Américains la perdront",
21:00 ça c'est Sergei Glaziev qui est le conseiller de Poutine
21:05 que vous connaissez, qui est celui qui est chargé de mettre en route
21:08 le processus de, je dirais, de Bretton Woods bis avec les manettes.
21:13 Il a écrit ce livre il y a 15 ans, ça veut dire que tous les intellectuels russes
21:17 savaient qu'il y aurait la guerre parce que les Américains poussaient, poussaient, poussaient
21:20 et la tectonique des plaques faisait qu'il y aurait la guerre.
21:23 Donc lorsque Victoria Nuland construit le gouvernement
21:30 et qu'elle l'annonce par ce coup de téléphone à l'ambassadeur d'Amérique,
21:36 - Rappelez-vous, notez l'expression qui est faite, qui est Victoria Nuland ?
21:39 - Elle a dit "Fed the Europeans" qui est donc la numéro 3 du département d'État chargé de l'Ukraine
21:44 dont le mari est M. Kagan qui est le chef des néoconservateurs,
21:49 donc ceux qui poussent à la guerre par tous les moyens.
21:52 Donc elle annonce le gouvernement, elle dit "voilà il faut que ça soit un tel, un tel, un tel"
21:57 et elle fixe au gouvernement sa ligne qui va être celle des 8 ans qui suivent,
22:04 à savoir pousser les Russes au conflit armé.
22:07 Et quand les Russes rentrent en guerre, moi j'écris un article
22:12 et le titre de mon premier article sur le sujet c'est
22:15 "Et le piège vient de se refermer" 3 petits points sur Poutine.
22:19 - Ah mais je suis d'accord que c'est un piège, oui je crois que c'est un piège.
22:22 - Mais ce que je pense... - Je crois que c'est un piège parce que,
22:24 excusez-moi de vous interrompre, parce que le problème quand même, voyez-vous,
22:28 moi je suis juriste, bon alors c'est que les juristes sont quelquefois un peu éloignés des réalités.
22:33 Je suis d'accord mais il ne faut quand même pas oublier que ces fameuses frontières de l'Ukraine,
22:37 Crimée incluse, alors que je suis sûr que les gens de la Crimée sont à 98% pro-russes,
22:44 il n'y a aucun doute. - Ce n'est pas qu'ils sont pro-russes,
22:46 c'est qu'ils sont russes. - Ils sont russes, ils sont russes,
22:48 bon ils sont russes et si on les consultait par une autre consultation,
22:52 ils ont été consultés, mais si on la faisait sous contrôle de l'ONU etc.
22:55 - Et les soldats qui avaient été chargés d'aller se retourner contre les populations,
23:00 à l'époque, il y a eu 2000 soldats qui sont rentrés en Ukraine et les 20 autres milles sont restées en Crimée.
23:07 - Bien sûr, bien sûr. - Ceux qui sont rentrés, c'est les ukrainiens.
23:11 - Je suis d'accord avec vous, mais il n'en reste pas moins que la Russie,
23:15 je parle bien de la Russie, République de Russie après l'effondrement de l'Union soviétique,
23:20 a de façon tout à fait solennelle reconnu les frontières de l'Ukraine,
23:25 en échange notamment du fait que l'Ukraine, à mon avis imprudemment,
23:30 qui était une puissance nucléaire, qui a évité une partie de l'arsenal nucléaire soviétique,
23:37 le rende, alors vous comprenez bien que dans ces conditions-là,
23:43 même si je ne nie pas la situation dramatique du Donbass,
23:48 c'est assez... je crois que le gouvernement russe est tombé dans le piège qui doit être étendu.
23:56 - À l'époque, oui, le problème c'est "pouvaient-ils faire autrement ?"
23:59 Moi, je ne le pense pas. Je ne le pense pas parce qu'en 2007,
24:03 Poutine dit "il ne faut pas aller plus loin", ligne rouge.
24:08 En 2008, l'OTAN dit "l'Ukraine et la Géorgie ont vocation à rentrer".
24:15 Je vous rappelle qu'en 2021, Zelensky, qui d'abord avait été élu à 70%
24:22 pour faire remettre en forme les accords de Minsk,
24:25 dès qu'il est à la tête de l'État, son premier voyager dans la communauté européenne à Bruxelles
24:31 pour dire "accueillez-moi et donc faites-moi rentrer dans l'OTAN",
24:34 je vous rappelle qu'en 2021, il signe l'ordre d'invasion des troupes du Donbass,
24:42 que lorsque les Russes interviennent, il y a 200 000 soldats ukrainiens
24:46 qui sont devant le Donbass, que toute la ligne devant le Donbass
24:49 a été construite comme une énorme ligne au Maginot,
24:52 ce dont on s'aperçoit aujourd'hui, et qu'un mois avant,
24:56 il demande qu'on lui donne l'arme nucléaire. Il ne faut pas oublier ça.
24:59 Alors quand vous êtes Poutine, vous faites quoi ?
25:02 Vous attendez comme ça en disant "que Dieu me garde jusqu'à ce que le jour… "
25:07 – Personne ne pense un seul instant que, même si l'extension de l'OTAN
25:13 était absolument détestable, et moi, autant j'étais contre la sortie de l'OTAN
25:19 à l'époque où le général de Gaulle l'a décidé,
25:22 autant j'étais favorable à la sortie de l'OTAN aujourd'hui,
25:25 alors qu'on a réintégré le dispositif militaire.
25:28 – Bien sûr.
25:29 – Mais je crois qu'on peut difficilement penser sérieusement,
25:33 comme le dit Poutine, ou comme il le laisse entendre,
25:39 qu'à la fin, on aurait attaqué la Russie. Je ne crois pas.
25:42 – On n'aurait pas attaqué la Russie, mais vous auriez eu le système…
25:50 ils auraient intégré l'OTAN, et après, on aurait mis des bombes nucléaires tactiques
25:56 à quelques minutes de Moscou. Poutine l'a annoncé le jour où il a fait l'intervention,
26:01 il s'est adressé au peuple russe, vous vous souvenez de ce qu'il leur a dit ?
26:04 – Je me souviens très bien.
26:05 – Il leur a dit "nous ne vivrons pas avec un pistolet sur la tempe".
26:09 On ne peut pas être plus clair sur les raisons de l'intervention.
26:12 – Oui, en somme, c'est la même attitude que les Américains à l'époque de Cuba.
26:16 – C'est tout à fait ça.
26:17 – Sauf que là, ça a dégénéré.
26:19 – C'est pour ça que mon deuxième article, mon cher Bruno,
26:22 c'est que c'est appelé "L'Ukraine, ce n'est pas les Sudètes, c'est Cuba".
26:27 C'est-à-dire que ce n'est pas l'invasion d'un pays pour des raisons de croissance territoriale,
26:34 auquel cas il serait rentré avec 1,5 million de soldats, pas avec 150 000 soldats,
26:38 mais c'est une défense existentielle de son territoire.
26:42 – De son territoire, disons du territoire ukrainien,
26:45 de la frange du territoire ukrainien qui est peuplée de Russes.
26:48 – Voilà, et surtout…
26:49 – Soyons quand même précis.
26:50 – Voilà, et surtout…
26:52 – C'est pas tout à fait la même chose.
26:53 – Et le deuxième objectif, c'est la démilitarisation.
26:55 – Sur le plan du droit international, c'est pas pareil.
26:56 – Et le deuxième objectif, c'est la démilitarisation de fait,
26:59 après avoir demandé pendant 10 ans ou 20 ans la démilitarisation de droit,
27:05 qu'il n'a jamais obtenue.
27:06 C'est ça les objectifs de Poutine.
27:08 – Je ne sais pas s'il les obtiendra, mais en tout cas,
27:10 on peut tomber d'accord sur le fait qu'à mon avis, de la part des Américains,
27:15 c'est une erreur stratégique majeure que cette politique,
27:18 qui précipite la Russie dans les bras de la Chine et de l'Inde,
27:21 c'est-à-dire qu'on voit la composition d'un ensemble de…
27:29 presque 3 milliards d'êtres humains, avec les immenses ressources de la Sibérie,
27:34 c'est exactement le contraire de ce qu'il aurait fallu faire.
27:37 – Bien sûr.
27:38 – Surtout les Américains qui vivent dans la perspective,
27:41 dans le Pacifique, d'une confrontation avec la Chine.
27:44 – Oui, mais si vous en revenez à la thèse qui est la mienne
27:50 sur le danger stratégique de la présence de la Russie
27:55 et de ses possibilités de se lier à l'Europe,
28:00 le fait de se réconcilier avec la Russie ne résout pas le problème, malheureusement.
28:05 Le problème stratégique reste le même.
28:08 Par contre, et ça c'est ce que je dis si on anticipe un peu sur la fin,
28:12 ce que je dis c'est que la Russie redevient fréquentable vis-à-vis d'eux
28:16 si l'Europe n'existe plus.
28:18 C'est pour ça que je dis que de même qu'ils poursuivaient deux objectifs
28:22 pendant la guerre, qu'ensuite ils ont toujours poursuivi deux objectifs.
28:28 Ils finançaient l'OS et l'FLN.
28:29 – C'est un peu de faux conclus, alors nous avons déjà dépassé le temps,
28:31 largement, je suis confus.
28:33 – D'accord.
28:34 – Excusez-moi de vous interrompre.
28:35 – Donc je finis juste avec une seule phrase pour dire que
28:38 ils poursuivent aujourd'hui deux objectifs.
28:41 L'un c'est de détruire la Russie et l'autre c'est de détruire l'Europe.
28:44 Et comme la Russie se défend et que l'Europe, ils poursuivent deux proies.
28:47 Il y a une proie qui se défend, l'autre qui ne se défend pas.
28:50 Donc qu'est-ce qu'ils vont manger, celles qui ne se défendent pas.
28:52 – Assurément.
28:53 Donc voici ce livre qui est donc très politiquement incorrect,
28:58 si l'on en croit la doxa actuelle, "L'Ukraine, un basculement du monde"
29:05 par François Martin, dont vous avez pu comprendre
29:10 qu'il était stimulant pour nos idées.
29:13 [Générique]

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