Parlons Vrai chez Bourdin - Emission du 30 juin

  • l’année dernière
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##PARLONS_VRAI_CHEZ_BOURDIN-2023-06-30##
Transcript
00:00:00 Donc, troisième nuit d'émeutes, après la mort de Nahel, les violences ont essémé dans tout le pays,
00:00:05 de Toulouse à Paris et sa banlieue de Marseille à Nantes.
00:00:08 Bilan, 667 interpellations.
00:00:11 Oui, et 249 policiers et gendarmes blessés la nuit dernière,
00:00:15 des scènes d'émeutes ici, des caméras de vidéosurveillance détruites, par exemple à Noisy-le-Sec.
00:00:24 Près de 500 bâtiments publics pris pour cible dans tout le pays, des magasins pillés aussi, par exemple,
00:00:31 en plein Paris avec le magasin Nike de Châtelet-les-Hailles, assaillis par la foule.
00:00:35 Les super-hêtes également prises pour cible, des vitrines brisées à un supermarché,
00:00:40 fracassés par une voiture bélier, un fast-food de Châtelet brûlé,
00:00:44 un camion volé à Drancy pour fracasser l'entrée d'un magasin ou encore un tramway brûlé à Lyon.
00:00:51 Une mairie de quartier a également été incendiée à Lille, un lycée en flamme, un marque en barreul dans le nord,
00:00:57 un dépôt de bus incendié à Aubervilliers, plusieurs commissariats pris pour cible à Avignon ou encore à Reims,
00:01:04 où des émeutiers se sont emparés d'uniformes et de matériel de police avant de prendre la fuite.
00:01:09 Parmi les scènes qui ont particulièrement choqué cette nuit, l'incendie sur un immeuble d'habitation à Mésières-les-Messes en Moselle.
00:01:15 (Cris de la foule)
00:01:25 Avec des écoles qui ont également été prises pour cible à plusieurs endroits,
00:01:29 40 000 policiers et gendarmes étaient mobilisés dans tout le pays cette nuit.
00:01:33 Une nouvelle réunion de crise est prévue à l'Elysée à 13h.
00:01:35 Rudy Mana, porte-parole d'Alliance Police Nationale, est avec nous en direct de Marseille.
00:01:40 Rudy Mana, bonjour.
00:01:42 Bonjour Jean-Jacques Bourdin.
00:01:43 Merci d'être avec nous Rudy Mana.
00:01:45 À Marseille aussi, il y a eu des affrontements, il y a eu du vandalisme, des pillages, des saccages.
00:01:54 Dernier bilan, je regarde, 56 personnes interpellées, 13 policiers blessés dans ces violences qui ont animé la nuit.
00:02:03 Dans le centre-ville de Marseille, Rudy Mana ?
00:02:06 Oui, tout à fait. On a vécu une situation insurrectionnelle, il faut le dire, dans le centre-ville de Marseille.
00:02:12 J'ai eu beaucoup de collègues qui, après leur nuit harassante, épuisante, m'ont appelé ce matin et m'ont dit "on a mal en notre France".
00:02:22 Alors nous, nous sommes des policiers qui gagnons 2 200 euros par mois,
00:02:26 on essaye juste de défendre la veuve et l'orphelin, on n'est pas un riche footballeur milliardaire qui a 15 gardes du corps et qui vit dans un palace.
00:02:34 Mais nous, on peut le dire, on a mal en notre France, parce que notre France est malade.
00:02:38 Et nous sommes extrêmement inquiets devant cette situation, parce qu'on a vu des jeunes déterminés qui étaient là uniquement pour détruire,
00:02:46 uniquement pour casser, et qui ensuite ont pillé la totalité des magasins qui se trouvaient en centre-ville, et de préférence des magasins de luxe.
00:02:57 Il y avait des groupes de jeunes un petit peu partout, de ce que me disent les collègues très très très jeunes,
00:03:06 de ce que me disent les collègues, il y avait très peu de relations avec Nahel en fait, ils ont profité de ce moment-là pour se rassembler,
00:03:14 et pour casser, en se donnant ce prétexte-là.
00:03:17 Mais je peux vous dire que beaucoup m'ont dit ce matin "si ça n'évolue pas, ou si ça ne change pas, on est foutus".
00:03:24 - Oui, enfin, n'exagérons pas Rudy Mana, on est foutus. Ça veut dire quoi "on est foutus" ?
00:03:31 - Ça veut dire qu'il va falloir qu'à un moment donné, on passe au plan B.
00:03:36 - C'est quoi le plan B Rudy Mana ?
00:03:38 - Le plan A, c'est ce qu'on vit actuellement, où on voit que ces jeunes font ce qu'ils veulent, sans réponse pénale,
00:03:46 sans... lorsqu'on les interpelle, vous l'avez bien dit tout à l'heure, Jean-Jacques, 14 à 17 ans, ils vont être très peu condamnés, qu'on se le dise.
00:03:54 Donc si aujourd'hui, si ce soir ou demain, on recommence à interpeller 667 jeunes comme on l'a fait dans toute la France,
00:04:02 et qu'il y en a 650 qui sortent pour l'excuse de la minorité, ben on s'en sortira jamais.
00:04:08 On s'en sortira jamais. Et eux sont déterminés à détruire. Parce que c'est ça qu'on a vécu.
00:04:14 Moi j'ai vécu celle de 2005. Les émeutes de 2005, vous en parliez tout à l'heure par rapport à 2005.
00:04:20 Je peux vous dire que c'était pas du tout la même violence. La violence s'est décuplée. La violence est beaucoup plus importante.
00:04:27 Et les policiers m'ont dit, vous l'avez également dit tout à l'heure, et à juste écoute, au départ, ils ne s'en prenaient pas à nous.
00:04:33 Ils étaient juste là pour détruire le domaine public, pour détruire... Je vous le dis, je me l'entends dans ma tête.
00:04:39 - C'est ce qui a vraiment changé, c'est-à-dire qu'ils ne cherchaient pas l'affrontement avec la police, ils cherchaient avant tout à détruire et à piller.
00:04:47 - Totalement, exactement. Et ensuite, quand ils ont pillé, et quand on a eu l'ordre de commencer à les interpeller,
00:04:53 à ce moment-là, il y a eu des affrontements, des policiers blessés, etc. Bien évidemment. Mais au départ, c'était pas ça.
00:04:59 C'était, on détruit tout ce qui est sur l'autre passage. Chaque fois qu'ils passaient devant une vitrine, ils la détruisaient.
00:05:05 La Samaritaine à Marseille, qui est un lieu historique, détruit. L'Alcazar détruit tout ce qui était devant eux.
00:05:13 Ils le détruisaient avec une violence... - Et dites-moi, Rudy Mana, pas si nombreux que ça, finalement ?
00:05:19 - Il y avait à peu près 400 jeunes. Et il faut les canaliser quand ils sont parmi 250. - Mais bien sûr. Mais ce que je veux dire, c'est que c'est pas une...
00:05:29 C'est une révolte très particulière. Très particulière. - Le souci, Jean-Jacques, et vous avez raison de le souligner, c'est que
00:05:37 les collègues me le disaient aussi ce matin, en fait, ils étaient à peu près 400, 450. Mais imaginez, ils me disaient, imagine qu'ils descendent de tous
00:05:46 des cités, des quartiers nord. Mais là, on va en arriver à quoi ? C'est ça, l'inquiétude qu'avaient mes collègues ce matin.
00:05:54 Je vous cache pas que c'est épuisant quand vous avez passé une nuit comme ça. C'est épuisant physiquement, et c'est épuisant aussi mentalement.
00:06:01 - Évidemment. - Et, bon, je viens d'avoir un collègue qui a été boussé au testicule. Il a reçu une bouteille de bière. Enfin, il s'est effondré.
00:06:08 Je viens de l'avoir au téléphone. Et il m'a dit, on n'avait jamais vu ça. Même dans les manifestations les plus dures, ils n'ont jamais vu
00:06:15 un tel degré de violence à l'encontre des bâtiments, bâtiments publics ou bâtiments au commerce, ou bar ou restaurant. Et ensuite, des pillages absolument incroyables.
00:06:25 - Rudi Mana, que dans l'immédiat, parce que vous dites la réponse judiciaire, évidemment qu'elle doit être au rendez-vous, la réponse judiciaire.
00:06:36 C'est incontestable, vous avez, évidemment, je vous suis à 300 %, mais dans l'immédiat, dans l'immédiat, que faut-il faire selon vous ?
00:06:44 Je parle dans l'urgence. - Bah écoutez, je... - Vous ne le savez pas ? Qui a la réponse ?
00:06:50 - La réponse, il va falloir que le président Macron, que le ministre Gérald Darmanin... - Parce que vous croyez que les jeunes les écoutent ?
00:06:58 - Non, non, non, pas du tout. Alors non, ils n'écoutent plus rien. - Ils n'écoutent plus aucun politique. Ils n'écoutent plus aucun politique.
00:07:04 Ils vivent, pardon, ils vivent sur les réseaux sociaux, sur Snapchat et sur TikTok.
00:07:10 - C'est ça. Là, je suis totalement... - Est-ce que, si je vous dis, Rudi Mana, c'est un peu comme si on... un jeu vidéo en direct ?
00:07:18 - C'est ça, exactement, on en est là. Ils n'ont plus... en fait, ils ne respectent plus la France. Voilà, je vous le dis, Jean-Jacques, c'est dur,
00:07:25 je vous dis quelque chose qui est dur, mais nous, je vous dis ce qu'on ressent sur le terrain. Je suis obligé de vous dire le ressenti de mes collègues
00:07:31 sur le terrain et je vous dis ce qu'on voit. Ils ne respectent plus la France, ils n'aiment pas la France, donc ils ne la respectent pas,
00:07:38 et c'est pour ça qu'ils la détruisent. En fait, c'est ça, le vrai enjeu et le vrai problème. Donc, qu'est-ce qu'il faut faire ?
00:07:46 Bien sûr que moi, je ne suis rien pour savoir ce qu'il faut faire aujourd'hui. On a un homme d'État, on a Emmanuel Macron, on a Gérald Darmanin,
00:07:54 ils vont réunir un conseil à 13h. - À 13h. - Écoutez, j'espère qu'ils vont me donner des orientations, mais il va falloir vraiment qu'on intervienne
00:08:03 plus rapidement, peut-être, mais le problème, c'est que... - En amont, mais c'est difficile. - C'est très difficile, et puis si vous intervenez tout de suite,
00:08:11 on va avoir des vraies violences, et là, on prend le risque d'avoir un policier qui reste sur le carreau ou un de ces jeunes qui reste sur le tapis.
00:08:18 C'est ça, la difficulté. Mais quand vous vous trouvez avec des gens comme ça, aussi déterminés... J'ai l'anecdote à Marseille de trois collègues
00:08:26 qui ont défendu un Auchan qui avait été vandalisé, et les jeunes ont voulu le piller, ils sont arrivés à 40, ils étaient 3.
00:08:33 Je peux vous dire qu'ils ont eu extrêmement peur. Ils l'ont dit, on a eu peur, mais c'est normal. 40, 3, c'est obligatoire. Donc qu'est-ce qu'on fait ?
00:08:41 On va tirer ? C'est pas possible. Donc on est devant une situation très difficile à régler, je vous le cache pas. Moi, je suis très préoccupé
00:08:52 par mes collègues policiers, parce que c'est eux dont je défends les intérêts, et franchement, on ne sait pas trop, en fait, comment s'en sortir.
00:09:01 — Merci beaucoup, Ruedi Mana, pour votre témoignage. Merci vraiment. Merci d'être avec nous. Est-ce que ce matin, vous lancez un appel au calme ?
00:09:10 — Déjà, M. Bourdin, je suis très triste, attristé par tout ce qui se passe dans notre pays. J'avais envoyé, moi, un signal d'alarme depuis de nombreuses semaines
00:09:18 par rapport à la situation dans les quartiers populaires. Et aujourd'hui, force est constatée que, déjà, nous avons perdu un jeune homme
00:09:27 qui s'appelle Naël, à 17 ans. Donc ça reste mes condoléances. Et ensuite, aujourd'hui, depuis quelques jours maintenant, des bâtiments publics brûlent,
00:09:37 des mairies sont brûlées. Il y a un constat général qui est accablant. Et vous savez, moi, je viens de Guilbel. On a connu les révoltes urbaines et les émeutes de 2007.
00:09:51 Là, ça nous fait un rémic. La paix est encore ouverte par rapport à cet épisode-là. Et en final, ça recommence.
00:10:01 — Est-ce que vous appelez au calme ? — Mais qui suis-je pour appeler au calme ? Vous savez, M. Bourdin...
00:10:07 — Non, non, mais je... Pardon. Carlos Martins Bilango. Donc personne ne vous écoute. Donc personne ne vous écoute.
00:10:15 — On a l'exemple, M. Bourdin. J'ai été directement sur place mardi soir à Nanterre pour discuter avec des jeunes.
00:10:25 Et malheureusement, ils n'ont pas voulu m'écouter. — Ils n'ont pas voulu vous écouter. Ils vous ont même pris à partie, je crois, non ?
00:10:29 — Vous avez vu par vous-même. J'ai été... — Vous avez été quoi ? Vous avez été menacé, insulté, frappé ?
00:10:37 — Ben comme sur la vidéo. Mais moi, j'ai été pour discuter, pour parler de mon expérience de 2007, quand j'avais 16 ans,
00:10:45 et pour dire ce que j'ai vécu à 16 ans et ce que je voulais pas que ça se reproduise pour eux. Mais je n'ai pas eu le temps de pouvoir m'expliquer.
00:10:52 — Oui. D'ailleurs, vous avez été agressé, vous aussi, parce que vous n'êtes pas plus écouté qu'un autre, Carlos Martins Bilango.
00:11:02 — Je suis considéré comme un ami de la République. Je suis pour eux un représentant de l'État.
00:11:07 Et c'est normal à l'exécutif et au gouvernement d'avoir la réponse politique juste pour apaiser les esprits, M. Bourdin.
00:11:15 — Est-ce que c'est pas le moment, justement – vous avez raison – la réponse politique... Je sais pas si elle est suffisante,
00:11:21 la réponse politique, Carlos Martins Bilango, parce qu'encore une fois, quand on écoute celles et ceux qui étaient dans la rue,
00:11:28 et ça a dépassé même le drame concernant Naël, vous avez entendu les émeutiers ou ceux qui les ont malheureusement côtoyés hier soir ?
00:11:38 Et les émeutiers, enfin tous ces jeunes qui étaient dans la rue – je dis bien « jeunes » volontairement parce qu'ils sont très jeunes –
00:11:45 qui sont là pour s'en prendre, comme vous le disiez, à des symboles de la République, mais aussi pour piller,
00:11:53 parce que c'est vrai que la vie est difficile dans certains quartiers, et puis aussi parce que c'est une génération qui finalement
00:12:05 vit dans une violence qui n'est pas la violence qui était celle de 2005 ou des précédentes émeutes.
00:12:13 Carlos Martins Bilango, toute la classe politique ne doit-elle pas aujourd'hui, collectivement, appeler au calme, franchement ?
00:12:22 – Je ne sais pas si ça aura son effet, M. Bourdin, franchement. Vous le savez, j'ai sorti un livre, vous le savez tout le monde, M. Bourdin,
00:12:30 il y a un mois où je parlais des critiques politiques. – Mais pourquoi est-ce que vous ne voulez pas ?
00:12:34 Ce que je ne comprends pas, ça ne coûte rien pour vous. – À quel moment, M. Bourdin, à quel moment ?
00:12:37 – Non mais, Carlos Martins Bilango, ça ne coûte rien pour vous d'appeler au calme, ça ne coûte rien.
00:12:43 – Mais M. Bourdin, mais bien sûr que je veux le calme. – Ou alors vous êtes inutile.
00:12:46 – Mais non, mais bien sûr que je veux le calme, mais j'étais sur place, moi, de Mondelkant.
00:12:49 – Et oui ! – J'étais sur place, vous avez vu les vidéos,
00:12:52 je n'ai même pas reçu de soutien, moi, de la casse politique par rapport à ce que j'ai subi.
00:12:57 Tout le monde s'est passé comme ça, comme ministre à la Poste, et j'ai été sur place aussi pour discuter avec les gens.
00:13:01 – C'est vrai. – Personne ne compte ce qui s'est passé,
00:13:04 tout le monde me laisse comme ça, mais ce n'est pas grave, M. Bourdin.
00:13:06 Et je vais vous dire encore une chose, M. Bourdin, vous savez, au moment des révoltes des Législatures,
00:13:11 il y a eu une réponse politique, avec 10 milliards, ce n'était pas suffisant, mais il y a eu une réponse.
00:13:18 Dans les quartiers populaires, ça fait 30 ans que les gens sont abandonnés, M. Bourdin, 30 ans que les gens sont abandonnés.
00:13:22 Dans les quartiers où il y a eu de l'enrûle, aujourd'hui, il y a des rats, il y a des malfaçons, les gens sont désabusés.
00:13:29 Et au final, dès qu'il y a un allumage, la moindre étincelle, tout s'embrase, et on voit que c'est partout,
00:13:39 que ce soit dans les quartiers populaires, dans les grandes villes de la métropole, et également dans les Outre-mer.
00:13:47 Il faut que le gouvernement voit un signal. Et vous savez encore une chose, M. Bourdin, pendant ces manifestations,
00:13:52 où j'étais présent hier à La Marche, les gens avaient des revendications politiques.
00:13:58 Ils ont demandé à l'admission de M. Darmanin. C'est des revendications politiques.
00:14:03 M. B. - Oui, d'accord, mais enfin là, je ne suis pas sûr que ceux qui étaient dans la rue hier soir aient des revendications politiques.
00:14:12 Vous savez qu'ils ont appauvrissement dans les quartiers. Bon. Est-ce qu'on peut aussi parler d'émeutes raciales à l'américaine ?
00:14:23 M. Darmanin - Non, non, M. Bourdin. J'étais à La Marche, le Mantaire, il y avait des personnes de toutes les couleurs.
00:14:30 Mardi soir, quand j'étais à Mantaire, également, j'ai croisé des mamans, des papa, avec qui j'ai pu discuter, des enfants plus jeunes,
00:14:37 qui n'étaient pas là pour faire des émeutes, et malheureusement, j'ai rencontré un groupe un peu plus énervé.
00:14:42 C'est vrai. Mais je vous le dis, j'avais toutes sortes de profils. J'ai même croisé des étudiants, qui vivaient dans les résidences étudiantes de Lanterre,
00:14:50 qui étaient dans la rue. Et je vous avais rappelé dans les quartiers.
00:14:54 M. B. - Oui, mais vous savez très bien, Carlos Martin Zbilongo, que ceux qui étaient à La Marche de Nahel ne sont pas nécessairement ceux qui étaient dans la rue hier soir.
00:15:01 M. Darmanin - Non, non, M. Bourdin, je vous parle de mardi soir, du premier soir.
00:15:04 M. B. - Mardi soir, même mardi soir. M. Darmanin - Vous étiez dans la rue, et j'ai vu des personnes de toutes les couleurs.
00:15:09 M. B. - Oui. D. Zemmour - Encore une fois, M. Zemmour vient pour diviser les Français.
00:15:14 M. B. - Bien, mais est-ce que... D. Zemmour - Parce que là, on parle de quoi, vous savez, M. Bourdin ? Quand vous parlez de...
00:15:18 On a eu, aujourd'hui, l'âge des personnes qui sont arrêtées. 12 ans, 13 ans, 14 ans.
00:15:23 C'est des Français ? C'est des enfants de la République ? C'est des enfants de la République ? M. B. - Oui.
00:15:27 D. Zemmour - À quel moment la République sera inclusive ? Les gens se sentent mis à part. M. B. - Oui, mais ces enfants...
00:15:33 D. Zemmour - Qu'est-ce que vous faites, Carlos Martins Bilongo, pour faire en sorte que ces enfants rentrent chez eux ?
00:15:39 M. B. - Je ne suis pas ministre de la Ville, je ne suis pas dans l'exécutif, M. Bourdin. La réponse doit venir de l'exécutif et du gouvernement.
00:15:46 Je ne peux pas, moi, lui donner... D. Zemmour - Est-ce qu'il faut... Alors, je vous pose la question. M. B. - ...et je serai inaudible.
00:15:50 D. Zemmour - Alors, je vous pose la question. Est-ce qu'il faut instaurer un couvre-feu ?
00:15:55 M. B. - Je ne sais pas si c'est la bonne réponse, M. Bourdin. Non, regardez, envoyez le RAID. Qu'est-ce que ça fait ?
00:15:59 C'est la surenchère. C'est la surenchère. Demain, on va envoyer l'armée. C'est la surenchère, M. Bourdin.
00:16:05 Ce sont nos enfants. Ce sont les enfants de la républicanité à l'école républicaine. Est-ce qu'on doit savoir leur parler, oui ou non ?
00:16:12 Ils ont 12-13 ans, M. Bourdin. Vous imaginez ? 13-14 ans.
00:16:15 D. Zemmour - Mais alors, vous n'avez aucune solution ? Vous n'avancez aucune solution pour qu'ils rentrent chez eux ?
00:16:23 M. Bourdin - Il faut des actes forts. Je vous dis une solution. La démission de Darmanin sera un acte fort. L'abrocation de la loi de 2017 sera une réponse.
00:16:32 Et vous verrez qu'il y aura du calme.
00:16:34 D. Zemmour - Darmanin qui démissionne et qui est remplacé par un autre... Pardon, hein ? Non ? Par un autre ministre de l'Intérieur, ça change quoi ?
00:16:42 M. Bourdin - Je vous le dis. M. Darmanin doit démissionner. Et ensuite, la loi de 2017 peut être abrogée.
00:16:48 Pourquoi, dès qu'on parle de police, M. Bourdin, on le met directement dans un coin anti-police ? On n'est pas anti-police.
00:16:55 On veut réformer la police de la cave aux grelis.
00:16:58 Parce qu'aujourd'hui, 0+2, un refus de temps péril, M. Bourdin, ne doit pas mener à la peine de mort. Vous êtes d'accord avec moi ?
00:17:06 D. Zemmour - Bien. Merci, Carlos Martin Zbilongo. Merci beaucoup d'avoir été avec nous, d'avoir accepté de répondre à nos questions.
00:17:13 M. Bourdin - Merci, M. Bourdin. Vous avez vu, j'étais sur place, moi, mardi soir.
00:17:16 D. Zemmour - Oui.
00:17:17 M. Bourdin - J'ai fait ce que je peux. Voilà. En tant qu'élu de la République, j'ai été sur place pour vous écouter.
00:17:21 D. Zemmour - Oui. Parce qu'il vaut mieux, effectivement, être sur place pour essayer de calmer et de faire en sorte que tout s'arrange,
00:17:28 plutôt que d'être sur place pour mettre de l'huile sur le feu. Je suis totalement d'accord avec vous, Carlos.
00:17:32 M. Bourdin - Et j'étais prêt à partie. Je n'ai pas été invité sur les matos télé. J'ai été sur place, discuté, et j'étais prêt à partie.
00:17:40 D. Zemmour - Mais bien sûr. Je sais que vous avez été prêt à partie, vous aussi. Ça prouve qu'on ne vous écoute pas plus qu'un autre.
00:17:45 Mais c'est comme ça. C'est la société dans laquelle on vit.
00:17:48 Merci beaucoup, Carlos Martin Zbilongo. Il est 10h55. Allez très vite.
00:17:53 Un témoignage. Il y en aura d'autres, puisqu'entre 11h et midi, vous ne raterez rien de la situation avec tous nos invités.
00:18:00 Ça va être passionnant, je peux vous le dire. Je vais vous poser des quantités de questions à nos invités.
00:18:06 Mais Jérôme est à Perpignan et veut témoigner. Bonjour, Jérôme.
00:18:09 Jérôme - Oui, bonjour.
00:18:10 M. Bourdin - Bonjour. Merci d'être avec nous, Jérôme.
00:18:12 Jérôme - Avec plaisir.
00:18:13 M. Bourdin - Merci. À Perpignan, ça a bougé un peu, hier, ou pas ?
00:18:16 Jérôme - Ça a bougé un petit peu.
00:18:18 M. Bourdin - Pas beaucoup. D'ailleurs, je remarque une chose. À part Marseille, quelques incidents animes,
00:18:24 mais le sud a beaucoup moins bougé, sud de la France, que le nord de la France.
00:18:30 Jérôme - Petit retard à l'allumage. J'espère que ça va durer, parce qu'avec les réseaux sociaux,
00:18:35 tant que ça arrive jusqu'à nous, il y a toujours un petit délai.
00:18:38 M. Bourdin - Oui, oui, oui. Allez-y. Jérôme - Je voulais juste vous faire part d'un témoignage.
00:18:43 J'ai été pendant 30 ans un chasseur-pompier professionnel dans plusieurs départements,
00:18:47 et j'ai vécu des émeutes, etc. Et quand M. Manat parle tout à l'heure de Plan B,
00:18:52 je le rejoins complètement. Ça a déjà été mis en œuvre.
00:18:55 Il faut juste que le gouvernement prenne ses responsabilités, prenne les bonnes décisions.
00:18:59 Et on y arrive. On y arrive. Moi, j'ai vu des émeutes où tout était à feu et à sang.
00:19:04 À partir du moment où on tape du poing sur la table, tout se remet dans l'ordre.
00:19:07 On entend les mouches voler dans la ville. Les seuls véhicules qu'on croise,
00:19:10 c'est des services publics ou de la force publique. Et les enfants, les parents,
00:19:15 les gardent à la maison. Et puis c'est réglé. Ceux qu'on chope, qu'ils émettent au commissariat,
00:19:21 les parents viennent les chercher. Et en deux jours, l'histoire est réglée.
00:19:24 Maintenant, il faut en avoir envie. Il faut juste en avoir envie.
00:19:27 Et quand c'est au niveau national, il faut peut-être...
00:19:30 Le monsieur juste avant parlait de monter en puissance avec à l'extrême l'armée.
00:19:38 Mais pourquoi pas ? Parce que c'est vrai que si c'est au niveau national,
00:19:41 effectivement, pour les gendarmeries, on sera limité. Faites jouer l'armée.
00:19:45 Il n'y a pas de souci. C'est juste pour maintenir l'ordre.
00:19:48 Et après, à long terme, on discutera d'autres choses.
00:19:51 Mais à mon sens, chaque fois que j'ai vu sur le terrain, parce que c'est bien d'avoir un avis
00:19:55 de sa tour dorée parisienne, mais allez-y. Là, le monsieur dit qu'il y est allé une heure.
00:20:02 Ou Père Pignanès, ou d'ailleurs, bien sûr. Mais dans un bureau, en tout cas.
00:20:05 Mais allez-y, à 3h du matin, quand vous prenez des électeurs qui tombent du 6e étage sur la gueule,
00:20:10 allez-y. Vous verrez le public que c'est effectivement des enfants.
00:20:13 - D'ailleurs, un jour ou l'autre, il faudra quand même penser au rôle des parents.
00:20:19 Enfin bon, chacun doit prendre ses responsabilités, les parents les premiers aussi.
00:20:24 À 11 ans ou 12 ans, on est complètement d'accord, c'est les parents qui doivent jouer.
00:20:27 C'est pas la police. - Bah évidemment.
00:20:29 - Merci Jérôme. - Mais c'est pas grave, on les cherchait au commissariat.
00:20:31 Eh ben croyez-moi, ils iront une fois, deux fois, et puis ils te feront les oreilles.
00:20:34 - Ça, c'est vrai. Merci beaucoup Jérôme. - Merci à vous.
00:20:36 - Merci. C'est sympa. Merci d'écouter Sud Radio.
00:20:40 La radio, on se dit les choses. Vous le savez. Et on va continuer à se les dire.
00:20:44 - Au dingue.
00:20:45 - Bien, il est 11h05. 11h05, nous poursuivons évidemment après cette nouvelle soirée nuit de colère, de violence,
00:20:56 avec ces saccages, ces pillages. Nous avons plusieurs invités qui vont pouvoir réfléchir avec nous, témoigner aussi.
00:21:04 D'abord Michel Auboin, qui est un ancien préfet, auteur du défi d'être français,
00:21:09 le défi d'être français au presse de la cité. Bonjour. - Bonjour.
00:21:12 - Je rappelle Michel Auboin que vous connaissez bien tous ces sujets, puisque rappelez-nous, rappelez-nous votre passé professionnel.
00:21:20 - Je connais assez bien les sujets des quartiers parce que j'ai longtemps travaillé sur le sujet,
00:21:26 à la fois sur le terrain, mais aussi j'ai travaillé d'un point de vue théorique sur la violence urbaine dans les années 90.
00:21:31 Donc c'est déjà assez ancien. J'étais dans les Sön en 2005, donc j'ai vécu directement les grandes crises de novembre 2005.
00:21:39 Et puis j'ai été directeur de l'intégration des étrangers en France, et donc j'ai approché la question du côté de la nationalité, du côté d'intégration,
00:21:53 ce qui m'a permis d'avoir une vue assez large, je crois, sur le sujet.
00:21:56 - Donc, quelqu'un qui sait de quoi il parle. Et vous savez que j'aime bien, dans ces débats, entre 11h et midi, mettre autour de la table
00:22:03 des personnes qui connaissent le sujet, et non pas des personnes qui sont là invitées pour faire le nombre, et qui parlent de tout sans rien connaître.
00:22:11 Reda Didi est avec nous aussi. - Bonjour.
00:22:14 - Vous êtes cofondateur de l'association Graines de France, dont l'objectif est de faire se rencontrer et dialoguer des policiers
00:22:20 et des jeunes des quartiers prioritaires de la ville. Alors, nous allons poser plein de questions.
00:22:25 Entre autres, vit-on une américanisation de la France ? La nouvelle génération qui vit dans les banlieues est-elle plus violente ?
00:22:33 La police est-elle devenue un ennemi à abattre ? Comment rétablir l'ordre ? Peut-on parler d'insurrection ?
00:22:38 Quel rapport avec les émeutes de 2005 ? Ces questions et tant d'autres vont être posées entre 11h et midi.
00:22:45 Mais tout de suite, nous allons commencer avec un témoignage, celui de Karine Franckley, qui est maire d'Aubervilliers.
00:22:51 Karine Franckley, bonjour. - Bonjour.
00:22:54 - Merci vraiment d'être avec nous, Karine Franckley.
00:22:56 Maire d'Aubervilliers, dans votre ville aussi, il y a eu de grosses violences hier soir.
00:23:02 Je crois que le dépôt de bus d'Aubervilliers a été incendié et la piscine, le chantier de la piscine olympique aussi est endommagé. C'est cela ?
00:23:12 - Oui, tout à fait. Alors, on a malheureusement subi une deuxième nuit de violence avec cet incendie de 12 bus
00:23:20 de notre dépôt de bus du fort d'Aubervilliers, qui a également impacté le chantier de notre piscine olympique.
00:23:29 Alors, fort heureusement, l'incendie a été circonscrit. On a des dégâts légers sur la façade de la piscine, mais notre piscine a été sauvée.
00:23:41 Moi, ce matin, c'est un sentiment de colère et d'écœurement parce qu'on ne peut pas réclamer justice en détruisant comme ça le bien commun.
00:23:53 Ce matin, ce sont des mamans qui n'ont pas pu déposer leurs enfants à l'école. Ce sont des plaintes d'habitants qui n'ont pas pu aller travailler.
00:24:02 Alors, au jour où on se bat pour rattraper le retard en équipement public dans ma ville, ils viennent saccager des équipements publics
00:24:12 et donc ils viennent détruire le bien commun. Alors, bien sûr, on peut comprendre l'émotion d'une maman qui a perdu son fils,
00:24:21 mais aujourd'hui, la République fonctionne. Le policier est en détention provisoire et ce n'est pas en pillant, en faisant une guérilla urbaine
00:24:31 qu'on viendra rétablir la justice.
00:24:35 - Oui, la République fonctionne et la justice, pour l'instant, fait son travail et on ne va pas, effectivement, porter d'accusation dans un sens ou dans l'autre
00:24:44 concernant l'affaire en elle-même. Laissons la justice travailler. Regardons ce qui s'est passé hier soir, Karine Franclay.
00:24:50 Ça a commencé comment à Aubertvilliers ?
00:24:54 - Écoutez, ça commence toujours de la même manière, vers 23h, 23h30. On a affaire à des jeunes extrêmement bien organisés
00:25:02 qui allument des incendies à plusieurs endroits de la ville. Alors, fort heureusement, notre police nationale et notre police municipale
00:25:12 qu'on a créée depuis trois ans est extrêmement bien coordonnée. Hier soir, par chance, on avait tout de suite l'appui d'une brigade de CRS,
00:25:22 mais malheureusement, face à un tel embrasement, on n'a pas pu empêcher le départ de feu au niveau des dépôts de bus.
00:25:31 - D'où venaient ceux qui ont mis le feu, qui ont saccagé et pillé ? D'où venaient-ils et qui étaient-ils ? Très jeunes, aussi à Aubervilliers ?
00:25:39 - On peut pas. On a eu les retours de la nuit précédente. On a des jeunes à partir de 14 ans, un pays sans doute aussi beaucoup plus vieux,
00:25:51 mais là, on n'a pas une typologie précise à l'heure d'aujourd'hui. On est en train de gérer la crise et réparer les dégâts.
00:25:59 - De gérer la crise et réparer les dégâts, et vous craignez pour ce soir, pour samedi soir, pour le week-end ?
00:26:06 - Évidemment, on craint. Et moi, ce qui m'inquiète aussi, c'est qu'il n'y ait pas un appel au calme commun de toute la classe politique.
00:26:13 Et quand je vois les dépositions de partis extrêmes ne pas appeler à l'apaisement, je trouve ça absolument dangereux et invigne.
00:26:23 - Karine Franck-Lé, c'est ce que je disais à Carlos Martins Bilongo, qui était mon invité juste avant vous, seulement la classe politique, vous savez, c'est jeune.
00:26:31 Ça en moque totalement, quel que soit le bord politique. Non ? Karine Franck-Lé, vous pouvez lancer tous les appels que vous voulez, est-ce qu'ils vous écouteraient ?
00:26:40 - Non. Moi, je pense qu'il faut faire un front commun et vraiment faire aussi expliquer, alors pas au moment de la guérilla, parce que quand c'est enflammé, c'est enflammé,
00:26:48 mais là, dans la journée, expliquer, voilà, qu'on s'attaque au bien commun, et que quand ils détruisent une école, c'est leurs travailleurs qu'ils détruisent,
00:26:58 ils détruisent l'autiste-travail de leurs parents, il faut vraiment les appeler à la raison.
00:27:05 - Bien. Merci beaucoup, Karine Franck-Lé, merci beaucoup. Je me tourne vers vous, Michel Auboin. Vous écrivez "Nous ne vivons pas la même colère qu'en 2005".
00:27:16 Et aujourd'hui, je ne veux pas parler d'insurrection. Pourquoi ?
00:27:19 - Parce qu'une insurrection, c'est un phénomène qui est organisé et qui a un but politique.
00:27:25 Or, là, les émeutes, comme celle de 2005 d'ailleurs, elles n'ont pas d'objet politique, elles ont été déclenchées par une émotion partagée,
00:27:34 mais elles n'ont aucun objet politique. - Pas d'objet politique, pas d'objet religieux, pas d'objet racial ?
00:27:39 - Non, c'est clair. Non, non, non, non, non. En fait, le seul dénominateur commun à tous ces jeunes, c'est "la police est notre ennemi, derrière la police,
00:27:51 on n'aime pas la France". Et donc, tout ce qui représente, on dit les institutions, mais enfin, tout ce qui représente en gros la France dans leur esprit...
00:27:58 - Oui. La France, c'est une mairie, c'est une école, c'est un drapeau, c'est... - C'est même la future piscine des Jeux Olympiques.
00:28:07 Donc, ça peut être tout. - C'est un bus, c'est... - Voilà. Et puis après, il y a, comme toujours d'ailleurs, l'occasion qui fait de la ronce,
00:28:14 c'est-à-dire, après tout, pourquoi pas piller le magasin de proximité, puis après, celui de plus loin, puis d'aller, etc.
00:28:20 Donc, tous ces phénomènes se conjuguent, mais on n'est pas dans une situation d'organisation insurrectionnelle. Et c'est pour ça, d'ailleurs,
00:28:27 je pense que les discours politiques n'ont pas beaucoup d'effet sur le phénomène. - Oui, ça, je suis... Je vous rejoins. Je pense que les politiques
00:28:36 ne sont pas écoutés. Tout le monde s'en moque. Et ces jeunes, d'ailleurs, n'écoutent pas, ne regardent pas la télé. Ils ne regardent que TikTok ou...
00:28:42 Ils utilisent Snapchat, donc... Les télévisions, les chaînes en continu, les responsables politiques, tout ça, peu importe pour eux.
00:28:51 Vous avez le même sentiment, Adydi ? - Le même sentiment sur la situation, l'analyse ? - Oui. Ce que vient de dire Michel Auboin...
00:29:00 - Alors, moi, je pense qu'il y a pas mal de facteurs qui expliquent la situation dans laquelle on est. D'abord, on est à une période où on est en été.
00:29:07 On est à un moment où la scolarité est terminée. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de cas que depuis le 15 juin, en fait, ces jeunes de 10 à 17 ans,
00:29:13 c'est la tranche d'âge qui est touchée, là, ne sont plus à l'école. Le brevet est terminé, le bac est terminé, et donc c'est un moment où on se retrouve,
00:29:21 où on mutualise, où on coalise. C'est des jeunes de 10 à 17 ans. Moi, je fais beaucoup d'éducation populaire. J'ai été éducateur spécialisé.
00:29:27 - Il y avait des jeunes dans la rue de 11-12 ans ? - Voilà, c'est ça. Donc, entre 10 et 17 ans. - 10 et 17 ans ?
00:29:33 - Cette tranche d'âge-là. Cette tranche d'âge-là, son rôle, c'est quand même d'aller tester le cadre qu'on met en face d'elle.
00:29:41 Et donc, il y a eu ce drame malheureux, Naël, qui ensuite s'est enflammé beaucoup plus vite qu'en 2005, je pense, par le biais des réseaux sociaux.
00:29:51 Et donc, il y a eu une forme de mimétisme et d'envie de faire un peu comme dans les autres quartiers, et une forme de concours de quartiers
00:29:57 sur celui qui allait finalement le plus réagir à cette action, sans réflexion aucune, avec en effet des voyous de circonstance qui ont pillé des magasins.
00:30:10 - Oui, des voyous de circonstance, des pillages de circonstance, qui en ont profité. - Et voilà, qui ont utilisé à un moment...
00:30:18 Mais tout ça vient nous interroger, nous, en tant qu'adultes et en tant qu'encadrants. C'est-à-dire, qu'est-ce qu'il a manqué pour que ce type de choses puissent se révéler
00:30:25 et puissent finalement se propager à une vitesse aussi rapide ? Quels sont les adultes qui ne sont pas présents ?
00:30:32 Quels sont les systèmes d'écoute, de prise de la température dans ces territoires-là qu'on n'a plus, qui auraient pu nous alerter sur la situation globale ?
00:30:42 Et c'est là-dessus qu'il faut, à mon avis, s'interroger. Mais en demandant tout de suite, là, maintenant, et je rejoins totalement ce que disait la mairesse d'Aubervilliers avant,
00:30:53 de cesser immédiatement ce qui se passe et qu'il y ait un appel à un front commun de la part des politiques, je ne sais pas s'ils sont au double tas,
00:30:59 mais en tout cas de la part de tous les adultes de ce pays politique, des parents, des institutions, des éducateurs spécialisés, des associations,
00:31:08 des sportifs de haut niveau qui aussi ont pu se considérer. Voilà, il faut vraiment qu'on tire tout dans le même sens, là.
00:31:13 - Qui ferait mieux de réagir aussi, maintenant. Ils ont réagi après la mort d'Onaël très bien, mais aujourd'hui, c'est à eux de réagir aussi.
00:31:20 Avant une phase de réflexion et de reconstruction des systèmes qui vont nous permettre d'éviter ce genre de choses à l'avenir.
00:31:27 - Bien. Nous allons prendre, il faut que j'observe une petite page de pub, il est 11h15, nous allons prendre Michel qui est un de nos auditeurs qui voudrait réagir.
00:31:36 Vous faites comme Michel, 0826-300-300, vous appelez, vous intervenez et nous poursuivons notre débat, c'est passionnant parce que nous avons plein de questions à poser.
00:31:44 11h16 à toutes ces points. - Il y a un débat autour de ce qui s'est passé encore hier soir et de ce qui risque de se passer ces prochains jours.
00:31:53 Nous allons évidemment, évidemment poser toutes les questions que vous souhaitez qu'on pose. La police, est-elle devenue un ennemi à abattre ?
00:32:02 Là, Reda Didi va répondre. Reda Didi qui est co-fondateur de l'association Graines de France dont l'objectif est de faire se rencontrer,
00:32:10 dialoguer des policiers et des jeunes dans des quartiers prioritaires de la ville. Michel Auboin est avec nous aussi ancien préfet,
00:32:16 auteur du "Défi d'être français" aux presses de la cité qui connaît parfaitement tous ces phénomènes d'émeute, de crise.
00:32:24 Michel est l'un de nos auditeurs. Bonjour Michel. - Oui, bonjour Jean-Jacques. - Bonjour Michel.
00:32:31 - Qu'est-ce que vous vouliez dire ? - Moi je trouve que c'est scandaleux tout ce qui est en train de se passer dans ces banlieues françaises et un peu partout en France.
00:32:38 Parce que de détruire, de brûler des écoles et des bibliothèques, tout ça, c'est vraiment montrer qu'on n'a pas grand chose dans sa tête.
00:32:47 Parce que s'il était un petit peu intelligent, il serait plutôt fier de pouvoir aller à l'école et de ne pas aller faire les cons dans la rue,
00:32:54 aller faire du "delay", du "cheat" et d'agresser les gens comme ils savent le faire. C'est des gens qui réclament le respect,
00:33:02 mais eux, ils ne respectent personne. Donc ça commence à bien faire. Il faut qu'ils arrêtent les conneries maintenant,
00:33:08 et qu'ils rentrent chez eux, et qu'ils réfléchissent un peu avec les neurones qu'ils ont un peu dans leur cerveau.
00:33:14 Parce que moi, par exemple, je suis fils d'immigrés, moi les parents m'ont toujours dit d'aller étudier et de ne pas aller faire le con dans la rue.
00:33:23 Maintenant, c'est aussi aux parents de tous ces jeunes-là de parler à leurs enfants et qu'ils arrêtent de faire les cons.
00:33:29 Et la gauche, là-dessus, Mélenchon, il est complètement discrété, parce que les gens vont se détourner de l'LFI,
00:33:36 parce que c'est n'importe quoi les discours qu'ils tiennent, ces gens, maintenant.
00:33:42 Et donc, il faut qu'ils arrêtent un peu les frais, plus ou moins d'argent public dans ces quartiers.
00:33:48 Et plus, au bout d'un ou deux ans, tout est détruit. Franchement, c'est honteux de voir tout ce qui se passe,
00:33:55 pour des gens qui ne respectent pas la loi, qui ne respectent pas la société et qui ne respectent personne.
00:34:02 Donc, on est en colère, on est en colère.
00:34:04 - Bien, merci Michel. Merci Michel, vous êtes finalement un peu le porte-parole de beaucoup de Français qui sont comme Michel.
00:34:11 Vous comprenez Michel Reda Didier ?
00:34:14 - Oui, oui, je comprends Michel et je comprends la situation.
00:34:19 Le sujet, c'est comment on sort de la rue et comment on évite d'en arriver là.
00:34:24 C'est moi le sujet, c'est l'objectif que j'ai en tête en fait. Après on peut...
00:34:28 - Alors, justement, je vais vous poser la question. Oui, c'est le sujet.
00:34:32 Le rapport entre les jeunes, ces jeunes-là, cette génération et la police,
00:34:37 vous faites tout pour essayer de rapprocher la police de cette génération-là.
00:34:42 Vous faites tout avec votre association. Comment ça se passe ?
00:34:46 Est-ce que vraiment les jeunes détestent la police ?
00:34:50 Et est-ce que la police est devenue un ennemi, je le disais, un ennemi à abattre ?
00:34:54 - Non.
00:34:55 - Non ?
00:34:56 - Les jeunes ne détestent pas la police. Les jeunes ont une méfiance, une défiance vis-à-vis de la police,
00:35:02 une méconnaissance du travail de policier, une méconnaissance de ce qu'il y a derrière l'uniforme,
00:35:08 l'humain qu'il peut y avoir. Les situations de dialogue concrets et nous sont travaillées.
00:35:12 On travaille à la journée avec des auteurs, des comédiens, on passe par le théâtre, on passe par l'écriture,
00:35:18 on passe par le sport de haut niveau avec des champions du monde,
00:35:20 on passe par la libération de la parole avec des journalistes qui vident dans leur sac
00:35:24 pour ensuite accueillir les policiers en fin de journée à 16h et pouvoir avoir un dialogue entre 1h et 1h30
00:35:29 où là, il n'y a pas de question tabou, un peu comme dans votre émission, on se dit tout,
00:35:34 mais on se respecte les uns les autres. Et ça s'est toujours bien passé.
00:35:37 Nous, on a fait Nîmes, on a fait Avignon, on fait toute la banlieue parisienne,
00:35:42 Sarcelles, Nanterre, Louvre, Fosse, on fait Paris, enfin voilà, il n'y a vraiment pas de sujet.
00:35:48 Et je n'ai jamais vu de dérapage sur cette question-là.
00:35:53 Des gens qui étaient, alors une petite proportion qui n'étaient pas toujours convaincus des propos qui étaient tenus par les policiers,
00:36:00 mais souvent des jeunes qui repartaient avec plus de questions que de réponses.
00:36:02 Et des policiers qui repartaient aussi avec plus de questions que de réponses.
00:36:05 Et nous, dans ces cas-là, on a gagné si on arrive à sortir une minorité.
00:36:09 - Pourquoi aussi ? Parce que vous avez porté attention à ces jeunes aussi peut-être, non ?
00:36:15 - Oui, porté attention, mis en place une méthodologie, avoir l'attitude qu'il faut, savoir imposer un cadre et des règles,
00:36:22 savoir créer un espace de dialogue sécurisé pour les uns et les autres.
00:36:26 - Un cadre et des règles.
00:36:27 - Où tout le monde se sent bien. C'est-à-dire que les policiers aussi avaient une forme de méfiance et de défiance vis-à-vis de ces populations-là,
00:36:31 à aller sur ces territoires et à venir dialoguer.
00:36:34 Et en sortir de là, ils étaient très étonnés finalement des propos et de la capacité à pouvoir échanger avec les jeunes et les habitants.
00:36:39 Parce qu'on fait ça avec les jeunes, mais on fait ça aussi dans un second temps, le soir ensuite, avec les parents et les habitants.
00:36:44 Pour que cet échange puisse se poursuivre au sein de la cellule familiale.
00:36:48 - Vous savez ce que c'est ces jeunes-là dont on parle, Michel Auboin ?
00:36:53 Vous le disiez entre 10, vous disiez 10-17 ans, bon 11-12, 10-11-12-13,
00:37:00 mais la majeure partie, 15-16-17, 14-15-16-17, ils jouent aux jeux vidéo.
00:37:07 C'est presque un jeu vidéo réel ce qui se passe là, non ?
00:37:12 - Oui, ça ressemble beaucoup à ça.
00:37:15 D'ailleurs ça se déclenche exactement de la même façon, on se met en groupe et on va faire la guerre et on va gagner des territoires, etc.
00:37:22 C'est très très semblable.
00:37:24 - Et puis il y a la violence quand même, qui est plus grande.
00:37:28 - La violence, elle est plus grande dans la société en général, pas uniquement dans les quartiers.
00:37:33 Clairement, elle est plus grande et on peut le voir tous les jours.
00:37:36 Simplement, eux, ils sont dans une situation...
00:37:42 Je dis les adolescents en général, pas uniquement ceux qui vivent dans les quartiers.
00:37:45 Les adolescents en général sont en contact avec une violence liée aux images.
00:37:50 Globalement, je me souviens dans des affaires de Rix, par exemple, les maires qui étaient outrés,
00:37:55 les maires des élus, qui étaient outrés de voir les images que regardaient des jeunes garçons ou filles de 12-13 ans
00:38:02 sur les réseaux sociaux, d'hyper-violence.
00:38:07 Des salles de viol, des choses comme ça.
00:38:09 Et donc ces images qui sont disponibles pour des esprits qui sont encore un peu immatures,
00:38:14 ça fait des dégâts considérables. Donc cette violence-là, elle existe.
00:38:18 Et surtout, le sentiment que tout n'est pas vraiment vrai.
00:38:21 Arrivez à leur dire "vous êtes dans un monde concret, vous brûlez un bâtiment, il coûte tant, ça sert à ça, etc."
00:38:30 C'est un pas qui est considérable pour beaucoup de ces jeunes.
00:38:34 C'est pour ça que j'entends les élus, c'est bien, il faut le dire, etc.
00:38:37 Mais je pense qu'il ne faut pas essayer de s'adresser aux jeunes,
00:38:39 je pense qu'il faut s'adresser aujourd'hui aux parents, aux éducateurs, à ceux qui sont autour d'eux.
00:38:43 - Aux adultes ? - Aux adultes qui sont dans les quartiers.
00:38:46 - Le temps des adultes est venu, là ? - Oui, le temps des adultes est venu.
00:38:50 - Et le temps des adultes est revenu. - Est revenu.
00:38:52 - Parce que ce qu'on se disait tout à l'heure, et ce qui est vrai, c'est qu'entre 2005 et aujourd'hui,
00:38:57 on a perdu beaucoup d'intervenants dans les quartiers,
00:38:59 et qu'on va mettre plus de temps encore à retisser les liens entre les plus jeunes et le monde des adultes.
00:39:07 - Très intéressant aussi. Pierre, témoigne. Bonjour Pierre.
00:39:12 - Oui bonjour M. Bourdin. - Ça va Pierre ?
00:39:14 - Bonjour mes amis, merci de m'accueillir, oui ça va, ça va.
00:39:16 - Vous avez connu les jeunes de quartiers d'un côté et les policiers de l'autre, Pierre, je sais.
00:39:21 - Oui, oui, oui, c'est quelque chose que je connais très bien.
00:39:25 J'étais ennemi, moi, à ce qu'on appelait à l'époque la ZUP Nord, à Nîmes,
00:39:29 la ZUP Sud, qui on appelle aujourd'hui Baldegour, Piste-Vert.
00:39:32 À l'époque, déjà moi-même étant jeune, je voyais déjà de génération en génération
00:39:37 une évolution qui était alarmante. Et je vous parle de ça il y a une trentaine d'années.
00:39:43 Et c'était alarmant déjà de génération en génération. Donc première des choses à dire quand même,
00:39:48 c'est que tous les responsables politiques sont les coupables déjà de cette situation dans les quartiers.
00:39:54 Parce qu'on ne peut pas faire croire qu'on ignore, qu'on ne sait pas ce qui s'y passe depuis des décennies.
00:40:00 Et on a laissé dépérir. Moi j'ai pensé souvent, j'avais des solutions souvent que j'ai mises en avant,
00:40:05 mises en avant, mises en avant. Aujourd'hui je peux le dire, ça ne marcherait plus.
00:40:08 Aujourd'hui c'est quelque chose qu'il faut... Irrécupérable, c'est totalement irrécupérable.
00:40:13 Et les policiers qui m'entendent le savent très bien parce que moi je les connais bien les policiers.
00:40:17 J'en ai dans ma famille, dans la municipale, j'en ai des amis dans la nationale, dans la gendarmerie,
00:40:22 dans la famille et je connais très très bien le mode de fonctionnement. Et je peux le témoigner avec certitude,
00:40:28 il y a un racisme systémique dans la police, systémique. Et de plus, il y a des méthodes
00:40:35 de faux témoignages, de faux soutiens, de faux pour accabler des jeunes, leur dire "tiens lui,
00:40:41 je vais lui coller un outrage" et il se retrouve devant le tribunal. Et comme il est insolvable,
00:40:45 c'est la municipalité qui paye l'amende, donc avec vos impôts. Et donc en fait ça ce sont des systèmes,
00:40:50 des procédés mafieux pour se faire des primes. Et eux ils arrondissent leur seine de mois par ce système-là.
00:40:56 Et ce sont des policiers. Donc c'est une honte. Et deuxièmement aussi, il faut le savoir, il faut comprendre,
00:41:01 ce n'est pas simplement malheureusement la mort de ce gamin, qui est évidemment horrible,
00:41:06 le comportement de ce policier. Mais rendez-vous bien compte que s'il n'y avait pas eu de vidéo,
00:41:11 il y avait déjà une écriture en faux, un faux témoignage, c'est-à-dire encore des systèmes mafieux
00:41:15 et hors la loi, et ce comportement est imputable à la police. Donc si la police n'est pas respectable,
00:41:21 elle ne peut pas être respectée. C'est grave ici. - C'est vrai Pierre, mais vous ne pouvez pas.
00:41:26 La police doit être respectée et respectable, tout le monde est d'accord. Respectable et respecté,
00:41:31 dans l'ordre. On est bien d'accord. On est bien d'accord. Mais vous n'allez pas imputer tous les mots à la police,
00:41:36 non plus Pierre. - Mais alors justement, parce que si vous voulez, depuis qu'il y a de plus en plus de vidéos
00:41:43 et de réseaux sociaux et autres, on ne peut pas ignorer tous ces comportements qui sont hors cadre légal,
00:41:50 quand on tape quelqu'un et quand même l'interpelle gratuitement, on crée du ressentiment en permanence
00:41:57 à force de voir toutes ces images qui sont hors cadre légal, un policier qu'on ne retrouve même pas,
00:42:02 on ne sait pas qui c'est, il a tapé gratuitement quelqu'un et puis finalement on ne le retrouve pas,
00:42:05 on ne sait pas qui c'est. Drôle de police quand même, soit dit en passant. - Dans tous les cas,
00:42:10 je vous interromps Pierre, parce qu'il est 29, presque 30, il faut que je fasse un peu de pub.
00:42:14 Dans tous les cas, là en l'occurrence, la justice travaille et me semble bien travailler. Enfin,
00:42:22 je ne veux pas porter d'appréciation sur le travail de la justice, elle travaille et elle avance.
00:42:27 On lui reproche tellement, bien souvent, d'être lente, à juste raison d'ailleurs. Là, elle travaille,
00:42:32 qu'est-ce que vous en pensez ? - Oui, la justice travaille, on va voir aussi l'IGPN qui va commencer
00:42:37 à faire des investigations, parce qu'on a dit, heureusement qu'on avait des vidéos, etc.
00:42:42 Même sans les vidéos, la justice aurait travaillé, elle aurait trouvé la solution, on verra ce qu'il
00:42:49 fait sur une affaire comme ça, c'est sûr. Après, la question de la relation, c'est vrai, entre la
00:42:53 police et une partie de la population, même peut-être parfois toute la population, c'est
00:42:57 une question sur laquelle on ne doit pas avoir de tabou, il faut aussi la revisiter. Parce que,
00:43:04 c'est vrai qu'il y a des façons de s'adresser à la population, il y a des codes d'odéontologie
00:43:09 qui existent, mais enfin, il y a des façons de s'adresser à la population qui, parfois,
00:43:12 ne sont pas tout à fait appropriées. Après, faites attention quand même, la police est quand même le
00:43:17 dernier rempart de nos institutions dans ce genre d'affaires, et il ne faut pas non plus désespérer
00:43:21 la police, parce qu'on en a tous besoin. Bien sûr. Bien, il est 11h à nuit, merci beaucoup Pierre,
00:43:26 on prendra Thierry tout à l'heure, qui veut nous parler des parents, lui. Où sont-ils ? C'est
00:43:30 incompréhensible. Bien, mais j'ai Reda Didi, avec nous, Michel Auboin aussi, allez, un peu de pub et
00:43:36 à tout de suite. Il est 11h33, allez, Michel Auboin, Reda Didi sont avec nous, et vous tous.
00:43:42 Alors, nous allons reprendre un auditeur, Thierry, qui est en Haute-Garonne. Bonjour Thierry,
00:43:46 vous êtes enseignant, mon cher Thierry. Bonjour. Merci vraiment d'être avec nous, allez-y, qu'est-ce
00:43:51 que vous vouliez dire ? Alors, moi, il m'est arrivé une affaire un petit peu similaire quand j'étais
00:43:55 jeune, puisque j'étais en moto, et j'ai été menacé d'un pistolet par un gendarme, et je veux dire,
00:44:04 je n'ai pas appris la fuite, je veux dire, si je n'étais pas dans mon tort, et j'ai eu une certaine
00:44:09 éducation qui fait que, bon, à ce moment-là, on a quand même une certaine attitude à avoir,
00:44:15 quoi, voilà. Donc ça, c'est la première chose que je voulais dire. Oui, on ne va pas faire le
00:44:19 procès ici, des uns ou des autres, hein ? Non, non, non, non. Parce que je laisse la justice,
00:44:23 vous savez, je vous garde bien, je fais très très attention, hein, depuis le début, je fais très
00:44:27 attention. Donc allez-y, vous vouliez parler des parents, Thierry. Il y a des gendarmes qui ne sont
00:44:33 pas bons, des enseignants, des bouchers, tout ce qu'on veut, mais il y en a des respectables,
00:44:37 ils font très bien leur travail. Voilà ce que je voulais dire déjà sur les gendarmes. Ensuite,
00:44:41 au niveau des enfants, qu'est-ce qu'ils faisaient ? Alors, c'est malheureux ce qui s'est passé,
00:44:44 c'est très malheureux, je suis parent, c'est très malheureux ce qui s'est passé. Mais qu'est-ce
00:44:48 qu'ils faisaient, ce gamin de 16 ans ou 17 ans, à conduire une voiture, hein, et dehors, voilà.
00:44:55 - Ce qui m'intéresse, Thierry, ce matin, très bien, oui, on s'est posé la question hier avant-hier,
00:45:00 effectivement. Mais ce qui m'intéresse, Thierry, ce matin, c'est les émeutes.
00:45:04 - Alors, sur les émeutes, mais oui, mais quand j'entends dire des gamins de 10 ans, 12 ans,
00:45:10 15 ans, qui sont dehors en train de faire... Mais mes enfants, ils sont jamais sortis après 11h du
00:45:18 soir à faire quoi que ce soit, même à les amuser. Mais je comprends pas, que font les parents ? Ils
00:45:24 sont responsables de leurs enfants qui ont cet âge-là ? - C'est la question que nous nous
00:45:30 posions. Michel Auboin, vous aviez des réponses. La population très jeune de ces quartiers,
00:45:39 qui s'enflamme, a changé au fil du temps. - Oui, elle a changé au fil des générations,
00:45:45 parce que on a aujourd'hui... Alors, les proportions sont pas connues, parce que les statistiques,
00:45:51 on les fait quartier par quartier, mais on les agrage pas, donc on sait pas le dire sur l'ensemble
00:45:54 de la France. Mais on a une partie de... Une grande partie de la population juvénile, je parle des
00:46:00 enfants, des plus jeunes, qui sont issus de l'immigration africaine, subsaharienne, et pas
00:46:06 maghrébine, comme dans l'imaginaire collectif. Mais clairement, ça c'est complètement évident.
00:46:11 Alors qu'est-ce que ça change ? C'est les formes d'éducation qui changent, puisqu'on a des fratries
00:46:18 plus nombreuses, des enfants nombreux, et un mode d'éducation qui privilégie beaucoup la mère,
00:46:26 avec des pères assez absents en matière éducative, il faut bien le dire, quand ils sont pas absents
00:46:31 en tout cours d'ailleurs, et des mères qui, elles-mêmes, sont en prise avec des difficultés
00:46:36 quotidiennes et économiques considérables. Alors moi, ce que je vois beaucoup, par exemple,
00:46:42 c'est dans les banlieues où je gravite, c'est des femmes qui sont femmes de ménage, qui tous les
00:46:49 matins partent à 5h du matin pour aller travailler, qui laissent les enfants un peu livrés à eux-mêmes,
00:46:55 ou aux mains des aînés, et ça fait quand même beaucoup de garçons, parce que c'est surtout des
00:46:59 garçons dont on parle, dans cette affaire on parle que des garçons d'ailleurs, on voit très peu de
00:47:03 filles dans les eaux, on en a vu quelques-unes mais très peu, et donc ces garçons qui vivent à
00:47:08 l'extérieur, et ça n'a rien d'étonnant, puisque c'est comme ça qu'ils auraient été élevés s'ils
00:47:13 étaient récemment nés. - Et quand il fait bon, comme en ce moment, il fait chaud, ils vivent plus à
00:47:17 l'extérieur encore. - Ouais, c'est sûr, en passant hier devant une école et en parlant aux responsables,
00:47:23 ils me disent, effectivement, comme les collèges ont fermé depuis 15 jours, qu'est-ce qu'ils font ?
00:47:29 Ils s'agglutinent à la porte de l'école, primaire, parce qu'il y en a un qui vient attendre son petit
00:47:35 frère par exemple, et donc ils sont des dizaines et dizaines agglutinés sans rien savoir quoi faire,
00:47:40 d'autres clairement, à la porte de l'école. Et ça c'est le ferment d'une réactivité collective,
00:47:47 s'il ne se passe rien, il ne se passe rien, mais s'il se passe un fait particulier, aussitôt tout
00:47:51 s'enflamme, et il n'y a pas d'encadrant, il n'y a pas d'adultes qui sont là pour prendre le relais.
00:47:56 - Reda Didi, vous êtes d'accord ? Vous intervenez dans les collèges ?
00:47:59 - Oui, nous on intervient dans les collèges. Alors, j'allais dire, cette analyse est très juste,
00:48:04 je me demandais si elle ne concernait pas l'île de France et un peu plus largement,
00:48:09 parce qu'on a après d'autres territoires, Lyon, Marseille, Nîmes, les 20 balles de Bourse
00:48:13 auxquelles on allait, où l'immigration, les habitants de ces territoires-là est un peu
00:48:18 différente, et a peut-être un petit peu stagné d'ailleurs, on a eu peut-être un peu moins de
00:48:21 turnover et peut-être un peu moins de retour dû peut-être à la puissance économique qu'a la région
00:48:26 qu'a la région île de France. On remarque aussi, et il ne faut pas qu'on tombe dans la caricature,
00:48:32 nous quand on donne la parole aux habitants des quartiers populaires, ce qui nous remonte d'abord,
00:48:35 c'est un besoin d'avoir plus de police, plus de police de proximité, avec lequel on peut
00:48:42 dialoguer, une police sur laquelle il faut se re-questionner, peut-être qu'il faut expérimenter
00:48:47 des choses, qu'on a pu voir à droite à gauche, mais plus de police, et un besoin d'aussi avoir
00:48:52 un territoire, j'allais dire comme le reste du territoire français, avec les mêmes services
00:48:56 publics, la même sécurité, la même possibilité de vivre convenablement. Et ça, ça remonte
00:49:03 régulièrement quand on donne la parole aux adultes notamment. - Alors maintenant, que faire ?
00:49:10 A 13 heures, le président de la République va présider une deuxième cellule de crise interministérielle.
00:49:16 Il y a, et c'est un appel de certains responsables politiques à droite, il y a la demande de l'état
00:49:23 d'urgence. L'état d'urgence, ça veut dire quoi, Félix Mathieu ? - L'état d'urgence, c'est une
00:49:29 mesure exceptionnelle qui permet de restreindre certaines libertés, d'accorder des pouvoirs
00:49:33 exceptionnels au pouvoir exécutif. Il a été créé par une loi de 1955, en réaction à l'époque aux
00:49:39 événements d'Algérie. Il est plus vieux en fait, donc, que la Ve République. L'état d'urgence,
00:49:44 il peut être déclenché en cas de péril imminent, d'atteinte grave à l'ordre public ou en cas de
00:49:49 calamité publique. Alors, quand il est déclenché par décret pris en Conseil des ministres, avec
00:49:54 signature du président de la République, cet état d'urgence court sur 12 jours, renouvelable par un
00:49:59 vote du Parlement. Il permet par exemple de restreindre la liberté de circulation, d'interdire
00:50:04 des rassemblements, des manifestations, d'instaurer un couvre-feu, d'instaurer un périmètre de
00:50:09 sécurité autour de certains lieux publics. Il autorise des perquisitions exceptionnelles sans
00:50:13 passer par la justice, ou même des assignations à résidence de certaines personnes. L'état d'urgence
00:50:18 a été déclenché à six reprises lors de la guerre d'Algérie, ou lors des émeutes de 2005, ou après
00:50:23 les attentats de 2015, à sept reprises, même si on comptabilise l'état d'urgence sanitaire créé avec
00:50:29 le Covid en 2020. - Est-ce qu'il faut déclencher l'état d'urgence, monsieur le préfet ? - Il faut y
00:50:37 réfléchir. Ce qui est sûr, c'est que c'est les outils juridiques dont on dispose et dont on
00:50:41 pourrait disposer. Et puis, il faut être absolument sûr de pouvoir le faire respecter. On n'est pas
00:50:48 dans le Covid. Le Covid, on a dit, tout le monde reste chez soi, d'une certaine façon, tout le monde
00:50:52 reste chez lui. Là, c'est pas du tout évident. - C'est pas parce qu'on décrète l'état d'urgence
00:50:56 que les jeunes qui ont envie de sortir ne sortiront pas. - Voilà, c'est pour ça. Et puis, on a d'autres
00:51:01 problèmes techniques qui sont graves. On a interpellé quelques centaines de jeunes, mais une
00:51:08 fois qu'on les interpelle, on les met où ? Parce que, pardon de dire, mais la plupart des commissariats,
00:51:12 ils sont déjà saturés. On va pas les mettre en garde à vue, surtout quand ils ont 13 ans. Donc,
00:51:16 en 2005, ils étaient alignés dans des couloirs. Objectivement, ça posait des problèmes insurmontables
00:51:21 et ça va en poser encore plus aujourd'hui. Donc, même ça, le simple fait de ne pas avoir les locaux
00:51:26 qui permettent de conserver des jeunes qui seraient attrapés pour passer la nuit au poste, comme on
00:51:30 dit avant, même ça, on ne sait pas le faire aujourd'hui. - Oui, l'état d'urgence, Red Hadidi, vous pensez
00:51:35 qu'il est temps de décréter l'état d'urgence ou pas ? Ou est-ce que ce serait un signe de...
00:51:42 pas de panique, mais est-ce que ce sera un signe de panique ou un signe de fermeté ?
00:51:48 - Nous, c'est pas notre rôle de penser ça. Mais ce que je voudrais dire, c'est qu'il faut
00:51:54 que là, les émeutes cessent. - Oui. - Le message est passé, vous l'avez très bien dit, ce cas a été pris
00:52:01 en charge de façon tout à fait convenable par le politique et par la justice. La justice est
00:52:07 passée, ou va passer. - Oui. - La justice va passer. - Elle fait son travail. - Il faut qu'elle fasse son chemin. - Elle poursuit son travail.
00:52:12 - Il faut que les uns les autres, on appelle au calme. Il faut qu'on arrive, les uns les autres, à retrouver
00:52:18 raison, à éviter que ceci ne déborde. En fait, la question avec l'état d'urgence ou d'autres
00:52:25 dispositions de cet ordre-là, je me dis que si ça marche pas, qu'est-ce qu'on fait derrière ? - Oui.
00:52:29 - Et c'est là la grosse difficulté pour moi. Et il me semble qu'il faut essayer d'autres
00:52:37 voies. Mais de toute façon, il va falloir avoir une multitude de réponses. Et pas une seule réponse
00:52:43 ne suffira sur ce cas-là. - Bien sûr. 11h42, nous allons encore prendre des auditeurs. Vous êtes très
00:52:50 nombreux. 0826, 300, 300. Chantal qui est à Brive, Justine qui est à Troyes et qui a envie d'intervenir.
00:52:58 A tout de suite. Il nous reste 10 minutes. Très vite, deux témoignages de deux auditrices. Parce que
00:53:04 vous êtes prioritaire, vous le savez. Chantal, par exemple, qui est à Brive-la-Gaillard dans Corrèze.
00:53:08 Chantal, très vite parce qu'on a beaucoup de choses à dire encore. Allez-y, Chantal. Bonjour.
00:53:13 - Oui, bonjour. - Merci. - Bonjour, Monsieur Bourdin. - Merci. - Le témoignage, ça n'en est pas.
00:53:18 - Alors, allez-y. C'est une remarque. - Oui, j'entends beaucoup de choses se dire, mais ça tourne en rond.
00:53:25 Et moi, j'aurais éventuellement une solution. Je pense que ce serait une bonne chose de faire appel à l'armée.
00:53:31 Il faut leur faire peur à ces jeunes. Alors, il faudrait effectivement les moyens importants, comme une guérilla.
00:53:38 Et puis peut-être les pompiers, lanceurs d'eau, conducteurs de vol, etc. - Oui, une guérilla, surtout pas de victimes, Chantal.
00:53:47 - Non, non, mais il faut leur faire peur le temps que carrément, ils vont avoir peur. - Bon, l'armée, Michel Leboin.
00:53:53 Attendez, Chantal, c'est une solution, l'armée ? - Non, c'est totalement inopérant. Enfin, ça a été étudié.
00:53:58 - Pourquoi ? Ça a été étudié, oui. - C'est les méthodes d'intervention de l'armée. D'abord, en termes d'image, franchement,
00:54:04 il vaut mieux utiliser des forces républicaines, la police ou la gendarmerie, et les polices municipales.
00:54:09 Mais en plus, en termes opérationnels, enfin, ça serait... - Le maintien de l'ordre, l'armée ne sait pas faire.
00:54:14 - Mais bien sûr que non. Tout ça, c'est quand même des techniques compliquées. La France, c'est un des pays qui a inventé
00:54:21 le maintien de l'ordre sans blessés et sans morts. Mais c'est des années de travail. Donc, on ne peut pas...
00:54:26 Alors, par contre, là où on pourrait utiliser davantage, c'est des moyens militaires. Je pense aux hélicoptères, par exemple,
00:54:32 parce qu'à chaque fois où on sort de ce problème, la police n'a pas d'hélicoptère. Je trouve ça scandaleux, je le dis publiquement.
00:54:39 À chaque fois où on réquisitionne des hélicoptères de la gendarmerie ou des pompiers pour circuler autour du quartier,
00:54:45 les hélicoptères, c'est absolument essentiel sur ce type de phénomène.
00:54:49 - Justine ? - Oui, je suis là. Bonjour.
00:54:53 - Bonjour, Justine. - Bon, alors, écoutez, moi, c'est sûr que tout le monde est un petit peu révolté.
00:54:59 L'état d'urgence, je vais faire rapide sur deux jours. Oui, pourquoi pas ? Mais ça va recommencer.
00:55:04 Le problème, il est à la base et ça fait des années et des années que ça dure. Donc il faudrait qu'il y ait un peu moins de laxisme.
00:55:09 Je ne détiens pas la solution. Mais des enfants de 13 ans qui n'ont pas de référence parentale, qui sont abandonnés,
00:55:17 comment voulez-vous qu'ils réagissent, ces enfants-là ? Ils sont dans la précarité, tout est difficile pour eux.
00:55:24 Je ne les excuse pas, absolument pas. Mais il va falloir qu'on agisse quand même. Je ne sais pas par quel moyen.
00:55:30 Mais je vais vous dire, pour faire vite, regardez, obtempérer, c'est normal. On s'arrête, on donne les papiers.
00:55:37 On ne le fait pas, ce n'est pas une raison pour qu'on lui tire une balle dans la tête.
00:55:41 Mais quand on n'a rien à se reprocher, on arrête. Donc c'est un enfant de la République. Il est où, le problème ?
00:55:47 Qu'est-ce qui se passe ? Alors on veut dire l'état d'urgence sur deux jours, des assignations à résidence,
00:55:52 mais ça ne fera rien, interpeller des enfants de présent, on ne peut rien faire. Donc il est vrai que moi aussi,
00:55:59 ça me révolte tout ce qui se passe. Mais il n'y a personne qui prend une décision.
00:56:03 Comme vous le disiez tout à l'heure, l'armée a rosé. Oui, on peut mettre le feu, on peut mettre des bombes.
00:56:08 Enfin, on n'est pas... ce n'est pas la guérilla. Mais la solution, je ne la connais pas, mais la solution, elle est à la base
00:56:15 d'un problème d'immigration, d'immigration. - Vous avez raison, Justine. Alors, reprendre... Il y a aussi une solution.
00:56:22 Merci Justine, dont vous parliez, qui me paraissent très intéressantes. Vous parliez tous les deux de cela.
00:56:27 Reprendre l'espace public. Qui, ce soir, demain, ces jours prochains, devrait reprendre l'espace public ?
00:56:35 - Je pense que tous les... D'abord, la question ne peut se régler qu'au niveau local. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de solution nationale
00:56:42 dans cette affaire. Parce que la vision... Il faut faire attention, on a un discours politique qui est global, mais en fait,
00:56:47 la vision du jeune, c'est "mon quartier". Et donc, certes, il va regarder ce que font les autres, mais c'est d'abord "mon quartier".
00:56:53 - Il y a un phénomène de mimétisme, d'un quartier à l'autre, d'une commune à l'autre.
00:56:57 - C'est des quartiers qui se battent entre eux, il ne faut pas oublier. Il y a des rixes régulières et parfois mortelles
00:57:02 entre les quartiers. Donc, ils ont une vision du quartier. En général, ils ne sortent pas de leur quartier.
00:57:06 Et d'ailleurs, ils ont un peu de mal à savoir ce qui se passe autour de leur quartier. Certains ignorent même la commune
00:57:11 dans laquelle ils habitent. Donc, c'est vraiment le quartier, le point de base. Donc, c'est dans le quartier.
00:57:16 Et donc, dans chacun des quartiers, il faut trouver une solution adaptée à chacun des quartiers.
00:57:20 Et dans chacun des quartiers, ceux dont on a besoin, ce sont des adultes, clairement.
00:57:23 - Les adultes. - Les adultes, oui.
00:57:25 - Les adultes, quels qu'ils soient. C'est-à-dire qu'on reprend l'espace public. On va manifester.
00:57:32 Les adultes vont manifester. Qui sont ces adultes qui pourraient aller manifester, Reda Didi ?
00:57:38 - C'est tous les adultes qui composent une société, qui composent la commune. C'est-à-dire qu'on a trop laissé l'espace public.
00:57:43 - C'est vrai. - Et nous-mêmes, notre génération a eu du mal et a encore du mal à intervenir dans l'espace public.
00:57:51 Alors que nous, quand on était plus jeunes, n'importe quel adulte qui vous remettait en place parce que vous aviez fait
00:57:56 une petite bêtise, ça ne posait aucun problème à personne. - C'est vrai.
00:57:58 - Et qu'aujourd'hui, tout ça, c'est perdu par des craintes, par des divergences, par des gens qui se connaissent un peu moins, par des difficultés.
00:58:05 Et je pense que si on laisse cet espace-là libre à des bandes de jeunes qui le prennent comme un terrain de jeu
00:58:11 pendant toute une soirée à jouer au chat et à la souris avec la police en cassant et en...
00:58:16 Mais non, ça ne marchera pas. C'était une initiative notamment du maire des Brics.
00:58:19 - Donc les maires devraient dire, lancer un appel à tous les adultes de leur commune, de dire voilà,
00:58:25 allez manifester ce soir, demain soir, allez reprendre l'espace public.
00:58:30 Alors, en s'appuyant aussi sur les autorités religieuses.
00:58:33 Est-ce qu'elles jouent un rôle si important que ça ?
00:58:36 Attendez, lorsque je pense à autorités religieuses, je pense aux musulmans, mais pas qu'aux musulmans.
00:58:40 Je pense aussi à maintenant les évangélistes qui sont très influents.
00:58:46 - Oui, non, alors je sais bien, dans la république laïque, on a toujours du mal à parler avec les autorités religieuses,
00:58:51 mais là, je crois qu'on ne fera pas l'économie de ce dialogue.
00:58:54 Donc, elles sont écoutées par une grande partie de la population, ces autorités religieuses, elles ont un pouvoir.
00:59:01 Alors, c'est effectivement les autorités musulmanes, c'est les églises évangéliques,
00:59:06 c'est quand même, il y a une population catholique aussi, assez nombreuse dans les quartiers,
00:59:10 parce qu'on a une vision très étrange des quartiers, mais enfin,
00:59:13 on a des religions qui correspondent aux immigrations qui ont populé les quartiers.
00:59:19 Donc, on a une population par exemple congolaise, très catholique et très pratiquante d'ailleurs.
00:59:25 Donc, je pense que ces autorités religieuses doivent être sollicitées,
00:59:29 je ne vois pas très bien comment on pourrait faire autrement.
00:59:31 En tout cas, ce qui est sûr, c'est que ça ne peut pas être un problème de police contre les jeunes.
00:59:35 - Il faut que les adultes interviennent.
00:59:37 - Il faut que les adultes qui sont responsables interviennent.
00:59:40 - Bah, évidemment. Et je pense aussi, et les responsables des trafics.
00:59:44 - Alors, là, c'est l'autre sujet, donc cela, évidemment, on ne va pas traiter avec eux.
00:59:48 - Non. - Mais, eux, ils ont tout intérêt à ce que ça s'arrête, clairement.
00:59:52 Parce que dans l'affaire, ils vont perdre beaucoup de chiffre d'affaires.
00:59:55 Et on voit bien d'ailleurs, les quartiers où le trafic est très important,
01:00:02 sont en général ceux dans lesquels on n'a pas beaucoup de problèmes d'ordre public.
01:00:05 - Donc là, hier soir, on le remarque ou pas ?
01:00:07 - Oui, enfin, il faudrait faire la statistique,
01:00:10 mais comme ça, intuitivement, j'ai l'impression que c'est toujours le cas.
01:00:12 - C'est toujours le cas. - Donc, on voyait bien...
01:00:15 - Et d'ailleurs, dans les quartiers nord de Marseille, pardon,
01:00:18 il n'y a pas eu beaucoup d'émeutes, alors que les émeutes ont eu lieu dans le cœur,
01:00:21 dans le centre de Marseille.
01:00:23 - Oui, oui, je l'y pensais, parce que dans les quartiers nord, on se tue beaucoup,
01:00:26 mais on ne met pas le feu au bâtiment.
01:00:28 - Oui, on ne met pas le feu au bâtiment, on se tue.
01:00:31 C'est le stade... - Oui.
01:00:33 - Plus élevé. Reda Didi, vous êtes d'accord ? Les adultes doivent, aujourd'hui...
01:00:39 Mais dans l'urgence, là !
01:00:41 Est-ce que c'est... Pourquoi est-ce que le président de la République ne lance pas un appel, justement ?
01:00:47 Là, à 13h, puisqu'il réunit, et il va prendre la parole, j'imagine.
01:00:51 Pourquoi est-ce qu'il ne lance pas un appel, justement, à tous ces adultes, de tous ces quartiers ?
01:00:57 - En effet, je pense que cette vision de reprendre l'espace public
01:01:01 par tous les adultes de bonne volonté qui vivent dans les quartiers, sur ces villes,
01:01:07 où ça a débordé hier, où les émeutes ont été les plus aigus,
01:01:12 on doit les reprendre. Et je ne pense pas qu'il faille aller vers l'annulation de manifestations.
01:01:16 Au contraire. - Au contraire ?
01:01:17 - Au contraire. Il faut être présent, il faut montrer qu'on est là, et il ne faut pas laisser...
01:01:20 - Mais moi, je serai le maire de Muiz, qui a été mis à feu et à sang la veille,
01:01:25 j'appellerai à la manifestation.
01:01:27 J'appellerai à la manifestation.
01:01:29 - Ça, ça doit être la réponse. - Des adultes.
01:01:30 - Absolument. - Ce sont les maires qui doivent...
01:01:32 - Coupler à ça. - Coupler avec l'État.
01:01:35 - Voilà. Coupler avec l'État, coupler avec des appels de tous,
01:01:38 tous les politiques, tous les sportifs, toutes les personnes, ce qu'on s'était dit avant,
01:01:42 qui doivent refaire un appel... - Qui ont disparu.
01:01:44 - Qui doivent refaire un appel au calme. - Et ça, trahurer.
01:01:47 - Et puis mettre... - Et ces 500 000, je ne sais plus combien,
01:01:49 qui mettent de l'huile sur le feu, évidemment.
01:01:51 - Et mettre ensuite un programme où il faut qu'on ait une réflexion un peu plus large
01:01:54 sur cette question de la relation pays-population,
01:01:57 et sur d'autres questions sur ces territoires,
01:01:59 pour éviter que cela ne se reproduise.
01:02:01 - Merci beaucoup, messieurs.
01:02:03 C'était passionnant, c'est passionnant.
01:02:05 Je vais recevoir Latifa Ibn Ziyatène, juste après,
01:02:09 qui se bat dans son coin, qui est désespérée,
01:02:13 un peu parce qu'elle a été prise à partie elle aussi, hier,
01:02:16 lors de la marche blanche, en hommage à Nahel.
01:02:21 Elle sera là, après les informations de midi.
01:02:24 Latifa Ibn Ziyatène est avec nous, bonjour.
01:02:26 - Bonjour. - Je rappelle Latifa,
01:02:28 nous nous connaissons depuis maintenant longtemps,
01:02:30 malheureusement, nous nous sommes connus après le drame que vous avez vécu,
01:02:34 la mort de votre fils, Imad, assassiné par Mohamed Merah,
01:02:38 c'était en 2012, et à la suite de ce drame,
01:02:42 vous avez dit "je ne peux pas, il faut que je porte une parole".
01:02:46 Une parole de justice, une parole d'équité,
01:02:50 une parole de compassion,
01:02:52 et il faut que je sois écouté,
01:02:55 notamment dans les quartiers difficiles,
01:02:58 vous avez créé l'association Imad, pour la jeunesse et la paix,
01:03:03 je dis bien la paix, Latifa Ibn Ziyatène,
01:03:06 inlassablement, vous allez dans les écoles,
01:03:11 inlassablement, vous rencontrez des jeunes, des parents,
01:03:14 des élus, des responsables d'associations,
01:03:18 et inlassablement, vous essayez de prêcher
01:03:22 une parole de paix et de justice, c'est bien cela.
01:03:25 J'ai bien résumé votre action.
01:03:28 - Tout à fait, pour la jeunesse et la paix,
01:03:30 et le respect, les valeurs, c'est très important.
01:03:36 - Ça c'est essentiel, nous allons parler du respect et des valeurs,
01:03:39 mais Latifa Ibn Ziyatène, vous étiez hier à la marche,
01:03:43 à la mémoire de Naël, vous teniez à y aller,
01:03:47 à la mémoire de Naël, on est bien d'accord.
01:03:50 - Tout à fait, je voulais participer à cette marche,
01:03:53 apaiser aussi la douleur de cette maman,
01:03:56 parce que je sais où je suis passée.
01:03:58 Une mère, quand elle perd un fils, c'est moitié d'elle qui part.
01:04:04 Et ce que j'ai senti moi, j'ai dit ma place,
01:04:08 elle est à cette marche, je dois être là, à côté.
01:04:11 Beaucoup de gens m'ont dit "il ne faut pas y aller, ce sera dangereux",
01:04:14 mais je n'ai pas peur, vous voyez, je suis allée,
01:04:16 c'est vrai qu'il y avait un danger, c'est vrai que j'étais en danger,
01:04:20 mais c'était important d'être là.
01:04:23 - Voilà, vous espériez, quelque part, ramener un peu de calme,
01:04:27 d'apaisement, j'aime préférer encore ce mot,
01:04:32 d'apaisement dans les esprits.
01:04:34 - Oui, parce que si j'étais là, c'est pour apaiser la douleur de cette mère,
01:04:39 et en même temps d'apaiser cette colère de cette jeunesse.
01:04:42 Parce que si jeûne, c'est sûr, il y a un colère,
01:04:48 mais je ne suis pas d'accord avec eux,
01:04:50 la colère ça ne se présente pas par la violence.
01:04:52 Vous savez, il faut avoir confiance à la justice.
01:04:55 Certains jeunes, j'ai même attrapé un jeune hier,
01:05:00 qui était complètement dépassé, la colère se voyait dans ses yeux,
01:05:04 dans ses mots, et je lui ai dit "jeune homme",
01:05:07 moi il y avait un monsieur qui était avec moi, je lui ai dit "calme-toi,
01:05:10 ce n'est pas par la violence qu'on va gagner,
01:05:12 ni toi, ni moi, ni personne, la haine ça ne gagnera rien,
01:05:16 ça crée de la souffrance,
01:05:18 croyez-moi, je suis sur le terrain, je suis dans les maisons d'arrêt,
01:05:21 je vois ce qu'il se passe, alors arrêtez."
01:05:25 Et il m'a dit "madame, ils nous ont retiré beaucoup de choses,
01:05:30 on n'est plus rien, et maintenant ils nous tuent,
01:05:34 alors je pense qu'il faut me lâcher madame."
01:05:36 Je lui ai dit "je ne peux pas te lâcher, s'il te plaît."
01:05:39 Et il m'a serré dans ses bras, il m'a dit "vous ne pouvez rien faire,
01:05:42 partez d'ici maman", comme ça qu'il m'a appelé,
01:05:45 "partez d'ici parce que ça va éclater en deux heures."
01:05:49 Et je ne voyais même pas, quelques secondes,
01:05:52 ça tourner en vinaigre, il n'y a pas d'autre mot.
01:05:56 - Oui, en vinaigre, vous étiez là, vous avez eu ce dialogue,
01:05:58 d'autres dialogues, et puis tout à coup vous avez senti
01:06:02 que vous n'étiez plus à être là, qu'on vous chassait
01:06:05 de ce cortège, de ce rassemblement.
01:06:09 - J'ai couru, j'ai rossi.
01:06:11 - Vous sentiez qu'on voulait s'en prendre à vous ?
01:06:15 - C'est-à-dire pas à moi spécialement, mais tu reçois les cailloux,
01:06:19 tu reçois... J'ai couru, même pour aller me protéger
01:06:24 à la préfecture, c'était impossible, toutes les portes s'étaient fermées.
01:06:27 Alors j'ai couru avec les gens et j'ai trouvé un homme,
01:06:31 je ne peux pas citer son nom parce qu'il était sur le lieu de travail,
01:06:36 et il était avec moi jusqu'au bout, il m'a même ramené dans sa voiture
01:06:40 jusqu'à ce que j'allais dans ma voiture pour récupérer ma voiture.
01:06:42 C'était vraiment...
01:06:44 - Cette marche blanche qui était une marche d'apaisement a dégénéré ?
01:06:47 - A dégénéré, vraiment horrible, on dirait qu'on est en guerre.
01:06:52 C'est ce que j'ai vu moi, tous ces jeunes, tout âge, jeunes et moins jeunes.
01:06:57 C'est pour ça que je dis et je répète,
01:07:00 aussi à la responsabilité de l'État, à la responsabilité des parents,
01:07:05 parce que les parents doivent parler avec leurs enfants.
01:07:08 Parce qu'on ne peut pas gagner, monsieur Bourdin,
01:07:12 de cette casse, de cette brûlure, tout ce qu'on voit aujourd'hui.
01:07:15 C'est pas comme ça, on doit raisonner nos enfants,
01:07:19 on doit parler sur les valeurs, sur le respect,
01:07:22 et on peut manifester, on peut manifester dans la rue,
01:07:25 en silence, on peut écrire, on peut aller appeler la justice,
01:07:30 on peut appeler l'État, mais on ne peut pas faire autant de mal.
01:07:34 Aujourd'hui c'est les gens qui travaillent, qui combrent leurs voitures,
01:07:37 c'est de casser des magasins, c'est les gens qui vivent avec
01:07:40 leurs moyens de travailler, leurs transports,
01:07:45 tout ce qu'on voit aujourd'hui, ça bloque tous ces gens-là.
01:07:49 Pourquoi générer le drame ?
01:07:52 Certes c'est grave ce qui est arrivé, c'est choquant,
01:07:56 mais la justice est là pour ça, il y a une justice.
01:08:00 On ne peut pas faire la justice nous-mêmes.
01:08:02 - Oui, Latifa, j'ai trouvé même parfois que,
01:08:07 je comprends évidemment la douleur de la mère,
01:08:10 mais même, j'ai trouvé que c'était aller un peu loin,
01:08:13 dans la manifestation, même de la part de la famille.
01:08:18 Même de la part de la famille, je ne veux pas juger la famille,
01:08:22 mais quand même !
01:08:23 - Voilà, on ne peut pas juger la famille,
01:08:25 mais la seule chose que je trouvais, cette marche,
01:08:27 elle était trop tôt.
01:08:29 - Oui, bien sûr.
01:08:30 - Il fallait attendre au moins qu'il enterre son enfant,
01:08:35 et après il pourra faire cette marche.
01:08:37 - Oui.
01:08:37 - C'était un peu trop tôt, et je pense que c'est une femme,
01:08:40 elle est complètement perdue.
01:08:42 J'ai senti hier, elle était sur le choc.
01:08:44 Et je ne pense même pas qu'elle est consciente
01:08:47 que son fils est mort.
01:08:49 Vous savez, moi j'ai perdu mon fils,
01:08:51 et malgré que j'ai pleuré, malgré que j'ai crié,
01:08:54 au fond de moi, je ne croyais pas que mon fils était mort.
01:08:57 Je croyais qu'il allait rentrer, qu'il allait revenir.
01:09:00 Et une mère qui perd son fils, c'est...
01:09:02 - Vous pensiez qu'hier, elle était encore avec son fils, quelque part ?
01:09:06 - Oui, quelque part. Je l'ai sentie, je l'ai touchée,
01:09:08 j'ai parlé avec elle, j'ai monté avec elle dans le camion.
01:09:10 - Oui.
01:09:11 - Je lui ai dit "je te souhaite beaucoup de courage,
01:09:14 essaye d'apaiser cette jeunesse,
01:09:17 essaye de passer un message,
01:09:19 parce qu'il y a beaucoup de dégâts".
01:09:20 Alors, elle ne m'écoutait même pas,
01:09:22 parce qu'elle était complètement
01:09:24 sur l'émotion des gens,
01:09:26 les gens qui étaient tout le monde,
01:09:28 pour aller se mettre debout.
01:09:30 Elle était complètement perdue, la pauvre femme.
01:09:32 - Elle était emportée.
01:09:33 - Emportée par les gens.
01:09:35 - Emportée par ce mouvement, par les gens qui l'entouraient.
01:09:37 - Voilà.
01:09:38 - Qui, quelque part, un peu l'utilisaient peut-être même,
01:09:41 utilisaient ce drame.
01:09:43 Certains, pas tous, mais certains.
01:09:46 - Moi, je dis, c'est dommage de faire tous ces dégâts,
01:09:50 et de ne pas laisser...
01:09:53 C'est comme on enlève le drame totalement,
01:09:58 et on ne parle aujourd'hui que de la violence.
01:10:00 On a oublié ce drame.
01:10:02 Au lieu de rester sur le drame et le respect,
01:10:05 et d'aller sur le minute du silence,
01:10:07 de le faire tranquillement,
01:10:09 d'aller sur le lieu où il était assassiné,
01:10:11 - La marcher sans un mot, en pensant à Naël,
01:10:14 en pensant à la souffrance de la mère,
01:10:16 d'avancer par milliers.
01:10:19 D'ailleurs, ça aurait eu beaucoup plus de force,
01:10:22 entre nous.
01:10:23 - Bien sûr.
01:10:25 C'est pour ça que je disais,
01:10:26 qu'est-ce qui se passe, pourquoi autant de...
01:10:28 Et quand je la voyais partir,
01:10:30 je me suis trouvée seule dans ce camion,
01:10:32 avec certains jeunes, ça m'a fait peur.
01:10:34 Il y a des gens qui m'ont fait descendre,
01:10:36 et je vous assure, j'ai croyé passer.
01:10:38 - Vous avez eu peur ?
01:10:40 - J'ai jamais eu peur.
01:10:42 Parce que si j'avais eu peur, je ne serais pas allée.
01:10:44 Mais ça fait vraiment dire, qu'est-ce qui se passe,
01:10:46 on est en France, pourquoi on est arrivé là ?
01:10:48 C'est pour ça que quand j'ai entendu ce matin,
01:10:50 la ministre d'aller voir les voitures brûler,
01:10:53 je pense que ça a place d'aller voir
01:10:55 aussi la politique de la ville, de voir ce qui se passe.
01:10:57 C'est parce que c'est eux qui sont sur le terrain.
01:11:01 C'est important.
01:11:03 - Oui, bien sûr. Quand la foule est en colère,
01:11:05 elle n'entend plus rien, c'est ce que vous dites ?
01:11:07 C'est ce que vous rappelez ?
01:11:09 - Moi je vous dis, j'ai parlé avec ce jeune homme,
01:11:11 il ne m'écoutait même pas.
01:11:13 Il se battait avec moi, vous voyez, on était deux à le tenir.
01:11:15 Il se battait.
01:11:17 Et je lui dis,
01:11:19 vous savez, la prison est remplie, jeune homme.
01:11:21 Il m'a dit, je n'ai pas peur, madame,
01:11:23 qu'est-ce qu'il peut me faire la prison ?
01:11:25 Déjà je suis en prison, déjà.
01:11:27 Vous voyez ? Déjà il nous tue.
01:11:29 Déjà il y a des barrières,
01:11:31 déjà on est oublié, on n'existe plus.
01:11:33 Et c'est vrai, ça fait un petit moment que j'ai dit,
01:11:35 je passe mon message.
01:11:37 Ouvrez cette cité.
01:11:39 Donnez la chance à cette jeunesse.
01:11:41 Écoute-les, accompagnez-les.
01:11:43 On revient sur l'arrière
01:11:45 d'ouvrir ce service militaire.
01:11:49 Parce qu'il y a un besoin aujourd'hui.
01:11:51 Parce qu'il y a une souffrance énorme.
01:11:53 - Je rappelle que votre fils était militaire.
01:11:55 - Voilà mon fils.
01:11:57 - Et je sais que vous en parliez avec lui.
01:11:59 Vous évoquiez tout cela avec lui.
01:12:01 - Bien sûr, bien sûr.
01:12:03 Et le service militaire, monsieur Bourdin, ça prend
01:12:05 un jeune
01:12:07 les valeurs, les règles,
01:12:09 le respect.
01:12:11 De sortir un bon citoyen.
01:12:13 Rien que six mois, c'est important pour un jeune.
01:12:15 Aujourd'hui il n'y a plus l'armée.
01:12:17 L'école,
01:12:19 aujourd'hui c'est très difficile.
01:12:21 Il y a certains parents qui accompagnent leurs enfants.
01:12:23 Il y a certains, maintenant, aujourd'hui,
01:12:25 les profs me disent "c'est nous qui orientons le jeune
01:12:27 parce que les parents ne sont pas présents".
01:12:29 Vous voyez, il y a des mères
01:12:31 qui vivent seules, qui souffrent.
01:12:33 Qu'on ne s'en rende pas compte aussi.
01:12:35 Qu'on ne doit pas aller vers eux pour voir ce qui se passe.
01:12:37 Cette jeunesse,
01:12:39 elle est complètement,
01:12:41 moi je dirais, dans la souffrance.
01:12:43 Une souffrance,
01:12:45 et l'espace public
01:12:47 lui a été, à certains endroits,
01:12:49 abandonné.
01:12:51 C'est-à-dire qu'elle occupe l'espace public.
01:12:53 Aujourd'hui,
01:12:55 les services publics sont partis,
01:12:57 les parents, certains, ont démissionné.
01:12:59 Mais que font les jeunes
01:13:01 de 14, 15, 16 ans, quand il fait beau,
01:13:03 par exemple, que les collèges sont finis,
01:13:05 que font-ils ? Eh bien, ils sont dans l'espace public.
01:13:07 Est-ce qu'on ne devrait pas,
01:13:09 tout à l'heure on en parlait avec mes deux invités,
01:13:11 je ne sais pas moi,
01:13:13 par exemple, essayer de reprendre l'espace public ?
01:13:15 Peut-être que les adultes,
01:13:17 là les adultes ont un rôle considérable à jouer.
01:13:19 Considérable dans les jours qui viennent,
01:13:21 dans les heures qui viennent, dans les jours qui viennent.
01:13:23 - Vous savez, monsieur Bourdin,
01:13:25 j'y vais quand il y avait le problème de cette...
01:13:27 Quand il y avait le...
01:13:31 le truc sanitaire.
01:13:33 - Oui, le Covid. - Voilà, le Covid.
01:13:35 Et beaucoup de jeunes qui ne sont pas
01:13:37 retournés à l'école. On ne les a pas cherchés.
01:13:39 - Oui. - On ne les a pas cherchés.
01:13:41 On n'a même pas posé la question
01:13:43 pourquoi ils ne sont pas venus à l'école.
01:13:45 Je connais des familles, des familles
01:13:47 qui ont des jeunes qui disent "mais ça ne sert à rien, madame.
01:13:49 À quoi sert ?
01:13:51 De toute façon, j'aurais aucune chance."
01:13:53 C'est pour ça que certaines
01:13:55 cités, on a laissé ce vide.
01:13:57 Ce vide énorme.
01:13:59 Et ce vide est rempli de la haine.
01:14:01 C'est pour ça que je dis,
01:14:03 tout le monde a une part de responsabilité.
01:14:05 Les parents, l'école,
01:14:07 la politique de la ville, l'État.
01:14:09 On a tous une part de responsabilité.
01:14:11 La société, c'est important parce qu'aujourd'hui,
01:14:13 on ne fait pas nécessaire.
01:14:15 Cette jeunesse,
01:14:17 c'est l'avenir de demain.
01:14:19 Elle a autant de chances que les autres.
01:14:21 - Les responsables associatifs,
01:14:23 les responsables religieux,
01:14:25 les autorités religieuses,
01:14:27 enfin, tout.
01:14:29 - Bien sûr, les élus. - Les autorités religieuses.
01:14:31 Toutes les religions.
01:14:33 On est bien d'accord.
01:14:35 - Les religions,
01:14:37 ils sont là pour passer le message
01:14:39 de paix, des valeurs, de respect.
01:14:41 Mais tout ce qui est
01:14:43 élu, tout ce qui est
01:14:45 associatif de terrain,
01:14:47 tous ces gens-là, ils doivent
01:14:49 jouer un rôle important pour cette jeunesse.
01:14:51 Parce que de voir ce colère
01:14:53 que j'ai vu hier, moi, ça m'a fait très peur.
01:14:55 C'est pas pour moi, mais j'avais peur
01:14:57 pour tous ces gens
01:14:59 qui reçoivent le nom de Mac
01:15:01 et il n'y a pas de voiture.
01:15:03 Tous ces dégâts, tout ça.
01:15:05 - Latifah Ibn Jaten, vous voyez la situation
01:15:07 changer ?
01:15:09 Les jeunes qui sont dans la rue
01:15:11 sont plus jeunes qu'avant.
01:15:13 Plus violents aussi qu'avant.
01:15:15 - Oui. Cette génération
01:15:17 aujourd'hui, comme je vous dis,
01:15:19 tellement qu'on a laissé le vide,
01:15:21 tellement qu'on n'a pas
01:15:23 donné leur chance,
01:15:25 même vis-à-vis d'école. Vous savez, quand vous avez
01:15:27 une carte scolaire, vous ne pouvez pas y aller dans
01:15:29 une autre école. C'est une
01:15:31 punition, moi j'appelle ça. Pour ça, je dis, il faut
01:15:33 sortir de cette carte scolaire, laisser la liberté aux gens.
01:15:35 Laissez, si j'ai les moyens
01:15:37 de faire mon fils aller dans une autre école
01:15:39 qui je peux.
01:15:41 Si j'ai le moyen de transport,
01:15:43 pourquoi vous m'interditez ? Pourquoi je suis obligé
01:15:45 d'aller dans cette école où j'habite ?
01:15:47 Il faut laisser la liberté aux gens.
01:15:49 Et cette liberté aussi,
01:15:51 je la sens, vis-à-vis
01:15:53 des jeunes qui ont été moins aidés. Je suis obligé
01:15:55 d'aller dans cette école, je ne l'aime pas,
01:15:57 mais je n'ai pas le choix. Et tout ça,
01:15:59 c'est fait
01:16:01 politiquement. Aujourd'hui,
01:16:03 vous savez, quand vous passez plus qu'11 ans
01:16:05 sur le terrain, je vois des choses
01:16:07 affreuses. Moi, j'ai jamais cru
01:16:09 de voir autant de cités aussi tristes,
01:16:11 aussi abandonnées qu'aujourd'hui.
01:16:13 - C'est vrai ?
01:16:15 - C'est horrible. C'est pour ça que je dis
01:16:17 tous ces hommes politiques,
01:16:19 qui doivent sortir
01:16:21 sur le terrain.
01:16:23 C'est important. - Ils doivent aller voir.
01:16:25 - Bien sûr, ils doivent aller les voir.
01:16:27 - Et vivre ce que vivent ces habitants-là.
01:16:29 Parce que le moment de Covid,
01:16:31 quand on habite sur un FR3,
01:16:33 F5, et on est 8, 9, dans le même
01:16:35 appartement, et qu'on n'a pas le droit de sortir,
01:16:37 vous savez, c'est très dur.
01:16:39 Et quand on n'a pas les moyens, qu'on n'a pas le matériel
01:16:41 pour travailler, c'est très dur, monsieur Bourdin.
01:16:43 Il y a des jeunes qui se sont
01:16:45 déprimés, qui ont beaucoup souffert.
01:16:47 Tout ça, c'est la colère,
01:16:49 toute cette colère qui sort aujourd'hui.
01:16:51 - Avec une colère
01:16:53 exploitée par certains,
01:16:55 évidemment, qui en profitent
01:16:57 pour aller piller, saccager,
01:16:59 détruire, incendier,
01:17:01 enfin, etc., etc.
01:17:03 - Oui, mais ça c'est impardonnable.
01:17:05 Moi, je dis à un jeune,
01:17:07 normalement, on doit manifester en silence.
01:17:09 Vous savez, s'ils se mettent tous d'accord,
01:17:11 et on sort dans la rue,
01:17:13 on manifeste qu'on n'est pas contents.
01:17:15 En silence.
01:17:17 Toutes les Français,
01:17:19 que ce soit l'État ou
01:17:21 n'importe quelle personne,
01:17:23 considèrent vraiment
01:17:25 une manifestation digne.
01:17:27 - Gagner la dignité.
01:17:29 - Digne. - Gagner le respect.
01:17:31 - Digne et avec respect. Mais là,
01:17:33 de saccager, de faire du mal,
01:17:35 je vous assure, moi je voyais des cailloux,
01:17:37 mais je ne sais même pas où ils ont
01:17:39 cherché ces cailloux. Il y a un caillou qui passait
01:17:41 entre mes jambes,
01:17:43 et un monsieur me disait "courez, courez
01:17:45 madame, courez !"
01:17:47 Je dis "mon Dieu, qu'est-ce qui se passe ?"
01:17:49 - Vous pensiez un jour pouvoir
01:17:51 être prise à partie, comme ça,
01:17:53 dans une manifestation ?
01:17:55 - Je n'ai jamais... - Vous n'en avez jamais été ?
01:17:57 - Jamais. Je me rappelle
01:17:59 quand on a fait la marche à Rouen,
01:18:01 quand j'ai perdu mon fils,
01:18:03 et on a fait la marche pour Charlie Hebdo,
01:18:05 tout ça, et il y avait un couple
01:18:07 qui était devant moi, et ils ont dit "mais
01:18:09 qu'est-ce qu'il fait cette dame-là devant nous ?"
01:18:11 C'est la seule que j'ai... ça m'a marquée
01:18:13 à vie, et j'ai pas répondu.
01:18:15 Après la dame, elle dit "mais il n'a rien
01:18:17 à faire là, il nous tue, et puis ils sont là."
01:18:19 Tout ça parce que j'ai porté mon foulard.
01:18:21 Et là,
01:18:23 j'étais choquée,
01:18:25 et après ils m'ont vu le soir à la télé,
01:18:27 et ils étaient complètement...
01:18:29 ils ont essayé de me contacter,
01:18:31 et ils ont demandé l'excuse.
01:18:33 Mais là, ce que j'ai vu hier, c'est différent.
01:18:35 Hier, c'était une...
01:18:37 Je plains
01:18:39 tous ces services de l'ordre,
01:18:41 c'était dur hier.
01:18:43 Franchement. C'était dur de voir
01:18:45 tous ces hommes
01:18:47 qui ont tous ces cailloux, et je dis "mon Dieu".
01:18:49 Et même ce...
01:18:51 C'est assez vrai, c'est me dire "courez
01:18:53 madame, courez". Je dis "mon Dieu".
01:18:55 C'est dingue.
01:18:57 J'avais des frissons.
01:18:59 Je vous assure, c'est...
01:19:01 Je vous tiens à chapeau.
01:19:03 - Merci Latifa.
01:19:05 Merci d'être venue nous voir.
01:19:07 Ce matin, sur Sud Radio, votre témoignage
01:19:09 très fort. - Merci beaucoup.
01:19:11 - Merci. 12h26.
01:19:13 Vous nous avez
01:19:15 accompagnée depuis deux heures,
01:19:17 vous nous avez... Nous avons battu un record d'appels,
01:19:19 du nombre d'appels. Vous étiez plus nombreux que
01:19:21 jamais à écouter, à suivre
01:19:23 notre émission. Je vous en remercie vraiment
01:19:25 de tout cœur. Et puis nous allons
01:19:27 poursuivre, évidemment, dès lundi.

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