À la française - Art musical

  • l’année dernière
Chef d’Orchestre depuis l’âge de 14 ans, Premier Prix du Conservatoire de Paris, Jean-Philippe Sarcos est un Chef d'Orchestre et Organiste au talent remarquable. Il est fondateur et directeur musical du Chœur et Orchestre Le Palais Royal, qui se produit régulièrement sur les plus grandes scènes françaises.
Suivez-le au Conservatoire Rachmaninov en compagnie de Laurent Poultier du Mesnil, afin de découvrir et comprendre combien l'Art Musical Français est si différent de tous les autres.
Le Chef Jean-Philippe Sarcos nous offre une approche musicale tout à fait passionnante, qui enchantera vos oreilles.


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Transcript
00:00 Bonjour, aujourd'hui, pour ce numéro de "À la française",
00:04 je vais vous emmener rencontrer un chef d'orchestre absolument fabuleux.
00:07 Il s'appelle Jean-Philippe Sarkoz, et nous allons parler d'art musical.
00:11 [Musique]
00:40 [Musique]
01:09 [Musique]
01:38 [Musique]
01:58 [Applaudissements]
02:09 Bonjour, Jean-Philippe, chef d'orchestre du Palais Royal, s'il vous plaît.
02:13 Jean-Philippe, merci beaucoup d'être avec nous pour parler de musique,
02:17 évidemment aujourd'hui, de musique.
02:19 Un chef d'orchestre, tout de suite ma première question,
02:22 comment est-ce qu'il sait pour diriger un orchestre ?
02:24 Alors, moi, je ne saurais pas trop l'expliquer parce que je fais ça depuis que je suis tout petit,
02:28 donc j'ai commencé à donner des cours à 14 ans, voilà, c'est ça.
02:31 Mais je crois que ce qui est important, c'est d'arriver déjà à concentrer toutes les énergies
02:36 pour que tout le monde ait envie de faire la même chose.
02:40 Le chef est là comme au service de tous ses musiciens pour leur permettre,
02:45 chacun, d'exprimer ce qu'il a dans le cœur avec une unité.
02:50 Un peu comme un chef d'entreprise, il y a le mot chef d'orchestre, chef d'entreprise,
02:54 il y a le mot chef dedans.
02:55 L'idée, c'est de rassembler l'ensemble d'énergie, on va dire, tout autour de toi,
03:00 mais il faut avoir donc, c'est quoi ? C'est le charisme qu'il faut avoir, c'est quoi ?
03:04 Le charisme, je pense que c'est indispensable, il faut que les gens aient envie de suivre,
03:08 et puis après, il y a plein de techniques, bien sûr, notamment de bienveillance.
03:13 Je crois qu'il faut aimer les musiciens, il faut aimer les chanteurs qui sont là.
03:17 Je me souviens qu'un jour, je donnais un concert avec le Requiem de Forêt à la Madeleine,
03:23 et cinq minutes avant, je commence à m'habiller,
03:28 et puis je m'aperçois que j'avais oublié mon pantalon et mes chaussures.
03:32 Donc j'étais en jean et en basket, et j'avais ma queue de pied en haut,
03:37 et donc j'étais très embêté, et donc je demande à quelqu'un d'aller me le chercher,
03:42 mais cette personne n'est pas arrivée à temps.
03:44 Et donc je suis rentré sur scène avec la queue de pied, la chemise blanche, le plastron, le noeud papillon,
03:51 et puis le jean et les baskets.
03:53 Je suis assez attentif à l'habit justement, parce que c'est un habit de serviteur que porte le chef d'orchestre.
04:01 Ce n'est pas un habit de prestige, c'est un habit de service.
04:04 Et c'est l'habit de mes maîtres, c'est l'habit que portait Jean-Jean Prêtre,
04:08 c'est l'habit que portaient tous les grands chefs qui m'ont précédé,
04:12 et je dois dire que chaque fois que je le mets, c'est quelque chose pour moi d'important.
04:18 Et alors pendant le concert, quelqu'un est arrivé avec ma tenue, et à la fin il y avait une réception,
04:23 et donc je me suis mis les chaussures vernis, les pantalons, etc.
04:26 Et tout le monde a trouvé que c'était vraiment dommage, parce que c'était...
04:30 Un peu rock'n'roll, et ça leur a...
04:32 Ils avaient beaucoup aimé, parce que surtout je leur avais dit combien j'étais embêté,
04:35 donc ça les a beaucoup fait rire.
04:37 Oh d'accord.
04:38 Il y a souvent quelque chose, ça m'est arrivé plusieurs fois, c'est la baguette.
04:41 La baguette, elle est en fibre de carbone ou en fibre de verre,
04:44 donc elle est assez souple, et souvent quand on dirige, on est en pleine action,
04:50 on ne fait pas attention, et parfois je trappe avec le bout de la baguette le pupitre ou une partition,
04:55 et très récemment, la baguette est partie en l'air, elle a tourbillonné,
05:00 je me suis dit que quand elle va tomber, elle va éborgner quelqu'un,
05:04 et puis elle est tombée juste à côté de quelqu'un sans faire de mal, mais elle aurait pu le faire.
05:08 Alors je vais t'emmener pour parler de musique,
05:11 mais écoute, dans un lieu emprunt de grands compositeurs, de grands interprètes,
05:17 essentiellement russes, mais il y a des français aussi,
05:20 nous allons aller au Conservatoire Rachmaninov.
05:24 Donc vous êtes au Conservatoire Rachmaninov, qui a été créé en 1923,
05:29 comme son nom l'indique, par des immigrés artistes russes,
05:34 parmi eux, on a donc l'illustre Serge Rachmaninov,
05:36 qui en a été le président d'honneur pendant plusieurs années,
05:39 et je vais vous montrer ce qui était intéressant,
05:41 c'est qu'en fait toute la société parisienne, surtout musicale,
05:45 s'était retrouvée, se retrouve régulièrement dans ce lieu.
05:48 Maurice Ravel, on va trouver Joseph Saint-Martin, on va trouver Toscanini,
05:53 on va trouver Jacques Thibault.
05:55 [Musique]
06:10 Jean-Philippe Sarkozy, merci beaucoup de répondre à nos questions sur l'art de la musique.
06:15 Avec plaisir.
06:16 Alors, tu diriges aujourd'hui l'Orchestre du Palais Royal,
06:19 maintenant, évidemment, comme toujours pour mes invités,
06:22 on va voir comment est-ce que tu es tombé dans la marmite de la musique.
06:26 Pour ma part, je n'ai jamais voulu être chef d'orchestre.
06:28 Ah bon, d'accord.
06:29 Jamais, jamais.
06:30 Mais ça s'est toujours fait comme ça,
06:32 j'ai commencé à donner des concerts à diriger à 14 ans,
06:35 et je n'ai plus jamais arrêté depuis,
06:38 mais il y avait un piano à la maison,
06:40 et quand j'étais petit, j'aimais beaucoup y taper dessus,
06:43 ce qui exaspérait mes parents, donc ils m'ont dit,
06:45 il faut absolument que tu apprennes,
06:47 en pensant que ça me dégoûterait, que ça m'empêcherait de continuer.
06:50 Et puis ça m'a beaucoup plu,
06:52 et à 14 ans, j'ai eu l'occasion de diriger,
06:54 que je n'ai pas souhaité diriger,
06:56 j'ai dirigé parce que la personne qui devait diriger n'était plus là,
07:00 et donc j'ai dû la remplacer comme ça, au pied levé.
07:03 À 14 ans ?
07:04 Voilà, c'est ça.
07:05 Et c'était une personne que j'admirais beaucoup,
07:08 et qui est morte, quand j'avais 14 ans.
07:11 Du jour au lendemain, tout son orchestre, son chœur,
07:15 tout ça s'est arrêté parce qu'il n'y avait plus de chef.
07:18 Je trouvais ça tellement dommage,
07:20 que je me suis proposé le chœur,
07:22 et je leur ai dit, mais il faut absolument continuer,
07:25 elle ne se laisse qu'en mémoire.
07:27 Et puis ils m'ont dit, mais on n'a personne pour nous diriger,
07:30 et je leur ai dit, écoutez-moi, je joue du piano,
07:33 je joue de l'orgue, je peux essayer peut-être.
07:36 Et puis la première fois, ça a dû être assez inexpérimenté,
07:42 mais ça leur a beaucoup plu, on a continué,
07:44 et puis ça s'est enchaîné.
07:46 Après je suis venu à Paris, faire mes études au Conservatoire de Paris.
07:49 Et aujourd'hui, l'Orchestre du Palais Royal.
07:51 Et aujourd'hui, je dirige pas mal d'orchestres,
07:54 dont le Palais Royal.
07:55 Plusieurs, d'accord.
07:56 Oui, et je vis une vie merveilleuse,
08:00 faite de musique du matin au soir, et j'en suis ravi.
08:03 Quelle est la différence entre la musique française et les autres musiques ?
08:06 Je crois qu'en France, on a toujours eu pendant des siècles,
08:10 des caractéristiques qui d'abord viennent de notre langue.
08:13 La langue française, c'est une langue qui a réuni
08:18 des peuples qui étaient du nord, du sud, de l'est, de l'ouest,
08:22 avec des accents très forts.
08:23 Donc il a fallu faire ce mélange,
08:25 pendant les mille ans où on a fait la France,
08:28 où les rois ont fait la France,
08:29 il a fallu mélanger tout ça,
08:31 à résulté de cela, une langue pleine de subtilité,
08:36 qui justement voulait accueillir toutes les spécificités
08:40 des peuples qui étaient agrégés pour faire la France.
08:43 Et donc ça a donné une musique pleine de couleurs,
08:47 pleine de demi-teintes.
08:49 Par exemple, en Italie, on a toujours des couleurs très éclatantes,
08:53 avec du rouge, des tomates qui explosent,
08:57 des couleurs très extérieures.
09:00 Alors qu'en France, on n'est pas du tout comme ça,
09:02 on est dans des couleurs pastelles,
09:04 des couleurs beaucoup plus tendres,
09:07 et ça c'est une caractéristique de la musique.
09:10 Dans les peuples allemands, par exemple,
09:13 on a toujours voulu une musique qui réunisse tous ces instruments
09:16 pour faire un merveilleux son,
09:19 où tous ces instruments sont une composante du son,
09:22 mais un peu indistinct.
09:24 En France, on n'a jamais voulu ça.
09:26 Depuis les Gaulois, je crois qu'on a toujours voulu
09:29 que chaque tribu ait sa spécificité,
09:32 et garde sa spécificité.
09:34 Je pense qu'en Savoie, dans le Languedoc, en Bretagne,
09:36 on n'est pas pareil qu'à Paris où on en joue.
09:40 Dans l'orchestre, c'est la même chose.
09:43 Le hautbois, en France, ne ressemble pas à la clarinette.
09:46 Et au contraire, tous les compositeurs ont voulu
09:49 magnifier le son du hautbois,
09:51 magnifier le son de la clarinette,
09:53 les juxtaposer,
09:55 faire qu'ensemble, ils puissent dialoguer,
09:58 se réunir parfois,
10:00 mais vivre chacun avec leurs couleurs.
10:03 Je crois que Wagner, Brahms,
10:06 tous les compositeurs allemands,
10:08 ils vont développer, ils vont prendre un thème
10:11 et le développer pendant une demi-heure.
10:14 Alors qu'en France, dès qu'on a trouvé un thème génial,
10:18 on le dit une fois, et puis on passe à autre chose.
10:21 Je pense que ça prouve qu'il y a dans l'âme française,
10:27 il y a quelque chose de spécifique.
10:30 Et que les autres ne peuvent pas avoir.
10:32 Je crois que c'est Taine qui disait que
10:35 "l'art est le miroir de l'âme d'un peuple".
10:38 La musique française vient de la langue française,
10:41 et c'est une langue française non accentuée,
10:44 à la différence de la langue italienne,
10:47 ou de la langue anglaise, ou de la langue allemande.
10:50 La langue française est une langue plate.
10:53 Et donc notre musique a ce côté un peu de platitude,
10:57 et comme il y a de la platitude, il faut trouver de la subtilité.
11:00 Je pense que, comme souvent en France,
11:03 les choses commencent avec Louis XIV.
11:05 Et quand Louis XIV, après l'affrontement,
11:08 va reprendre les rênes de son char royal,
11:14 il va vouloir se détacher de l'impérialisme italien.
11:21 Quand il veut refaire la façade du Louvre,
11:24 le Bernin lui propose une merveilleuse façade,
11:28 et Louis XIV tombe amoureux de ce plan,
11:31 mais il dit au Bernin "repart vite en Italie,
11:33 parce que je ne veux pas de ça en France,
11:35 moi j'ai envie d'une façade française".
11:38 Ce qui est amusant, beaucoup de monde le savent,
11:41 c'est qu'il va faire appel à un Italien, justement,
11:43 pour contrer les Italiens.
11:45 Et c'est le jeune Uli, qui était l'ami du roi,
11:48 qui va réinventer la musique française et l'opéra français.
11:54 Uli va partir de la déclamation,
11:57 va partir de notre langue française,
11:59 pour créer l'opéra français,
12:02 qu'on appelait à l'époque la tragédie lyrique.
12:05 Et cette tragédie lyrique n'est rien d'autre
12:08 que la déclamation mise en musique.
12:10 Essayer de suivre le discours qu'on aurait en parlant,
12:14 et de faire vivre des notes sur ce discours,
12:18 en cinq actes, avec des balais,
12:21 parce que ça aussi, la danse,
12:23 c'est quelque chose de très important dans l'esprit français,
12:26 c'est la danse des bulles de champagne dans les flûtes.
12:29 Je pense que dans les salons qui existaient en France
12:33 avant la Révolution, cet esprit, toujours sarcastique,
12:37 cet esprit brillant, cet esprit qui voulait
12:42 avoir toujours des effusions d'intelligence,
12:46 eh bien, c'est la légèreté de la danse.
12:49 Et au 18e, au 19e, au 20e siècle encore,
12:52 l'opéra français se distinguera par la danse.
12:55 - Maintenant, tu t'es arrêté à la Révolution.
12:59 Après la Révolution, comment évolue la musique ?
13:03 - Après la Révolution, elle va évoluer grâce
13:07 au Conservatoire de Paris,
13:10 qu'avait créé Louis XVI.
13:13 C'est Louis XVI qui, en 1783,
13:17 va créer l'école royale de chant et de déclamation.
13:21 Dans l'hôtel des menus plaisir du roi,
13:23 dans la salle qui existe toujours encore aujourd'hui,
13:26 et dans laquelle j'ai beaucoup dirigé,
13:28 dans laquelle Berlioz a créé la Symphonie fantastique,
13:31 dans laquelle on a créé en France toutes les symphonies de Beethoven.
13:34 Après la Révolution, elle va continuer
13:37 la mission qu'avait donnée Louis XVI.
13:39 Et ce conservatoire va être un endroit
13:42 où tous les grands compositeurs vont exalter l'esprit français
13:46 et transmettre cet esprit français qui remontait
13:48 déjà à plusieurs siècles, et qu'ils vont transmettre
13:51 dans les générations qui viennent.
13:53 Et donc ce Conservatoire de Paris,
13:55 qui fonctionne encore aujourd'hui merveilleusement,
13:58 fait des miracles parce qu'il arrive
14:02 à créer les musiciens les plus talentueux du monde.
14:08 Je crois que le Conservatoire de Paris, aujourd'hui,
14:10 est un endroit où une formation d'élite,
14:14 où énormément de musiciens du monde entier
14:17 apprend une certaine façon de jouer la musique.
14:21 Et on va avoir une musique au XIXe siècle,
14:24 qui est en France, qui est pleine de clarté.
14:28 C'est Rivarol qui disait
14:31 « Tout ce qui n'est pas clair n'est pas français ».
14:34 Et ça c'est aussi une belle définition de l'esprit français,
14:37 c'est l'esprit de clarté.
14:39 Alors quelles sont les grandes tendances ?
14:40 Il n'y a rien de mieux qu'un pont pour parler des tendances,
14:43 qui nous emmène d'un moment à un autre, d'un lieu à un autre.
14:47 Il y a eu des grands compositeurs
14:49 qui ont été oubliés pendant un certain nombre d'années,
14:51 qui ont réapparu.
14:52 Dans les années 80,
14:54 on a eu cette grande redécouverte de la musique baroque.
14:58 Alors redécouverte, c'est un peu exagéré quand même,
15:01 parce que Bach était joué avant les années 80.
15:05 Mais on a redécouvert beaucoup de compositeurs baroques,
15:09 et on a redécouvert surtout la façon de les jouer,
15:13 donc avec les instruments anciens,
15:16 et toute une manière d'étudier les traités
15:19 pour arriver à interpréter dans l'esprit de chaque époque.
15:24 Voilà, maintenant tout cela s'est un peu émietté,
15:29 et je crois que ce qui caractérise notre époque,
15:32 c'est que tout est devenu très parcellaire.
15:35 Et on écoute aujourd'hui la musique quand on est jeune non plus,
15:40 en écoutant des CD où on avait une pochette qui expliquait la musique,
15:44 et qui donnait des informations sur le compositeur,
15:47 mais on les écoute un peu au hasard,
15:49 en suivant des playlists Spotify ou Deezer,
15:54 qui font qu'on entend des musiques,
15:58 on peut aimer des musiques, mais mélangées.
16:01 Souvent quand on discute, et j'ai l'occasion de le faire avec beaucoup de jeunes,
16:06 et je leur demande "qu'est-ce que tu écoutes, qu'est-ce que tu aimes ?"
16:09 ils me répondent "moi j'aime tout".
16:11 Je crois que c'est aujourd'hui, ça c'est une des réponses que j'entends le plus souvent,
16:14 "j'aime tout".
16:16 Alors, évidemment quand on aime tout,
16:19 ça veut peut-être dire aussi qu'on n'aime rien, vraiment,
16:22 mais ça veut dire surtout qu'on a un flou intégral dans l'esprit,
16:26 et je crois que ce qui caractérise les années 2020,
16:30 surtout chez la jeunesse,
16:33 c'est la difficulté de se faire une culture musicale,
16:37 du fait justement de la façon dont on écoute la musique.
16:41 Je pense qu'aujourd'hui il faut absolument qu'on fasse plein d'actions
16:45 pour faire découvrir cette musique à notre jeunesse.
16:50 Moralité, essayez d'écouter, je vous mets au défi,
16:53 d'écouter une oeuvre dans sa totalité.
16:56 Choisissez, dans sa totalité vous écoutez une oeuvre.
16:59 Le disque ou l'oeuvre du début à sa fin.
17:03 Est-ce qu'il y a une façon de diriger un orchestre à la française ?
17:08 Ah ben oui, justement.
17:09 Tous les noms que tu as cités,
17:11 Toscanini c'était l'Italien par excellence,
17:15 complètement furibond, colérique, extraverti.
17:21 Bernstein, c'est le chef américain.
17:24 Oui, tout à fait.
17:26 C'est tout ce qui peut être typique de cet esprit américain d'autrefois,
17:32 c'est-à-dire un esprit un peu excessif.
17:35 Bernstein sautait partout,
17:38 il n'hésitait pas à se mettre dans des états complètement disproportionnés.
17:43 En France, une direction à la française,
17:46 ça va être une direction qui va chercher tout ce dont on parlait tout à l'heure,
17:51 caractéristiques de l'esprit français,
17:53 c'est-à-dire la clarté du discours, l'élégance aussi.
17:58 Je pense qu'il y a une élégance à la française
18:00 qui veut qu'on reste dans des limites du convenable,
18:07 sans que ce soit pour autant de l'eau tiède.
18:09 Ce n'est pas ça.
18:10 Tu as parlé de Carayane,
18:11 le philharmonique de Berlin à l'époque de Carayane.
18:14 C'est vraiment l'orchestre où on va tout uniformiser
18:18 et ça va être tous les instruments qui vont se fondre.
18:22 C'est absolument admirable,
18:23 mais c'est complètement l'opposé de l'esprit français
18:26 qui veut magnifier chaque sonorité d'instrument.
18:29 Dans notre émission, nous avons une tradition,
18:32 c'est de demander à notre invité son oeuvre préférée.
18:37 S'il y avait une oeuvre phare comme ça,
18:40 je pense à une oeuvre que je dirige souvent,
18:42 qui s'appelle l'Intermezzo de Cavalleria Rusticana de Mascani.
18:47 C'est une oeuvre italienne, une oeuvre extrêmement extravertie,
18:52 une oeuvre fabuleuse, dans laquelle je me reconnais complètement.
18:59 Ta période préférée, ce serait quoi ?
19:02 On a compris, tu aimes bien quand tu es plongé dedans.
19:05 Oui, parce que je ne suis pas…
19:08 Évidemment, le 18e siècle, c'est peut-être une époque.
19:11 La fin du 18e siècle est quelque chose qui pour moi est merveilleux
19:15 parce qu'il y a évidemment cette révolution
19:20 qui vient interrompre la musique en France.
19:22 Pendant 20 ans, on ne va plus faire de musique en France.
19:25 Donc, c'est quelque chose qui, artistiquement, est terrible.
19:29 On va détruire aussi tous les instruments français.
19:32 Mais à cette période, à la fin du 18e,
19:35 on arrive à une éclosion, un mûrissement des arts extraordinaire.
19:41 Nous arrivons à la fin de notre émission.
19:43 Maintenant, ce que je voudrais, c'est que tu nous donnes des informations
19:46 pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus,
19:49 pour nos téléspectateurs qui souhaiteraient en savoir plus
19:52 sur ce que tu fais, te suivre, et puis l'orchestre du Palais Royal.
19:57 Très bien, mais c'est très facile parce qu'aujourd'hui, sur Internet,
20:00 on tape "orchestre le Palais Royal".
20:03 Il y a un beau site.
20:05 Le Palais Royal, il y a un beau site qui explique tout.
20:07 On a une saison intéressante avec 50 concerts par an.
20:11 C'est pas mal.
20:13 On fait aussi des concerts pour les enfants tout petits,
20:16 entre 0 et 7 ans, parce qu'on pense que c'est important de faire ça.
20:21 Sur des tapis, avec des musiciens qui sont proches,
20:25 et on donne des concerts tous les mois.
20:29 Et puis, on a notre Académie du Palais Royal,
20:32 où on a 400 étudiants par an qui viennent,
20:35 à qui nous faisons travailler dans un orchestre et deux chœurs.
20:39 On leur fait travailler les grandes œuvres du répertoire
20:42 et on donne des grands concerts monstres,
20:44 avec le Récum de Verdi, des grandes œuvres.
20:47 Alors moi, mon challenge, je vais le faire avec toi,
20:50 suite à ce que tu as dit.
20:52 Mon challenge, chers auditeurs, mon défi, pardon, pas mon challenge, mon défi,
20:57 c'est tout simplement d'écouter une œuvre
21:02 interprétée par deux grands chefs d'orchestre complètement différents.
21:09 Et là, vous allez voir que l'œuvre,
21:13 on a l'impression que parfois, ce n'est pas la même.
21:15 Donc, mon défi, c'est de trouver une œuvre qui vous plaît bien,
21:20 une œuvre très classique, la 9e, on s'en fiche de Beethoven, par exemple.
21:24 Vous prenez Karajan, si vous arrivez à trouver Toscanini,
21:28 vous allez voir, mais ça n'a strictement rien à voir.
21:31 C'est extraordinaire.
21:32 C'est là où on comprend toute la nuance de la musique classique,
21:35 tout le talent du chef d'orchestre qui prend son essor, qui prend son importance.
21:41 C'est quelque chose, c'est une expérience qui est très intéressante
21:44 et qui va vous surprendre.
21:46 [Musique]

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