Cette vidéo sur l'équipement gaulois s’inscrit dans une petite série de vidéos sur l’archéologie et les Gaulois que je réalise en compagnie de Guillaume Reich, Docteur en Archéologie protohistorique, dont la spécialité est justement les Celtes du second âge de fer, leur armement et les techniques martiales gauloises.
Dr Guillaume Reich
Ingénieur de recherche – Archéologue
Maison des Sciences de l'Homme et de l'Environnement Claude-Nicolas Ledoux
UAR 3124, CNRS, Université Bourgogne Franche-Comté, F-25000, Besançon
Quelques articles de G. Reich sont disponibles ici : https://unistra.academia.edu/GuillaumeReich
Merci au village de Coriobona pour l'accueil : https://www.coriobona-village-gaulois.fr/
Merci aux gaulois d'Esse pour leur soutien dans le projet : http://gaulois-esse.fr/
Merci à l'association Drungo pour son intervention : https://www.facebook.com/senodrungo
Découvrez la chaîne Youtube d'ACTA et leurs expérimentations : https://www.youtube.com/channel/UC5z4Ly-11ucgbSCARkvDA6g
Écrit par Benjamin Brillaud et Guillaume Reich
Montage par Dead Will : https://www.youtube.com/channel/UCtLkNuzB2_j2z7SFdvkiCww
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Dr Guillaume Reich
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ÉducationTranscription
00:00 Mes chers camarades, bien le bonjour et bienvenue ici dans le village gaulois de Coriobona !
00:04 Coriobona, c'est un village reconstitué par l'association des gaulois d'Ais en
00:28 1940. Et si nous sommes ici aujourd'hui, ça n'est pas pour manger du sanglier, mais
00:32 pour défoncer quelques clichés en vous présentant l'équipement des combattants gaulois. Cette
00:37 vidéo, elle s'inscrit dans une petite série de vidéos sur l'archéologie et les gaulois
00:40 que je réalise en compagnie de Guillaume Reich, docteur en archéologie proto-historique
00:45 dont la spécialité est justement les celtes du second âge de fer, leur armement et les
00:49 techniques martiales gauloises. Le second âge du fer, c'est la période qui s'étend
00:53 de 475 avant notre ère à 25 avant notre ère pour toute l'Europe tempérée. On
00:59 appelle aussi cette période la Thène, tout simplement parce que la Thène, c'est un
01:03 site archéologique de très grande importance qui se trouve en Suisse et qui a livré beaucoup
01:07 de matériel qui nous a permis de nous renseigner sur ce second âge du fer.
01:10 Autant le préciser tout de suite, les celtes ça englobe pas mal de trucs, du coup dans
01:14 cette vidéo on va utiliser sans distinction les termes celtes, gaulois, laténien. Pour
01:20 ceux qui suivent pas, l'athénien comme l'Athènes, la période que l'on vient
01:23 de décrire.
01:24 Dans notre imaginaire, les gaulois sont victimes d'un certain nombre d'images dépinales,
01:28 c'est à dire des clichés qui leur collent à la peau. On a longtemps imaginé les celtes
01:32 comme des barbares, c'est à dire comme des sauvages sans culture et sans raffinement,
01:37 heureusement civilisés par Rome. Alors que la civilisation celtique figure parmi les
01:41 plus brillantes de l'antiquité. Nous continuons toujours aujourd'hui d'utiliser des acquis
01:46 ou des inventions de la période celtique qui ont durablement influencé les cultures
01:50 antiques. Et c'est valable dans de très nombreux domaines comme la philosophie, l'agriculture,
01:56 l'artisanat ou encore l'art de la guerre.
01:59 Ce que je vous propose aujourd'hui, c'est de développer quelques-uns des aspects concernant
02:02 la guerre justement, qui semblent revêtir une importance capitale dans les sociétés
02:07 gauloises.
02:08 Nous avons ici affaire à deux guerriers gaulois en tenue de combat. Et si l'on peut
02:18 déjà voir quelques similitudes entre leurs panoplies, ils ne correspondent pas à la
02:22 même époque puisque près de 200 ans les séparent. Le premier, présenté par Patrick,
02:28 représente un combattant léger, fantasain ou cavalier, de la seconde moitié du IIIe
02:32 siècle avant notre ère. Tandis que le second, incarné par Jean-Paul, exhibe une panoplie
02:37 d'un combattant lourd, pouvant combattre à cheval ou à pied, caractéristique de
02:41 la moitié du Ier siècle avant notre ère, à une période que l'on nomme par convention
02:45 « époque de la guerre des Gaules ».
02:46 Il y a donc un décalage d'environ deux siècles dans les équipements présentés
02:50 ici. Et ce saut dans le temps, rendu possible par la reconstitution proto-historique, nous
02:54 permet d'apprécier l'évolution de l'armement celtique au cours des trois derniers siècles
02:58 avant notre ère. Cette évolution est liée au changement dans la manière de se battre,
03:03 c'est-à-dire des améliorations consécutives aux expériences heureuses comme désastreuses
03:07 sur les champs de bataille antiques, mais aussi aux innovations technologiques et aux
03:11 métamorphoses plus générales au sein des sociétés celtiques. Il y a donc bien des
03:15 différences entre les équipements qui correspondent à une réalité archéologique. Mais on y
03:20 voit aussi quelques ressemblances.
03:22 Il existe effectivement une panoplie standardisée que l'on retrouve tout au long du second
03:25 âge du fer. Cette panoplie, on la connaît surtout par ce qu'on appelle les ensembles
03:30 clos, c'est le cas par exemple de la plupart des sépultures. Cette composition très fréquente
03:34 effectivement c'est ce que nous on appelle en archéologie la panoplie ternaire. Elle
03:38 est composée de deux armes offensives et d'une arme à fonction mixte, mi-défensive,
03:45 mi-offensive. La première c'est l'arme offensive par excellence des guerriers de
03:49 l'antiquité, une arme d'as, c'est-à-dire un fer fiché sur une ampe en bois qui va
03:54 composer une pique ou une lance. Et la seconde arme offensive particulièrement emblématique,
04:00 si ce n'est mythique du combattant celte, c'est l'épée en fer qui se loge dans
04:05 un fourreau métallique sur le côté droit du combattant. Et puis l'arme à fonction
04:10 mixte c'est naturellement le bouclier. Ces trois éléments, arme d'as, arme de
04:14 poing et bouclier, forment ce qu'on appelle la panoplie ternaire qu'on va retrouver
04:18 finalement sur les représentations des guerriers des deux périodes qui vont être proposées
04:22 là.
04:23 Penchons-nous un peu plus sur ces armes pour y voir plus clair, notamment sur leur évolution,
04:27 à commencer par celle des armes d'as. Ces armes font l'objet de variations morphologiques
04:32 conséquentes, à tel point qu'il est difficile d'établir des classifications réellement
04:35 pertinentes basées sur des critères évidents. Il y a bien sûr de grandes familles qui se
04:40 dessinent mais elles connaissent une répartition inégale dans le temps et sont souvent en
04:43 usage sur de longues périodes, parfois plusieurs siècles. En revanche, les différences de
04:48 formes, de dimensions renvoient manifestement à des usages variés, à des spécialités
04:53 martiales, à des spécialisations techniques. Et pour être plus clair, on va vous montrer
04:57 que certains points reviennent constamment sur les armes, peu importe la période.
05:01 Par exemple, les pointes sont toujours en alliage ferreux. Elles sont systématiquement
05:05 composées d'un empennage partagé autour d'une nervure médiane, même si c'est
05:09 la flamme de cet empennage qui subit les plus importantes variations. Cette ampe en bois
05:13 est, au fond, l'essentiel de l'arme d'as. Elles sont pourtant mal connues car elles
05:18 sont très rarement conservées.
05:20 Oui, le bois ça pourrit et ça se conserve assez mal. Et ça c'est un vrai problème
05:23 puisque c'est la morphologie et les dimensions de la hampe qui vont conditionner les usages
05:28 martiaux qu'on va pouvoir faire de cette arme d'as.
05:29 On ne se bat pas avec une lance de la même manière qu'avec une pique. On n'emploie
05:39 pas une perche de 3 mètres de la même façon qu'un bâton de 1 mètre. Seuls quelques
05:43 rares contextes, notamment l'ensevelissement et la privation d'oxygène, autorisent la
05:48 conservation de ces amples de bois, permettant d'estimer la matière et les dimensions
05:51 exactes de quelques exemplaires.
05:53 Bien sûr, il y a des moyens indirects de se procurer ces informations. Par exemple,
05:57 on peut mesurer l'intérieur des douilles. On va pouvoir également analyser les restes
06:02 en bois qui vont se loger à l'intérieur de ces fers de lance et qui sont parfois conservés
06:06 par la corrosion. On va pouvoir estimer également leurs dimensions par la longueur des fosses
06:11 dans lesquelles est parfois enterré l'armement. Et puis ça peut être aussi estimé grâce
06:17 à l'apport de l'iconographie ancienne. Tout ça nous permet de restituer grosso modo
06:21 une arme d'aste qui fait entre 2 mètres et 2,50 mètres de longueur à peu près.
06:27 La hampe est généralement taillée dans du frêne, qui est le bois le plus adapté
06:39 à la fois en termes de résistance mécanique au choc qu'en termes de souplesse. C'est
06:44 pour ça que cette essence est régulièrement employée pour la confection des manches d'outils.
06:49 Parfois, l'extrémité proximale, c'est à dire la zone théoriquement la plus proche
06:53 du corps par opposition à l'extrémité distale tournée vers l'adversaire, est
06:58 dotée d'un renfort métallique que l'on nomme un talon. Ce talon, peut être à soie
07:03 ou à douille, est un accessoire qui est extrêmement intéressant pour le combat.
07:06 Mais ça on le verra dans un prochain épisode si vous voyez ce que je veux dire.
07:10 Ces armes d'aste sont très répandues à l'époque. C'est même l'arme par excellence
07:13 du guerrier celte, celle qui caractérise le fantassin mais peut aussi être utilisée
07:17 à cheval. On dit parfois que les celtes sont les inventeurs de ce que l'on conceptualise
07:21 en tant qu'occidentaux sous le terme de lance. Beaucoup d'armes d'aste historiques
07:26 découlent de la lancias des gaulois. D'où l'importance d'insister sur la lance.
07:31 Ça rime !
07:32 La deuxième arme de nos combattants est l'épée, assez particulière, très caractéristique.
07:40 L'épée est une arme emblématique du guerrier celte. Elle est moins répandue et pourrait
07:45 être réservée aux strates sociales les plus hautes. On a tendance à dire qu'elle
07:49 est l'arme de l'aristocratie et à vrai dire, c'est plutôt probable. En langue
07:53 gauloise, on la nomme « cladio », ce qui a donné « gladius », soit le glaive des
07:58 romains. Elle est très singulière, à la fois simple dans son apparence et d'une
08:02 richesse d'élaboration sidérante. Sa taille varie un peu selon les périodes, de quelques
08:07 dizaines de centimètres, passant d'une arme assez courte au cours des époques plus
08:11 anciennes, à une arme assez longue, dépassant parfois le mètre au cours du premier siècle
08:15 avant notre ère. Son poids varie grosso modo de 500-600 grammes à près d'un kilo, ce
08:20 qui lui permet de rester particulièrement maniable. Sa pointe est aussi l'une des
08:24 données qui change souvent, même s'il y a quelques nuances à apporter. En effet,
08:28 pour les phases anciennes, il y a souvent une extrémité distale pointue qui tend
08:32 à être moins asserrée au cours de la guerre des Gaules. Mais c'est un schéma très
08:36 théorique puisque l'on rencontre beaucoup d'armes de pointe dotées d'une pointe
08:39 qui n'est pas très asserrée, mais qui autorise tout de même l'emploi de l'estoc,
08:43 c'est à dire d'un coup avec la pointe de l'arme. Et au contraire, on trouve des
08:46 épées pointues au premier siècle avant notre ère.
08:48 Du coup, il n'y a pas vraiment de vérité absolue sur la pointe de l'épée gauloise.
08:53 C'est relatif on va dire.
08:54 Intéressons nous maintenant à la façon dont ces épées sont créées. La lame est
09:08 en alliage ferreux plus ou moins carburé, généralement trempé. Elle conserve une
09:13 certaine souplesse, ce qui, nous y reviendrons dans un autre épisode, explique certains
09:17 stéréotypes au sujet de la fabrication des épées, mais justifie aussi certains usages.
09:22 La lame est forgée sans gouttière centrale, mais parfois avec une nervure médiane. La
09:27 section varie entre un profil lenticulaire, rhomboïdale, c'est à dire en losange,
09:32 ou nervurée.
09:33 Ce qui est assez remarquable, c'est que l'épée est à deux tranchants parallèles,
09:37 ce qui veut dire que l'on utilisait ces épées surtout pour la taille. La taille,
09:41 dans le jargon, c'est un coup avec le fil de la lame des côtés coupants. On va l'opposer
09:45 à l'estoc qu'on a vu tout à l'heure, où l'on frappe avec la pointe.
09:48 La partie basse de l'épée est pourvue d'une poignée en matière organique, qui
09:51 peut être du bois, des matières dures animales, éventuellement des éléments métalliques,
09:56 auxquels on ajoute une petite garde et un pommeau. La garde n'a ici pas réellement
10:00 de rôle de protection, comme sur certaines armes du bas moyen-âge, mais plus une fonction
10:04 de blocage de la main lors de la manipulation de l'arme. Le pommeau, lui, n'a pas de
10:08 rôle de contrepoids puisqu'il est trop léger.
10:10 D'ailleurs, en parlant de la garde de l'épée, elle a une forme un peu particulière, c'est
10:15 à dire curviligne, qui fait écho à l'entrée du fourreau dans lequel elle vient se loger.
10:19 Mais ça, on y reviendra plus tard.
10:21 Sur le flanc droit du combattant donc, grâce à un système de suspensions variées selon
10:25 les époques, composé soit de chaînes semi-rigides et de courroies organiques, soit de courroies
10:30 en cuir et d'anneaux métalliques, est suspendu un fourreau entièrement métallique, ne pesant
10:35 que quelques centaines de grammes.
10:37 Le fourreau d'épée laténien, c'est vraiment là qu'on voit la grande qualité du travail
10:44 métallurgique chez les celtes. Parce que d'une part, il est composé de tôles extrêmement
10:48 fines qui font parfois juste un demi-millimètre d'épaisseur.
10:52 Et ensuite, au niveau de la facture du fourreau, c'est un assemblage qui est réalisé avec
10:57 une précision qui est de l'ordre du demi-millimètre également, puisque tout est assujetti par
11:04 des éléments qui sont rentrés en force, en contrainte, et tout tient de cette façon-là.
11:09 Et puis il y a la défense. On voit que le bouclier est un peu particulier, on reconnaît
11:21 sa forme ovale, plate. La poignée est au centre et, c'est intéressant, il n'y a pas de
11:27 système de sangle en cuir, de courroie, comme sur certains boucliers médiévaux.
11:31 Cette poignée au centre du bouclier n'est pas anodine. Elle permet aux guerriers de
11:35 tenir fermement le bouclier puisqu'elle se situe au niveau du centre de gravité de
11:39 l'arme. La poignée est logée dans un creux au centre de la planche et elle permet un
11:43 temps de réponse réduit lors de l'utilisation du bouclier.
11:46 Cette poignée horizontale s'appelle un manipule. Parfois il peut y avoir une languette métallique,
11:51 on appelle ça un renfort de manipule. Vous le voyez, la main peut se loger à l'intérieur
11:56 du bouclier. On a en fait un trou qui est creusé dans le bois, dans ce qu'on appelle
12:01 la spina. La spina est un demi-fuso de bois qui sert de fusible mécanique et qui va
12:08 lui-même être protégé par une coque métallique qu'on appelle un imbeau. Mais tout ça
12:15 participe vraiment au fait de pouvoir protéger la main lors de la manipulation du bouclier.
12:22 Cet imbeau de fer, il y en a tout un tas de formes différentes qui changent en fonction
12:26 des époques. Ce qui forcément intéresse les archéologues qui vont les classer par
12:30 type et par époque. Ce qu'on remarque quand on examine un imbeau, c'est qu'il est
12:34 fixé au bouclier par au moins deux clous ou rivets. En mesurant un rivet, on peut donc
12:38 estimer approximativement l'épaisseur de la planche des boucliers. Parfois les pourtours
12:43 ou la tranche inférieure ou supérieure du bouclier sont renforcés par des bandelettes
12:47 métalliques que l'on nomme des orles. Il arrive que ces orles permettent de restituer
12:51 la forme exacte du bouclier dans une sépulture, même si c'est un phénomène assez peu
12:55 répandu. En revanche, ces orles permettent en général d'apprécier l'épaisseur
12:59 de la planche en bois sur le pourtour du bouclier. Car si les quatre types d'éléments métalliques,
13:03 l'imbeau, les clous rivets, le renfort de manipule et les orles sont assez bien connus
13:08 par l'archéologie, le reste, la planche, la spina, la poignée, sont en matériaux
13:13 organiques qui pourrissent et ne sont que très rarement conservés. Heureusement, quelques
13:17 exemplaires nous sont parvenus et viennent compléter les informations obtenues par l'iconographie
13:21 ou de manière indirecte, comme ce que nous avons énoncé précédemment.
13:25 Les quelques exemplaires de boucliers qui nous sont parvenus complets, notamment sur
13:30 le site de l'Athènes, révèlent une très grande qualité du travail de menuiserie.
13:35 Par exemple, sur l'un de ces boucliers en chaîne qui est daté de 225 avant notre ère,
13:39 on a retrouvé que le bouclier avait été façonné en deux planches qui forment vraiment
13:44 le plateau. Et ces planches ont été mûrement sélectionnées, il y a vraiment un choix
13:48 en amont pour avoir quelque chose qui répond bien à des contraintes mécaniques.
13:52 Pour accroître la résistance de ce bouclier, il arrive qu'on le recouvre entièrement
13:56 de cuir cru, c'est une sorte de protection. Et puis on peut imaginer une autre forme de
13:59 protection, c'est le fait de décorer le bouclier avec ce qu'on appelle des symboles
14:03 apotropaïques, c'est à dire des symboles qui sont destinés à faire peur à l'adversaire,
14:07 qui est une manière aussi dans la pensée celtique de préserver l'intégrité de
14:12 ce bouclier. Nous avons également d'autres types de boucliers, des boucliers qui peuvent
14:15 être façonnés avec de l'osier ou de l'écorce, parfois recouverte de cuir.
14:20 Cette panoplie ternaire des guerriers gaulois semble donc témoigner d'une grande maîtrise
14:24 technique. Mais on peut légitimement se poser plusieurs questions. Cette tenue est-elle
14:28 adaptée à la fois pour les fantasains et les cavaliers ? Est-ce que l'équipement
14:31 est-elle le reflet d'un certain statut social ? En d'autres termes, est-ce qu'un guerrier
14:36 celtique est davantage un aristocrate ou un individu des couches moins aisées de la population
14:40 ? Aborder cette question des statuts est quelque chose d'assez complexe. D'autant que le
14:44 métier des armes semble, pour l'essentiel de la période latinienne, époque de la
14:48 guerre des Gaules mise à part, être la caractéristique d'une certaine aristocratie, d'une élite
14:53 de la société celtique, qui va parfois exporter son savoir-faire par l'intermédiaire du
14:57 mercenariat. Ce qu'il est possible de déduire en revanche, c'est qu'il est plus que
15:00 vraisemblable qu'un guerrier doté d'une épée suspendue dans un fourreau, muni également
15:04 d'un bouclier et d'une lance, soit plus riche qu'un combattant doté d'un bouclier
15:08 et d'une lance. Un moyen relativement simple de déduire l'importance du statut d'un
15:13 guerrier est donc d'examiner sa tombe, qui se fait le reflet dans l'au-delà du statut
15:17 du guerrier de son vivant.
15:19 Alors Guillaume, une question qu'on peut quand même légitimement se poser quand on
15:30 voit un petit peu ces guerriers celtes, c'est l'utilisation des armes à distance. Parce
15:34 que c'est vrai que quand on regarde un peu la panoplie qu'on a présentée épée,
15:38 lance, bouclier, on ne parle pas d'utilisation d'armes à distance. Est-ce qu'il y avait
15:41 des arcs, des fronts, des javelots ?
15:44 En fait c'est un sujet qui est relativement complexe. L'archerie, on a un certain nombre
15:49 de sources et elle apparaît a priori comme un privilège de l'aristocratie, tout comme
15:53 la guerre. On sait que la chasse est a priori quelque chose qui permet la préparation du
15:58 combattant au combat. Après, ça ne veut pas forcément dire que l'arc est utilisé
16:03 à la guerre. On sait que c'est très vraisemblablement le cas pour les combattants de la période
16:10 ancienne de l'Athènes. C'est très difficile à prouver pour les 3ème et 2ème siècle
16:14 avant notre ère. Et en revanche, sur la fin de la période gauloise, on arrive à nouveau
16:20 à un usage abondant de l'archerie dans le cadre militaire. On a également quelques
16:25 attestations de frondes, notamment par le biais des balles de fronde que l'on retrouve
16:30 sur les champs de bataille, également sur la fin de la période gauloise.
16:33 Alors les balles de fronde, c'est-à-dire qu'il y a des balles qui sont vraiment forgées
16:37 de chalpour, on ne les utilise pas des cailloux. Là, c'est plutôt des cailloux, mais il
16:41 faut vraiment imaginer que c'est quelque chose qui est mineur pour l'essentiel de
16:46 la période celtique. Après, on a aussi tout ce qui relève de l'arme d'Ast que l'on
16:51 peut propulser, donc les armes de jet type javelot et javeline. Ces javelots et javelines,
16:56 c'est pareil en fait. On a un peu du mal à déterminer lesquelles sont réellement
17:01 en usage et si on s'en sert de cette façon-là. Il faut savoir qu'en fonction de la morphologie
17:07 de ces fers, comme on l'a vu tout à l'heure, ça va conditionner l'usage qu'on va
17:11 en faire. Donc parfois c'est un peu délicat de déterminer si on est face à un fer de
17:16 javelot ou face à un fer de pique. Toujours est-il que, a priori, d'après les classifications
17:22 qu'on peut établir à l'heure actuelle, on sait que c'est un peu pareil que pour
17:27 l'archerie. On fait usage abondant du javelot au cours de la période de la Tène Ancienne,
17:32 notamment avec des guerriers qui sont juchés sur un char de guerre à deux roues. On sent
17:37 l'abandonner, cette pratique-là, à l'articulation des troisième et deuxième siècle avant notre
17:41 ère et ça revient vraiment sur le devant de la scène à la fin de la période gauloise,
17:47 notamment au cours du fameux épisode de la guerre des Gaules.
17:49 Il y a un autre truc qui m'interroge aussi, c'est-à-dire que bon là il y avait cette
17:52 interrogation-là sur les armes à distance, mais on parle de cette panoplie ternaire,
17:57 épée, lance, bouclier. Alors quand on perd la lance, on prend l'épée, mais si on perd
18:03 l'épée, en fait, il se passe quoi ? Est-ce qu'il y a des haches, des petits couteaux ?
18:08 Je ne sais pas moi. Quand on a sa vie en jeu, en général, on va trouver les astuces pour
18:12 essayer de résoudre son problème immédiat. Donc effectivement, on a souvent dans les
18:18 tombes des couteaux qui sont associés aux panoplies strictement militaires. Ça ne veut
18:24 pas pour autant dire que le couteau est pensé comme une arme en amont, c'est-à-dire que
18:28 c'est plus un outil, quelque chose qu'on va utiliser. Ça peut être pour couper son
18:32 saucisson par exemple lors du repas du guerrier, mais évidemment si on est en place, si on
18:39 l'utilise à ce moment-là, on peut tout à fait l'exhiber, s'en servir au combat.
18:43 La hache, c'est un peu la même chose, on va en retrouver dans certains contextes, dans
18:48 des tombes, mais sans que pour autant ce soit quelque chose de systématique. Et là, pour
18:55 le coup, a priori, on peut exclure l'usage militaire puisqu'on ne se trimballe pas sur
18:59 le champ de bataille avec une hache. Oui, ça reste porte-dans-le-bouclier si on
19:04 commence à s'amuser quoi ! C'est un peu ça.
19:06 Une autre partie de l'équipement que nous n'avons pas encore abordé et qui est pourtant
19:16 fondamentale, c'est l'équipement du corps, l'équipement défensif. Et pour ça, les
19:21 guerriers celtes ont également fait preuve d'un certain talent. L'équipement le
19:24 plus emblématique, qui a été utilisé jusque dans les tranchées de la première guerre
19:28 mondiale, est la côte de maille, une invention celtique de la fin du IVe siècle avant notre
19:33 ère, puis reprise par de nombreux peuples antiques. Elle est composée de milliers d'anneaux
19:37 de fer, aboutés ou riftés. C'est une protection corporelle, généralement renforcée aux
19:42 épaules, qui n'empêche pas la fluidité des mouvements. Un atout de poids dans un
19:46 combat donc, qui nous offre un avantage non négligeable face à un autre guerrier qui
19:50 n'en aurait pas. Cependant, cette côte de maille serait le
19:52 privilège d'une élite martiale ou économique. Et on peut très bien comprendre pourquoi.
19:57 La complexité de la réalisation d'un tel équipement nécessite forcément un coût
20:02 élevé. On pourrait en effet penser que l'assemblage long et fastidieux de la côte de maille
20:06 justifie le coût d'une telle fabrication. Mais ça serait vite oublier l'activité
20:10 chronophage de la réalisation du fil. Cette côte de maille se porte sur un subarmalice,
20:15 une sorte de brogne ou de gambison en cuir souple, en peau, en feutre ou en tissu. Différentes
20:21 sources à notre disposition permettent même de supposer qu'il y avait des cuirasses
20:25 organiques, c'est à dire à base de matière qui périme. Ce qu'il faut bien comprendre,
20:29 c'est que le cinéma et certaines reconstitutions fantasmées nous ont habitué à imaginer
20:33 la cuirasse comme une protection de cuir d'un seul tenant, d'un seul bloc. Pour
20:37 le coup, on ne peut pas exclure qu'il y en ait eu. Mais l'archéologie n'a pas
20:40 encore permis d'en révéler à ce jour dans le contexte du second âge du fer. Cette
20:45 cuirasse, il faut l'envisager différemment. Plus vraisemblablement, il s'agirait de
20:48 protections corporelles faites de couches superposées de tissus de lin encollés.
20:52 Ces protections sont particulièrement résistantes et constituent de véritables ancêtres du
20:57 gilet pare-balles. Un bon moyen de se protéger pour se faire péter la pence avant et après
21:01 le combat, et pas pendant !
21:02 Pour la tête, le guerrier est parfois, cela dépend des périodes et des secteurs géographiques,
21:11 protégé par un casque dont la forme varie. Certains types de casques gaulois ont inspiré
21:15 des casques romains. Le principe est généralement celui d'une calotte métallique, en fer
21:19 ou en bronze, avec boutons rapportés. Les joues sont souvent protégées de paragnatides,
21:24 c'est à dire de couvre-joues protégeant la mâchoire. Un couvre-nuque se situe à
21:28 l'arrière de la calotte pour protéger, comme son nom l'indique, le crâne et la
21:32 nuque.
21:33 Pour la protection des membres, c'est autre chose. Ce que l'on sait du monde celtique
21:37 révèle quelques rarissimes exemplaires de protection des membres inférieurs comme des
21:40 jambières. Clairement, ça n'est pas la norme. De même, rien ne permet vraiment d'argumenter
21:45 en faveur de brassards ou autres canons d'avant-bras organiques, en tout cas sur le plan archéologique.
21:50 Les vêtements, tels que ceux que l'on peut voir sur nos deux compères, viennent sans
21:54 doute jouer une partie de ce rôle. On reconnaît d'ailleurs les fameuses braies, l'ancêtre
21:57 du pantalon développé par les gaulois, et on voit une tunique, que l'on peut imaginer
22:02 être les deux éléments standards de l'équipement gaulois. On peut également observer un manteau,
22:06 que l'on appelle « saie », « sagoum » ou « saillon ». Ce manteau a parfois
22:10 pu être utilisé pour parer certains coups, mais pour le coup c'est une longue histoire
22:14 et l'analyse complète de chaque pièce nécessiterait une vidéo bien plus longue.
22:18 J'espère que cet épisode vous aura apporté quelques éclaircissements sur l'équipement
22:31 des guerriers celtes. On vous prépare la suite, on ne vous cache rien, très bientôt
22:34 sur la chaîne va arriver une vidéo sur le combat gaulois, on va mettre en pratique tout
22:38 ce qu'on a vu, ça va être super génial, on compte sur vous pour être au rendez-vous.
22:41 Merci à Guillaume Reich avec qui on a préparé cette série de vidéos sur le combat gaulois,
22:46 je vous mets un lien dans la description vers son travail, c'est vraiment intéressant.
22:50 Merci également à Patrick et Jean-Paul pour leur super prestation et merci à leurs associations
22:56 respectives, on a d'un côté les gaulois d'Est qui nous ont accueilli ici dans le
22:59 magnifique village de Coriobona et de l'autre l'association Drongo qui est une troupe
23:04 de mercenaires gaulois, je vous mets les liens en description.
23:07 Maintenant on compte sur vous pour partager l'épisode, pour nous dire ce que vous avez
23:11 pensé de tout ça en commentaire, n'hésitez pas à vous abonner si ce n'est pas déjà
23:15 le cas et à très bientôt sur la chaîne !
23:17 *Musique*