Tristan Séguéla, réalisateur de « Tapie » sur Netflix : » C’est une mini-série, il n’y aura pas de saison 2 »

  • l’année dernière
Transcript
00:00 Votre invité média Céline Baydarcourt a réalisé le biopic de Bernard Tapie qui est
00:03 sorti ce matin sur Netflix, ça s'appelle tout simplement "Tapie".
00:07 Les 7 épisodes s'étendent sur plus de 30 ans de sa vie, de 1966 à 1997.
00:12 Et de son rêve de devenir chanteur jusqu'à son arrivée en prison, l'histoire d'un
00:16 gamin de banlieue hyper ambitieux devenu chef d'entreprise, animateur télé, ministre,
00:20 président de l'Olympique de Marseille.
00:21 Une vie incroyable et une série incroyable, j'ai vraiment adoré.
00:25 Bonjour Tristan Seguela.
00:26 Vous êtes non seulement le réalisateur mais le co-scénariste de cette série avec Olivier
00:30 Demangel.
00:31 Vous avez mis 10 ans à la monter cette série sur Bernard Tapie.
00:34 Pourquoi ça a été si long ? Est-ce que par hasard vous attendiez à ce que Bernard
00:38 Tapie ne soit plus là parce qu'il ne voulait pas qu'elle voit le jour ?
00:40 Non, pas du tout.
00:42 En revanche, c'est vrai, ce qu'on peut dire c'est que le projet ressemble beaucoup
00:45 à son sujet.
00:46 Il a mis longtemps à se monter.
00:48 On nous a dit non, puis oui, puis non.
00:51 On s'est tombé, on s'est relevé.
00:52 On a eu différents diffuseurs, etc.
00:56 Mais c'est la vie des projets.
00:58 Il a fallu qu'on arrive sur la plateforme Netflix pour que notre ambition rejoigne celle
01:05 de la plateforme.
01:07 Votre ambition qui est assez ancienne, vous aviez cette ambition de faire la série sur
01:12 Bernard Tapie en même temps que Laurent Laffitte qui rêvait lui de jouer Bernard Tapie.
01:16 Ce sont ces deux envies qui se sont rencontrées.
01:18 Oui, en fait, on avait la même envie en même temps et on se l'est dit le jour où
01:24 je lui ai effectivement fait remarquer qu'il me faisait beaucoup penser à Bernard Tapie.
01:28 Physiquement, il a un air de Bernard Tapie, même sans trop d'artifice.
01:32 Oui, dans le regard.
01:34 Je trouvais un truc qui m'a fait penser à lui.
01:36 Je me suis dit, moi qui rêvais effectivement un peu en secret, parce que ça me semblait
01:40 presque trop grand pour moi ce projet, de pouvoir raconter cette histoire incroyable
01:46 à l'écran.
01:47 J'ai eu le sentiment de trouver l'interprète rêvée pour ça.
01:50 Et lui avait le même rêve de son côté.
01:53 Il vous fascine, vous, Bernard Tapie ?
01:55 Oui, il me fascine depuis toujours.
01:57 Comme il a fasciné beaucoup de Français, je fais partie de ceux qui ont grandi avec
02:02 lui.
02:03 Et c'est vrai qu'en plus de ça, j'ai eu l'opportunité ou l'occasion de le croiser
02:09 un peu dans mon enfance.
02:10 Je pense que ça a dû renforcer encore cette envie-là.
02:13 Et vous vouliez montrer quoi avec cette série ? Parce qu'il apparaît extrêmement sympathique,
02:18 chaleureux, ce qu'il était vraiment dans la vie.
02:19 Mais est-ce qu'il a quand même une volonté de renforcer la légende, le mythe Tapie ?
02:23 Non.
02:24 En fait, comme on le dit beaucoup avec Olivier Demangel, notre projet, c'est de faire le
02:30 portrait intime de cette légende, effectivement.
02:33 Et pas d'illustrer sa page Wikipédia.
02:36 Et d'être d'une certaine manière pas accusateur, ni élogieux.
02:42 On n'est ni ses agiographes, ni ses détracteurs.
02:45 Parce que ce n'est pas totalement la réalité.
02:48 Au début de chaque épisode, il est écrit "c'est une série librement inspirée de
02:52 faits réels".
02:53 Pourquoi vous avez fait ce choix-là ? De mêler les deux, réalité et fiction, finalement.
02:56 Je pense que ça, c'est un peu l'art du biopic.
02:58 Je crois que le biopic qui aurait prétention à la vérité absolue serait un peu fallacieux,
03:05 mensonger, déjà.
03:06 Là, on en est loin de la vérité absolue.
03:07 Et vous l'assumez parfaitement.
03:09 Oui, on en est loin.
03:10 Et en même temps, on part à chaque fois de faits et de découvertes qu'aurait pu faire
03:14 un journaliste d'investigation.
03:16 Avec Olivier Demangel, on a exploré le site de l'INA Media Pro, qui recense toutes les
03:22 archives qui sont innombrables.
03:24 Et on a fait des découvertes formidables qui nous ont inspiré des moments de pure fiction.
03:29 On est parti des faits et on a dérivé vers la fiction.
03:32 Et vous avez totalement inventé le rôle que vous attribuez dans la série à Dominique
03:36 Tapie, la seconde épouse de Bernard.
03:38 Dans la série, elle est très impliquée dans ses affaires.
03:41 Or, elle et sa famille ont toujours dit que c'était faux.
03:44 Oui, en fait, on s'est aussi inspiré d'une chose qui me semble réelle et vraie.
03:49 C'est que sans Dominique Tapie, il n'y a pas de Bernard Tapie.
03:53 Il y a cette histoire d'amour qu'on ressent très bien dans la série.
03:57 Oui, c'est aussi une grande histoire d'amour.
03:59 Ça, c'est vrai.
04:01 Et on la raconte à notre façon.
04:03 Bernard Tapie, à qui vous aviez donc parlé de votre projet, ne voulait pas qu'il voit
04:08 le jour.
04:09 Vous l'avez fait quand même.
04:10 Mais ça, ça ne pose pas de problème à l'un de ses fils, Laurent, que j'ai interrogé
04:12 hier.
04:13 En revanche, il vous reproche de ne pas l'avoir associé à l'écriture du scénario.
04:16 On l'écoute et vous pourrez répondre après.
04:18 Non seulement j'aurais voulu, mais au début, c'est ce que Tristan m'avait dit.
04:21 Tristan, on a fait un déjeuner ensemble.
04:23 Il m'a dit oui, oui, tu as plein d'anecdotes, tu as plein de trucs qu'on ne connaît pas.
04:26 On va t'intégrer à l'écriture.
04:28 Et puis après, il allait vous voyer pendant des mois pour au final me faire comprendre
04:33 que ça ne serait pas.
04:34 Et j'aurais préféré qu'il me le dise dès le début parce qu'en plus, je comprends
04:37 très bien que ce n'est pas pu se faire.
04:39 J'imagine que Netflix a dû lui dire tu comprends bien que si Laurent Tapie qui revoit
04:42 les scripts, tous les passages qui vont être un peu sombres sur son père, il va vouloir
04:46 les gommer ou les édulcorer.
04:47 C'est ce que vous auriez fait ? Non, c'est pas ce que j'aurais fait.
04:51 C'est ce que j'aurais été obligé de faire si mon père était toujours vivant.
04:56 Tristan Seguela, pourquoi finalement, Laurent Tapie n'a pas participé à l'écriture
04:59 du scénario ? Il n'a jamais été question qu'il participe
05:01 à l'écriture du scénario.
05:02 Il s'agissait simplement de lui faire lire notre travail avec Olivier Demangel à la
05:06 toute fin, juste avant qu'on parte en tournage.
05:08 Mais ce que je veux dire quand même, c'est que j'ai toujours cherché à préserver
05:13 ma liberté dans cette aventure.
05:15 Et il m'a semblé dès le début que je ne serais pas libre si je l'impliquais lui
05:18 ou un autre membre de la famille.
05:20 Ce qui est évidemment délicat.
05:22 Mais pour moi, c'était ça où j'abandonnais tout de suite.
05:25 Est-ce que vous pensez que cette série très française, sur un homme d'affaires français
05:30 très connu en France, peut intéresser un public non français et notamment américain
05:34 pour qui le self-made man, c'est d'une banalité absolue ?
05:37 C'est une grande interrogation.
05:40 Ce qui est sûr, c'est que Bernard Tapie, c'est une forme d'incarnation française
05:44 du rêve américain.
05:45 Ils en ont beaucoup chez eux, des Bernard Tapie, dès qu'ils sont allés au sommet
05:49 du pouvoir.
05:50 Donc, est-ce que cette version française du mythe américain intéressera Outre-Atlantique
05:57 ? Réponse dans quelques jours ou quelques semaines.
06:00 On n'en est vraiment pas persuadé.
06:01 Est-ce qu'il y aura une suite ? Parce que ça s'arrête en 97 et après, il s'est
06:05 passé plein de choses encore dans la vie de Bernard Tapie.
06:07 Il a fait l'acteur, il y a eu la maladie, il y a eu les problèmes avec le Crédit Lyonnais.
06:12 Non, c'est ce qu'on appelle une mini-série.
06:14 C'est-à-dire un objet long comme ça.
06:16 Il y en a presque pour 7 heures, 7 épisodes, mais qui se referment d'une certaine manière.
06:21 Si des gens regrettent qu'il n'y ait pas de suite, c'est dommage.
06:24 Mais tant mieux, ça veut dire qu'ils ont apprécié.
06:26 C'est exactement mon cas.
06:27 Merci beaucoup d'être venu Tristan Séguel.

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