Avec Anne-Cécile Mailfert, fondatrice de la Fondation des femmes, ancienne Porte-parole d’Osez le féminisme.
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-cecile-mailfert-en-toute-subjectivite
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00:00 En toute subjectivité avec vous, bonjour Anne-Cécile Maïfert, présidente de la Fondation
00:06 des femmes et ce matin, vous nous parlez du féminisme de l'autre côté des Pyrénées.
00:11 Mercredi, dans la rue, un homme a touché les fesses d'une journaliste espagnole en
00:14 plein direct.
00:15 Elle a continué à parler sérieusement au micro en souriant, mais les journalistes
00:18 en studio n'ont pas laissé passer.
00:20 Ils ont posé les bons mots, prévenu la police, déculpabilisé leurs collègues.
00:24 Cette réaction impeccable n'est pas sans rappeler celle de la société espagnole en
00:28 soutien à Jénier Mozo, championne du monde de foot, face au président de la Fédération
00:32 espagnole qu'il avait embrassé de force.
00:34 Au lieu de s'excuser platement, Luis Robiales a tenté de se victimiser lui.
00:38 Mal lui on appris, au bout de trois semaines de mobilisation nationale, il a finalement
00:42 dû démissionner.
00:43 L'Espagne semblerait être devenue le pays le plus féministe d'Europe.
00:47 Et paradoxalement, ce sont les thématiques féministes qui auraient fait trébucher Pedro
00:53 Sanchez.
00:54 En mai dernier, le Premier ministre Pedro Sanchez a effectivement subi une lourde défaite
00:57 aux élections régionales et a réussi à sauver les meubles de justesse cet été.
01:00 Les mois précédents, deux lois avaient fortement clivé l'opinion publique.
01:04 La loi sur le viol, dite « Solo C.S.C. », a paradoxalement été interprétée par des
01:09 juges comme un moyen de libérer des criminels condamnés.
01:11 Peu de temps après, une loi sur les droits des personnes trans a fortement mobilisé
01:15 les milieux conservateurs et fait apparaître des lignes de fracture au sein du mouvement
01:19 féministe.
01:20 Attaquée pour sa difficulté au compromis, il y a quelques semaines, dans le journal
01:23 El País, la dynamique ministre des droits des femmes Isabel Montero revendiquait au
01:28 contraire sa détermination à agir.
01:30 Une analyse simpliste à gauche a alors refait surface.
01:33 Pour gagner face à l'alliance de la droite et de l'extrême droite qui menaçait d'arriver
01:36 au pouvoir, il faudrait abandonner les sujets sociétaux, périphériques, féministes.
01:41 Et c'est pas contradictoire que ce sujet en cesse-ci soit si haut dans l'agenda,
01:45 dans la société espagnole et qu'il suscite autant de rejets ?
01:50 C'est exact.
01:51 Et il faut en retenir trois choses.
01:53 Déjà que le féminisme n'est pas un « à côté » sociétal.
01:56 Il est devenu un sujet central, fondamentalement politique.
02:00 Et comme tout sujet politique, il est divers, il est traversé de conflits, il passionne,
02:04 il préoccupe.
02:05 Bref, il est incontournable.
02:07 Sans détourner, c'est échoué.
02:08 La seconde leçon, c'est que le féminisme est une lutte constante.
02:11 Face aux résistances, la meilleure parade aux tentatives de retour en arrière et de
02:14 ne rien laisser passer, renoncer, c'est reculer.
02:16 Enfin, la troisième leçon, c'est la force de l'action politique.
02:19 Avec le recul, il n'était pas temps de voir que l'Espagne, un pays caricaturé pour
02:23 son machisme, soit devenue en moins d'une génération un pays qui devrait nous donner
02:27 des leçons.
02:28 Ce n'est pas un hasard, ce sont des responsables politiques qui l'ont décidé.
02:32 Agir peut tout changer.
02:33 A ce sujet, hier, la Cour des comptes pointait l'inaction de la France dans la lutte contre
02:37 les violences faites aux femmes, ses budgets ridicules et ses politiques entravées.
02:40 Malgré des avancées, il nous manque encore une forte et puissante volonté.
02:44 En somme, ne croyez jamais ceux qui vous disent qu'on ne va pas y arriver, c'est juste
02:48 qu'ils n'ont pas voulu essayer.