C’est la tendance du moment pour faciliter la transition vers une consommation plus responsable et des produits plus durables : placer le design au centre des attentions. Alliant utilité et émotion, le design permet aux marques d’apporter de nouvelles réponses à des problèmes, notamment en période de transformation profondes des entreprises.
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00:00 Et en agence cette semaine j'ai le plaisir de recevoir Mathieu Delapalme, directeur associé
00:08 et cofondateur de l'agence Pulp, racheté il y a quelques mois par le groupe de communication
00:13 Surf.
00:14 Bonjour Mathieu.
00:15 Bonjour.
00:16 Alors avec vous on va parler du design qui se place de plus en plus j'ai l'impression
00:19 au cœur des attentions des marques et c'est vrai qu'on a souvent tendance dans l'imaginaire
00:23 collectif, les non spécialistes en tout cas, à cantonner le design à quelque chose qui
00:27 relèverait de l'expression graphique or c'est beaucoup plus que ça je crois.
00:31 Est-ce que vous pouvez vous nous donner votre définition du design ?
00:34 Alors c'est un métier qui touche en fait à énormément de choses.
00:37 Il y a effectivement une partie très visible, un peu formelle et esthétique.
00:42 Alors cette esthétique on la retrouve en graphisme mais aussi dans les lieux c'est-à-dire
00:47 qu'il y a des designers qui travaillent sur des lieux.
00:49 Il y a même des en fait chez Louis Vuitton, Pharrell Williams s'appelle designer aussi
00:55 donc il y a une espèce d'amplitude en fait du rôle du design qui va bien au-delà de
00:59 la partie graphique et j'ai envie de dire ce qui est intéressant dans ce métier c'est
01:04 ce qu'il est capable d'apporter comme intelligence sur un certain nombre de sujets au-delà de
01:09 la conclusion visuelle.
01:11 C'est aussi tout ce qui se passe avant dans la manière en fait de regarder les problèmes
01:17 et de trouver des solutions qui sont sans doute un peu nouvelles.
01:20 Donc il y a un sujet de forme mais il y a aussi beaucoup un sujet de fond.
01:23 Il y a un sujet de fond parce que le design est toujours en rapport avec l'utilité en
01:26 fait.
01:27 Oui, il y a un sujet d'usage dans le design au sens très large parce qu'il y a du design
01:33 de produits, il y a du design graphique, il y a du design de service.
01:36 Donc c'est vrai que c'est un métier qui touche à beaucoup de choses et l'utilité est au
01:41 coeur de tout ça.
01:42 J'ai envie de dire l'homme et la femme en fait sont au coeur de tout ça c'est-à-dire
01:45 qu'on s'intéresse beaucoup à l'humain et de savoir si tout ce qu'on est en train
01:51 de designer, tout ce qu'on est en train de créer, dans quelle mesure ça résout des
01:55 problèmes pour nous, pour vous, ça apporte des solutions, ça ouvre des perspectives,
02:02 ça permet de vivre plus agréablement dans la société dans laquelle on vit.
02:08 Donc c'est vrai que c'est quelque chose qui touche en fait beaucoup l'usage et notre
02:13 quotidien surtout.
02:14 Je suis allée voir sur votre site internet, vous définissez comme une agence de design
02:19 où l'on observe le monde avec un point de vue, un regard positif, qu'est-ce que ça
02:23 veut dire concrètement ?
02:24 Je crois qu'on nous soumet des problèmes à résoudre, des problèmes liés à des
02:30 marchés, des marques et des produits.
02:32 Après on en a une interprétation classique parce que le marché a ses codes, il y a des
02:38 catégories qui ont des codes, il faut y répondre de certaines manières.
02:41 Et puis on est aussi là pour apporter des choses peut-être un peu nouvelles, un peu
02:45 différentes, bousculer un petit peu les habitudes.
02:49 Et là-dedans on a des convictions nous sur ce que le design peut apporter de positif.
02:55 Alors c'est peut-être un peu ambitieux mais il faut de l'ambition aussi dans nos métiers
02:59 au monde, à la société dans laquelle on vit, au rapport humain.
03:02 Il y a beaucoup d'exemples qui démontrent que quand il y a du design quelque part, les
03:07 gens peuvent se dire un peu plus bonjour, un peu plus merci, peuvent être un peu plus
03:11 sensibles à une forme d'esthétique qui rapproche du bien, c'est-à-dire que le beau et le bien
03:17 c'est des choses qui fonctionnent très bien ensemble.
03:19 Et là je pense qu'il y a des choses à apporter et nous qu'on souhaite apporter.
03:23 Donc ça c'est une vraie conviction d'agence qui est très importante pour nous, qui habite
03:28 l'ensemble des personnes qui travaillent à l'agence et qui est précieuse pour nous.
03:32 Et qu'on essaie de transmettre à nos clients surtout.
03:34 Vous citez l'humain, le beau et le bien.
03:36 Quel est le rapport que vous faites entre le lien qui existe entre design et émotion ?
03:41 Les designs qui sont très forts, ils sont très émotionnels, ils sont forcément émotionnels.
03:47 On cherche des designs qui marquent, dans tous les sens du terme d'ailleurs.
03:51 Et ce qui marque n'importe qui, il y a une part de raison, c'est-à-dire c'est utile
03:56 ou ça va me servir à quelque chose.
03:57 Et puis ça me touche, ça m'émeut.
04:00 Et là-dedans l'émotion est très importante.
04:03 Et pour que le design fonctionne, il a besoin de déclencher en fait chez la personne une
04:10 part d'émotion la plus élevée possible pour qu'il puisse s'en souvenir, adopter un produit,
04:17 adopter un service, adopter une marque dans la relation.
04:22 C'est comme dans toute relation humaine d'ailleurs, il y a une part de raison, puis il y a une
04:25 part d'émotion.
04:26 Il y a des gens avec lesquels on aime bien être, soit pour des raisons, on va dire,
04:31 des éléments très rationnels et puis parce qu'on se sent bien, qu'on est bien avec eux.
04:35 Et je pense que le travail du design pour les marques doit contribuer à ça.
04:40 Et donc il y a une part d'objectif, mais il y a aussi une part de subjectif.
04:42 Comment est-ce que justement vous mettez ça au service des marques alors ?
04:44 Alors il y a déjà un premier sujet pour les marques, c'est de bien comprendre où
04:51 elles en sont et là où elles veulent aller.
04:53 Donc ça, il y a un premier gros travail d'écoute, c'est un métier beaucoup d'écoute, de compréhension
05:01 et d'analyse du marché, de ses consommateurs, de l'entreprise, de ce qu'elle est capable
05:06 de faire aussi parce qu'on peut inventer des produits formidables, mais il faut que
05:10 ça corresponde à ce que l'entreprise est capable de proposer à ses clients.
05:14 Et donc on cherche à bien définir cette partie-là.
05:21 Il faut qu'il y ait une stratégie au départ qui soit très très claire parce que sinon
05:25 on peut inventer énormément de choses, on peut designer beaucoup de choses, mais il
05:28 faut que ce soit un design qui soit utile à l'entreprise parce que nos clients, c'est
05:32 à la fois le consommateur final ou le client final, mais aussi l'entreprise.
05:37 Donc il faut qu'on soit capable de bien comprendre quelle est sa stratégie et notre designer,
05:42 il est à son service, au service de ses stratégies, même s'il doit faire levier et peut-être
05:47 inventer des choses auxquelles il n'aurait pas pensé, je parle de l'entreprise, et
05:51 proposer des choses auxquelles le consommateur n'aurait pas pensé non plus.
05:54 D'ailleurs le consommateur, quand on lui pose la question "vous imaginez quoi ?" il
05:59 n'en sait pas grand-chose, enfin il a un pouvoir d'imagination, mais notre job c'est
06:02 de, comme l'entreprise d'ailleurs, c'est de créer des choses auxquelles les consommateurs
06:06 n'ont pas forcément pensé, qui pourtant résolvent des problèmes qui sont très importants
06:10 dans le quotidien.
06:11 Vous intervenez à quel moment ? C'est-à-dire au moment de la création de produit, au moment
06:16 de la phase d'industrialisation, au moment plus tard de mise sur le marché ? A quel
06:21 moment est-ce que le design est le plus essentiel finalement ?
06:24 Il intervient en fait, pour faire un produit ou faire un packaging ou une identité, il
06:30 intervient très tôt, justement pour bien orienter, bien définir l'angle de départ,
06:36 et puis ensuite il accompagne tout le process jusqu'à la réalisation.
06:40 Alors nous on n'est pas capable de tout faire jusqu'à la fin, parce qu'il y a beaucoup
06:44 de catégories où le design intervient, et on ne peut pas être expert de tout.
06:49 En revanche, la partie amont, la créativité, et puis on a des savoir-faire dans un certain
06:54 nombre de domaines, là oui on intervient.
06:57 Donc on intervient assez tôt en fait dans le process, et il faut d'ailleurs intervenir
07:00 assez tôt dans le process.
07:01 Pour une chose très très simple, c'est que souvent les problèmes sont mal posés.
07:06 C'est intéressant ça.
07:08 Parce que les gens ont toujours une habitude de poser les problèmes de la même manière,
07:14 pour plein de bonnes raisons ou de mauvaises, mais les problèmes sont, ou en tout cas pour
07:19 être posés un peu différemment de ce qu'ils sont aujourd'hui.
07:21 Et donc notre métier est aussi peut-être de poser les problématiques de manière un
07:27 petit peu différente.
07:28 Moi je suis convaincu qu'en fait, alors je ne suis pas designer moi-même, même si
07:33 j'anime l'agence, je pense qu'en fait il y a un problème et il y a plusieurs solutions.
07:39 On est très matricé, en particulier en France, on est très cartésien, il y a des espèces
07:43 de logiques implacables qui partent en haut et qui arrivent en bas.
07:47 Je pense que le designer il voit les choses un peu différemment.
07:50 Il pense qu'il y a plusieurs solutions pour un même problème et c'est ça qui est intéressant.
07:54 Donc la manière dont on pose ce problème à l'origine, elle est assez cruciale pour
08:00 pas refaire toujours la même chose et puis inventer des choses auxquelles on n'a pas
08:03 forcément pensé.
08:04 Et ça commence à ce moment-là, au moment où on pose le problème et où on finit par
08:09 poser des questions et trouver des réponses un peu nouvelles.
08:12 Je vais vous poser une question qui est très à la mode mais qui en même temps me semble
08:16 essentielle à poser cette année.
08:18 Dans quelle mesure est-ce que vous pensez que l'IA va être une aide ou au contraire
08:24 mettre à bas, je ne sais pas comment on peut dire, vos métiers de designer ?
08:27 Je crois que l'IA, d'abord c'est une invention extraordinaire.
08:32 Je pense que c'est une vraie révolution.
08:34 Donc il faut la regarder avec, si j'ose dire, à la fois une forme d'humilité et en même
08:41 temps pas du tout être démesurément inquiet de ce que ça peut faire.
08:48 Je pense qu'il faut contrôler, enfin contrôler en tout cas considérer que c'est un nouvel
08:53 outil, c'est quelque chose de vraiment exceptionnel, de très étonnant, de très nouveau, qui
08:59 peut apporter énormément de choses.
09:01 Et la vraie question c'est comment est-ce qu'on l'utilise ? Pas est-ce qu'elle va
09:06 nous empêcher de faire un certain nombre de choses.
09:08 Je crois que à la fois le cerveau humain dans ses parties de raison et dans ses parties
09:12 d'émotion, parce qu'on en parlait tout à l'heure, crée des choses qui sont absolument
09:16 uniques.
09:17 Il y a plusieurs intelligences.
09:18 Il y a la raison, puis il y a aussi celle de l'intuition.
09:22 Donc plein de choses.
09:23 Alors peut-être que l'IA un jour arrivera à ça, mais bon, il y a un petit peu de chemin
09:26 et puis on en est au tout début.
09:28 Donc je pense que c'est comment est-ce qu'on utilise cet outil au service justement de
09:31 toutes ces problématiques d'entreprise auxquelles on est confronté et pour aider les marques
09:35 à mieux avancer, les produits à être plus justes et les services plus adaptés.
09:43 Donc je le vois plus comme un outil formidable que comme une forme de conflit a priori.
09:50 Merci beaucoup Mathieu Delapalle.
09:52 On se rappelle que vous êtes directeur associé et cofondateur de l'agence Pulp.
09:55 Merci beaucoup.