Vendredi 14 mars 2025, SMART BOURSE reçoit Wilfrid Galand (Directeur stratégiste, Montpensier-Arbevel) , François Cabau (Senior eurozone economist, AXA IM) et Benoit Peloille (CIO, Natixis Wealth Management)
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00:003 invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13François Cabot est à nos côtés, économiste zone euro chez AXA-IM.
00:16Bonsoir François.
00:17Bonsoir Nicolas.
00:18Wilfried Galland est également avec nous, directeur général adjoint et directeur stratégiste
00:22de Montpensier Arbevel.
00:23Bonsoir Wilfried.
00:24Bonsoir Nicolas.
00:25Et Benoît Pelloual nous accompagne, directeur des investissements de Natixis Wealth Management.
00:29Bonsoir Benoît.
00:30Bonsoir Nicolas.
00:31Bon, ça a été le sujet tout au long de la semaine, ce concept de période de transition
00:35ou de nécessaire détox pour l'économie américaine, concept porté par Donald Trump
00:40et son administration.
00:41Je voulais partir quand même de la baisse du S&P 500, 10% de correction par rapport
00:46au sommet en 16 séances, effectivement c'est une correction un peu éclair au regard des
00:51standards de marché qu'on peut avoir, c'est l'avis des marchés de voir les indices parfois
00:56baisser de 10%.
00:57Généralement ça se fait sur quelques semaines, un ou deux mois, là ça s'est fait de manière
01:02assez concentrée, assez dense.
01:05Qu'est-ce qui a expliqué ce repricing de marché et surtout à quoi est-ce que le marché
01:10s'est réajusté avec cette baisse de 10% du S&P 500 aujourd'hui Benoît ?
01:16Ce qui est très intéressant dans cette baisse, c'est surtout le mouvement relatif.
01:21C'est vraiment autant l'année dernière les US étaient un peu la locomotive qui tirait
01:25le reste des marchés actions.
01:26Là ils sont vraiment seuls à être dans cette situation, le reste des marchés se porte
01:30plutôt bien et particulièrement bien l'Europe qui est en progression assez significative.
01:32Maintenant il n'y a pas non plus de signe particulièrement inquiétant, de signe de
01:37panique ou de stress de marché.
01:39Si on regarde les spreads monétaires, si on regarde les spreads high yield, les obligations
01:44les plus risquées, dans des mouvements comme ça sur les marchés actions avec une remontée
01:47de la volatilité, on aurait pu attendre une tension un peu plus importante des spreads
01:51de crédit.
01:52Ce n'est pas spécialement le cas, ça se tend mais ça n'a rien de particulièrement inquiétant.
01:55Pour nous le marché est en train tout simplement de migrer à un scénario pour les Etats-Unis
01:59de croissance un peu plus modeste, en tout cas qui nous semble un peu plus cohérent.
02:03Si on raisonne en termes de niveau d'indices, compte tenu des primes de risque, du niveau
02:08de taux, sur le S&P au-delà des 6000 points, on n'était pas dans un scénario de soft
02:15lending de l'économie ni même de no lending mais de réaccélération de l'économie.
02:18Au-delà de 6000 points, on valorisait une croissance qui est réaccélérée, une croissance
02:24qui a des profits au-delà de 20%, ce qui nous semblait très optimiste.
02:26On revient sur des niveaux qui semblent un peu plus cohérents avec le cycle, si on est
02:32autour de 5400-5500 points, on valorise de nouveau ce scénario de soft lending, d'une
02:38économie qui ralentit, qui atterrirait autour du consensus, qui est autour de 2%, ce qui
02:42est déjà un peu plus cohérent.
02:43Mais pour l'instant, on ne valorise rien de particulièrement inquiétant, en tout cas
02:47par un freinage beaucoup plus important de la croissance économique.
02:50Toute la question est de savoir jusqu'où ce ralentissement nous emmènera, j'imagine.
02:54C'est ça, Benoît ?
02:55C'est l'idée.
02:56C'est effectivement ça.
02:57Parce que 2%, on aimerait bien que tout s'arrête à 2%, l'inflation, les taux, la croissance.
03:05Et surtout, c'est qu'on a de plus en plus une accumulation de signes qui laissent à
03:09penser que l'économie pourrait freiner un peu plus que ce que l'anticipe le consensus.
03:12Encore une fois, un peu au-dessus de 2% pour l'économie américaine, ça reste un scénario
03:17de freinage modeste de l'économie qui soulève la question de savoir est-ce que c'est suffisant
03:22pour retrouver fondamentalement la maîtrise de l'inflation autour de 2 ? La question
03:25reste ouverte.
03:26Nous, on pense qu'il y a besoin vraisemblablement d'un freinage peut-être un peu plus appuyé.
03:29D'accord.
03:30Ce moins 10%, comment vous le prenez, Wilfried ? C'est déjà une bonne partie du chemin
03:36qui est fait ou est-ce que ça ouvre la voie à effectivement quelque chose qui pourrait
03:39se transformer d'une correction à un marché un peu plus compliqué ? Le marché baissier
03:45étant consensuellement admis autour de moins 20.
03:49Ce qui me paraît très amusant, c'est que quand Donald Trump parle d'une économie
03:55de détox, moi dans mon enfance on appelait ça une purge.
03:58Parce que c'est exactement ça qu'on est en train de vivre.
04:02Le marketing a un peu changé.
04:03Le marketing a un peu changé mais je pense que ça donne une meilleure idée de ce qu'on
04:07est en train d'y vivre.
04:08Et effectivement, ce que vient de dire Benoît est très très juste.
04:12Ce que le marché nous donne désormais comme prix, c'est les prix d'une probabilité
04:17de récession américaine.
04:18On n'en est pas là mais on sent que les probabilités sont en train de monter.
04:23Et effectivement, on a eu en fin de semaine, en particulier hier, on commençait à avoir
04:28des signaux un tout petit peu plus inquiétants.
04:30Par exemple, effectivement, les spread de Crédit AI étaient restés extrêmement calmes
04:34mais on voyait hier en particulier, on voyait que ça commençait à se tendre et à se
04:39tendre vite.
04:40Le niveau restait, effectivement, totalement rassurant.
04:44On parlait plus bas, les spread étaient au plus bas sur les US.
04:47Mais la vitesse à laquelle ça changeait, c'est un peu comme la vitesse de la correction.
04:51On sentait qu'on commençait à avoir quand même pas mal de nervosité dans le marché.
04:54Et ce que le marché nous dit, c'est qu'on a un double effet récessif des politiques
04:58de Donald Trump.
04:59Le premier effet récessif, c'est l'incertitude liée aux droits de douane.
05:02Comment est-ce que les droits de douane vont impacter l'économie américaine et globalement
05:05l'économie mondiale ? Et le douzième effet récessif, c'est le fait qu'on est en train
05:09de couper à l'âge dans des dépenses publiques de façon totalement aveugle.
05:12Et là aussi, ça a un impact direct sur la croissance économique et sur la partie emploi.
05:18Et on a vu par exemple que dans le Michigan, on parlait à l'instant d'un indice du Michigan,
05:21on a parlé bien sûr des anticipations d'inflation qui sont remontées très fortement, en particulier
05:27chez les démocrates et les indépendants.
05:30Par contre, sur les républicains, ça reste une inflation à zéro.
05:33Sur la partie inflation, il y a toujours une vraie polarisation dans cette enquête auprès
05:37des consommateurs.
05:38D'ailleurs, les démocrates pensent que l'inflation va exploser et les républicains sont beaucoup
05:42plus confiants de ce point de vue-là.
05:43Quand vous regardez l'inflation à moyen terme, les démocrates nous disent que ça va aller
05:47vers 6,5.
05:48Les indépendants sont à peu près cohérents avec le chiffre, c'est-à-dire qu'ils sont
05:52autour de 4.
05:53Et les républicains pensent que c'est moins 0,1.
05:56Donc on a vraiment une polarisation extraordinairement forte.
05:59Mais à l'intérieur de l'indice du Michigan, on a également des indications sur la qualité
06:05du marché de l'emploi.
06:06Et ces indications sont en train de se dégrader aussi, de façon assez forte.
06:10Et donc là, on voit que c'est vraiment le soutien de la croissance américaine, le soutien
06:14de la consommation via le marché de l'emploi, qui est en train de faiblir.
06:17Donc attention quand même, on est en train de générer un niveau d'incertitude.
06:20Quand on regarde les indices d'incertitude de l'économie américaine, les financiers
06:25adorent calculer des indices, parce qu'après ça permet de faire des produits structurés
06:28sur des indices.
06:29Mais ces indices d'incertitude d'aujourd'hui, en général, quand tout se passe bien, on
06:33est entre 100 et 200.
06:34100 et 200, c'est un niveau à peu près correct.
06:36Au moment de la pandémie, on était à 550.
06:39Au moment de la crise de 2008, on était autour de 250-300.
06:44Là, on est à 350 en termes d'indices d'incertitude économique.
06:48C'est extraordinairement fort, pas un indice d'incertitude financière.
06:51Évidemment, en 2008, c'était plus important.
06:52Mais l'indice économique d'incertitude est extraordinairement fort et donc les marchés
06:57reflètent cette incertitude-là.
06:58Là, il nous dit que c'est peut-être le temps d'arrêter.
07:00Je pense que les marchés savent aussi que Donald Trump ne regarde pas les actions, il
07:05regarde les taux.
07:06Et donc, tant que les taux ne bougeront pas, tant que les taux sont plutôt à la baisse,
07:09et aujourd'hui, ils sont plutôt à la baisse par rapport à ce que c'était il y a un mois,
07:12Donald Trump n'est pas inquiet parce que son électorat, il a du mortgage, son électorat,
07:17il a des taux de crédit.
07:18Dans le 70-40, il y a de l'obligataire aussi dans le 70-40 des Américains.
07:22Oui, mais le cœur de son électorat, il n'a pas d'action, en tout cas très peu d'action.
07:26Et il déteste Wall Street parce que Wall Street, c'est l'élite.
07:28Vous ne pouvez jamais oublier que le récit de Donald Trump, c'est Donald Trump contre
07:31les élites, en particulier les élites financières, et c'est pour ça que le discours est un discours
07:37autour des taux d'intérêt, quand on écoute Scott Bessent, pas du tout au niveau des années
07:40à venir.
07:41C'est des mois qui communiquent sur la baisse des taux longs, comme c'est leur objectif.
07:44Exactement.
07:45Je prolonge la question, et franchement, la question de marché, est-ce que ça milite
07:50pour rester encore prudent sur l'idée d'une reprise, d'un rebond du marché américain
07:54après 10% de baisse ?
07:56Je pense qu'à ce stade, on a déjà bien mis un prix au ralentissement.
08:01Si on a un scénario de récession, ce n'est pas dedans.
08:03Le scénario de ralentissement est dedans.
08:05Pour ceux qui ont un petit peu de temps devant eux, remettre un petit pied, ce n'est pas
08:10non plus idiot.
08:11Ce n'est pas inapproprié de recommencer éventuellement à se positionner maintenant.
08:14Je n'ai pas entendu le terme « ininvestissable », ce n'est pas le cas.
08:16Là aussi, Benoît, je vous repasse la parole sur…
08:18Sur le scénario action globale, on reste quand même relativement prudent, on n'appuie
08:23plus sur le relatif.
08:24Il y a encore peut-être plutôt un peu de potentiel côté Europe, justement.
08:26On reste quand même relativement prudent sur les États-Unis parce que…
08:30Mais ça redeviendra à un moment, on retrouvera un moment d'intérêt sur les États-Unis,
08:34c'est ça le… Il y a un peu de tactique dans tout ça quand même.
08:36Voilà exactement l'objectif.
08:37Nous, ça va être de se repondérer justement en action américaine de façon plus significative.
08:41On pense que c'est peut-être encore un peu tôt, justement, avec cette problématique
08:44de ralentissement, cette idée de détox qui est très importante justement pour le scénario
08:50macro.
08:51On pense que ça peut appuyer un peu plus le freinage de l'économie américaine et
08:55c'est nécessaire même pour obtenir une stabilisation de l'inflation à l'objectif
08:58de deux.
08:59Bon, après 55 jours d'exercice du pouvoir et le concept de détox ou de période de
09:03transition, qu'est-ce que vous comprenez de la stratégie de Donald Trump ? Et derrière
09:07cette idée de détox, est-ce qu'on assiste pour l'instant à simplement une vibe qui
09:13retombe un peu ou est-ce qu'il y a déjà peut-être des phénomènes auto-alimentés
09:18un peu plus profonds et un peu plus graves pour la suite sur le plan macro, j'entends,
09:22François ?
09:23Non, je crois qu'effectivement il y a une grande confusion et ça reflète bien les
09:26indices d'incertitude autant au niveau commercial que de politique économique plus généralement.
09:30On était en tête en Europe avec l'Allemagne et la France en tête de liste il y a maintenant
09:35presque un an et évidemment les Etats-Unis nous rattrapent quelque part de ce côté-là
09:39donc on a effectivement une espèce de bulle d'incertitude qui grandit de ce côté-là
09:43et effectivement une grande confusion sur en fait c'est quoi l'objectif final.
09:47Et c'est vrai que le macroéconomiste que je suis, il a souvent le marché en face de
09:52lui qui réagit trop vite par rapport à la macro.
09:55Là le souci c'est qu'on a un décalage, c'est-à-dire qu'on a les nouvelles provenant
09:58de Washington, le marché et la macro qui suit tant bien que mal et là-dessus c'est
10:02vrai que je rejoins beaucoup ce que disaient Benoît et Wilfrid, c'est-à-dire que ça
10:05corrige et ça paraît logique par rapport au niveau d'expressionnalisme qu'on avait
10:09vis-à-vis de la macro, maintenant comme on ne sait pas très bien où on va du point
10:12de vue de la politique économique américaine, on a envie de se dire que ce qu'on a eu
10:16là depuis un mois ça fait totalement sens mais en même temps les indicateurs retardés
10:22par essence macroéconomiques sont plutôt bons, c'est-à-dire que vous avez l'emploi
10:25qui tient bien, les demandes d'allocations de chômage tiennent bien aussi donc de ce
10:30qu'on a pu avancer semaine par semaine c'est pas du tout la catastrophe.
10:33Donc de ce côté-là effectivement on s'est mis totalement pour un ralentissement un
10:37peu plus à marche forcée que ce qu'on aurait pu avoir en anticipation.
10:41De notre côté entre guillemets c'est ce qu'on avait, c'est-à-dire qu'on avait
10:43un ralentissement de 3 à 2 cette année et on descend à 1,5 voire un peu en dessous
10:47l'année prochaine en croissance américaine.
10:49D'accord.
10:50Donc ça reste un soft landing mais avec quelque chose qui tourne quand même relativement
10:53proche de zéro en séquentiel, initialement plutôt sur le H2 2025 mais là on a l'impression
10:59que le ralentissement se fait plus vite et qu'on y est plus rapidement donc est-ce
11:03qu'on va plus vite vers zéro et on se stabilise là et entre guillemets on s'arrête là
11:06parce que le coup devient trop fort et pour l'économie américaine notamment ou alors
11:11au contraire on pourrait être amené à descendre plus bas parce que finalement l'aspect presque
11:15dogmatique qu'on a l'impression de cette persuasion qui nous est faite continue et
11:21là-dessus c'est vrai qu'on a largement à découvrir de ce qui peut nous arriver
11:25et entre temps c'est vrai que je reviens sur l'idée de Benoît du parallèle antagoniste
11:30finalement entre l'Amérique et les Etats-Unis qui décélèrent avec des mauvaises nouvelles
11:33et l'Europe qui surprend sur les marchés en réponse mais qui aussi donne de bonnes
11:38raisons d'être plus optimiste donc là-dessus c'est vrai qu'il y a un peu un chassé-croisé
11:43sur lequel on pourrait se dire qu'en tout cas d'un point de vue macro on a de la marge
11:46pour aller en dessous sur les U.S. et pour aller plus haut sur l'Europe.
11:49Je comprends.
11:50On peut continuer d'avoir des déceptions sur l'économie américaine quand on peut
11:53continuer d'avoir encore peut-être des surprises positives sur l'économie européenne.
11:56Pour la Fed, ça la place dans quelle situation et je vais dire dès la semaine prochaine
12:02la dernière prise de parole de Jérôme Poel ne changeait pas grand-chose au discours du
12:05FOMC de janvier je crois, pas d'urgence à baisser les taux, vous le rappeliez les
12:10données dures, les données solides montrent effectivement qu'il n'y a pas d'effondrement
12:15de l'économie américaine mais au-delà de l'incertitude envahissante il y a quand même
12:19aussi des enquêtes et je reviens au Michigan qui commencent vraiment à affaiblir.
12:23Est-ce que dans le discours au moins est-ce que Jérôme Poel peut réintroduire une forme
12:29d'assurance ou de réassurance pour l'économie et les marchés ?
12:33Je pense que le discours doit être très ouvert parce que le guide du Banquier Central
12:39c'est celui du macroéconomie, c'est les données dures donc là-dessus encore une
12:42fois tout se porte bien et c'est...
12:45On a les ventes au détail je crois la semaine prochaine encore avant le FOMC.
12:48C'est juste qu'ils peuvent encore éventuellement donner un petit guidage supplémentaire mais
12:52à la fois côté économie réelle côté inflation on a quelque chose qui se porte
12:55très bien et qui n'a pas changé depuis six semaines donc là-dessus ça ne sert
12:58à rien non plus que la Banque Centrale arrive et agite feu de toute flamme, attention on
13:03va dans le mur.
13:04Ça pourrait rajouter une inquiétude.
13:05Parce que nous notre point de vue quand même sur la fonction de l'action de la FED on
13:08a quand même une inflation et l'enquête du Michigan le rapporte bien qui est plutôt
13:13évidemment orientée à la hausse et là-dessus avoir un marché qui price quasiment 100 points
13:17de base de baisse d'autos sur 2025 ce n'est pas du tout évident de notre point de vue
13:21donc là-dessus se dire qu'on pourrait avoir un coussin d'amortissant avec une fête qui
13:28pourrait devenir beaucoup plus accommodante parce que attention on a peur d'une récession
13:30etc.
13:31Ce n'est pas du tout gagné de ce côté-là parce que nous on a une baisse simplement
13:34au T4 2025 en se disant qu'effectivement l'économie américaine ralentit plus vite
13:39mais pour l'instant sur mars les projections des membres du FOMC devraient faire état
13:45d'une économie qui tient relativement bien et donc pas besoin de faire feu de toute flamme
13:49pour la soutenir pour l'instant.
13:50Wilfried, où est le niveau de douleur ? Qu'est-ce qui peut infléchir s'il le fallait la politique
13:57de Trump ou la conduite de la politique de Trump et qui amène à un moment une forme
14:03de réassurance ?
14:04Je pense que le niveau de douleur ce sont les taux qui vont nous les donner, clairement
14:09les taux il y a un mois, un mois et demi ils étaient à 4,65 sur le disant américain
14:14aujourd'hui on est à 4,30 donc il n'y a aucune inquiétude du point de vue des taux
14:17à avoir.
14:18Si effectivement on commençait à avoir une inquiétude sur la dette américaine, sur
14:21le dollar et qu'on avait une tension de ce point de vue là, là ce serait une corde
14:25de rappel extrêmement puissante.
14:27Si on avait évidemment, on n'en est pas là, mais des marchés qui dévissent véritablement
14:31y compris de la partie action, qui bloquent par exemple le système de crédit américain,
14:35là effectivement à la fois du côté de la Fed et du côté de l'exécutif on aurait
14:39quand même des lumières qui s'arrêteraient.
14:41On a eu aussi, il ne faut pas l'oublier, une alerte cette semaine sur la possibilité
14:48pour l'administration américaine de taxer le dollar, c'est-à-dire de taxer les flux
14:51financiers entrant aux Etats-Unis puisqu'ils ont, alors dans le tout, l'anmarie Trump
14:55s'est passé un petit peu sous les radars, mais c'était nos confrères du Financial
14:58Times qui ont alerté sur le sujet, ils ont annulé des dispositifs qui permettaient de
15:04taxer les investissements chinois aux Etats-Unis et on se dit, en fait ils vont probablement
15:08remettre quelque chose d'autre et ça fait partie des inquiétudes en particulier dans
15:12le continent asiatique sur comment est-ce qu'ils vont être traités par la suite de
15:16l'administration Trump et donc est-ce qu'il n'est pas nécessaire déjà de se désengager
15:20un peu du pays.
15:21Et en fait ce qu'on voit quand même aujourd'hui c'est que clairement Trump et son administration
15:24sont les derniers des mercantilistes, c'est-à-dire qu'ils nous disent aujourd'hui que leur puissance
15:29va se mesurer aux flux financiers nets qu'ils vont être capables de récupérer de l'étranger
15:34et non pas à la création de valeur de l'économie américaine.
15:38L'argent pleut sur les Etats-Unis, il le répète souvent, l'argent des tarifs va pleuvoir
15:42sur les Etats-Unis.
15:43Mais aujourd'hui ce qu'ils ne voient pas c'est que l'argent extérieur pleut sur les Etats-Unis
15:47ce qui leur permet de recycler leur déficit commercial et c'est un signal de force, leur
15:51déficit de balance des paiements est le signal de la force de l'économie américaine et
15:54du dollar et non pas un signal de faiblesse.
15:56Et donc l'erreur de diagnostic que fait cette administration est au cœur des politiques
16:02aujourd'hui et au cœur des inquiétudes des investisseurs parce qu'on est véritablement
16:06en train d'affaiblir ce système-là.
16:09Donc Jérôme Powell va se retrouver effectivement dans une situation un petit peu compliquée
16:13mais le cœur pour lui c'est est-ce que l'économie américaine risque de ralentir trop fort ?
16:16Moi je fais partie de ceux qui pensent que les droits de douane agissent sur l'économie
16:22américaine comme une taxe.
16:23Et donc ça agit comme une taxe, ça veut dire que c'est récessif, c'est pas inflationniste.
16:28Pour moi ça n'est pas inflationniste du tout.
16:30Quand on fait les calculs, la part des biens de consommation dans la consommation américaine
16:36c'est 4% de la consommation américaine.
16:38Donc même si vous augmentez le prix de ces biens de consommation, ça ne va pas avoir
16:41un impact macroéconomique très fort.
16:43En revanche c'est 16% du corporate GDP américain, donc 16% pour faire simple de la valeur ajoutée
16:50aux Etats-Unis des entreprises américaines.
16:53Donc c'est par les entreprises qu'on va avoir l'impact via diminution des investissements,
16:59diminution des marges, diminution des embauches.
17:01C'est ça qu'il va falloir suivre et c'est je pense ça que Jérôme Powell va suivre
17:04pour savoir comment est-ce qu'il va ajuster sa politique monétaire.
17:07L'inflation, alors qu'on a le pétrole en baisse, les défaissances chinoises, c'est
17:12pas le sujet.
17:13En revanche le sujet de la stabilité financière américaine commence à devenir un sujet.
17:17Est-ce qu'il aura plus d'éléments dès la semaine prochaine pour commencer à prendre
17:21position ? Jusqu'à présent il s'est toujours retenu en disant on n'est pas là pour spéculer,
17:25pour anticiper.
17:26Il faudra attendre de voir et attendre de voir aussi les premiers effets produits par
17:30les politiques mises en place par la nouvelle administration.
17:32La semaine prochaine ce sera encore trop tôt.
17:34Ce sera encore trop tôt François Lillouz, très bien.
17:37En fait je suis assez mal à l'aise avec cette idée qu'il y aurait une corde de rappel
17:40immédiate grâce à la Fed ou grâce à Trump parce que les marchés baissent etc.
17:44Je suis très dubitatif sur cette idée, en tout cas s'il y en a un c'est probablement
17:47plus bas et plus tardif dans l'année.
17:50Déjà c'était très bien évoqué, la Fed peut partir avec de telles anticipations d'inflation,
17:55un niveau d'inflation encore au supérieur de l'objectif, des données en dure qui montrent
17:58une croissance toujours au-dessus du potentiel, c'est très difficile de faire quoi que ce
18:01soit.
18:02Ça aurait pour effet justement d'inquiéter plus qu'autre chose justement la dynamique
18:05de marché.
18:06Mais surtout du côté de l'administration Trump, leur action produit, on le voit dans
18:13ce qu'on appelle les données d'enquête, produit déjà des effets qui vont être négatifs
18:16sur l'économie américaine.
18:17Les anticipations de la part des entreprises sur les barrières douanières, on l'a vu,
18:21ça a impacté considérablement la balance commerciale en termes des biens qui est très
18:25largement déficitaire, donc on se précipite pour sécuriser les approvisionnements avant
18:28les barrières douanières.
18:29Donc ils ne croient pas du tout au bluff, à la logique transactionnelle, les entreprises
18:31se disent on va payer beaucoup plus cher donc il faut réagir.
18:34Les ménages c'est la même chose, on parlait des données d'enquête.
18:37Les enquêtes d'effet de régional sur les intentions de dépense de CapEx commencent
18:47à se tasser un peu.
18:48C'est là où il y a probablement aussi quelque chose de nouveau, on parle du split entre
18:52les ménages liés aux anticipations d'inflation, il y a quelque chose de très notable dans
18:56le moral, c'est que, et c'était bien illustré dans l'enquête du Conference Board, ce sont
19:00les ménages très aisés qui ont le moral qui flanche cette fois, et c'est probablement
19:03beaucoup plus important que dans les années précédentes où effectivement le moral était
19:07plutôt bas, il a été plutôt bas qu'il ne l'est aujourd'hui, mais ça avait assez
19:10peu d'impact sur le marché.
19:11Là cette fois ça concerne plutôt les ménages aisés, et l'économie américaine est outrageusement
19:17dépendante pour sa consommation des ménages aisés, le top 10% des revenus les plus élevés
19:23représentent la moitié de la consommation américaine, ça n'a jamais été aussi élevé
19:26historiquement.
19:27Donc le fait que ce soit ces ménages-là qui ont le moral qui flanche c'est un signal
19:29très important sur l'économie américaine, et justement les théories réelles ne s'y
19:35ne s'y trompent pas, ce n'est pas l'effet d'inflation, on voit bien que les taux réels
19:39baissent parce qu'on anticipe, on s'inquiète sur le rythme de la croissance.
19:43Donc maintenant où est ce pout ? Je suis très dubitatif, l'administration Trump déjà
19:48c'est son dernier mandat, elle ne pourra pas en faire un troisième, donc la logique
19:51d'y aller franchement elle est là, mais surtout il y a des fondements idéologiques
19:55peut-être plus appuyés sur ce moment.
19:57Peut-être ce point d'analyse qu'il faut effectivement...
20:00Les références appuyées aux années 20, où on a mis des barrières douanières absolument
20:04démentielles qui ont amené à ce qu'on connaît ensuite des années 30.
20:07Ça s'est super bien passé après.
20:08Il y a une référence appuyée, puis il y a un entourage, l'entourage de la politique
20:11commerciale n'est plus du tout le même, il y avait des gens qui étaient vraiment très
20:15pro-libre-échange dans son premier mandat, ce n'est pas du tout le cas aujourd'hui.
20:18La logique un peu libérale, libertarienne autour de lui, il ne faut pas l'oublier,
20:23ce sont des économistes qui préfèrent que l'Etat n'intervienne pas, de souffrir, de
20:26faire souffrir l'économie avec cette idée de destruction créatrice et derrière ça
20:30repart.
20:31Donc je pense que le seuil d'acceptation de douleur il est plus important cette fois-ci.
20:34Et même quand on écoute certains membres de l'administration, je ne parle pas de Scott
20:39Besan qui est un homme de marché ou d'award lieutenant, qui doivent quand même comprendre
20:43les mécaniques des tarifs, mais ne serait-ce que la porte-parole de la Maison-Blanche,
20:48quand on lui parle des tarifs, elle semble convaincue que c'est une taxe sur les étrangers
20:54et une baisse d'impôts pour les Américains.
20:56C'est-à-dire qu'à force de le répéter, on se demande s'ils ne sont quand même pas
20:59convaincus que ça peut fonctionner comme ça.
21:01– Même quand on écoute, c'était suite à la conférence de presse de Trump, quand
21:10on écoute Howard Lutnick qui était interrogé par vos conférences de CNBC, il a dit clairement
21:18que l'objectif c'était le external revenue service qui remplace, il l'a redit, et il
21:22a même été jusqu'à dire que les taxes douanières aux Etats-Unis allaient permettre,
21:26il l'a dit d'ailleurs sous les colibés de vos confrères de CNBC, allaient permettre
21:32de rapatrier aux Etats-Unis la production, tenez-vous bien, de t-shirts et de télé.
21:36Ce qui évidemment est totalement impossible, sauf si vous produisez des t-shirts à 350
21:42dollars, il y a une clientèle pour ça, mais ce n'est quand même pas la majorité.
21:45– De toute façon on a fait les calculs, si on veut remplacer l'ARS aujourd'hui,
21:49par l'IRS, qui serait abondé par les tarifs, il faut mettre quoi, 80, 100, 140% de tarifs ?
21:56– Je pense même que si on veut véritablement…
22:00– Ça n'a plus de sens quoi.
22:01– Oui, je pense qu'on doit être au-delà de 150%.
22:03– Oui.
22:04– D'un autre côté quand on prépare des tarifs à 200% sur les espiritueux, le champagne
22:10ne fait qu'ouvrir la voie.
22:11– On voit aussi beaucoup, c'est là où c'est très différent de la séquence du
22:16premier mandat, puisque dans le premier mandat, on a d'abord quand même beaucoup d'adoucisseurs,
22:23que ce soit les baisses d'impôts, que ce soit la dérégulation bancaire, etc.
22:27Et ensuite vient en seconde partie de mandat la guerre commerciale, à un moment où l'économie
22:32américaine a déjà été bien entretenue, bien chauffée.
22:35C'est vrai que là pour le coup, la séquence est complètement à front renversé.
22:37Il faut quand même imaginer aussi qu'il poursuit toujours l'objectif de baisser
22:41les impôts.
22:42Est-ce que les revenus des tarifs le permettront ? Est-ce que le doge le permettra ?
22:47Mais il y a quand même toujours aussi cette perspective-là qui est importante pour les
22:51investisseurs et pour le marché, j'imagine.
22:53– Oui, c'est sûr que tout est lié et trop lié finalement, c'est qu'il y a une
22:59bataille idéologique un peu impérialiste, il y a une question de revenus, de rapatrier
23:06la production sur le territoire, il y a une question de rapatrier des capitaux sur le
23:10territoire, et il y a la question de générer du revenu budgétaire pour financer des baisses
23:20de tarifs.
23:21Il y a une péréquation qui est complètement incohérente là-dessus, y compris convaincre
23:30les membres de son propre parti qui sont un peu orthodoxes budgétairement parlant et
23:34qui auraient besoin d'être vraiment rassurés comme nous on a besoin d'être rassurés
23:37sur comment ça va être financé.
23:39Là-dessus, effectivement c'est complètement inversé par rapport à la dynamique précédente
23:44et il doit plutôt prouver qu'il va être capable d'aligner les chèques pour soutenir
23:50cette activité plutôt que celle-ci, alors qu'il a bénéficié d'une activité, d'une
23:54économie qui était en forme éblouissante.
23:57Et donc là-dessus, effectivement, il y a une vraie question peut-être d'autant…
24:00– Il le sait, il ne l'avouera jamais, mais c'est peut-être d'ailleurs pour ça qu'il
24:05dit même l'inverse.
24:07– Oui, oui, évidemment, forcément, mais…
24:09– Et d'autant plus qu'il en bénéficiait alors qu'en fait, finalement, le terrain
24:18s'est retourné sous ses pieds alors qu'il pensait effectivement être celui qui allait
24:21sauver etc.
24:22Donc c'est véritablement un changement de perception.
24:24– Ça change son rôle quoi en fait.
24:26– Nous, hommes rationnels, on peut se dire, voilà, est-ce que tout d'un coup on va
24:30se rendre compte des baisers qu'il fait ? Là on se rend bien compte que, et je finirai
24:33là-dessus, dans cette confusion, le seul élément qui n'est pas une confusion, c'est
24:38le bras armé commercial contre la Chine.
24:40Donc là-dessus, il y a une semblante cohérence et le reste, c'est vrai que c'est un grand
24:44brouillard et à voir comment ceci va évoluer dans les prochaines semaines.
24:48– Juste sur cette idée d'une économie en super santé etc. dont il hérite, on en
24:53revient à ce qu'il évoque sur cette période de detox nécessaire, c'est que l'analyse,
24:58c'est qu'on a une inflation qui est trop élevée parce qu'on a une administration
25:01qui a boosté l'économie et que derrière cette économie, il y aurait de l'excès
25:07qui aurait généré.
25:08– Ce qu'on a tous constaté, c'est ce que je veux dire.
25:13– Dans les faits, l'économie américaine, ça fait plus de deux ans où elle n'est
25:17pas passée une seule fois en dessous de son potentiel, ce n'est pas comme ça qu'on
25:20ramène l'inflation à 2%, très clairement, donc il y a du vrai dans ce qui est expliqué.
25:24On a eu une administration qui était la plus dépensière quasiment de l'histoire moderne
25:27aux Etats-Unis alors qu'on était au plein emploi et donc il y a la volonté de revenir
25:30en arrière.
25:31Il sait que ça coûte et il a tout intérêt politiquement à faire que ça coûte au début
25:34de son mandat.
25:35– Si jamais il se retrouve confronté à une récession malgré l'idée qu'il aimerait
25:40peut-être l'éviter, comment il réagit ?
25:43– Il va surtout tout faire pour la mettre sur le dos de l'administration précédente
25:46à travers ce discours.
25:47– Quand on est en récession, normalement les déficits de fil, les amortisseurs pour
25:51leur rôle, etc.
25:52– C'est ça.
25:53– Comment un Trump réagit si demain il est vraiment confronté non plus à un ralentissement
25:57qu'il souhaiterait maîtriser, contrôler, vendre publiquement avec l'idée qu'on veut
26:02voir les taux baisser ?
26:03Si jamais les taux sont à 2,50, qu'est-ce qu'il nous dit quoi ?
26:06C'est-à-dire qu'est-ce qu'il fait ?
26:08– Il n'est pas dans l'économie.
26:09– Non mais le vrai problème il est que pour l'instant il n'a pas de plan B.
26:13– Il faut que ça marche quoi.
26:15– Ce qu'on voit clairement c'est qu'il n'a pas de plan B et donc les discours sont
26:20tellement hors-sol qu'on ne voit pas effectivement le point où il va se rendre compte que s'il
26:26y a un ralentissement très fort de l'économie, ce n'est pas comme ça qu'il va baisser
26:30les déficits.
26:31Parce qu'en fait vous ne baissez les déficits dans le cadre d'une récession que si vous
26:36êtes dans une politique de déflation extrêmement forte et il n'a absolument aucun intérêt
26:40à avoir une politique déflationniste et jamais la Fed ne laissera s'installer une
26:46déflation profonde.
26:47Ça pourrait générer en fait un peu quelque chose de très particulier avec une espèce
26:52de reflation à marge forcée de la Fed qui fasse remonter les indices boursiers mais
26:58avec une économie qui se porte mal, ce qui est exactement l'inverse de ce qu'il souhaite.
27:02Bon, espérons pour lui que la lumière va arriver, l'esprit de Pentecôte.
27:06– C'est un temps un peu devant nous Pentecôte, début juin.
27:11– Sinon on a une bonne tête d'Agno Pascal.
27:12– Début juin c'est peut-être un moment important pour le marché, je ne sais pas.
27:16– Non mais vous savez que ce qu'on dit c'est que les marchés rebondissent aux
27:19ides de mars, les ides de mars c'est le moment où Jules César a été assassiné
27:22sur le forum, donc c'est le 15 mars, donc normalement c'est la semaine prochaine.
27:25– Ben c'est là, c'est le Nasdaq qui est en train de rebondir de force en ce moment on se parle.
27:29– Les ides de mars en général ça marche à chaque fois.
27:31– Bon, moi je voulais revenir sur l'Europe, alors là, parole à vous François Cabot,
27:35vous êtes économiste… – La transition avec les ides de mars
27:37et Jules César.
27:38– Aucune transition.
27:39Non mais c'est vraiment la question que j'ai envie de vous poser parce que comme
27:44beaucoup d'économistes et d'observateurs, j'imagine ça fait 15 ans que vous constatez
27:49que l'Allemagne sous-investit, que les excédents allemands sont les déficits français etc.
27:54Enfin, toute cette histoire là on la connaît, qu'est-ce qui s'est passé dans votre tête
27:57quand le 4 mars au soir, Frédéric Schmers nous sort un « whatever it takes » avec
28:00la possibilité déjà de voter très vite, c'est peut-être dès la semaine prochaine,
28:05donc en termes de calendrier avec l'ancien régime parlementaire, et ben je ne sais pas,
28:12les masses, 1000 milliards, enfin je veux dire, ça peut aller, je ne sais pas, 10%-15%
28:18du PIB allemand, ça peut être 6-7% du PIB de la zone euro sur 10 ans bien sûr ! Qu'est-ce
28:25qui s'est passé dans votre tête ? Non mais comment on module l'enthousiasme quand on
28:30attend ça depuis 15 ans ? On se dit c'est vrai ? Est-ce que c'est vraiment vrai ? Et
28:34qu'est-ce que ça va générer ?
28:35– Effectivement, c'est en train de venir réalité devant nos yeux ébahis et effectivement
28:40on n'a pour l'instant que les grands chiffres, on attend plus des détails notamment
28:47avec les post-négociations avec les Verts, il y a une petite réorientation des fonds
28:50sur les 500 milliards, mais néanmoins, juste pour donner un peu de contexte pour ceux qui
28:53nous écoutent surtout, 500 milliards c'est 11,6 points de PIB allemand du PIB aujourd'hui,
29:00donc en gros sur 10 ans, donc c'est… – Ça c'est le plan infrastructure, c'est
29:04le fonds spécial infrastructure.
29:05– C'est pour ça que je commence par là, parce que c'est celui dont on connaît le
29:11montant, dont on connaît l'horizon et dont on a un peu d'historique, un peu sérieux
29:16sur qu'est-ce qu'on peut en attendre en termes d'impact sur la croissance du PIB,
29:21et pour la faire courte, l'idée c'est que la croissance potentielle de l'Allemagne
29:25aujourd'hui ça tourne autour de 0,5 et que si vous faites 1,5 point de PIB pendant
29:2910 ans, vous allez plutôt vers 1,5% de croissance allemande en équilibre, c'est-à-dire
29:37que sans incertitude, si tout se passe bien, voilà, donc il y a des scies à mettre, mais
29:41néanmoins c'est quand même clairement un changement de régime, ce sur quoi il faut
29:45évidemment rajouter les aspects de dépenses militaires, sur quoi malheureusement on n'a
29:49pas beaucoup d'état, si ce n'est qu'a priori il y a plutôt un élan pour y aller
29:55franchement.
29:56– Il y en aura plus quoi.
29:57– Mais là le souci que j'ai c'est que malheureusement notre infrastructure militaire
30:03européenne et puis allemande aussi est globalement à capacité, et que si vous voulez dépenser
30:09plus très vite, il faut importer, et donc ça malheureusement le sourire devient un
30:14peu moins béat et effectivement c'est un peu moins bon pour la croissance à court
30:18terme.
30:19Mais néanmoins ça n'empêche pas que l'idée d'avoir des commandes à horizon 5-10 ans
30:24et plus va faire que l'élan sera là, le sentiment et la perspective certaine qu'on
30:29va dans cette direction-là.
30:30– 10 jours après le 10 ans allemand il n'a pas re-bougé, et 10 jours après on
30:36est toujours avec un eurodollar à 1,09 et un 10 ans allemand autour de 2,90, le marché
30:39ne s'est pas dit que c'était un feu de paille ou que c'était un signal qui ne
30:44serait pas suivi des faits, etc.
30:45– Tout à fait, il n'y a pas de raison et puis même il y a un potentiel pour aller
30:48un peu plus loin sur le 10 ans allemand, si on met un point de croissance en plus, on
30:51était à 2,40 et on pourrait aller au-dessus de 3,00, pas forcément aller à 3,50 mais
30:55au-dessus de 3,00 sans problème à terme une fois qu'on aura vu tout ça.
30:59Et là-dessus c'est une très bonne nouvelle, d'autant plus que ceci est rééquilibré
31:07aussi la dynamique de croissance européenne.
31:11– Ce qui est bon pour l'Allemagne, c'est aussi bon pour l'ensemble de la zone.
31:14– Exactement, vous avez des flux de ruissellement, je devrais dire,
31:21sur les différentes économies également, et donc qui permettrait, je trompe pour des pays
31:26aujourd'hui, vous avez l'Italie qui est à 3,5 et la France qui est autour de 3,5-3,6
31:31sur le 10 ans français et là l'Italie qui est à 4, vous vous dites aujourd'hui c'est
31:35pas très confortable cette affaire-là parce que vous mettez deux inflations sur un 0,5
31:39de croissance italienne et 1% en croissance, on n'y est pas vraiment.
31:42Donc l'idée c'est qu'effectivement, d'une part ces pays peuvent dépenser un peu à la
31:45marge nationalement mais aussi d'un point de vue européen et surtout bénéficier
31:49effectivement du flux d'entraînement allemand. Et là-dessus, et c'est peut-être la transition
31:54qui était sur l'histoire américaine, c'est que l'Allemagne avait le record de déficit
31:59commercial et de surplus de comptes courants en Europe et quand vous regardez les données
32:05de manière à peu près, vous vous rendez compte que depuis deux ans, qui est-ce qui
32:08finance le déficit américain ? C'est les Européens. Donc là-dessus, c'est plus les
32:13Chinois, donc là-dessus il y a un vrai rééquilibrage qui est en train de se faire, alors très clairement
32:17qui va prendre du temps mais qui effectivement peut nous rendre d'autant plus enthousiastes
32:22sur le fait que cette épargne accidentaire qu'on avait en Europe, enfin elle va être
32:27utilisée à bon escient pour redonner de l'élan à la croissance et c'est plutôt
32:32une belle histoire parce que même si on peut avoir des taux plus élevés, autant des taux
32:36longs que des taux BCE qui peuvent être à la marge plus élevés, c'est une histoire
32:39positive de croissance et qui effectivement devrait bénéficier à l'ensemble de l'économie
32:45et effectivement en premier lieu l'économie allemande.
32:47Du coup la Banque Centrale Européenne semble avoir perdu sa boussole, François ?
32:51On l'a tous perdue parce qu'on change de régime mais ça c'est le court terme et sur
32:58le court terme on sait très bien que ces investissements-là, ça va mettre longtemps
33:01à se mettre en musique, c'est des investissements publics, donc il faut faire des appels d'offres,
33:05etc. Donc je pense que sur 2025, l'affaire elle est quand même globalement réglée.
33:08Elle ne va pas être dépendante de ce que va faire l'Allemagne et par contre elle va
33:13être très dépendante de ce que va faire les Etats-Unis sur les tarifs.
33:16Pour la fonction réaction de la BCE, c'est d'abord Trump et les tarifs sur les prochaines
33:21décisions qui doivent jouer ?
33:23Vous avez un séquençage de timing loin avec des effets qui vont prendre de l'ampleur
33:28avec le temps sur le package fiscal budgétaire allemand et des effets positifs et des effets
33:33très négatifs très rapides potentiels sur l'Europe.
33:36Donc là-dessus, pour nous, on reste tout confortable avec notre call de la BCE qui
33:40tombe à 1,50 à la fin de l'année, notamment au regard des différentes news qui sortent
33:46de ci, de là, alors sur les vins espiritueux.
33:49Donc c'est Trump qui amènera la BCE et Isabel Schnabel à admettre que 2% n'est pas un point
33:55d'arrêt pour le big beautiful airstar ?
33:57Si il y va comme il l'a dit, effectivement, on est quand même plutôt encore dans ces
34:01risques baissiers et même si on n'est pas encore dans ces tarifs-là, ces 25%, il y
34:06a cette incertitude dont on parlait au tout début qui n'est là que pour ralentir la
34:10consommation.
34:11On parlait depuis de nombreuses trimestres et mois ensemble du taux d'épargne qui,
34:15dans tous les cas, ne va pas aller en s'améliorant.
34:17Du coup, en court terme, l'histoire est quand même plutôt avec un biais négatif.
34:21Bon, messieurs Wilfried, Benoît, sur cette séquence euro-boom, comme je l'appelle.
34:26Je me suis dit, vous n'allez pas quand même me lancer sur la BCE de nouveau ?
34:29Non, non, non.
34:30L'Europe, l'Allemagne.
34:31Vous connaissez mon sentiment sur la BCE.
34:32On ne s'est pas vu depuis le 4 mars.
34:33Vous connaissez mon sentiment sur la BCE.
34:34Je pense qu'effectivement, on a un vrai changement de régime en Europe et en Allemagne.
34:42Le Zeitgeist 22 de Lavcholz, il est véritablement là.
34:45Le changement de temps, il est véritablement là.
34:48Augmenté là-même.
34:49Ce qu'on attend désormais, c'est toujours la même chose en Europe, c'est l'exécution.
34:55C'est-à-dire que ce qu'on voit, par exemple, c'est que le plan Renew Europe a été dépensé
35:00à peu près à 50%.
35:01A 750 milliards, 4 ans plus tard, on a juste la moitié qui a été dépensée.
35:06Mais là, on va avoir une bonne gouvernance à l'Allemande.
35:07Alors, la bonne gouvernance à l'Allemande est peut-être un petit peu fantasmée.
35:12C'est-à-dire que quand on regarde ce qui se passe par exemple aujourd'hui dans les
35:14appels d'offres de l'armée allemande, les appels d'offres de l'armée allemande, c'est
35:19une espèce de boîte noire absolument considérable dans laquelle il a fallu 3 ans de débats
35:24parlementaires pour sortir les appels d'offres inférieurs à 5 000 euros de cette boîte
35:28noire.
35:29Pour que, localement, ils aient le droit de faire des appels d'offres, je dis bien inférieurs
35:32à 5 000 euros.
35:33Ça concernait y compris les papiers de toilettes et le savon dans les casernes, donc on allait
35:38quand même très très loin.
35:39Donc aujourd'hui, l'Allemagne a développé une culture bureaucratique et réglementaire
35:43qui n'a rien à envier à la culture française, c'est pour ça qu'on parle du couple franco-allemand,
35:47et qui réclame un changement là aussi de mode d'exécution pour aller véritablement
35:54très vite.
35:55Ce qu'on a fait aujourd'hui dans les marchés, c'est qu'on a anticipé énormément ce genre
35:59de choses.
36:00Quand on regarde, on parlait du rattrapage entre l'Europe et les Envies, je regardais
36:05tout à l'heure, si on enlève les valeurs défense de la partie Europe, certes l'Europe
36:11surperforme les Etats-Unis, mais beaucoup moins que ce qu'on voit depuis le début
36:16de l'année.
36:17Iron Metal, c'est notre Nvidia, je dis maintenant.
36:19Exactement, c'est la performance des obus par rapport à la performance des GPU, on
36:24y est presque, en tout cas ça rime, mais le sujet fondamental, il est effectivement
36:28un sujet d'être à la hauteur des promesses qu'on a aujourd'hui, et de le faire d'une
36:35façon qui augmente véritablement la croissance potentielle de l'Europe.
36:40Ce n'est pas si simple que ça d'investir, surtout quand on dit qu'on va investir de
36:45façon publique, moi je me méfie toujours de comment est-ce que ça va véritablement
36:49aller au service de la croissance, de la valeur ajoutée, de l'économie.
36:54On peut juste dépenser pour dépenser, en France on est très fort pour ça.
36:57En Allemagne, je pense que quand on accumule des excédents dans l'idée que quand il y
37:05aura vraiment la crise, je pense qu'un euro, un deutschmark allemand reste bien dépensé
37:11quand il s'agit de relancer l'économie.
37:13Je pense qu'on sait faire en Allemagne des économies, en revanche, savoir faire des
37:16plans d'investissement, ça fait très longtemps qu'on n'en a pas fait, donc c'est un peu
37:19comme les EPR, il faut réapprendre.
37:21Ah oui, on me rappelait en 2009, le poids économique des Etats-Unis et le poids économique
37:26de l'Europe en dollars étaient équivalents, aujourd'hui c'est divisé par deux, c'est
37:3155% de l'Europe aujourd'hui, du poids économique des Etats-Unis.
37:36Conclusion avec vous sur ce moment européen, Benoît ?
37:39Moi je rejoins très largement ce qui a été dit sur le long terme, c'est le changement
37:42de régime, ça se voit d'ailleurs sur les marchés, c'est ce que nous disent...
37:46Le changement de régime, ça veut dire que les investisseurs globaux qui considéraient
37:49que l'Europe n'était peut-être pas très intéressante à investir vont peut-être
37:53se poser stratégiquement la question de la place de l'Europe dans des portefeuilles,
37:56ça peut vouloir dire ça par exemple ?
37:58Oui, et il était temps parce qu'en fait, à part faire des US, ils ne faisaient plus
38:00grand-chose, ces dernières années, quasiment tout le monde surpondérait les US, donc là
38:04il y a maintenant autre chose à faire, donc oui, à long terme, c'est très très bien,
38:08maintenant effectivement, à plus court terme, il y a le risque d'exécution, il y a la difficulté
38:11de la BCE, effectivement, la BCE ça fait plusieurs fois où dans ses discours elle
38:16explique qu'elle baisse ses taux, mais que ça ne se répercute pas suffisamment dans
38:19l'économie, et là on a eu mécaniquement un resserrement des conditions de financement
38:24qui est totalement indépendant de son fait, donc c'est pour ça que la lecture n'est
38:27pas aussi évidente pour la BCE, sachant que l'euro plus élevé, c'est une nature à
38:30faire baisser un peu plus vite l'inflation, donc ça renforce le scénario de désinflation,
38:34donc nous nos économistes n'ont pas changé, toujours au moins deux baisses de taux encore
38:37de la part de la BCE d'ici cet été, et maintenant ce que ça veut dire pour les actifs
38:42européens, c'est que l'Europe justifie d'une place un peu plus importante en termes
38:47d'allocations actives, ça s'ajoute à une liste finalement assez longue depuis plusieurs
38:51mois d'arguments en faveur de l'Europe, des actions européennes, entre une valorisation
38:56qui était probablement un peu pessimiste, surtout en relatif aux Etats-Unis, on a une
39:00dynamique en plus de révision de profit qui à l'inverse des Etats-Unis est en train
39:04de repartir, alors que justement aux US on a une macro qui commence à fléchir, une
39:09micro un peu orientée de la même manière, donc tout ça s'accumule et peut-être que
39:12la Chine va nous annoncer un plan de soutien à son consommateur, ce qu'on attend depuis
39:16longtemps, dont l'Europe serait la zone à en profiter le plus indirectement mais le
39:22plus significativement dans les autres pays, donc voilà il y a pas mal d'arguments et
39:26donc on pense qu'en relatif l'histoire elle peut encore continuer.
39:28Une situation à front renversé quand même de ce qu'on a vécu ces deux dernières années,
39:32aveuglés par cet exceptionalisme américain, le reste du monde est là et se réveille
39:37et bouge aujourd'hui.
39:38Merci beaucoup messieurs d'avoir été les invités de Planète Marché, Benoît Pelloual
39:42directeur des investissements de Natixis Wealth Management, Wilfried Galland directeur
39:45général adjoint et directeur stratégiste de Montpensier Arbevel et François Cabot
39:48économistes honoraux chez AXA-IM.