Retrouvez Nouvelles têtes présenté par Mathilde Serrell sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes
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00:00 grâce aux nouvelles têtes Mathilde, ce matin un rappeur que l'on compare déjà à Kendrick Lamar !
00:06 Il vient de décrocher l'audacieux prix Joséphine, Thurie est dans notre studio, portrait sonore !
00:12 Il vient de Boulebi, Boulogne-Biancourt, un terroir du rap français qui a la rime dure
00:20 et la punchline en uppercut, mais lui il chantonne à la chorale et danse à la smooth criminal !
00:27 Dans ses oreilles le groove incandescent de Michael Jackson, le rock en fusion, la scène rap en ébullition !
00:43 Dans son rétro, sa naissance à Yaoundé, au Cameroun et son retour au pays pendant six années qui le marqueront à jamais !
00:55 On dit "no problem" et si tu veux en mettre plein la vue c'est "hasta la vista baby"
01:04 Lui qui se voyait plutôt en fils de Sarah Connord en Terminator, Perfecto et Grosse Moto, deviendra Thurie Balboa, rappeur puis éducateur et jeune papa !
01:14 Aujourd'hui c'est un artiste qui peut exprimer les trois !
01:17 Je passe toute ma nuit au studio, j'enchaîne direct, je dépose mon fils à la crèche,
01:21 les autres parents me regardent chelou car j'ai la tête de leur chef, "Monsieur, que faites-vous dans la vie ?"
01:26 Mon babsou j'écris des 16, je vends pas la 16, ma maîtresse de ton gosse veut devenir ma maîtresse,
01:31 j'ai du bon taga dans ma tagatière, je l'ai fait sans baron, je l'ai fait sans grand frère,
01:37 mais je vais le faire sans chœur, comme un chanteur solo !
01:40 On a dû couper la rime Thurie que vous aurez reconnu parce qu'il est trop tôt !
01:46 Tout juste récompensé du prix Joséphine parce qu'il est osé ! Son premier album "Papillon Monarque" part en tournée, Thurie bonjour !
01:53 - Coucou ! - Ça va ? Vous avez laissé tomber Balboa en cours de route, pourquoi ?
01:58 - Parce que c'était déjà assez péchu comme ça, Thurie, ça va !
02:03 - Le motif du papillon, l'orfèvrerie des textes comme le souligne le prix Joséphine, le goût du gospel, du jazz,
02:09 le jeu sur les voix, on vous compare au rappeur Kendrick Lamar, comment vous le recevez ?
02:14 - C'est flatteur, être comparé à un prix Pulitzer, ce n'est pas tous les quatre matins, donc ça me fait plaisir !
02:21 - Et qu'est-ce que vous avez de commun ? - La sincérité, je pense !
02:24 - Et l'introspection ? - Et l'introspection, bien évidemment !
02:27 - Ce prix Joséphine, mercredi dernier, organisé par nos camarades de Phi, puis vous a fait quoi ?
02:33 Vous succédez à November Ultra, rien à voir, de la pop en chambre !
02:36 - Oui, et November Ultra, c'est imbattable, donc encore une fois, c'est quelque chose d'extrêmement flatteur,
02:44 à la limite du syndrome de l'imposteur !
02:47 - Vous avez eu un petit... - Limite ! Limite !
02:49 - Mais vous n'avez pas franchi ! - Non !
02:51 - Vous savourez, quand même, j'espère !
02:53 Votre mère, elle a réagi comment, puisque c'est elle votre mentor musical ?
02:56 - Alors, ma mère a réagi comme si c'était elle qui avait écrit toutes mes œuvres !
03:03 Mais ça lui ressemble, et puis je lui tire mon chapeau, c'est grâce à elle, tout ça !
03:07 - Elle vous a transmis, non, ce mélange des genres qu'on entend un petit peu, qu'on a évoqué dans le portrait ?
03:12 - Elle m'a transmis, justement, les mélodies, et puis le goût des mots !
03:18 - Luther Vandross et Jacques Brel, Claude Nougaro et Michael Jackson, Dalida aussi,
03:24 vous avez toutes cette bande-son-là dans votre tête, c'est pas très coutumier de vos potes à Boulogne-Biancourt, à ce moment-là ?
03:29 - Franchement, si ! - Ah, tout le monde écoute ça !
03:32 - Aussi bien que les hommes se cachent pour pleurer, les hommes cachent aussi leurs goûts musicaux, quand ils sont un peu fleurs bleues !
03:40 - Les hommes se cachent pour écouter Dalida ? - Exactement !
03:43 - C'est notre vérité ! Vous clamez dans cet album "Je ne suis pas nouvelle école",
03:46 vous dites "J'espère que mon fils ne fera pas le même métier que moi", pourtant vous êtes redevenu rappeur,
03:50 après avoir été éducateur pendant 10 ans, aujourd'hui, qu'est-ce que vous mettez derrière ce mot, rappeur ?
03:55 - Derrière ce mot, je mets énormément d'espoir, je mets du courage et puis une force de proposition inévitable.
04:08 - Qu'est-ce qui vous ramène au rap, chéri ?
04:10 - Ce qui me ramène au rap, c'est l'urgence, c'est l'amour et la survie.
04:16 - C'est vrai qu'il y a un trou noir, c'est ce retour au Cameroun, je l'ai brièvement évoqué, ce père violent.
04:22 Vous avez enfin pu raconter tout ça en 2021, dans un premier recueil de titres, "Bleu Gospel",
04:28 c'était l'assurance vie pour vous ? Vous pensez même vous arrêter après ?
04:33 - En fait, comme je disais, ça s'est fait dans un état d'urgence, mais aussi dans un souci de santé mentale.
04:44 Il fallait que j'évacue beaucoup de choses et j'ai fait de mon art une thérapie.
04:48 - Et aujourd'hui, vous ne pouvez plus vous en passer ?
04:50 - Non, absolument pas.
04:53 - On écoute ce que ça donne dans un deuxième extrait de Papillon Monarque.
05:17 - Cette chanson, c'est pour votre grand-mère ?
05:20 - Oui, c'est pour ma grand-mère, mais en réalité, je la voulais comme un pansement pour toutes les personnes
05:26 qui ont perdu un être cher. C'est pour ça qu'elle ne s'appelle pas grand-mère, mais "Là où on dort heureux".
05:33 - Et il y a en même temps des projections, quand on écoute l'album, on imagine aussi votre mère.
05:38 Votre mère, c'est quelqu'un que vous avez sauvée ?
05:41 - Elle m'a sauvée un million de fois. Si je peux la sauver, ne serait-ce qu'une fois, avec de jolies chansons, pourquoi m'en priver ?
05:50 - On a entendu des chansons sur le deuil, la santé mentale, et aussi des chansons très terre-à-terre.
05:56 On parle de la dèche, du frigo, des factures, des chaussures qu'il faut racheter aux enfants.
06:02 Fils de pute, mon fils fait du 27 et ça c'est une très mauvaise nouvelle en septembre.
06:08 - Il faut faire vite.
06:09 - Non mais dans un milieu où on parle de moula, dans le rap en permanence, vous avez fait un pas de côté.
06:14 - Oui, vraiment. Je décris la réalité. C'est-à-dire que 80% des rappeurs sont pauvres. Ce n'est pas si bling-bling que ça.
06:24 - Et vous dites même que ça pue la merde d'être reconnu sans être riche.
06:29 - Tellement, tellement.
06:30 - C'est une chanson entière.
06:31 - Oui, le prix Joséphine prend le métro.
06:35 - Vous citez aussi Jeanne Moreau. Vous ne donnez pas votre âge parce que vous dites que vous êtes une fée.
06:40 Et vous écoutez Angèle. Pour vous sentir plus fort, vous diriez que vous êtes un rappeur déconstruit.
06:45 - Oui, totalement.
06:47 - Et encore peut-être pas assez, il y a encore du boulot ?
06:49 - Il y a encore du boulot mais la déconstruction reste salvatrice.
06:55 - Thierry, c'est sujet libre. Vous avez l'antenne pour vous et vous êtes venu avec un cadeau.
07:04 Elle voulait un enfant, moi je n'en voulais pas.
07:11 Il lui fut pourtant facile avec ses arguments de te faire un papa.
07:22 Cécile, ma fille, quand son ventre furont en riant aux éclats,
07:31 Elle me dit « Talons, jubile ! Ce sera un garçon. »
07:38 Et te voilà, Cécile, ma fille.
07:43 On est né à nez, les yeux dans les yeux.
07:48 Quelle est le plus étonnée des deux ?
07:53 Et je sais que bientôt, toi aussi tu auras
07:59 Des idées, puis des cites-iles.
08:04 Des mots doux sur tes hauts et des mains sur tes bas.
08:11 Cécile, ma fille.
08:18 - Merci Thierry. L'album est une tuerie. Papillon Monarch récompensé par le Prix Joséphine 2023.
08:24 Vous partez en tournée en février-mars. Tout est sur le site. De nouvelles têtes sur Fonds Sinterre.