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00:09 Bonjour, bienvenue sur InvestirTV, notre émission bourse où les gérants de fonds viennent nous partager leurs valeurs préférées, leurs convictions, thèmes, secteurs du moment.
00:20 Aujourd'hui, c'est Damien Charlet, le directeur de la gestion sous mandat de Mesquert Asset Management qui nous a rejoint.
00:27 Damien, bonjour.
00:29 Bonjour.
00:30 Alors nous avons déjà reçu des représentants de votre auguste maison, est-ce que vous pouvez nous la représenter en deux mots ?
00:36 Oui, alors Mesquert AM, c'est une des principales sociétés de gestion indépendante à Paris, on gère 4 milliards d'euros sur les classes d'actifs traditionnelles,
00:46 j'allais dire, des expertises en action, en obligation et en gestion diversifiée, une cinquantaine de collaborateurs.
00:52 Un des pionniers en gestion ISR, puisque le premier fonds ISR a été lancé en 1983, donc ça ne date pas d'hier,
01:00 et société qui maintenant fait partie du groupe LFPI, qui était un des principaux groupes de gestion d'actifs au sens large,
01:08 avec du private equity de l'immobilier au niveau européen.
01:12 Parfait. Alors la première valeur que vous proposez, que vous portez attention, c'est une valeur nationale, emblématique, c'est Pernault.
01:23 Oui, c'est Pernault, donc société familiale, la famille détient 16% du capital, avec des marques bien connues du grand public,
01:35 type Chivas Regal, Ballantine's, évidemment Ricard, mais c'est un portefeuille de 240 marques au niveau mondial,
01:43 avec 17 marques qui sont dans les premières mondiales, donc un portefeuille très riche.
01:49 Un chiffre d'affaires de 12 milliards d'euros, et une capitalisation boursière de 40 milliards, donc on connaît l'ordre.
01:57 Une des plus grosses sociétés françaises.
01:59 Et alors pourquoi vous croyez au potentiel de cette valeur ?
02:01 Alors ce qui nous plaît dans cette valeur, c'est qu'il y a deux raisons.
02:06 La première, c'est qu'ils ont un portefeuille de marques et d'actifs qui couvrent un peu tous les types de clientèle,
02:14 donc qui va du plus haut de gamme vers quelque chose de plus accessible.
02:17 Et tous les âges aussi.
02:19 Et tous les âges, absolument. Et donc dans des périodes où la visibilité commence à se détériorer,
02:24 où potentiellement on parle beaucoup de "down-trading", c'est-à-dire de changement de comportement du consommateur
02:31 vers du plus cher, vers quelque chose d'un peu moins cher,
02:34 c'est typiquement le genre de portefeuille qui nous intéresse,
02:36 parce que potentiellement plus résistant à des secousses économiques,
02:41 sachant qu'en plus ils sont présents évidemment au niveau mondial de manière assez équilibrée,
02:46 c'est-à-dire en gros un tiers, un tiers, un tiers entre l'Europe, les États-Unis et l'Asie.
02:52 Donc quelque chose qui nous paraît bien défensif dans le contexte actuel.
02:56 Et la deuxième chose, c'est que c'est un titre qui a beaucoup souffert ces dernières semaines.
03:02 Alors le contexte est un petit peu moins bon pour les spiritueux et pour les alcools dans leur ensemble.
03:10 — Pour quelles raisons ? C'était une correction après Neo4Trous ?
03:13 — Parce qu'aux États-Unis notamment, la consommation ralentit. En Asie, la consommation ralentit aussi.
03:19 Alors c'est vrai qu'on voit une économie américaine qui facialement résiste très très bien,
03:26 mais il y a quand même certains segments de consommation qui ont déjà commencé à affaiblir.
03:30 Et la consommation d'alcool en fait partie.
03:33 Ça s'est traduit par des révisions à la baisse sur les attentes de Pernaut de l'ordre de 9% ces dernières semaines.
03:39 Mais le titre a baissé de 22. Donc il y a eu une vraie baisse de valo.
03:44 Et le titre a très nettement sous-performé le CAC 40 depuis un an. On est à plus de 30% de sous-performance.
03:49 Donc on a déjà des investisseurs qui se sont méfiés de ce secteur depuis un certain temps,
03:54 sachant que c'est un management qu'on aime bien, qui a prévenu que les prochaines semaines allaient être compliquées.
03:59 Donc a priori, pas trop de mauvaises surprises à attendre.
04:02 — D'accord. Une correction qui peut consister à un point d'entrée avec une forte visibilité sur le titre.
04:06 — Exactement. — Alors une deuxième valeur que vous allez me faire découvrir, c'est STM, que je ne connais pas du tout.
04:10 — Alors STM, bon, là aussi, une très très grosse valeur internationale dans les semi-conducteurs.
04:15 Une valeur que les investisseurs en général aiment bien, qui traverse une année 2023 compliquée.
04:23 D'abord parce qu'il y a eu beaucoup de croissance en 2022. Et 2023 a été marqué par du déstockage et donc un chiffre d'affaires en baisse,
04:34 ce qui est pour des sociétés de croissance, ou en tout cas des sociétés de semi-conducteurs, qui sont plutôt sur des marchés porteurs.
04:40 Effectivement, c'est pas ce qu'on a envie de voir. Mais c'est une société qui est très très bien positionnée sur un certain nombre de segments porteurs.
04:49 Alors ils ont 70% de leur activité dans l'automobile et dans l'industrie, et 30% dans la consommation.
04:54 Alors la consommation a beaucoup souffert. L'automobile, évidemment, a beaucoup mieux résisté,
04:58 parce que le contenu de semi-conducteurs dans les voitures électriques, notamment, augmente de manière très dynamique.
05:06 Donc pour eux, c'est très profitable. En revanche, la partie consommation a plus souffert.
05:10 Tout ce qui est téléphonie, PC, etc. a été beaucoup plus compliqué.
05:15 D'accord. C'est cyclique, j'imagine, et vous imaginez le rebond.
05:19 Absolument. En fait, aujourd'hui, la grosse phase de déstockage semble être derrière nous.
05:25 Ça s'est traduit par un pic de baisse de chiffre d'affaires vers le mois de mars-avril, où le chiffre d'affaires était en baisse de 20%.
05:34 On va avoir une année 2023 qui sera en baisse d'une dizaine de pourcents.
05:39 Mais avec un déstockage qui se termine et des bases de comparaison qui ne deviennent plus favorables,
05:43 on est parti sur une année 2024 qui, normalement, devrait retrouver le chemin de la croissance et retrouver le chemin d'une bonne croissance.
05:49 Ce qui nous intéresse, ce n'est pas seulement les faits de base et le fait que ça sera mieux après avoir été moins bien.
05:57 C'est que la société est très bien positionnée sur certains segments particuliers,
06:01 type les semi-conducteurs à base de carburets de silicium, qui est un segment qui croît de 30% par an,
06:09 et dans lequel STM a 40% de part de marché.
06:14 On n'imagine pas qu'ils vont garder ces 40% de part de marché, parce que comme tous les marchés, il y a de la concurrence.
06:20 Mais même s'ils perdent une partie de leur part de marché...
06:25 De par la croissance, quelque part, ça comprend ce que je veux dire.
06:27 Exactement. Ils auront une très forte croissance sur ce segment-là.
06:30 Le segment automobile devrait rester très résistant.
06:34 On a eu par exemple, encore hier, Infineon, qui est un principal concurrent sur le segment automobile,
06:40 qui a fait une journée investisseur sur l'automobile.
06:44 Ils ont donné des illustrations de la dynamique des semi-conducteurs dans l'automobile.
06:49 Ils s'attendent à ce que d'ici quelques années, il y ait 2 000 dollars en moyenne.
06:54 Alors évidemment, la moyenne entre des hautes gammes et des bas de gamme automobiles, ça peut beaucoup changer.
06:57 Mais en tout cas, en moyenne, qu'on ait 2 000 dollars de semi-conducteurs dans les automobiles d'ici 2030,
07:02 alors qu'aujourd'hui, on est à 1 300 et que dans les voitures thermiques, on est à 700.
07:06 D'accord.
07:07 Donc, même si le marché automobile reste stable, la pénétration de leurs produits fait qu'il y aura une croissance sur ces secteurs-là.
07:16 Oui, les services de l'A.O.T. ou électrique sont plus consommatrices de semi-conducteurs que les légitimes.
07:20 Absolument. Et la baisse de cours de ces derniers mois...
07:24 Là aussi, ces derniers mois, on garde quand même toujours les valeaux,
07:26 même si ça ne suffit pas pour faire monter des titres, c'est important.
07:30 On est sur des niveaux de valeaux pour des sociétés technologiques comme ça,
07:32 avec quand même des belles perspectives qui sont de l'ordre de 10.
07:35 Donc, c'est vraiment des valeaux faibles.
07:37 Après, ça reste des valeurs cycliques, mais c'est une cyclicité quand même qui est,
07:43 je vais dire, adoucie par le fait qu'ils ont un certain nombre de marchés qui sont structurellement en croissance.
07:50 Très intéressant. Dernière valeur, donc, on va du côté de l'Espagne, dans l'habillement, c'est avec Inditex.
07:57 Inditex, je ne sais pas si vous comprenez.
07:58 Inditex, absolument. Alors là aussi, aujourd'hui, on sélectionne une valeur plutôt défensive,
08:05 avec une bonne visibilité, valeur familiale, donc avec une stratégie moyen terme.
08:12 Alors Inditex, c'est Zara.
08:13 Inditex, absolument. Zara, c'est 70% de leur activité. La famille Ortega détient 60% de ce groupe,
08:22 avec quand même plus de 100 milliards de capi, donc autant vous dire que c'est...
08:27 Oui, c'est une des plus grosses fortunes mondiales.
08:29 C'est une des plus grosses fortunes mondiales, exactement.
08:32 Donc 70% de l'activité, c'est Zara.
08:34 Et après, dans les autres marques que vous connaissez peut-être, ou que vous avez peut-être vu,
08:38 il y a Massimo Dutti, bien sûr, Poulain-Berre, et après quelques autres marques.
08:45 La caractéristique principale d'Inditex, qui a fait son succès depuis pas mal d'années,
08:51 c'est que c'est du fast fashion qui est devenu un vilain mot,
08:54 depuis que le fast fashion a enregistré des très fortes croissances et arrive de Chine.
08:59 Mais la particularité, c'est que c'est de la fast fashion avec un sourcing local.
09:03 Donc c'est moins perturbant au niveau durabilité, transition durable, etc.,
09:12 que du fast fashion qui prend l'avion et qui va de partout.
09:16 Et le modèle, et ce qui a fait le succès du modèle, c'est à la fois le sourcing local,
09:21 et c'est le fait qu'ils sont extrêmement réactifs,
09:25 et qu'ils ont beaucoup investi dans les technologies,
09:28 ce qui rend leur modèle extrêmement rentable.
09:32 Et donc aujourd'hui, ils sont très très rentables.
09:34 Et puis je pense, comment dirais-je, qu'ils bénéficient un peu des difficultés de leurs concurrents,
09:37 parce qu'ils résistent par rapport à des marques de vêtements qui, elles, sont en train de...
09:41 Absolument, absolument. C'est assez étonnant, parce que c'était pas vraiment ce qui est attendu,
09:44 mais ils ont plutôt... Ils se sont renforcés grâce au Covid,
09:47 parce qu'il y a beaucoup de petits concurrents qui ont disparu.
09:50 Donc effectivement, aujourd'hui, bien qu'il y ait évidemment toujours des concurrents qui apparaissent dans l'habillement,
09:59 ils ont pas de difficultés particulières.
10:02 C'est une société de croissance, ça a pour le coup une pure valeur de croissance,
10:05 c'est-à-dire qu'ils ont de la croissance visible,
10:08 qui est comprise entre 5 et 7% par an de croissance de chiffre d'affaires, avec des marges très élevées.
10:14 Et dans les prochaines années, tout laisse à penser que cette croissance va se poursuivre,
10:19 avec une bonne visibilité, parce que...
10:22 Alors, il y a deux choses.
10:24 D'abord, ils ont certaines zones géographiques dans lesquelles ils sont peu présents,
10:27 et les États-Unis en font partie.
10:29 Ils ont entre 0,5% et 1% de parts de marché aux États-Unis.
10:34 Et leur intention, c'est de s'y étendre.
10:36 Et alors, justement, ils ont annoncé cette année qu'ils allaient nettement augmenter
10:41 leurs investissements opérationnels, pour passer de 1,1 à 1,7 milliard.
10:47 Et soit dit en passant, ils ont 10 milliards de cash net,
10:51 ce qui est quand même absolument gigantesque.
10:53 Donc ils ont les moyens de leurs ambitions.
10:55 Et si leurs parts de marché aux États-Unis passaient ne serait-ce que de 0,5, 0,7 à un peu plus de 1%,
11:03 ça ferait déjà une croissance de plus de 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
11:06 Donc ils ont des ambitions de croissance encore,
11:09 soit par toujours amélioration de leurs espaces de vente,
11:13 mais aussi par augmentation de leurs espaces de vente.
11:15 Ils ont les moyens de leurs ambitions.
11:18 Et, j'allais dire, ils ont encore, dans certains endroits,
11:21 des parts de marché suffisamment faibles pour que leurs ambitions de croissance soient crédibles.
11:26 Alors évidemment, là, pour le coup, on est sur des valeurs un petit peu plus chères,
11:29 parce que c'est de la croissance visible, parce qu'ils déçoivent rarement
11:32 Les dernières publications ont été très bonnes.
11:35 Ils ont, j'allais dire, l'avantage des sociétés familiales,
11:39 c'est-à-dire qu'ils ont une vision moyen terme qui leur permet de ne pas juste viser
11:45 et de faire des investissements pour le prochain trimestre.
11:48 Donc ça permet d'avoir une croissance moyen terme qui est beaucoup plus visible.
11:52 Et une fois de plus, ils déçoivent rarement.
11:54 OK. Merci.
11:56 Pour conclure, alors, de manière plus globale, comment voyez-vous l'évolution des marchés
12:02 sur les prochains mois jusqu'à la fin de l'année ?
12:05 Alors, c'est un peu plus difficile depuis deux mois.
12:08 La principale cause, c'est les hausses de taux d'intérêt.
12:12 Notre sentiment, quand même, malgré tout, c'est qu'il y a un gros consensus
12:17 pour voter en faveur d'un atterrissage en douceur des économies,
12:22 et notamment de l'économie américaine.
12:24 L'histoire nous dit que quand il y a des hausses de taux, en général,
12:27 ça se traduit par une récession.
12:29 On a du mal à se dire qu'avec la violence de la hausse des taux de ces derniers mois,
12:34 il ne va pas y avoir une récession un peu partout.
12:36 Pour nous, on n'y échappera pas.
12:38 Ça ne veut pas dire qu'elle sera très méchante, parce que le marché de l'emploi est très bon.
12:41 Mais on est encore sur des anticipations, à notre avis,
12:45 notamment de prévision de résultats en Europe et aux États-Unis,
12:48 qui sont des scénarii haut de fourchette de ce qu'on peut attendre.
12:52 C'est-à-dire que sur l'Europe, le consensus attend 6% de croissance des bénéfices en 2024,
12:58 ce qui pour nous n'est pas vraiment un scénario de récession,
13:01 surtout si l'inflation baisse et que les entreprises ont plus de mal à baisser l'inflation.
13:04 Et ça, c'est réaliste ou plutôt optimiste ?
13:06 Ça nous paraît optimiste.
13:07 Et aux États-Unis, le consensus est encore à 11%.
13:09 Donc ça nous paraît particulièrement optimiste.
13:12 Donc on ne pense pas qu'il va y avoir de catastrophes sur les marchés.
13:16 Mais en revanche, on pense que dans les prochaines semaines,
13:18 ça va être compliqué quand même pour avoir un vrai redémarrage des indices,
13:24 avec un contexte où les appels de "pre-close",
13:30 c'est-à-dire toutes les conversations qu'on peut avoir avec les entreprises
13:34 un mois avant leur publication, c'est-à-dire avant qu'elles rentrent dans leur période de blackout,
13:39 globalement, le message commence à être un peu plus prudent.
13:41 Donc ce qu'on craignait ou ce qu'on craint sur l'optimisme des anticipations 2024
13:48 semble commencer à se traduire par des discours un peu plus prudents
13:54 de la part de beaucoup d'entreprises dans beaucoup de secteurs
13:56 à l'approche des publications du troisième résultat.
13:59 Pour éviter de se voir et d'être durement sanctionné,
14:01 il vaut mieux effectivement prévenir que...
14:03 Voilà. Donc pour l'instant, sur la partie action, on reste relativement prudent,
14:07 alors qu'on est plus optimiste sur la partie obligatoire.
14:12 Parfait. Damien, merci d'être venu nous partager vos connaissances, votre expertise.
14:18 Merci à tous de nous avoir suivis.
14:21 Je vous donne rendez-vous très prochainement sur Investisseur TV
14:25 avec un autre expert des marchés de la finance.
14:28 [Musique]
14:38 [Silence]