Lundi 16 octobre 2023, SMART BOURSE reçoit Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain)
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00:00 Le dernier quart d'heure de Smartboard chaque lundi, c'est le quart d'heure américain
00:08 et nous retrouvons en direct à 17h45 ou en replay bien sûr sur bsmart.fr notre correspondant
00:14 américain Pierre-Yves Dugas qui est avec nous en visioconférence.
00:17 Bonjour Pierre-Yves, merci beaucoup d'être avec nous comme chaque début de semaine pour
00:21 revenir sur quelques-uns des faits marquants de l'actualité américaine.
00:26 L'université du Michigan publie régulièrement chaque mois une enquête qui est une référence
00:33 historique pour mesurer le moral des ménages et du consommateur américain.
00:38 La dernière version de cette enquête a été publiée vendredi pour le mois d'octobre,
00:43 en l'occurrence Pierre-Yves, qui montre que la confiance des consommateurs américains
00:48 depuis plusieurs mois d'affilée ne cesse de baisser désormais.
00:52 Effectivement, alors c'est l'indice préliminaire, on a un indice préliminaire qui tombe au
00:58 milieu du mois et puis ensuite un petit peu avant la fin du mois on a l'indice définitif.
01:03 C'est très intéressant de voir que dans une économie américaine de plein emploi
01:07 où l'inflation a beaucoup baissé tout de même depuis plusieurs mois, où on a l'impression
01:17 que l'emploi est donc très très solide et que les entreprises sont toujours désespérées
01:23 à la recherche d'emploi, où l'essence a baissé, parce que depuis un mois l'essence
01:29 baisse aux Etats-Unis, eh bien malgré cela, l'indice de la confiance des Américains
01:34 a nettement chuté mi-octobre, on est retombé au plus bas depuis cinq mois et c'est le
01:42 quatrième mois consécutif de recul.
01:45 Donc en soi ce mouvement est intéressant, mais il est d'autant plus intéressant qu'il
01:49 est paradoxal parce que par ailleurs les circonstances économiques ne semblent pas conformes à
01:55 une telle rechute du moral des Américains.
01:58 Il se passe quelque chose, alors méfions-nous de la volatilité de l'indice de la confiance
02:06 des Américains, cette confiance est affectée par de multiples facteurs, à noter toutefois
02:11 que cette chute observée mi-octobre est antérieure à la crise du Proche-Orient, antérieure
02:19 à la prise d'otages américains au Proche-Orient et que les choses peuvent continuer donc de
02:26 se dégrader, ne serait-ce que de ce point de vue émotionnel.
02:29 Un autre indice intéressant, nous parlions à l'instant de l'IRA et de la politique
02:36 de Joe Biden, mais la popularité de Joe Biden et en dépit de toute la campagne qu'il
02:41 mène sur les Biden et l'Omex, il est autour de 39% de l'indice de popularité et son
02:46 impopularité est à 54%, donc il se passe quelque chose.
02:52 Qu'est-ce que ça peut être ? Alors il y a plusieurs pistes évidemment, je pense qu'une
02:56 des pistes les plus évidentes c'est qu'on sort de 30 ans d'inflation très faible avec
03:02 les Américains, on n'a pas l'air de dire que ça va mieux, à part vous et moi et quelques
03:07 autres professionnels de l'information économique, quand on veut savoir s'il y a de l'inflation
03:12 on regarde les chiffres, l'Américain moyen quand il veut savoir s'il y a de l'inflation
03:16 il regarde les prix des choses qu'il achète tous les jours.
03:18 Ces prix-là parfois baissent un petit peu, c'est le cas de certains produits alimentaires
03:23 depuis quelques mois, mais ils sont très très loin de retrouver leur niveau antérieur
03:27 à la pandémie et les Américains s'étaient habitués à payer le lait autour de 3,50$
03:33 par exemple un gallon c'est 3,38 litres et le lait aujourd'hui il est encore à 4,40$.
03:39 L'essence a baissé depuis un mois c'est vrai, mais l'essence reste 30 à 40% au-dessus
03:45 de ce qu'elle était avant la pandémie.
03:48 Quand on va au restaurant on se rend compte que les prix des menus ont considérablement
03:54 augmenté, en gros pour faire simple, pour parler de la restauration rapide, on a un
04:02 burger aujourd'hui au prix où on avait le burger, les frites et la boisson.
04:06 Les Américains se souviennent de ça, c'est imprimé dans leur tête, leurs habitudes
04:13 de consommation ne se sont pas adaptées encore à ces nouvelles circonstances, d'autant
04:20 que, n'oublions pas le plus important, l'ajustement du pouvoir d'achat n'a pas été suffisant
04:26 pour une grande partie des Américains.
04:28 Donc je pense que nous avons là quelques pistes qui peuvent permettre d'expliquer
04:33 ce paradoxe qui n'est pas satisfaisant.
04:36 Un dernier point, je crois qu'il faut mentionner et qui ne doit pas faire plaisir à la réserve
04:41 fédérale, dans le cadre de cette enquête bimensuelle relative à la confiance des
04:47 Américains, on leur pose des questions sur leurs anticipations inflationnistes.
04:51 Eh bien oui, les anticipations inflationnistes des Américains, mi-octobre, se détériorent,
04:57 c'est-à-dire que les Américains anticipent une inflation qui va progresser et le changement
05:02 est assez net par rapport à la mi-septembre, puisque maintenant ils tablent sur 3,8% d'inflation
05:08 dans un an, contre 3,2 il y a un mois.
05:11 Il se passe quelque chose qui n'est pas bon.
05:14 À suivre, effectivement, alors qu'on est à 13 mois maintenant de l'élection présidentielle
05:22 américaine et sur le plan politique, qu'il n'y a toujours pas de speaker à la chambre
05:28 des représentants au sein du Congrès, ça commence à devenir un peu inquiétant et
05:36 peut-être même d'ailleurs que les marchés pourraient à un moment se crisper quand même
05:40 sur cette situation de vide politique au sein de la chambre des représentants, au sein du Congrès.
05:48 Depuis le 3 octobre, il n'y a plus de speaker, une minorité de huit frondeurs trumpistes
05:55 se sont alliés à la totalité des élus démocrates de la chambre des représentants
06:00 pour démettre Kevin McCarthy et depuis on ne trouve pas de remplaçant à Kevin McCarthy.
06:06 Kevin McCarthy a dit qu'il n'était pas candidat à sa propre succession, encore qu'il a laissé
06:10 la porte ouverte et puis tout à l'heure, je l'écoutais, il a annoncé qu'il allait
06:15 voter pour Jim Jordan. Alors Jim Jordan est celui qui va tenter aujourd'hui peut-être
06:20 dans les prochaines heures de se faire élire par l'ensemble de la chambre. Le problème
06:25 c'est que Jim Jordan, il lui faut 217 voix pour être élu speaker et il n'est pas certain
06:31 d'avoir la totalité des voix de son propre camp. Rappelons que les démocrates ont 212
06:40 voix, 212 sièges à la chambre des représentants, les républicains en ont 221. A 217, il faut
06:51 absolument faire le plein et il n'est pas certain que Jim Jordan qui a été adoubé
06:56 par Donald Trump et qui a supplanté l'autre candidat dont nous parlions la semaine dernière,
07:03 Steve Scalise, puisse réussir son coup de devenir speaker. Alors c'est très grave
07:07 pourquoi ? Parce que la semaine dernière on en plaisantait, ça faisait désordre,
07:13 mais là on a une crise majeure au Proche-Orient et le congrès est pour moitié paralysé.
07:19 En outre le Sénat revient en session aujourd'hui et la chambre est paralysée parce que sans
07:25 speaker on n'a pas d'ordre du jour. Donc il faut absolument que les républicains fassent
07:30 quelque chose et si Steve Scalise ne sera pas speaker et si Jim Jordan rate son coup,
07:38 à ce moment-là qu'est-ce qui peut se passer ? Ou bien il y a un autre candidat
07:42 républicain qui arrive à dégager un consensus au sein de la conférence républicaine ou
07:47 alors on rentre dans des tractations qui se sont engagées assez discrètement au cours
07:53 des dernières heures à Washington pour faire un marché avec les démocrates. C'est-à-dire
07:59 que les démocrates qui à 100% ont voté contre tout candidat républicain seraient
08:04 prêts à lâcher quelques voix, il ne faudrait que quatre voix démocrates pour faire basculer
08:09 les choses, de manière à obtenir du futur speaker républicain quelques concessions
08:14 notamment sur l'ordre du jour et le type de loi qui serait soumise à l'ensemble du
08:20 floor de l'hémicycle de la chambre des représentants. Naturellement ça n'est pas du goût des
08:28 trumpistes qui pensent avoir la main pour le moment.
08:31 Intéressant parce que alors évidemment si les États-Unis et le Trésor américain arrivent
08:36 à vendre leurs dettes sans problème, on voit quand même sur certaines adjudications,
08:40 on peut faire le lien directement avec la situation de crise politique qui est quand
08:44 même un facteur de plus en plus mis en avant pour expliquer la prime de terme ou la prime
08:50 de risque qu'on a aujourd'hui sur les obligations américaines du Trésor, sur des adjudications
08:56 qu'on a vu la semaine dernière comme le 30 ans par exemple, Pierre-Yves, encore une
09:01 fois il y a de la demande, il y a des investisseurs américains et globaux pour acheter les papiers
09:06 de dette américaine mais on demande quelques bips supplémentaires, on demande un peu plus
09:13 que la rémunération de marché actuel. Il y a bien quand même l'idée qu'il y a une
09:18 prime de risque qui s'installe, qui reste marginale bien sûr mais qui est en train
09:23 de s'installer quand même dans ces marchés obligataires américains.
09:26 Alors c'est une chose de dire qu'on a une forte polarisation de la vie politique à
09:31 Washington et qu'elle paralyse le Congrès, c'en est une autre de dire que le Congrès
09:37 ne peut pas du tout fonctionner parce qu'il n'y a pas de speaker à la Chambre. Dans
09:41 40 jours, le gouvernement fédéral américain n'a plus de sous et on se retrouve en situation
09:47 de shutdown. Vous imaginez qu'après le traumatisme des 15 derniers jours, quel que soit ce speaker
09:53 qui va sortir miraculeusement de la conférence républicaine ou d'un deal avec les démocrates,
09:59 sera-t-il capable de faire avaler des compromis à la frange droite du parti républicain
10:08 pour permettre de financer, ne serait-ce que pour quelques mois de plus, le gouvernement
10:12 fédéral ? Les chances d'un shutdown le 17 novembre ont encore augmenté au cours
10:17 des derniers jours et c'est certainement un des éléments de dysfonctionnement quasi
10:23 permanent maintenant qui s'est installé à Washington, qui pèse sur une partie du
10:28 pool d'investisseurs dans les titres du Trésor.
10:31 Merci beaucoup Pierre-Yves, merci d'être avec nous chaque semaine, le lundi en l'occurrence,
10:37 pour débriefer ensemble l'actualité américaine. Pierre-Yves Dugas, notre correspondant américain
10:41 qui était en visioconférence dans ce dernier quart d'heure de Smartbours ce soir, quart
10:46 d'heure que vous retrouvez bien sûr comme le reste de nos émissions en replay sur Bismarck.fr
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