"Je suis une lointaine héritière de Gisèle Halimi". Samia Maktouf au micro de Judith Beller.

  • l’année dernière
"Destins de Femmes"
Samia Maktouf, avocate, notamment des familles de victimes du Bataclan.

Une émission de Judith Beller.


"Destins de Femmes" nous raconte les parcours des femmes extraordinaires qui tissent le lien de notre République. Nous explorons des thèmes universels tels que la lutte pour l’Egalité des genres, la liberté d’expression, la diversité culturelle, le droit à disposer de son corps. Emission tirée du livre de Valérie Perez-Ennouchi, "Destins de Femmes", sorti chez Ramsay, prix Edgard Faure 2021.

Une émission de Judith Beller.

Merci au Groupe Connect Travail Temporaire !

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Transcription
00:00 Le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
00:03 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout
00:07 en France.
00:08 Le groupe Connect présente Sud Radio, Destin de Femme, Judith Beller.
00:14 Bienvenue à toutes et à tous dans Destin de Femme sur Sud Radio.
00:17 Comme tous les samedis à 14h, vous allez découvrir aujourd'hui le destin d'une femme
00:20 française avec un destin extraordinaire pour que le combat pour le droit des femmes devienne
00:25 une cause commune.
00:26 Tout cela est inspiré, vous le savez, par le livre même titre de Valérie Pérez-Hénouchi
00:29 sorti chez Ramsey, Destin de Femme.
00:32 Aujourd'hui, nous allons donc découvrir ensemble le destin de l'avocate engagée Samia Maktouf.
00:36 Parmi vos clients, Samia Maktouf compte notamment les victimes du Bataclan, on va en parler,
00:40 mais vous êtes aussi présidente de l'association des avocats franco-tunisiens qui organise
00:44 la première édition du prix Giselle Alimi le 16 novembre prochain à 18h30.
00:48 Attention à la cour d'appel de Paris.
00:50 Un sacré destin que vous vous façonnez, c'est une évidence.
00:52 Sonia Maktouf, bienvenue sur Sud Radio.
00:54 Merci de votre invitation.
00:55 Avec plaisir.
00:57 Sud Radio, Destin de Femme, Judith Beller.
01:00 Samia Maktouf, pour commencer, les quatre questions que je pose à toutes les invitées
01:04 de Destin de Femme, vous êtes prête ?
01:05 Oui.
01:06 Alors, quel destin de quelle femme vous inspire le plus ?
01:09 Est-ce que j'ai le droit d'en citer plusieurs ?
01:10 Je pense que j'ai la réponse.
01:11 Allez-y.
01:12 Je vais commencer par Giselle Alimi.
01:13 Oui, bien sûr.
01:14 Je me considère une lointaine héritière de Giselle Alimi et je me devais…
01:17 Pourquoi lointaine ?
01:18 Parce qu'elle est franco-tunisienne, avocate.
01:19 Oui, mais vous n'êtes pas lointaine.
01:20 Un peu de moyen.
01:21 Mais en tout cas, héritière de Giselle Alimi, née en Tunisie, grandie en Tunisie, ayant
01:30 eu son baccalauréat et prêté serment d'abord, ce qu'on a tendance à ne pas le savoir,
01:37 elle a prêté serment au Barou de Tunisie avant de venir et fait même son stage de
01:43 droit d'avocat à Tunis même, avant de venir en France, à Paris et d'exercer cette
01:51 extraordinaire profession qui est l'avocature.
01:55 Et alors, c'est la seule femme dont vous aviez envie de nous parler ?
01:57 Je pense que c'est pas le cas.
01:58 Non, j'en ai malheureusement beaucoup.
01:59 J'espère que mon temps me permettra.
02:00 Allez, une autre.
02:01 Je vais essayer deux.
02:02 Deux ?
02:03 Simone Veil.
02:04 Oui.
02:05 Parce qu'avec Giselle Alimi, elles ont fait beaucoup pour nous.
02:09 Beaucoup pour nous, y compris l'autorisation d'avorter et bien d'autres lois.
02:17 Elles ont eu toutes les deux le courage.
02:19 Simone Veil, une rescapée de la Shoah, qui a su rester debout, avancer et gagner des
02:28 droits pour les autres femmes et les autres humains d'une manière générale.
02:33 Et aux côtés de Giselle Alimi, elle a mis en pratique ce combat que Giselle Alimi a
02:41 fait dans les tribunes et dans les prétoires.
02:44 Elle l'a porté sur la scène politique.
02:47 Il y a le destin d'une autre femme que je voudrais citer.
02:49 Allez, une dernière.
02:50 C'est très important.
02:51 C'est Ons Jeber.
02:52 Ons Jeber, c'est cette femme tunisienne, africaine, arabe, qui a su faire parler d'elle.
03:01 Elle a réussi avec courage et détermination à gagner différentes coupes.
03:10 Elle est arrivée à la demi-finale de Roland-Garros, à la finale de Wimbledon.
03:15 Et c'est très important, j'en parle parce que c'est la première femme arabe, musulmane,
03:21 africaine qui a réussi à se hisser aussi haut.
03:25 Et c'est pour moi et c'est mon combat.
03:27 C'est un exemple.
03:28 C'est cet exemple-là qu'il faudrait donner aux jeunes et non pas à celles qui ont Tunisie.
03:34 Parce que je parle de la Tunisie parce que j'en viens et parce que c'est le pays qui
03:37 a le plus donné d'enfants pour renforcer les rangs de l'organisation djihadiste Daech.
03:45 Il y a pas mal de Français aussi.
03:48 En tout cas, c'est bien que quelqu'un comme Ons Jeber donne envie aux filles de jouer
03:55 au sport et de donner un exemple pour qu'elles soient libres de leur mouvement et d'être
04:02 un exemple pour les autres.
04:03 - Bien sûr.
04:04 Quel a été votre plus grand succès, Samia Maktouf ?
04:08 - De pouvoir exercer ma profession que j'aime.
04:15 - C'était un combat ?
04:18 - C'était un combat, non pas pour y arriver parce que depuis l'âge de 7 ans, je voulais
04:23 être avocate.
04:25 - Depuis l'âge de 7 ans ?
04:27 - Voilà.
04:28 Mais peut-être pour être précise en répondant à votre question, parce que malheureusement
04:32 eu égard au sujet et au dossier sensible que j'ai été amenée et que je suis amenée
04:39 à défendre, il n'y a pas beaucoup de joie.
04:42 Mais il en arrive de temps en temps.
04:44 Et je voudrais citer le cas d'une jeune fille française qui a été happée par les griffes
04:51 d'un jeune djihadiste, elle est tombée enceinte et qui l'a abandonnée.
04:56 Et une fois qu'elle a accouché, il est venu reconnaître l'enfant et pour l'emmener en
05:02 Syrie en se prévalant de son droit d'être père.
05:06 Et j'ai réussi devant la cour d'appel de Versailles parce que les magistrats ont été
05:12 sensibles et à l'écoute et qui ont eu le courage de prendre cette décision qui est
05:18 celle d'empêcher un homme de voir et de bénéficier du droit de visite.
05:24 Parce qu'on a l'impression que c'est un droit sacré.
05:26 Ce n'est pas un droit sacré.
05:28 Il faut mériter d'être mère et d'être père aussi.
05:32 Et donc c'était une satisfaction disons.
05:35 Votre plus grande déception, Samia ?
05:41 Bah écoutez, c'est malheureusement de voir qu'aujourd'hui encore, en 2023, des jeunes
05:51 femmes continuent à mourir sous les coups de leurs bourreaux.
05:56 De leurs mafies.
05:57 Une des trois jours en France.
06:00 Malheureusement, le droit avance certes.
06:03 Il y a une conscience à la fois politique et dans la rue.
06:09 Mais je pense qu'on est encore loin, très très loin de cette prise de conscience unanime.
06:16 Parce qu'on a l'impression que c'est normal.
06:19 C'est tout à fait normal.
06:20 C'est banalisé quoi.
06:22 C'est banalisé.
06:23 Et ça, ça me fait mal au cœur.
06:24 Bon, un peu de bome au cœur.
06:25 Quelle est votre plus grande joie, Samia Maktouf ?
06:28 Bah écoutez, en ce moment, c'est d'organiser le prix littéraire Gisèle Halimi.
06:33 On va y venir.
06:34 Le prix littéraire Gisèle Halimi.
06:37 J'en suis heureuse parce que je trouve que c'est très important de donner aux jeunes.
06:45 Je parlais tout à l'heure d'exemples.
06:48 Je pense que c'est très important que dans les écoles, que les jeunes cansoeurs et canfrères
06:55 puissent suivre le chemin tracé par Gisèle Halimi.
06:59 Oui, parce qu'en fait, l'ouvrage qui gagnera ce prix, il évoquera forcément l'émancipation
07:05 et la liberté des femmes.
07:06 Mais aussi l'égalité et la fraternité entre les hommes et les femmes.
07:08 C'est important, ça.
07:09 Oui, mais des droits humains.
07:11 Je l'ai bien précisé parce que je considère que être du côté des femmes, plaider la
07:17 cause des femmes ne consiste pas à s'opposer à l'homme.
07:21 L'homme est partie prenante.
07:24 Et ce que disait Gisèle Halimi, c'est son mari qui était le premier à l'encourager.
07:28 Et opposer les genres n'est pas une solution.
07:33 Vous savez, c'est pour ça qu'on a lancé Destins de femmes.
07:35 C'est pour que le combat pour le droit des femmes devienne une cause commune.
07:38 D'ailleurs, le prix littéraire Gisèle Halimi pourrait être emporté par une femme ou un
07:42 homme.
07:43 Et ceux qui ont concouru sont des femmes et des hommes.
07:46 Les membres du jury sont des femmes et des hommes.
07:49 La première édition de ce prix, Gisèle Halimi, c'est donc le 16 novembre prochain à 18h30
07:53 à la cour d'appel de Paris.
07:55 Ce sera un prix qui sera remis par Madame Julie Couturier qui va tenir de l'ordre des
07:58 avocats au barreau de Paris en présence évidemment du jury.
08:01 Donc on parlait de Gisèle Halimi, avocate du droit à l'avortement, avocate comme vous
08:06 aussi, puis avocate aussi représentant des minorités, une femme, une juive, une franco-tunisienne,
08:13 c'est pas n'importe quoi tout ça.
08:14 C'est un peu logique que vous l'ayez choisie pour représenter ce prix féministe finalement.
08:19 Je me devais de lui consacrer un prix littéraire.
08:24 Gisèle Halimi, en fait, son œuvre ne se limite pas au droit à ce qu'elle a fait.
08:30 À ce qu'elle a fait pour les femmes.
08:33 Elle en a fait beaucoup plus.
08:34 Mais il fallait bien choisir un axe.
08:36 Et l'axe que j'ai choisi qui sera celui-là, c'est celui de l'émancipation des femmes.
08:42 Alors justement, comme je disais à l'instant, vous l'avez connue Gisèle Halimi.
08:45 Elle avait participé à un numéro spécial que vous avez dirigé de la Gazette du Palais
08:49 de l'ordre des avocats au barreau de Paris en 98 avec un titre sur la condition des femmes
08:54 en Tunisie.
08:55 Tunisie des shéhérazades devenues citoyennes.
08:56 Comme je disais tout à l'heure, c'est ce que vous recensez aussi dans la manière
09:01 dont vous la présentez.
09:02 Elle a subi directement quatre discriminations, Gisèle Halimi.
09:05 Elle était femme, elle était juive, elle était de condition modeste.
09:08 Et puis à l'origine aussi, elle avait connu la colonisation en Tunisie.
09:12 Et tout ça, c'est ce qui a fait d'elle ce qu'elle a été aussi, qui a défini
09:15 ses combats et en tout cas ses combats prioritaires.
09:18 C'est une histoire très proche de la vôtre en fait.
09:20 Ça serait prétentieux de considérer qu'elle est très proche de la mienne parce que Gisèle
09:25 Halimi a mené un combat, bras le corps.
09:28 Elle s'est consacrée, elle a consacré sa vie à ce combat.
09:32 Et ça serait prétentieux de m'appeler.
09:33 - Est-ce pas du positionnement ?
09:34 - Oui, du positionnement.
09:35 Je suis dans son sillage.
09:36 - Et de l'histoire peut-être aussi.
09:37 - Je suis dans son sillage.
09:39 En ce qui me concerne, oui, je suis fille unique avec cinq garçons.
09:43 Donc oui, il fallait faire sa place.
09:48 Je dis toujours, moi j'ai jamais joué à la poupée.
09:51 J'ai été obligée de jouer avec mes frères parce qu'autrement on est exclue.
09:56 Mais pour autant, je voudrais insister sur le fait que cela ne nous enlève pas notre
10:01 féminité.
10:02 - Encore une fois, ça l'affirme non ?
10:03 - Ça l'affirme, mais je veux dire, être féministe n'est pas...
10:07 - N'est pas ne pas être féminine.
10:09 - N'est pas ne pas être féminine.
10:11 Donc pas du tout.
10:12 - Vous envoyez un petit pic à des femmes qu'on ne nommera pas aujourd'hui ?
10:15 - Je n'envoie de pic à personne, mais moi mon discours s'adresse aux jeunes.
10:19 - D'accord.
10:20 Alors comme Samia, vous nous avez dit tout à l'heure que vous vouliez être, on va revenir
10:23 dessus un petit peu, deux secondes, depuis vos sept ans, vous vouliez être avocate.
10:26 Comment vous avez deviné que vous vouliez être avocate ? Qu'est-ce qui vous a tout
10:29 d'un coup révélé ?
10:30 - C'est quelque chose qui s'impose à vous.
10:31 Je ne vous dis pas ce que j'ai envie d'être.
10:33 Je portais haut la parole.
10:35 J'aime beaucoup le verbe.
10:36 J'aime être aux côtés des personnes qui n'osent pas, qui ne s'avancent pas, même
10:44 s'ils sont dans leur droit.
10:45 Je me suis érigée en quelqu'un qui était là pour les accompagner, pour faire valoir
10:52 un droit au fait.
10:53 - Donc faire valoir haut et fin la parole de ceux qu'on n'entend pas aussi.
10:57 - Tout à fait.
10:58 Et en cela, une fois de plus, à Simon Leveille, à Gisèle Halimi, j'adresse mes respects
11:06 parce que c'est des femmes qui, à l'époque, et ce n'était pas facile, ont su trouver
11:12 leur place et dire sans être intimidées, sans être découragées, porter leur parole.
11:19 Vous savez parler dans une assemblée face à une assemblée majoritairement masculine
11:24 et leur dire "oui, si je n'assume pas, si je n'ai pas envie de garder ce bébé, il
11:30 faudrait que je puisse disposer de mon corps et d'avouter".
11:33 C'est excellent.
11:34 Je me souviens d'une des plaidoiries de Gisèle Halimi où il expliquait ce qu'est le corps
11:40 d'une femme, ce qu'est un vagin qui doit porter cet enfant qui va remplir l'humanité,
11:47 qu'il va falloir accueillir bien pour qu'il soit bien parce que c'est la moitié de l'humanité.
11:52 - Bravo pour ce que vous faites, Samia Maktouf.
11:55 Vous restez avec nous, évidemment.
11:56 Vous le savez, vous, chers auditeurs, CEDRADIO, c'est votre radio destin de femmes aujourd'hui.
12:00 C'est avec l'avocate, vous l'auriez compris, Samia Maktouf.
12:03 Vous restez avec nous, on revient tout de suite.
12:05 Le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
12:08 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout
12:12 en France.
12:13 Le groupe Connect présente...
12:15 - CEDRADIO, destin de femmes, Judith Beller.
12:18 - Si vous nous rejoignez, bienvenue les copines et les copains dans "Destin de femmes" sur
12:22 CEDRADIO, c'est l'émission du féminisme positif consacré aux femmes extraordinaires
12:26 qui font notre République française.
12:28 Aujourd'hui, pour l'avocate Samia Maktouf, présidente de l'association des avocats tunisiens,
12:33 il est temps de nous raconter un peu son destin et puis notamment, évidemment, son passage,
12:38 pas que son passage, son incarnation en tant qu'avocate des victimes du Bataclan.
12:42 Alors justement, Samia Maktouf, sur ce dernier sujet, vous êtes donc l'avocate des victimes
12:48 du Bataclan.
12:49 La représentation de victime d'attaques terroristes quand on est une femme, et de surcroît une
12:53 femme tunisienne, ça prend un certain sens.
12:55 Éclairez-nous là-dessus, s'il vous plaît.
12:57 - D'abord, je suis, si vous permettez, je précise, je suis l'avocate de plusieurs victimes
13:02 du terrorisme depuis l'attentat de Mohamed Meira en 2012.
13:05 J'étais l'avocate de la mère du militaire français Ibn Ziyad qui a été tuée.
13:10 J'ai été également l'avocate de plusieurs autres victimes.
13:16 Et on n'est pas l'avocate de victimes d'attentats terroristes comme on l'est de victimes d'accidents
13:23 de la route ou de femmes même violentées.
13:27 C'est un acte très particulier et on se doit d'être aux côtés de ces victimes parce
13:33 que c'est la France toute entière qui a été attaquée.
13:36 Et c'est l'objectif des terroristes, c'est de mettre à mal ces personnes, d'ailleurs,
13:47 peu importe, puisqu'il y a des victimes de toute religion, de toute nationalité, que
13:52 ce soit au Pataclan, à l'attentat de Nice ou...
13:57 - Ils sont tous victimes du terrorisme islamiste.
13:59 - Du terrorisme islamiste qui tente à mettre à mal la République et les institutions de
14:05 la République, voulant par ailleurs profiter de ce qu'il y a de bien dans l'état de droit,
14:12 de la démocratie, c'est le fait de bénéficier de leurs droits.
14:15 Dans l'acte, et je suis la première à me féliciter, lorsqu'un supposé terroriste
14:23 ou criminel est jugé, il bénéficie jusqu'au prononcé du verdict de l'intégralité de
14:29 ses droits de défense, d'être représenté, et encore mieux s'il est bien représenté
14:35 par un autre confrère.
14:36 Toute personne devant faire face à des charges criminelles ou terroristes, c'est tout à
14:44 fait normal qu'ils puissent bénéficier des droits d'un avocat.
14:46 - Qu'est-ce que vous en pensez du coup des confrères qui sont avocats d'un terroriste
14:49 par exemple ? Vous pourriez faire ça ?
14:50 - Je les respecte.
14:51 - Vous pourriez faire ça ?
14:52 - Je les respecte.
14:53 Vous savez, la question m'a été posée au moment, au début de l'ouverture du procès
14:57 des attentats du 13 novembre, et j'ai répondu, je vais faire la même réponse.
15:00 Oui, on m'a demandé si j'aurais pu être l'avocate de Salah Abdeslam.
15:04 J'ai dit oui, bien sûr, à condition qu'aucun autre confrère ou canseur n'était pas prédisposé.
15:13 N'accepter sa défense, parce qu'on ne peut pas.
15:17 Eichmann a bien bénéficié d'une des meilleures des défenses.
15:21 Et c'est ce qui rend la justice...
15:23 - Faut peut-être remémorer aux auditeurs qui était Eichmann quand même, le grand de
15:26 nazi.
15:27 - La nazi qui a exécuté, c'était sous ses ordres, que plusieurs juifs ont été exterminés,
15:34 déportés et tués.
15:35 Et donc il a bénéficié d'un état de droit, d'un procès équitable et bénéficié des
15:45 diligences et de la présence d'un avocat commis d'office.
15:49 - Samia Maktouf, j'ai déjà reçu Zina Bel Razoui et quand je lui ai demandé ce qu'elle
15:52 souhaitait aux terroristes en question et aux islamistes qui lui veulent tant de mal,
15:55 parce qu'elle a plusieurs fatwas sur la tête, elle me répondait, je leur souhaite d'aller
15:58 boire un coup et d'aller se détendre un peu et d'être aimée.
16:01 Qu'est-ce que vous en pensez de cette réponse ?
16:02 - Avant d'être aimée et d'aller boire un coup, il faudrait préserver notre société.
16:06 Et si on parle du même procès où elle était présente, c'est des personnes qui n'ont qu'un
16:11 seul but dans la vie, c'est d'exterminer tous ceux qui ne pensent pas de la même manière
16:16 qu'eux.
16:17 Donc moi ce que je souhaite c'est de les tenir loin des citoyens, du monde et de garder un
16:25 oeil sur eux et ça c'est très important.
16:27 - Qu'est-ce que c'est le rôle précis d'une avocate de victime dans ce type d'affaires
16:30 Samia ?
16:31 - C'est d'accompagner ces victimes, leur expliquer le droit, leur expliquer comment
16:41 avoir des réponses à leurs questions.
16:43 Parce que vous savez les victimes, contrairement à ce qu'on peut penser, moi je l'ai vu depuis
16:48 le procès Mera en passant par tous les autres procès terroristes où j'ai assisté des
16:52 victimes, ces victimes nous ont donné, lorsque vous savez elles témoignaient à la barre,
17:01 des leçons de courage puisque c'est des victimes qui ne sont pas du tout animées par un sentiment
17:09 de vengeance ni de revanche.
17:10 C'est des personnes qui veulent comprendre comment les êtres chers, le mari, le fils...
17:15 - C'est pour se soigner en fait ?
17:17 - Non c'est pas pour se soigner, moi je refuse qu'on dise que le procès c'est pour se soigner.
17:21 Une thérapie ça se fait dans un cabinet de médecins.
17:24 Le procès c'est pour permettre à ces personnes là de comprendre dans quelles conditions cet
17:29 attentat a pu se dérouler, a-t-on pu l'éviter, qui sont les vrais responsables, directs ou
17:35 indirects, dans quelles conditions.
17:37 Est-ce que les êtres chers sont morts tout de suite ? Est-ce qu'ils ont souffert ? Comment
17:43 la prise en charge a-t-elle été adéquate ? A-t-elle été au niveau de leurs souhaits ?
17:51 Vous savez, toutes les circonstances c'est ça.
17:55 C'est ce que les victimes du terrorisme veulent comprendre.
17:58 Pourquoi, comment et pourquoi le mien ?
18:01 - Alors vous officiez Samia Maktouf aux deux barreaux, en Tunis et Paris.
18:06 Comment est-ce que vous gérez justement les différences culturelles et les attentes liées
18:09 au genre justement dans le contexte professionnel tunisien par rapport au contexte français
18:13 qui est forcément très différent ?
18:14 - Oui il est différent mais les différences culturelles ne constituent pas un obstacle.
18:19 Au contraire c'est un enrichissement, c'est quelque chose qui vous permet de mieux comprendre.
18:25 - Est-ce que quand on est une femme en Tunisie aujourd'hui c'est plus compliqué que quand
18:28 on est un homme au même titre qu'en France ?
18:30 - Vous savez, c'est le mauvais exemple la Tunisie parce que grâce à un homme visionnaire
18:35 qui est Bourguiba, la femme tunisienne depuis 56 années a bénéficié du statut des droits
18:41 des femmes.
18:42 - Donc ça n'empêche pas le machisme et le sexisme si je peux me permettre.
18:44 - Oui, en droit c'est ancré, le droit des femmes est ancré dans la constitution tunisienne.
18:50 D'ailleurs pardonnez-moi de revenir d'un mot sur une de mes déceptions, c'est la décision
18:56 qui a été rendue par la cour fédérale américaine dans la décision d'Obs qui a retiré le
19:04 droit aux femmes d'avouter.
19:07 Ça c'est une grande déception parce que les droits acquis ne sont jamais acquis.
19:11 - C'était Simone de Beauvoir qui disait ça.
19:13 - Il faut vraiment, j'ai dû le lire et c'est resté dans ma mémoire, il faut le garder
19:18 en mémoire.
19:19 - Mais à chaque fois qu'elle écrit il faut bien faire attention à nos droits féminins
19:20 parce qu'ils se sont réattaqués.
19:21 - C'est un exemple, rien n'est acquis et en Tunisie après la révolution on a tenté
19:27 de revenir sur des droits acquis.
19:29 - Je reviens à ma question, comment est-ce qu'il y a le rapport aux femmes dans la loi
19:33 en Tunisie par rapport à en France ?
19:35 - Dans la pratique oui il y a du machisme, oui il y a malheureusement une banalisation
19:42 du mauvais traitement de la femme, oui il y a des femmes battues, oui il y a des femmes
19:46 qui meurent sous les coups de leur bourreau, leur mari.
19:48 Mais par rapport à d'autres législations arabes dans des pays musulmans, ce n'est pas
19:56 la Tunisie qui pose le plus grand problème.
19:59 Moi je suis beaucoup plus inquiète à ce qui se passe et à ce qui s'est passé récemment
20:05 il y a un an jour pour jour pour Marsa, cette femme sportive kurde sunnite qui dans une
20:14 mèche de ses cheveux ont dépassé son foulard, tout ce que le régime iranien n'aime pas,
20:21 elle est morte sous les coups des mollahs, de la police islamique.
20:26 - Alors Tahaatou justement qu'est-ce que vous pensez de ces féministes radicales en
20:32 France qui soutiennent les femmes qui veulent se voiler en disant que c'est leur droit ?
20:35 Quand on voit ce qui se passe en Iran et que nos sœurs meurent pour avoir le droit d'enlever
20:40 ce voile là, est-ce que ce n'est pas un peu inquiétant tout de même ?
20:43 - D'abord dans votre question vous confortez la réponse puisque vous parlez de radicalisme.
20:49 Tout ce qui est radical est contraire au respect le plus élémentaire des droits humains,
20:55 homme ou femme.
20:56 - Donc ce n'est pas un droit de se voiler ?
20:58 - Ce n'est pas un droit.
21:00 Moi je...
21:01 Vous savez je vais vous dire, je sais pas si j'ai le temps de vous dire ce que j'en
21:04 pense, c'est important.
21:05 Écoutez, moi je n'ai aucun problème avec une femme qui décide sciemment, sans contrainte,
21:11 de se voiler.
21:12 C'est sa liberté et je respecte sa liberté.
21:14 En revanche, lorsque vous voyez aujourd'hui des jeunes filles qui portent un uniforme
21:22 islamiste qui se voient le visage, je suis désolée, c'est de la propagande islamiste
21:33 qui est l'expression de leurs bourreaux qui sont derrière.
21:35 Et vous me donnez l'occasion de parler de ce prosélytisme qui ne dit pas son nom et
21:41 je voudrais revenir sur ce que je l'avais écrit et je reviens sur ça, sur le cas d'une
21:49 chanteuse de rap qui n'est autre que Diam's qui, dans une forme de prosélytisme inédit,
21:58 dans le cadre d'un endroit qui n'est pas approprié à cela, c'était le festival de
22:03 Cannes où on lui a déroulé le tapis rouge où elle est venue complètement couverte
22:11 pour dire "voilà comment j'ai retrouvé ma sérénité et comment je me sens bien
22:16 depuis que je me suis convertie".
22:17 Qu'elle se convertisse, je n'ai aucun problème, c'est sa vie.
22:21 Mais quand on est porteur d'exemples et qu'on propage le fondamentalisme, je ne sais
22:30 pas si Diam's est consciente du mal qu'elle fait et je pèse mes mots et je ne veux pas
22:36 aller au-delà mais j'espère que Diam's est consciente du mal qu'elle fait parce
22:40 qu'aujourd'hui il y a des femmes qui sont inspirées d'elle et j'aimerais, parce
22:44 qu'elle a des enfants, j'aimerais qu'elle y pense la prochaine fois qu'elle parlera.
22:48 La prochaine fois qu'elle parlera, qu'elle ouvrira sa bouche, qu'elle pense à ses enfants.
22:52 C'est pas sûr qu'elle ait vu de la radio mais elle vous entend certainement.
22:55 Mais c'est très très grave ce qu'elle a fait.
22:57 C'est extrêmement grave quand on a une résonance auprès de ces jeunes, c'est Hans
23:02 Jaber qu'il faut entendre et pas une femme comme Diam's qui fait de sa voix du prosélytisme.
23:11 Je suis désolée, ça me met en colère parce que c'est grave ce qu'il fait, c'est
23:16 dangereux.
23:17 Votre message il sera passé, Samia Maktouf, merci d'être venue par chez nous pour Destin
23:20 de Femmes.
23:21 Je rappelle tout de même que la première édition du prix Gisèle Halimi, organisée
23:25 par vous-même Samia Maktouf, vous êtes présidente de l'association des avocats franco-tunisiens,
23:30 ça aura lieu le 16 novembre prochain à 18h30 à la cour d'appel de Paris et ça sera
23:34 le prix qui va remettre, qui va mettre à l'honneur un livre qui défend l'égalité
23:38 homme-femme, que ça soit d'un homme ou d'une femme, c'est bien ça ?
23:40 Tout à fait.
23:41 Et bien rendez-vous alors le 16 novembre.
23:43 Et puis nous chers auditeurs, on a rendez-vous samedi prochain à 14h pour un nouveau Destin
23:47 de Femmes évidemment.
23:48 Puis n'oubliez pas, demain c'est excellent, c'est le retour à 19h tous les dimanches
23:51 chers auditeurs, la Coupe du Monde est terminée.
23:53 Le podcast Destin de Femmes et nos autres rendez-vous sont sur sudradio.fr, la chaîne
23:57 YouTube de Sud Radio, Deezer, etc.
24:00 Tout le tintouin, vous le savez bien.
24:01 Merci à Quentin qui réalise pour nous aujourd'hui et bisous les copines et les copains.
24:05 A très vite.
24:06 Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
24:10 Avec le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
24:14 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout
24:18 en France.

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