• le mois dernier
Les Vraies Voix avec Joël Molinario, professeur de théologie à l’Institut catholique de Paris, ancien membre de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église, créateur d’un diplôme universitaire "abus et bientraitance".

Retrouvez Les Vraies Voix avec Cécile de Ménibus et Philippe David du lundi au vendredi de 17h à 20h sur #SudRadio.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry

———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://dai.ly/x8jqxru
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————

☀️ Et pour plus de vidéos des Vraies Voix : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDRB7z8JrbG9LyNtTmhxaU-a

##LE_COUP_DE_PROJECTEUR_DES_VRAIES_VOIX-2024-10-14##

Category

🗞
News
Transcription
00:00Les Vraies Voix Sud Radio, le code projecteur des vraies voix.
00:04Hiver 1954, l'abbé Pierre connaît une soudaine notoriété après son appel à la solidarité pour les sans logis.
00:11Pourtant, de 1955 à 1962, il se tient loin des caméras. Pourquoi ?
00:16Mon père, qu'est-ce que vous êtes devenu ?
00:18Vous le savez, j'ai été très malade.
00:21Voilà, la statue de l'abbé Pierre vient d'être retirée de ce square ici à Alfortville, où il a vécu 7 ans depuis juillet.
00:26Il est visé par des accusations de violences sexuelles commises entre 1950 et 2000.
00:31En juin 1958, alors que le ministre de la fonction publique Edmond Michelet a l'intention de décorer l'abbé Pierre,
00:38le cardinal Feltin, archevêque de Paris, lui écrit une lettre pour l'en dissuader.
00:42À l'heure présente, cette distinction serait fort inopportune,
00:46car l'intéressé est un grand malade, traité en Suisse, dans une clinique psychiatrique.
00:51Il vaut mieux ne pas parler de cet abbé ? C'est très confidentiellement que je vous signale la chose.
00:56Voilà, le square abbé Pierre s'appelle désormais le square Joséphine Baker, ici à Alfortville.
01:02Et donc des évêques redoutant le scandale avec un abbé Pierre qualifié de grand malade mental et échappant à tout contrôle.
01:07Les archives de l'église catholique dévoilent comment, à la fin des années 50,
01:11la hiérarchie épiscopale en France a gardé le silence sur un comportement jugé problématique mais jamais nommé.
01:16Alors parlons vrai, pensez-vous qu'une prise de conscience est possible ?
01:20Comment expliquer que l'omerta ait duré si longtemps ?
01:23Et à cette question, les religions ont-elles une responsabilité face aux dérives de leurs représentants ?
01:27Vous dites oui à 70%, vous voulez réagir ?
01:30Au datant, vos appels au 0826 300 300.
01:33Et notre invité Joël Molinario qui est avec nous, professeur en théologie à l'Institut catholique de Paris,
01:38ancien membre de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l'église et créateur de ce diplôme universitaire,
01:43abus et bien-traitance, merci d'avoir accepté notre invitation.
01:47Philippe Bilger.
01:48La question de Sud Radio porte sur la responsabilité des religions
01:55pour les transgressions graves qui sont commises par le clergé, pour aller très vite, ou les prêtres.
02:03Je ne crois pas que les religions soient responsables des transgressions.
02:11Ma deuxième observation, c'est le fait que je suis effaré,
02:16même si humainement parfois je peux le comprendre,
02:20par les transgressions et les pratiques individuelles qui viennent troubler le fidèle
02:27et qui montrent à quel point un certain nombre de membres du clergé ne respectent pas
02:34l'engagement qu'on s'attend à les voir respecter.
02:37Et dernière observation, la plus grave, c'est le fait que,
02:42alors qu'on savait dans le milieu que l'abbé Pierre était dangereux, déséquilibré,
02:50qu'il était en possibilité d'agresser et même de violer,
02:56on s'est eu, on a validé, on a été lâches,
03:01on a été de nouveau excessivement respectueux du principe de précaution
03:08et en réalité parce qu'il a été résistant et à cause de l'hiver 54.
03:13C'est un scandale.
03:14– C'est pour cela qu'on pose la question sur la responsabilité de ne pas l'avoir écartée à l'avant.
03:19– Oui, c'est la responsabilité, pas des religions, des clergés en tout cas,
03:22bien sûr que c'est une responsabilité, la hiérarchie c'est une responsabilité écrasante.
03:27Après c'est très compliqué, je vois à quel point par exemple le pape actuel
03:31y va petit à petit sur la reconnaissance de la pédophilie
03:34parce qu'il y a l'abbé Pierre avec toute la hiérarchie et tout le clergé qui s'est eu
03:40mais il y a toutes les affaires, on peut recoller ça aussi avec les affaires de pédophilie
03:43donc il y a une omerta et sur l'abbé Pierre,
03:46et je suis d'accord absolument avec Philippe Bigère,
03:48c'est véritablement, on ne peut pas toucher à l'icône en réalité, c'est ça le problème.
03:52Alors il y a la résistance mais c'est surtout hiver 54,
03:55l'abbé Pierre c'est quelqu'un qui enflamme ce pays, l'imaginaire de ce pays,
03:59est-ce qu'on touche à l'imaginaire de ce pays ?
04:01La réponse pour moi, et oui, il faut être capable de faire tomber les statues de leurs piédestals,
04:06parce que c'est un prédateur en fait,
04:08je voyais avec Cécile tout à l'heure, merci de la précision,
04:10parce que je savais qu'il avait violé,
04:12qu'il était accusé en tout cas de viol,
04:14mais j'ignorais en fait que je n'avais pas capté que c'était aussi sur des mineurs,
04:18donc c'est un prédateur en réalité,
04:20c'est un prédateur comme l'évêque de Boston était un prédateur avec les petits garçons,
04:25c'est insupportable, on ne peut pas accepter ça, voilà, c'est tout, jamais, plus jamais.
04:29Une réponse rapide, non, les religions, j'ai bien compris ensuite la précision que vous avez donnée,
04:38mais en tout cas sur la question à l'état brut, non, les religions ne sont pas responsables de ça, certainement pas.
04:44Après, le clergé, là où il y a des clergés, dans les religions où il y a des clergés et toute la hiérarchie,
04:51oui bien sûr, de se taire comme ça sur quelque chose qui dure, mais depuis des années et des années,
04:57moi je suis effaré d'apprendre que ça dure depuis quasiment le début des années 70.
05:02Et je rappelle qu'il est décédé en 2017 et qu'il devait rouvrir 75 ans après.
05:11Oui, et bien voyez-vous, c'est ça qu'il y a d'effarant.
05:15Et c'est là, et je voudrais rajouter une chose qui moi me semble importante aussi,
05:19c'est là où il y a quand même des bénéfices à des mouvements comme MeToo et NousTout etc,
05:26qui sont là pour dénoncer un certain nombre de choses.
05:28Et là, on est passé au travers de tout, de tout, de tout.
05:30Et là, on était face à un icône qui dégringole de sa...
05:34Et bien c'est bien, il ne faut plus lécher les icônes comme ça.
05:36Joël Molinario est avec nous, professeur de théologie à l'Institut Catholique de Paris
05:40et ancien membre de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église.
05:43Merci d'avoir accepté notre invitation.
05:45Merci.
05:47J'imagine que, alors je ne sais pas si vous, vous êtes un peu tombé de l'armoire comme nous,
05:51mais comment tout ça est possible en fait ?
05:56Alors, c'est une vaste question que vous posez.
06:00La première question, est-ce que je suis tombé de l'armoire ?
06:05Non, puisque à la SIAZ, nous avions reçu déjà trois témoignages sur l'abbé Pierre.
06:11Et que plusieurs membres de la SIAZ, des historiens, ont fait cette enquête
06:16qui a révélé la mise à l'écart de l'abbé Pierre dans les années 50.
06:23Et la lettre du cardinal Féutin notamment, tout ça.
06:26Donc ça, nous le savions.
06:30Simplement, la SIAZ n'est pas une juridiction.
06:33Donc nous, ce qu'on encourageait les personnes à dire les choses, les victimes, à se prononcer,
06:43à dire les choses, elles ont mis du temps à le faire.
06:46Il a fallu aussi que la fondation l'abbé Pierre demande un rapport.
06:51Il y a des choses qui se sont faites.
06:52Mais je reviens par exemple à la question que vous m'avez posée tout à l'heure,
06:56un peu provocatrice, est-ce que les gens qui savaient sont coupables ?
07:00Oui, ils sont complices, pas coupables.
07:04Oui, complices.
07:05Mais il ne faut pas oublier que les premières personnes qui savent, ce sont les victimes.
07:12Et donc, il faut aussi s'interroger,
07:14qu'est-ce qui fait qu'il y a une telle ambiance dans l'institution
07:19pour que les victimes ne disent rien pendant 70 ans ?
07:22Oui, c'est fou.
07:23Oui, c'est terrible.
07:24Et qu'elles portent leur souffrance en elles-mêmes sans avoir la possibilité de le dire.
07:30Donc, ça veut dire qu'il y a un environnement qui a permis ça.
07:34Et pour la SIAZ, il y a un double phénomène, l'idole sociale et l'idole ecclésiale.
07:41Dans les deux cas, on avait affaire à un unicorne, comme vous avez dit tout à l'heure.
07:45Et donc, c'est très dur de s'allier et de s'allier.
07:51Jean-Michel Fauvert, je veux réagir.
07:53Oui, je voulais juste vous poser une question.
07:57Vous dites que ce n'était pas de votre rôle de déposer plainte.
08:02Mais si, parce que quand on a connaissance d'une...
08:06Alors, je sais que c'est difficile.
08:07D'une infraction.
08:09D'une infraction, on est en droit de déposer plainte.
08:11Vous n'êtes pas une administration, donc vous n'avez pas un article 40, etc.
08:14Mais on peut le signaler.
08:16Donc, voilà, ça...
08:18Oui, je suis assez étonné de ce que vous dites.
08:20Alors, j'entends bien ce que vous dites.
08:22Je ne vous mets pas, vous, en accusation.
08:24Mais en réalité, combien de gens ont fonctionné comme vous ?
08:26En se disant...
08:27Non, mais ce n'est pas lui, il n'est pas éclairage.
08:28Non, mais pas vous, pas vous, pas vous.
08:29Je veux bien dire.
08:30Mais combien d'organismes ou bien d'associations parallèles
08:34qui étaient peut-être au courant, finalement,
08:37n'ont pas été plus royalistes que le roi
08:39et n'ont pas osé être ceux qui dénoncent ?
08:41En réalité, combien ?
08:42C'est ça aussi.
08:42C'est la chaîne dont vous parliez, Philippe et Cécile, tout à l'heure,
08:46de complicité qui me navre, pas simplement au sein de l'Église.
08:49Vous êtes d'accord ou pas avec ça ?
08:50Oui, bien sûr.
08:52Parce qu'en fait, pour répondre aussi à la question
08:57de la responsabilité des religions,
08:58je crois qu'il y a une responsabilité des religions
09:01dans le fait d'amplifier un phénomène.
09:05Parce que la sacralisation de la personne du prêtre,
09:09notamment, fait que ça amplifie le phénomène de silence.
09:15Et ça, ça brise la possibilité pour les victimes,
09:21notamment qui sont les premières qui doivent parler,
09:25de pouvoir parler.
09:26Parce qu'on ne peut rien dire contre l'abbé Pierre.
09:30C'est trop énorme.
09:31Je fais le parallèle,
09:33avant de donner la parole à Philippe Bilger,
09:34dans les grandes entreprises.
09:35Françoise, on a vu des prédateurs dans des grandes entreprises
09:39et tout le monde se tait pendant l'hôpital.
09:41Oui, je suis d'accord avec vous, c'est l'hôpital maintenant.
09:43J'ai connu, en effet, des institutions
09:46qui préféraient étouffer des affaires scandaleuses
09:52parce qu'elles ne voulaient pas,
09:54croyaient-elles, porter atteinte
09:57à la réputation collective de l'institution.
10:00Vous avez évoqué le lien entre l'univers ecclésial et les victimes.
10:06Est-ce qu'au fond,
10:07ces victimes qui se sont eues trop longtemps,
10:10est-ce qu'elles n'étaient pas inspirées,
10:12paradoxalement,
10:13par le même dessein que les autorités ecclésiales ?
10:17C'est-à-dire, pendant longtemps,
10:19la peur de porter atteinte à une institution
10:22qui, pourtant, leur avait fait très mal.
10:26Et si vous le permettez,
10:29ce que je peux comprendre d'une institution,
10:32selon moi, profane,
10:34j'ai eu du mal à l'admettre d'une institution
10:38qui aurait dû, théoriquement,
10:41porter au plus haut les valeurs de vérité et de transparence.
10:46– Oui, je suis d'accord avec vous,
10:49mais simplement, il y a une chose qui a été
10:53d'abord mise en avant dans l'Église catholique,
10:56c'est là où je connais le mieux,
10:57mais on pourrait étendre ça à d'autres religions,
11:01on est bien d'accord.
11:03Mais c'est la volonté de préserver la réputation de l'institution
11:10qui est installée dans un paysage.
11:13Et du coup, il y a même, dans les années encore 40-50,
11:17même s'il y avait un anti-christianisme
11:20qui commençait à apparaître,
11:21mais il y avait quand même une collusion politique, culturelle.
11:27– C'est vrai ?
11:28– Il ne faut pas trop parler de ces affaires-là.
11:31Et puis, pour, d'une certaine manière, protéger un peu l'Église catholique.
11:36Et si on regarde, par exemple, l'Italie aujourd'hui,
11:39c'est ce qui se passe encore,
11:40parce que l'Église catholique en Italie
11:43est encore très installée dans le paysage social et culturel.
11:47– Bien sûr, je suis d'accord avec ce que vous dites, bien sûr.
11:50C'est-à-dire que l'Italie n'a absolument pas déchristianisé,
11:53mais a décatholicisé.
11:55– Il n'y a pas de séparation des Églises et de l'État en Italie.
11:57– Il n'y en a aucune.
11:58Quand vous arrivez à Rome,
12:00un quart de la ville de Rome appartient au Vatican, par exemple.
12:03Et vous faites même, vous dégrévez…
12:06– Mais moi, j'ai une petite question entre la frontière entre le bien et le mal.
12:09C'est-à-dire que, quand vous avez un adulte qui abuse d'un enfant,
12:13son père ou quelqu'un de sa famille,
12:14la frontière entre le bien et le mal,
12:16quand on est sous le couvert d'une religion
12:19et dans un État comme le clergé,
12:21est-ce que c'est difficile, en tout cas pour ceux qui croient en Dieu,
12:27et en l'occurrence dans cette religion,
12:28de se dire, est-ce que c'est moi qui pense mal,
12:31ou c'est lui qui fait…
12:32– C'est une excellente question.
12:33– C'est ça le truc.
12:35Le poids de la religion ne fait pas justement glisser entre le bien et le mal.
12:38– Tu veux dire le poids de la croyance ?
12:39– Oui, de la croyance.
12:40– C'est intéressant ça.
12:41– C'est une très très bonne question.
12:42– C'est intéressant ce que vous dites, je partage ça.
12:46– Pour une fois.
12:46– On dit souvent, dans nos expériences,
12:52et là c'est la siase avec toutes les victimes que nous avons rencontrées,
12:56que les victimes de pédophilie par exemple,
12:59ou de pédocriminalité, c'est plutôt le terme qu'il faudra employer,
13:03ce sont des personnes qui sont victimes,
13:08qui se sentent coupables avec un agresseur qui se sent innocent.
13:12– C'est le propre du viol.
13:16– Voilà, le propre du viol.
13:19Et donc ce caractère-là de ces crimes,
13:25qui était mis sous le couvert du péché,
13:28mais vous voyez que la catégorie de péché, elle était insuffisante.
13:32– Bien sûr.
13:32– Parce qu'on peut très vite s'accorder,
13:37puisqu'on est dans une religion de miséricorde, bien on va pardonner.
13:42Benoît XVI pose le mot crime pour dire
13:46que la pédocriminalité c'est un crime,
13:49c'est pas seulement un péché, c'est un péché bien sûr.
13:52– Merci mille fois Joël Molinari, professeur de théologie
13:56à l'Institut catholique de Paris,
13:58ancien membre de la commission indépendante sur les abus sexuels
14:01dans l'église et créateur de ce diplôme universitaire,
14:03abus et bien-traitance.
14:04Merci d'avoir accepté notre invitation.
14:07Merci Philippe Hilger.
14:08– Merci à vous, merci à demain.
14:09– Merci Marie-Françoise de Gouin,
14:10merci notre Jean-Michel Fauré.
14:12– Merci, je suis très intéressant.
14:13– Je suis clair à l'idée, la dernière est formidable.
14:15– Merci à lui.
14:17Dans un instant Philippe David avec Stéphane Pelé, Aurélie Gros
14:21sur l'engagement.
14:23– L'engagement, les vraies voix citoyennes
14:25et c'est 100% féminin ce soir,
14:26enfin, sauf Stéphane Pelé et moi évidemment.
14:28– Et encore, et encore.
14:30– Et on se retrouve demain avec Philippe David à partir de 17h.
14:34Merci à notre équipe et passez une très belle soirée.
14:37Salut et à la demain.

Recommandations