L’affaire Jean-Paul Dancoisne _ Petits meurtres entre voisins _ Chroniques Criminelles
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00:00 Crimes passionnels, disparitions inquiétantes ou machinations diaboliques,
00:05 percer les secrets des faits divers les plus marquants
00:08 et plonger au cœur des affaires les plus étonnantes de l'histoire judiciaire.
00:12 La découverte de la vérité ne tient parfois qu'à un fil.
00:16 Bienvenue dans Chroniques Criminelles.
00:19 Dans cet épisode, l'affaire Jean-Paul D'Ancoine.
00:24 Cette terrible histoire commence en juillet 2013 à Amiens dans le quartier Saint-Acholles.
00:31 Chantal Croizet, une retraitée, se volatilise mystérieusement sans laisser de traces.
00:38 Pour ses voisins et pour son fils, c'est l'incompréhension.
00:42 Pourquoi celle qui allait devenir grand-mère aurait-elle disparu ?
00:47 Dans un premier temps, les enquêteurs pensent au suicide.
00:50 Depuis sa retraite, en effet, Chantal supportait mal de rester inactive.
00:55 Mais plusieurs mois après sa disparition, coup de théâtre.
00:59 Des éléments nouveaux relancent l'enquête.
01:03 Et ce que vont découvrir les policiers va bouleverser le quartier tout entier.
01:08 Affaire Jean-Paul D'Ancoine, un podcast inédit de Chroniques Criminelles.
01:16 Printemps 2015, dans le nord de la France.
01:20 Les policiers sont sur les dents.
01:23 Voilà des mois qu'une mère de famille de 55 ans s'est brutalement volatilisée.
01:31 Alors qu'ils examinent sa ligne de téléphone portable, ils font une découverte cruciale.
01:37 Cet indice inespéré les conduit sur la piste d'un mystérieux personnage.
01:44 Un homme que personne n'aurait pu un seul instant soupçonner.
01:49 Les enquêteurs ne le savent pas encore,
01:52 mais ce qu'ils s'apprêtent à découvrir va traumatiser la région toute entière.
01:57 Pour comprendre cette histoire, il faut remonter deux ans auparavant.
02:07 Tout commence à Amiens dans la Somme, une ville de province à l'atmosphère des plus tranquilles.
02:15 Amiens, c'est la capitale de l'ex-Picardie, puisque maintenant ça fait partie de la région des Hauts-de-France.
02:20 Tony Poulain, chroniqueur judiciaire au Courrier Picard.
02:24 C'est, on va dire, une grande petite ville ou une petite grande ville.
02:27 Les gens qui viennent de Lyon ou de Paris disent que c'est un très grand village.
02:31 Tout d'abord le centre historique, bien évidemment, la cathédrale.
02:35 La référence, c'est la cathédrale et les quartiers s'articulent autour de cette cathédrale.
02:40 Mais Sauda Yahyaoui, avocate de la Défense.
02:43 On vit plutôt bien, c'est une ville plutôt verte avec pas mal d'atouts.
02:49 C'est ici, à Amiens, que Chantal Croizet habite depuis toujours.
02:55 Cette femme de 55 ans est née dans cette région de Picardie où réside également toute sa famille.
03:04 Elle est issue d'une famille nombreuse, elle a deux frères et trois sœurs.
03:08 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
03:12 Un fils, Jonathan, et deux petits-enfants. C'est une famille très soudée.
03:16 Chantal Croizet, c'est la troisième d'une fratrie.
03:19 La dimension familiale, mon frère, ma sœur, c'est quelque chose.
03:23 Jérôme Crépin, avocat des Partis Civils.
03:26 La famille, la notion de famille, c'est quelque chose chez les Croizets.
03:30 Chantal vit seule, mais elle est très proche de son fils unique, Jonathan, qui a lui-même deux enfants.
03:38 Philippe, l'un des frères de Chantal, se souvient d'elle avec émotion.
03:44 Elle s'est coiffée quand elle était jeune à la garçonne.
03:48 Elle avait les cheveux comme ça, claqués comme ça.
03:50 Philippe Croizet, frère de Chantal Croizet.
03:54 Elle était courageuse. Elle donnait tout ce qu'elle avait.
04:00 C'était une personne qui voulait se débrouiller seule.
04:06 Chantal Croizet est une personnalité dans son quartier, et pour cause.
04:14 Pendant de nombreuses années, elle y a tenu le Walter, un petit bar à l'ambiance très conviviale.
04:20 Parmi ses amis, Patrick Dufresnois, qui possède lui aussi un café.
04:26 C'était une tenancière de bistrot, comme moi.
04:32 Patrick Dufresnois, ami de Chantal Croizet.
04:36 Et forcément, dans ce métier-là, tout le monde se côtoie et se connaît plus ou moins.
04:40 Et quand on est tenancier de bar, dans un quartier comme ça, on est connu.
04:45 Clémentine Biziot, journaliste police-justice.
04:48 C'est vraiment une figure. Tout le monde connaît Chantal.
04:52 Toutes ses journées passées derrière son bar, à écouter ses clients raconter leur vie,
04:58 grâce à son sourire et à sa gentillesse, Chantal Croizet fait l'unanimité.
05:06 Quelqu'un qui était très apprécié par les gens. Jamais d'étincelle, jamais de problème.
05:12 C'est une petite femme sans histoire.
05:15 Dans cette tradition de région, il y a toujours du café sur le feu pour quelqu'un qui pourrait rentrer.
05:20 Il y a une ouverture vers les autres.
05:23 Pourtant, en ce début d'année 2013, Chantal n'a pas vraiment le moral.
05:33 Voilà quelques mois tout juste qu'elle a dû se résoudre à fermer son bistrot.
05:42 Il y avait des problèmes d'arthrose qui faisaient que c'était devenu insupportable sur la fin.
05:46 Elle est sans emploi à ce moment-là de sa vie, ce qui n'est pas une habitude chez elle.
05:51 Plus avoir de contact avec les gens, quelqu'un qui côtoyait du monde tous les jours, c'est compliqué.
05:57 Donc il faut s'y faire, c'est une autre vie.
06:00 Chantal n'en continue pas moins de côtoyer ses amis et la plupart de ses anciens clients.
06:08 Mais c'est sa famille, et en particulier son fils Jonathan et ses petits-enfants,
06:14 qui l'aident à surmonter ce moment de sa vie.
06:18 Elle avait tout l'amour pour ses petits-enfants.
06:24 Elle n'avait qu'eux à s'occuper.
06:27 C'était une très bonne grand-mère, très gentille.
06:30 C'est une grand-mère courage, une battante, qui donne énormément d'amour à ses petits-enfants, à son fils.
06:36 Dans ce moment difficile de sa vie, elle se raccroche à ça.
06:40 Des frères et sœurs, un fils et ses deux petits-enfants qu'elle aime par-dessus tout.
06:48 Ainsi va le quotidien de Chantal Croizet.
06:52 Une existence paisible, malgré les difficultés qu'elle doit traverser.
06:57 Jusqu'à ce jour fatidique de l'été 2013.
07:03 Amiens, le 29 juillet.
07:06 Il fait très chaud sur le nord de la France.
07:09 La ville est quasiment déserte.
07:12 Jonathan, le fils unique de Chantal, comme chaque semaine, tente de joindre sa maman.
07:18 Puisqu'ils sont très proches, et ils se donnent très régulièrement des nouvelles.
07:22 En plus, il se passe une semaine sans que la mère et le fils aient découvert qu'il avait un fils.
07:28 Généralement, c'est même plus fréquent encore.
07:30 Il est très étonné, il tombe directement sur le répondeur et sa mère ne le rappelle pas.
07:34 Il essaye à plusieurs reprises, sans réponse.
07:38 Voilà une semaine que les appels du fils de Chantal sonnent systématiquement dans le vide.
07:45 Jonathan, qui possède un double des clés de sa maison, veut en avoir le cœur net.
07:51 Il entre dans sa maison, il y a un petit peu de temps,
07:56 il entre dans sa maison, il note rien d'anormal,
07:59 les manteaux sont accrochés dans l'entrée, tous ses vêtements sont dans le placard.
08:04 Il manque quand même certaines choses, il manque son téléphone et ses papiers.
08:08 Sauf que c'est étrange, puisqu'elle ne répond pas à son téléphone, elle n'a avisé personne.
08:14 Difficile pour Jonathan de ne pas céder à l'inquiétude.
08:19 Pas un coup de fil, pas le moindre message de sa mère.
08:23 Et maintenant, sa maison qu'elle semble avoir abandonnée du jour au lendemain.
08:29 Ce n'est pas le genre de Chantal. On est déjà un peu dans les familles du Nord,
08:34 on ne part pas très loin sans donner des nouvelles et sans dire où on est.
08:37 Donc au bout de deux semaines, on est le 12 août 2013,
08:41 Jonathan décide de se rendre directement au commissariat de police d'Amiens
08:44 et il va faire état de la disparition inquiétante de sa mère.
08:47 Pour lui c'est tout à fait anormal que sa mère ne réponde pas au téléphone,
08:51 que son portable bascule directement sur sa messagerie.
08:54 Cette disparition n'est absolument pas normale.
08:57 Chantal Croizet étant majeure, pour les policiers d'Amiens, il n'y a pas de raison de s'affoler.
09:05 Quoi qu'en pense Jonathan, son fils, elle aurait très bien pu partir de son plein gré.
09:12 Il réalise néanmoins une rapide enquête de voisinage.
09:18 Cette enquête ne débouche pas sur grand chose.
09:21 On leur décrit une femme sympathique, sans histoire, qui ne créait pas de nuisance pour ses voisins.
09:27 Les voisins ne vont pas avoir de choses particulières à dire,
09:30 si ce n'est l'une des voisines chez qui Chantal devait passer le 28 juillet 2013.
09:35 Cette voisine va expliquer aux enquêteurs que Chantal n'est jamais venue.
09:38 Du côté du commissariat, voilà le scénario envisagé.
09:45 Chantal aurait tout laissé derrière elle, en n'emportant que ses papiers et son téléphone portable.
09:52 Pour Jonathan comme pour Philippe, son frère, c'est tout simplement inimaginable.
09:58 Ce n'est pas normal qu'elle ait été partie comme ça, disparue.
10:05 Au début on croyait qu'elle avait fait... je ne sais pas, qu'elle avait peut-être rencontré quelqu'un.
10:10 Pour moi, ce n'est pas son habitude d'avoir des copains comme ça.
10:14 Ma soeur était sérieuse.
10:16 On s'est aperçu qu'il y avait un problème.
10:19 Ce qui a bien pu arriver à Chantal, ce n'est pas quelqu'un qui est parti pour les Amériques, comme on dit.
10:25 C'est peut-être la personne dans la rue dans le quartier, dont on se dit, mais il n'a rien pu lui arriver.
10:31 Toujours aucun signe de Chantal.
10:36 Les jours, les semaines, puis les mois passent, et rien ne bouge du côté de la police.
10:43 Pour le fils de Chantal, pour tous les membres de sa famille, c'est l'incompréhension.
10:48 Au bout d'un certain moment, j'ai été au commissariat, j'ai voulu être reçu pour demander l'enquête.
10:57 Philippe Croizet, frère de Chantal Croizet.
11:00 On voyait bien que ça n'avançait pas.
11:04 Le commissariat était dans ce domaine-là, et il n'a pas fait son travail comme il faut.
11:10 Il n'y a pas d'investigation plus que ça qui sont menées à Amiens.
11:15 Les proches de Chantal Croizet le savent, et donc ils ne comprennent pas.
11:18 Ils sont un peu désorientés, et ils sont un peu agacés même à ce moment-là.
11:23 Malgré l'insistance de Philippe, de Jonathan et des autres, la justice refuse toujours d'ordonner une enquête plus poussée.
11:33 Selon le procureur d'Amiens, la théorie de la disparition volontaire demeure à ce stade la plus probable.
11:41 Pour que des investigations soient enclenchées, il faut vraiment que la disparition soit jugée inquiétante.
11:49 On n'a rien qui nous prouve que Chantal Croizet a été victime d'anomie.
11:52 Jérôme Crépin, avocat des partis civils.
11:55 Elle est partie de chez elle.
11:56 On ne déclenche pas forcément tout de suite, je dirais l'artillerie la plus lourde judiciaire
12:01 qui consiste à ouvrir une information judiciaire contre X.
12:05 Parmi les habitants du quartier, les plus folles rumeurs commencent à se propager.
12:12 D'autant que depuis la fermeture de son bar, Chantal traversait une mauvaise passe.
12:18 Son état s'était même aggravé ces derniers mois.
12:23 Et puis surtout, il va y avoir des difficultés financières qui vont arriver à ce moment-là.
12:29 Clémentine Biziot, journaliste police-justice.
12:32 Elle a commencé à prendre des antidépresseurs.
12:35 Et c'est vrai que c'est une période compliquée à ce moment-là pour Chantal Croizet.
12:40 L'hypothèse d'un suicide finit même par se répandre dans le quartier.
12:45 Du côté de sa famille, en revanche, impossible d'imaginer que Chantal ait pu décider d'en finir.
12:55 Ma soeur, elle a pas un tempérament suicidé.
12:59 C'était quelqu'un qui aimait la vie.
13:02 Qui aimait fêter, danser, sortir, voyager, manger... Vous savez ?
13:09 Et puis les petits-enfants... Elle adore ses petits-enfants.
13:13 C'est vraiment tout ce qu'elle a.
13:15 Elle aurait pas pu, ne serait-ce que pour ses petits-enfants, mettre fin à ses jours.
13:20 Alors que les proches de Chantal veulent espérer, pas question non plus pour son fils de baisser les bras.
13:26 Il n'a plus qu'une seule idée en tête.
13:29 Retrouver sa mère, coûte que coûte.
13:32 Tous les matins, quand il part au travail, il passe devant la maison de sa mère.
13:36 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
13:39 Il accroche un mot sur la porte dans lequel il s'adresse à sa mère.
13:44 "Si tu lis ce message, donne-moi des nouvelles, je veux être sûre que tu vas bien."
13:49 Jonathan, il ne lâche pas. Dès qu'il a un moment libre, il cherche sa mère.
13:53 Tony Poulin, chroniqueur judiciaire au Courrier Picard.
13:57 C'est devenu une obsession chez lui.
14:00 Et il n'a aucun doute sur le fait qu'elle n'a pas pu partir volontairement.
14:04 Le jeune homme prend la décision de mener ses propres investigations.
14:11 Il passe le quartier au peigne fin.
14:14 Et se rend même chez Patrick, dans le bar que sa mère fréquentait régulièrement.
14:19 Son fils menait l'enquête de son côté.
14:24 Il était venu chez moi pour me poser quelques questions.
14:26 Si il y a longtemps que j'avais vu sa mère, comment elle était.
14:30 Si elle était bien, si elle était moins bien.
14:34 Patrick Dufresnois, ami de Chantal Croisé.
14:37 Moi, la dernière fois que je l'avais vue, elle était très bien.
14:40 Il n'y avait pas de problème.
14:42 On n'en savait pas plus.
14:44 Pourquoi Chantal a-t-elle disparu si brutalement ?
14:50 Que lui est-il arrivé ?
14:52 Pour Jonathan, pour tous les siens, ces longs mois d'attente virent au supplice.
14:58 On imagine tous les cas possibles.
15:01 Si elle a été enlevée, si elle a été tuée, si elle a été violée.
15:08 On les voit à la télé, tout ce qui se passe.
15:12 Amiens, été 2014.
15:17 Cela fait maintenant une année toute entière que Chantal a disparu.
15:22 Et toujours rien.
15:24 Ne sachant plus quoi faire, c'est encore son fils qui tente le tout pour le tout.
15:30 Jonathan, en désespoir de cause, va se dire
15:33 « Peut-être que la seule et unique solution qui me reste, c'est de faire du bruit et de médiatiser l'affaire. »
15:39 Il décide de contacter la presse locale, en particulier le Courri Picard.
15:42 Et il demande aux journalistes d'écrire des articles pour parler de la disparition de sa mère.
15:47 Sollicité par Jonathan, les journalistes du quotidien régional s'interrogent.
15:54 Que signifie cette mystérieuse disparition ?
16:01 Résultat, un premier article, puis d'autres, sont publiés.
16:06 Et après des mois et des mois de totale inertie judiciaire,
16:11 le fils de Chantal arrache enfin une victoire.
16:15 Jonathan va finir par avoir gain de cause presque deux ans après la disparition de Chantal.
16:21 Grâce à l'acharnement de Jonathan, à la médiatisation de cette affaire,
16:27 les forces de police vont se mettre à enquêter beaucoup plus sérieusement que ce qu'ils ont fait jusqu'à présent.
16:34 Cet appel à témoin, lancé par la police et par un juge d'instruction d'Amiens,
16:39 près de deux ans après la disparition de Chantal Croizet,
16:43 la gérante du bar Le Walter a été vue pour la dernière fois en juillet 2013 à Amiens,
16:48 dans le quartier Saint-Achel, où elle résidait.
16:53 C'est la police judiciaire qui reprend à zéro l'affaire Chantal Croizet.
16:58 Première priorité pour ces enquêteurs aguerris,
17:02 étudier d'éventuels appels entrant ou sortant sur son téléphone portable,
17:08 afin d'essayer de la localiser.
17:11 Et ils vont tirer un petit peu le seul fil qu'ils ont en leur possession,
17:18 puisqu'il n'y avait aucun indice chez Chantal Croizet,
17:21 donc le seul fil qu'ils ont en leur possession, c'est cette ligne de téléphone au nom de Chantal Croizet.
17:27 Ce qui est étonnant, c'est qu'on va la reprendre au point où on l'avait laissée,
17:31 avec le seul élément tangible, c'est-à-dire le téléphone.
17:34 À ce stade, personne ne sait où se trouve ce téléphone.
17:40 Il existe cependant un moyen technique qui pourrait permettre d'en savoir plus.
17:46 Il est tout à fait possible de demander des réquisitions auprès d'un opérateur téléphonique
17:52 pour savoir s'il y a des mouvements suspects qui ont eu lieu sur cette ligne téléphonique.
17:57 Et là, c'est le premier rebondissement de cette affaire.
18:01 On va s'apercevoir assez rapidement qu'il va être utilisé à quelques reprises.
18:06 Le téléphone portable va parler, mais il va surtout se promener.
18:13 Pour les hommes de la PJ, c'est une avancée déterminante.
18:17 Soit Chantal est vivante, soit quelqu'un d'autre utilise son portable.
18:23 Et grâce à la puce utilisée dans l'appareil, ils n'ont aucun mal à identifier cet utilisateur.
18:34 Il est immédiatement convoqué.
18:36 Il explique avoir acheté le téléphone à Nokia sur un vide grenier dans le Nord,
18:41 et il l'a acheté à une certaine Marianne.
18:44 Marianne, c'est une voisine de Chantal.
18:47 Donc à ce moment-là, pour les enquêteurs, c'est une série de questions qui se posent.
18:51 Mais que faisait cette fameuse Marianne en possession du téléphone de Chantal Croizet ?
18:56 Est-ce qu'elle est liée de près ou de loin à la disparition de Chantal Croizet ?
19:01 Par quels moyens cette voisine Marianne s'est-elle procuré le portable de Chantal ?
19:07 Pour le savoir, les policiers la placent en garde à vue et l'interrogent.
19:11 Marianne explique qu'en juillet 2013, elle s'est retrouvée en panne de téléphone
19:17 et un ami du quartier Saint-Achel lui a prêté un téléphone.
19:20 Elle ajoute même qu'au bout de deux jours, lorsqu'elle a voulu lui rendre le téléphone,
19:24 il lui a dit "t'inquiète pas, tu peux le garder".
19:26 Et cet ami, c'est un certain Jean-Paul Dankwan.
19:29 Jean-Paul Dankwan, il habite à seulement quelques centaines de mètres de chez Chantal Croizet.
19:36 Clémentine Biziot, journaliste police-justice.
19:39 Et donc sur le champ, les enquêteurs qu'est-ce qu'ils vont faire ?
19:42 Ils vont s'intéresser à ce profil de Jean-Paul Dankwan.
19:46 Pourquoi cet habitant du quartier Jean-Paul Dankwan se trouvait-il en possession du téléphone de Chantal ?
19:55 Pour la police, c'est à n'en pas douter un témoin important.
20:03 En interrogeant discrètement son voisinage, les enquêteurs sont intrigués.
20:08 Car c'est un drôle de portrait qui se dessine de cet homme de 51 ans.
20:14 Jean-Paul Dankwan, c'est un homme assez impressionnant. Il fait quasiment deux mètres.
20:21 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
20:24 Très fin, frêle, on peut dire que c'est un grand dadé.
20:28 On croirait que c'est quelqu'un qui a pris l'habitude de se baisser pour passer sous les encadrements de porte.
20:35 Tony Poulain, chroniqueur judiciaire au Courrier Picard.
20:38 Qu'il en est resté légèrement voûté.
20:40 Qui boite un peu, avec un visage très court, avec un nez assez long.
20:47 Mais Saouda Yahyaoui, avocate de la Défense.
20:50 Donc une image assez particulière de cet homme.
20:56 Un physique qui ne passe pas inaperçu.
20:59 Et une attitude parfois étrange selon ses voisins.
21:03 D'après eux, ce Jean-Paul Dankwan s'est installé dans le quartier Saint-Acholles trois ans auparavant.
21:10 Il y vit seul, dans une petite maison individuelle.
21:14 C'est un quartier fait de petites maisons typiques amiénoises.
21:21 Des maisons en briques rouges, qui ressemblent un petit peu aux maisons des Corons du Nord.
21:25 Le lien se fait naturellement avec les voisins qui peuvent habiter.
21:31 Et puis il y a des comités de quartier également, dans ces quartiers, où il peut y avoir des activités.
21:35 Donc il y a une vraie vie sociale et associative.
21:38 Dans les rangs de la police, une seule certitude pour le moment.
21:45 Jean-Paul Dankwan semble parfaitement intégré parmi la population du quartier Saint-Acholles.
21:53 Lui qui a longtemps travaillé dans la région, comme jardinier paysagiste.
21:58 Malgré ses déficiences intellectuelles, Jean-Paul Dankwan va s'insérer dans la société et s'en sort bien.
22:06 La meilleure preuve, c'est que Jean-Paul Dankwan va occuper un emploi aux espaces verts à la mairie d'Arras.
22:11 C'est que Jean-Paul Dankwan va être capable d'obtenir son permis de conduire.
22:15 Un métier, une voiture, une maison individuelle.
22:21 Ainsi s'écoule le quotidien sans histoire de Jean-Paul Dankwan, dont tous les riverains connaissent ici la silhouette.
22:30 Quelqu'un de gentil, qui était ouvert avec les gens, il discutait sans arrêt.
22:38 Patrick Dufresnois, ami de Chantal Croizé.
22:41 Tous les jours, il réparait sa voiture, elle était toujours à sa voiture.
22:44 Et les gens qui passaient sur le trottoir, il leur parlait, il avait du dialogue avec eux.
22:50 Il donne facilement des coups de main.
22:52 Ça peut être conduire en voiture un habitant du quartier à la gare, aider une mère célibataire à faire ses courses.
22:58 Et c'est lui, Jean-Paul Dankwan, qui est de loin le voisin le plus serviable du quartier.
23:06 Il a d'ailleurs tissé des liens d'amitié avec plusieurs de ses habitants.
23:11 Comme Chantal Croizé, à qui il rend régulièrement des services depuis quelques mois.
23:19 Il a rencontré Chantal Croizé lors d'une fête du comité de quartier.
23:23 Ils ont échangé, ils sont devenus amis au deux fils en aiguille.
23:27 Ils venaient prendre le café chez Jean-Paul.
23:30 C'était vraiment une relation amicale.
23:32 Voilà, ils passaient, ils pouvaient passer un petit peu de temps ensemble.
23:35 Alors, que faisait le téléphone de Chantal entre les mains de cet homme ?
23:42 Questionnés par les enquêteurs, les témoins sont formels.
23:46 Chantal apprécie beaucoup la compagnie de Jean-Paul Dankwan.
23:51 Mais aussi la façon dont son ami lui fait partager sa grande passion.
23:56 Sa passion, c'est la musique.
23:59 Il a du matériel de DJ impressionnant pour un amateur, presque de niveau professionnel.
24:06 Il va proposer ses services de disque jockey.
24:09 Il anime des soirées de comité de quartier, de club du troisième âge.
24:13 Il organise des karaokés.
24:15 Jockey, jockey.
24:17 Ça va aller, ça va être réaliste.
24:20 C'est en découvrant ces images que les enquêteurs le réalisent.
24:27 Jean-Paul Dankwan est bel et bien devenu à sa façon
24:31 une figure incontournable du quartier Saint-Acholles.
24:34 Il est quasiment présent à toutes les animations.
24:38 Il va y avoir un anniversaire de plusieurs personnes âgées du quartier
24:43 et Jean-Paul va se proposer de venir avec son matériel
24:47 pour faire danser ces petites personnes âgées qui fêtent leur anniversaire.
24:51 Lui, il est dans son élément à ce moment-là.
24:54 Là, on sent que c'est vraiment ce qui lui plaît.
24:59 À la fois se servir de ce matériel dont il est très fier
25:03 et puis se rendre utile, exister un peu dans le regard des autres.
25:08 Jean-Paul Dankwan s'est donc littéralement fondu dans le paysage.
25:13 Et parmi toutes les relations qu'il a pu nouer,
25:17 il en est une qui pourrait intéresser les policiers.
25:20 Jean-Paul Dankwan va créer des liens assez forts avec une jeune femme du quartier
25:25 qui s'appelle Alexandra. Elle est maman célibataire de deux enfants.
25:28 C'était le voisin de mon grand-père et moi, au moment-là, j'étais en train d'aménager.
25:32 Alexandra Leroux, amie de Jean-Paul Dankwan.
25:35 Et mon grand-père, il m'a dit, si tu as besoin d'aide, je peux te proposer à Jean-Paul de t'aider.
25:39 Il aide beaucoup le quartier, sa tâche seule.
25:41 Il a une remorque, il aide les gens dans les travaux, dans les déménagements.
25:45 Pour Alexandra, commence alors une relation amicale tout à fait sincère.
25:52 Il faut dire que ce brave Jean-Paul a toujours le cœur sur la main.
25:57 Il lui propose même un jour d'assurer l'animation de sa fête d'anniversaire.
26:04 Il m'a dit, si tu veux, pour qu'on passe une bonne soirée, j'amène mon matériel de musique.
26:09 Il avait ramené son matériel de musique. Il avait fait un peu le DJ.
26:13 Il avait parlé au micro, il avait chanté. On s'est amusé.
26:30 C'est la joie, la bonne humeur. Il y a les enfants, il y a tout le monde qui danse.
26:34 Il y a le karaoké, on passe du Claude François.
26:37 Jean-Paul Dankwan, ce voisin en or, paraît totalement inoffensif.
26:49 Les enquêteurs sont alors loin de l'imaginer,
26:52 mais cet homme qui n'est encore qu'un témoin potentiel dissimule de terrifiants secrets.
26:59 Amiens, le 15 avril 2015. Chez les policiers, une seule chose est certaine.
27:06 Ce curieux personnage s'est trouvé en possession du téléphone de Chantal.
27:12 Et c'est ce fameux jour, lorsqu'ils arrivent chez Dankwan, que le coup de théâtre se produit.
27:19 Frappe à la porte, Jean-Paul leur ouvre.
27:23 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
27:26 Et l'homme a une attitude qui les étonne beaucoup.
27:29 Il hausse les épaules et il se retourne, il leur dit "c'est par là".
27:33 Les policiers vont avoir l'impression que ça fait 22 mois que Jean-Paul Dankwan les attend.
27:38 Tony Poulain, chroniqueur judiciaire au Courrier Picard.
27:41 C'est même à se demander s'il n'est pas soulagé de les voir enfin.
27:45 Et ils traversent la maison, et ils se retrouvent devant la porte.
27:50 Et ils traversent la maison, la pièce où il entrepose son matériel de musique.
27:56 Ils ouvrent la petite porte qu'ils donnent sur la cour, et ils leur désignent une poubelle installée dans le coin de la cour.
28:01 Étrange manière d'accueillir des enquêteurs.
28:05 Et très vite, ils comprennent pourquoi Dankwan les a conduits directement dans la cour, devant cette poubelle.
28:13 Alors là c'est une vision d'horreur qui attend les policiers.
28:19 Quand ils soulèvent le couvercle du conteneur poubelle, ils trouvent baignant dans un liquide verdâtre ce qui reste d'un corps.
28:32 Et là ils discernent, c'est un pied squelettique en état de décomposition avancée.
28:38 Les policiers viennent de retrouver Chantal Croizet.
28:44 Jean-Paul Dankwan avoue immédiatement l'impensable.
28:49 L'odeur qui se dégage de la poubelle est suffocante.
28:53 A l'intérieur, ce qu'il reste du corps de Chantal Croizet.
28:58 Elle a été ligotée.
29:00 Pour ces officiers de police habitués à toutes sortes de scènes de crimes, c'est une vision insoutenable.
29:10 Quand on découvre ça, je pense que ni les enquêteurs, ni qui que ce soit ne peut rester indifférent.
29:17 Jérôme Crépin, avocat des partis civils.
29:20 Non seulement il l'a tuée, mais elle est dans une poubelle depuis des mois.
29:23 Chantal elle a disparu le 29 juillet 2013, donc on est plus d'un an et demi après la disparition de Chantal Croizet.
29:32 Clémentine Biziot, journaliste police-justice.
29:35 Ça fait un temps fou qu'elle est probablement dans ce conteneur.
29:40 Il y a presque plus de chair, c'est un corps qui est décomposé.
29:43 Et tous ces insectes, c'est abominable.
29:45 Le jour même, la police judiciaire annonce l'affreuse nouvelle à la famille de Chantal.
29:53 En apprenant les circonstances de la découverte du corps, Philippe, son frère, est sous le choc.
30:01 On a été tous...
30:03 Puis d'un côté on était contents qu'ils l'ont retrouvée quand même.
30:08 Ça va, donc elle était.
30:10 Sauf que...
30:13 On le retrouvait comme ça.
30:16 Philippe Croizet, frère de Chantal Croizet.
30:19 Il y a de la tristesse dans l'état où on l'a retrouvée.
30:23 Et on se demande qu'est-ce qui lui a fait.
30:26 Qu'est-ce qui lui a fait.
30:30 Quant au fils de Chantal, Jonathan, il s'effondre également.
30:35 Lui qui, depuis des mois et des mois, remuet ciel et terre dans l'espoir de retrouver sa mère.
30:42 Pour Jonathan, c'est d'autant plus difficile que lors de sa propre enquête,
30:50 il est passé des dizaines de fois devant la maison de Jean-Paul D'Ancoine
30:54 sans se douter une seconde que le corps de sa mère était caché là.
30:59 Donc il a su qu'elle était là.
31:01 Il s'est dit, ben dis donc.
31:05 C'est si proche.
31:08 Elle était à 500 mètres de sa maison, Chantal.
31:11 Une famille dévastée, un scénario digne d'un film d'épouvante
31:20 et ce voisin modèle que tout désigne comme le meurtrier.
31:24 Alors comment et surtout pourquoi Chantal Croizet a-t-elle trouvé la mort ?
31:29 Le corps d'une femme disparue après près de deux ans retrouvée par la police
31:42 dans la cour d'un habitant du quartier Saint-Acholles à Amiens.
31:45 J'avais pas l'air méchant parce que j'avais déjà discuté plusieurs fois de voiture comme ça.
31:50 Chaque coup j'ai demandé, ça va ? Pas trop de travail à faire sur la voiture ?
31:54 Je me disais non. Mais je n'avais pas l'air méchant.
31:58 Je le connais mais sans plus.
32:00 Comme ça le voisin, on le voit, on dit bonjour et puis c'est tout.
32:04 Dans le quartier, c'est la stupéfaction.
32:08 Voilà presque deux ans que Jean-Paul D'Ancoine cachait le cadavre de Chantal dans ses poubelles.
32:14 Comment un voisin si dévoué, tellement apprécié de tous, a-t-il pu faire une chose pareille ?
32:21 Même interrogation parmi les policiers.
32:26 Alors que D'Ancoine est placée en garde à vue, ils commencent par vérifier ses antécédents.
32:32 Et ils vont aller de surprise en surprise.
32:36 Alors les policiers quand ils ont Jean-Paul D'Ancoine,
32:41 une des premières choses qu'ils font c'est d'interroger leur fichier.
32:44 Et là d'un coup ça clignote en rouge.
32:47 Pourquoi ? Parce que Jean-Paul D'Ancoine a un passé judiciaire particulièrement chargé.
32:52 En fait il s'avère que dans les 20 dernières années de sa vie,
32:55 Jean-Paul D'Ancoine en a passé 19 derrière les barreaux.
32:59 Il y est allé pour des faits graves. Dans un premier temps pour un viol.
33:05 Et dans un deuxième temps, il est allé devant la cour d'assises du Pas-de-Calais à Saint-Omer.
33:10 Cette fois-ci pour un meurtre. Dans les deux cas, les victimes étaient des femmes.
33:14 Un viol aggravé en 1989.
33:21 Puis le meurtre d'une femme commis en 1995 dans le nord de la France.
33:27 Deux crimes pour lesquels il a été condamné à un total de 33 ans de prison.
33:34 Et si derrière ces deux précédentes affaires se cachait un criminel en série ?
33:40 L'APJ se plonge dans ces vieux dossiers.
33:44 Objectif, essayer de percer le mystère Jean-Paul D'Ancoine et comprendre ce qui a pu arriver à Chantard.
33:52 Octobre 1989 à Arras dans le Pas-de-Calais.
34:00 Jean-Paul D'Ancoine n'a que 25 ans.
34:04 Par des relations communes, il fait la connaissance d'une femme que nous appellerons Pascale.
34:10 Pascale est une jeune femme qui vit avec son enfant qui est âgé de 9 mois.
34:19 Antoine Vaste, avocat des partis civils.
34:22 C'est une personne qui est assez vulnérable, qui n'a pas de gros moyens financiers.
34:29 Jean-Paul D'Ancoine lui propose de la conduire en voiture car elle souhaite aller faire une course.
34:35 Mais une fois en route, il bifurque.
34:38 Et il s'arrête dans un lieu isolé à l'abri des regards.
34:42 Pascale sort de la voiture, Jean-Paul D'Ancoine revient vers elle, la fait remonter dans la voiture.
34:48 Et il lui dit qu'il veut avoir un rapport sexuel avec elle.
34:51 Et là Pascale, elle est terrorisée.
34:56 Jean-Paul D'Ancoine devient de plus en plus menaçant.
34:58 Il la gifle, il sort une bombe lacrymogène, il la gaze.
35:02 Et là, il va littéralement la violer.
35:05 Impossible pour Pascale de tenter quoi que ce soit.
35:09 Jean-Paul D'Ancoine, ce colosse, ne lui laisse aucune chance.
35:13 Il finit tout de même par la raccompagner à son domicile.
35:19 Elle dépose aussitôt plainte contre lui.
35:22 Jean-Paul D'Ancoine, dans un premier temps, va reconnaître les faits.
35:26 Il va expliquer qu'il se trouvait face à une jeune femme qui est vénale.
35:33 Et il met en place un système de défense.
35:35 En gros, c'est de reporter la responsabilité sur Pascale.
35:39 Tony Poulain, chroniqueur judiciaire au courrier Picard.
35:42 En disant, c'est elle qui vient vers moi, qui n'arrête pas de me demander de l'argent.
35:46 Il explique que Pascale lui demandait sans arrêt de l'argent, 100 francs, 200 francs, 300 francs.
35:55 Mais cet argument ne convainc pas la justice.
35:58 Le jeune Jean-Paul D'Ancoine est condamné à 8 ans de prison pour viol par la cour d'assises de Saint-Omer.
36:05 Il est libéré, pour bonne conduite, après 6 années de détention.
36:11 En avril 1995, Jean-Paul D'Ancoine est sorti de prison depuis 38 jours.
36:19 Même pas 2 mois.
36:23 Jean-Paul D'Ancoine sort de prison.
36:26 Et c'est par sa soeur qu'il va rencontrer Marie Chantal.
36:32 Un peu plus d'un mois seulement après sa remise en liberté,
36:37 D'Ancoine frappe à nouveau, toujours dans la région d'Arras.
36:41 Il kidnappe Marie Chantal.
36:45 Le cadavre de cette femme de 41 ans sera découvert quelques semaines plus tard.
36:52 Alors le corps de Marie Chantal va être retrouvé en pleine campagne.
36:57 La tête est enveloppée dans une serpillière et un sac plastique.
37:03 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
37:07 Et son corps est recouvert de sacs poubelle.
37:10 Évidemment, elle a des marques de coups sur le corps.
37:16 Elle a également les mains qui sont ligotées.
37:21 Des traces de violence, un cadavre retrouvé ligoté.
37:26 À Amiens, les enquêteurs de la police judiciaire sont frappés par les similitudes avec la mort de Chantal Croizet.
37:34 En exhumant ce premier dossier de meurtre impliquant D'Ancoine, ils font une autre découverte.
37:41 Assez vite, il admet qu'il est à l'origine de la mort de Marie Chantal.
37:46 Et son mobile, à l'en croire, c'est l'argent à nouveau.
37:49 L'argent, l'argent, l'argent, ça revient à longueur de temps dans son discours.
37:53 Lui, il présente Marie Chantal comme une femme qui n'aurait eu de cesse de lui demander de l'argent.
37:58 L'argent. Jean-Paul D'Ancoine avance systématiquement le même mobile.
38:05 Mais il y a autre chose qui interpelle les policiers.
38:09 Les profils de Marie Chantal en 1995, puis de Chantal Croizet en 2013, sont assez similaires.
38:18 À chaque fois, ce sont des femmes seules, célibataires, mères de famille.
38:24 Clémentine Biziot, journaliste, police justice.
38:28 Qui passent des moments difficiles de leur vie, qui sont dans des états de vulnérabilité, qui ont des problèmes d'argent.
38:35 Des décors qui ont été ligotés et puis lâchement abandonnés, comme des détritus.
38:44 Là, c'est frappant. La première finit dans les sacs poubelle, la deuxième finit dans un conteneur poubelle.
38:49 On a une sorte de fil rouge dans la carrière criminelle de D'Ancoine.
38:55 Des victimes très vulnérables, des crimes sordides.
39:00 Et ce scénario qui semble vouloir se répéter.
39:03 Alors, qu'est-il arrivé à Chantal Croizet dans la maison de Jean-Paul D'Ancoine ?
39:09 [Musique]
39:23 Dans la salle d'interrogatoire, D'Ancoine fait face aux enquêteurs.
39:27 Leur stratégie consiste à ne surtout pas le brusquer.
39:32 Alors, il le questionne d'abord sur la nature de sa relation avec les victimes.
39:37 [Musique]
39:42 Jean-Paul D'Ancoine va tenter de donner une explication aux enquêteurs
39:46 qui est une explication un peu à braquade abrantesque.
39:48 Jérôme Crépin, avocat des partis civils.
39:51 Bon, pratiquement en expliquant que c'est Chantal Croizet qui aurait suggéré
39:56 que débute une relation qui ne soit plus seulement une relation de quartier, mais une relation intime.
40:03 D'ailleurs, il explique qu'il la trouvait chiante, qu'elle voulait tout le temps le voir
40:09 et qu'elle ne s'intéressait qu'à son argent.
40:12 Les policiers n'en reviennent pas.
40:17 C'est la même explication que D'Ancoine avait avancée lors du viol de 1989.
40:23 Puis, lors du meurtre qui lui avait valu 25 ans de réclusion criminelle.
40:28 Un mobile auquel ne croient pas les proches de Chantal Croizet.
40:33 Ça m'étonnerait que Chantal allait demander de l'argent à un gars comme ça.
40:39 Philippe Croizet, frère de Chantal Croizet.
40:42 Chantal, elle n'était pas comme ça.
40:45 Elle se débrouillait pour travailler, c'est tout.
40:50 Mais pour de l'argent, moi je ne le crois pas du tout.
40:54 La famille de Chantal ne peut pas croire à la version d'Ancoine.
40:57 Et puis, si elle avait eu besoin d'argent, on était là.
40:59 Jamais, elle n'aurait eu besoin qu'à m'en demander, d'aller m'en demander chez D'Ancoine.
41:05 Jean-Paul D'Ancoine, lui, n'en démord pas.
41:09 Pour le reste, il se montre tout à fait coopératif.
41:13 Et voici le récit qu'il fait spontanément de cette journée du 28 juillet 2013.
41:20 Chantal Croizet vient chez lui le matin, à l'heure des écoles, vers 8 heures.
41:26 Ils boivent un café ensemble.
41:29 C'est alors que Chantal lui aurait demandé de lui dépanner 200 euros.
41:33 Elle avait des difficultés financières à ce moment-là.
41:36 Et alors là, Jean-Paul D'Ancoine, subitement, il s'énerve.
41:39 Elle a mis hors de lui qu'on lui demande de l'argent.
41:41 Pour lui, c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.
41:43 Encore et toujours, ces histoires d'argent.
41:48 Quant à la suite de la scène, D'Ancoine la raconte aux policiers
41:52 avec un détachement pour le moins déconcertant.
41:57 Il va reconnaître qu'il l'a étranglé.
42:04 Mais Saouda Yahyaoui, avocate de la Défense.
42:07 C'est ce qu'il dit d'emblée au service de police.
42:12 Il ne voulait plus l'entendre et demander de l'argent.
42:15 Il se rapproche d'elle, il va poser ses énormes mains sur son cou.
42:19 Il va l'étrangler très très fort.
42:22 Du fait du poids de Jean-Paul D'Ancoine, elle va tomber.
42:25 Sa tête se fracasse sur le sol.
42:27 Il va continuer à l'étrangler alors qu'elle est au sol.
42:30 Jusqu'à temps qu'elle décède.
42:32 Chantal Croizet ne respire plus.
42:36 Jean-Paul D'Ancoine indique ensuite avoir dérobé le portable de la victime
42:44 qu'il ne conservera que quelques jours.
42:46 Mais il lui reste une chose à faire.
42:50 Se débarrasser du cadavre.
42:53 Jean-Paul D'Ancoine va traîner le corps de Chantal Croizet à travers la cour
43:02 puis dans la maison.
43:04 Et là il descend le corps à la cave.
43:07 Il explique d'ailleurs que la tête de Chantal va taper sur les marches
43:10 et que des vêtements vont se déchirer.
43:13 Le corps reste quelques jours dans la cave.
43:16 Il ne sait pas trop quoi en faire.
43:18 Et puis il va expliquer qu'il a été prévenu d'une visite de la société des eaux.
43:22 Tony Poulain, chroniqueur judiciaire au courrier Picard.
43:25 Il doit venir inspecter le compteur d'eau qui est à la cave.
43:29 Et que là il comprend que les gens qui vont se rendre chez lui vont découvrir le corps.
43:34 Jean-Paul D'Ancoine poursuit sa terrible confession.
43:39 Prévenu de l'intervention du service des eaux,
43:42 il explique aux policiers avoir été contraints d'agir vite.
43:45 A l'aide de cordes, il va réussir à faire remonter au cadavre l'escalier de la cave.
43:56 Et puis, sachant pas trop quoi faire, il a vu ce conteneur poubelle dans sa cour.
44:01 Et là il va décider de la mettre dans ce gros conteneur à poubelle de 200 litres.
44:06 Il met la tête, la première en bas.
44:09 Et puis par-dessus, il va mettre une couverture, un rideau de douche, des grosses caisses.
44:14 Et il va expliquer aux enquêteurs que, très régulièrement,
44:17 il va revenir mettre de la javel pour s'assurer que l'odeur ne se répande pas.
44:23 Une opération en partie réussie.
44:29 Le corps de Chantal ne sera découvert que presque deux ans plus tard dans la cour de sa maison.
44:36 [Musique]
44:41 Devant ces révélations fracassantes, c'est un frisson d'horreur qui secoue tout le quartier.
44:48 Jamais on n'aurait pensé qu'il aurait été capable de faire ça.
44:54 Patrick Dufresnois, ami de Chantal Croisé.
44:57 Beaucoup de gens qui ont été chez lui, surtout des femmes qui allaient chez lui boire le café,
45:02 ont été surpris et ils se sont dit, j'en ai connu plusieurs qui m'ont dit,
45:06 "Ça aurait pu m'arriver à moi, tu vois pas."
45:11 Mais bon...
45:13 [Musique]
45:18 Et s'il y en a une pour qui toutes ces atrocités ont de quoi glacer le sang, c'est bien Alexandra.
45:25 Elle que son ami Jean-Paul faisait danser sur la musique de Claude François.
45:31 [Musique]
45:37 En cette année 2014, le cadavre de Chantal croupissait chez lui depuis plusieurs mois.
45:44 Le choc total.
45:47 Je me disais, "C'est pas possible, c'est pas possible."
45:49 Dire que j'ai été manger dans son jardin, en plus qu'il y avait un corps à côté.
45:53 Alexandra Leroux, amie de Jean-Paul Dankwane.
45:56 J'étais choquée, terrifiée. J'ai dit, "Il aurait pu très bien aussi m'arriver quelque chose."
46:02 Je pensais à mes enfants. Qu'est-ce qu'ils auraient fait sans leur maman ?
46:06 [Musique]
46:10 Je me dis, "C'est pas possible, ça aurait pu très bien m'arriver."
46:13 D'ailleurs, j'en faisais des cauchemars. Je le voyais passer à l'acte.
46:16 Je le voyais dans la pièce, dans la chambre, vouloir me tuer.
46:19 [Musique]
46:22 Parmi les enquêteurs, en tout cas, une question demeure sans réponse.
46:27 Pourquoi, lorsqu'il commet un crime,
46:30 Dankwane fait-il immanquablement référence à l'argent ?
46:35 [Musique]
46:37 À chaque fois qu'il s'attaque à une femme, qu'il considère comme vulnérable, qu'il considère comme avide.
46:45 Antoine Vaste, avocat des partis civils.
46:48 Et rapidement, il en vient à considérer que c'est quelqu'un qui est insupportable à ses yeux
46:55 parce que c'est quelqu'un qui en veut à son argent.
46:58 C'est quelque chose qui revient constamment.
47:01 Comme si on ne pouvait pas l'aimer, lui, pour lui-même,
47:03 et que ça passait automatiquement par le don d'argent.
47:06 Comme si on achetait les sentiments.
47:09 [Musique]
47:11 Dankwane ne serait-il pas, en réalité, en proie à des pulsions vers les femmes ?
47:17 Pour étayer cette hypothèse, la police interroge celle qui le côtoyait.
47:23 À commencer par Alexandra, son amie.
47:27 Et elle admet que Jean-Paul avait parfois un comportement bizarre.
47:33 Alors des fois, sans me prévenir, il me dit "Tiens, j'ai ramené ça pour manger ce soir, on mangera ensemble."
47:38 Il n'a pas demandé mon avis avant.
47:42 Il me regardait beaucoup.
47:44 Par exemple, quand je faisais ma vaisselle, il était en train de me fixer.
47:48 Souvent, il me regardait dans les yeux.
47:50 Une fois, j'ai posé la question "Tu n'as jamais eu de copine ou de femme ?"
47:54 Il ne répondait pas.
47:56 Je ressentais une gêne.
47:58 Il ne me répondait pas. Il bégayait. Il se mettait à bégayer.
48:01 Est-ce que, finalement, cette histoire d'argent, qu'il sert à toutes les sauces,
48:06 est-ce que ce n'est pas pour camoufler un mobile sexuel ?
48:10 Est-ce qu'il n'a pas tout simplement voulu avoir une relation sexuelle avec Pascal ?
48:16 Clémentine Biziot, journaliste Police Justice.
48:20 Peut-être aussi avec Chantal, que ses femmes lui ont résisté
48:24 et qu'il s'est transformé en un criminel et qu'il a violé ou tué.
48:30 Dans l'affaire Chantal Croizet, impossible, vu l'état du corps,
48:35 de savoir s'il y a eu des violences sexuelles.
48:38 Mais il est un élément de la scène de crime qui interroge les enquêteurs.
48:43 Chantal Croizet a été retrouvée dans la poubelle, en partie dénudée
48:48 et en partie couverte d'une jupe à franges rouges et noires
48:53 qui ferait presque penser aux tenues de flamenco,
48:57 pour donner une idée de ce qu'était cette jupe courte.
49:01 Très clairement, c'est un vêtement qu'elle n'a jamais possédé,
49:04 qui ne correspond pas du tout à ses habitudes vestimentaires.
49:09 Cette tenue n'a jamais appartenu à Chantal.
49:14 Pour l'accusation, cet indice pourrait confirmer la piste
49:19 d'une mise en scène à caractère sexuel.
49:23 Derrière cette jupe, il y a la crainte légitime que peut ressentir la famille
49:32 qu'il y ait eu un aspect sexuel dans le meurtre de Chantal.
49:36 Est-ce que Jean-Paul Dankwan n'a pas, dans un espèce de fantasme morbide,
49:42 été aller chercher cette jupe, la mettre sur la dépouille ?
49:46 C'est assez flou, mais en tout cas ça pose des questions d'un mobile sexuel à ce moment-là.
49:51 Que signifie ce vêtement féminin retrouvé sur la scène de crime ?
49:57 Mis sous pression par les enquêteurs, Jean-Paul Dankwan refuse de s'expliquer.
50:03 Quand on pose la question de la mini-jupe à Jean-Paul Dankwan,
50:07 on se heurte à un de ces nombreux silences, dès que les questions le dérangent un petit peu.
50:11 D'un moment, il dit "j'ai plus rien à dire, j'ai plus rien à dire de toute façon".
50:14 Mais Saouda Yahya, oui, avocate de la défense.
50:17 Ce sera la même chose que toutes les autres cours d'assises, et tout est déjà joué.
50:23 Un dangereux prédateur sexuel, aux moyens intellectuels pour le moins limités.
50:28 Dans la tête des enquêteurs, un parallèle se dessine avec un redoutable tueur multirécidiviste,
50:36 un certain Francis Saulme.
50:39 On est en droit de se poser la question "est-ce qu'on n'a pas affaire à un tueur en série ?"
50:44 Puisqu'il y a une répétition, il y a un véritable mode opératoire.
50:48 Et lorsque j'ai plaidé le second dossier, celui de Marie Chantal,
50:54 j'ai dit à la cour d'assises "il ne faut pas qu'il y ait une troisième affaire Dankwan".
51:00 Ça a été ma conclusion. Malheureusement, on connaît la suite.
51:05 En raison de son profil si particulier, Jean-Paul Dankwan parviendra-t-il à obtenir des circonstances atténuantes ?
51:17 Il risque désormais la réclusion criminelle à perpétuité dans l'affaire Chantal Croizet.
51:23 Ce n'est pas un cas ordinaire qui est jugé depuis ce matin aux assises de la Somme.
51:29 L'homme qui se trouve dans le boxe est un récidiviste. Il a déjà passé de longues années en prison.
51:34 Au palais de justice, nous retrouvons Mickaël Guillot.
51:36 Cet homme est jugé pour un meurtre commis un an après sa sortie de détention.
51:41 C'est un homme au physique imposant qui est entré dans le boxe des accusés ce matin,
51:45 grand, costaud, le visage sévère, mais le regard vide.
51:49 On a l'impression au début d'un personnage qui est un peu l'idiot du village, etc.
51:54 On dirait un Picardien, un grand gaga.
51:56 Tribunal d'Amiens, 9 octobre 2017.
52:00 Jean-Paul Dankwan offre le spectacle d'un homme totalement déconnecté de la réalité.
52:06 Mais la cour s'interroge.
52:09 Derrière ce visage, l'accusé ne cacherait-il pas une stratégie de défense ?
52:15 Dankwan se fait plus bête qu'il ne l'est.
52:18 Jérôme Crépin, avocat des partis civils.
52:20 Dankwan, c'est la troisième fois qu'il passe à la machine judiciaire.
52:25 Donc, il connaît la mécanique.
52:28 Et finalement, on peut se demander si Jean-Paul Dankwan ne joue pas sur sa déficience intellectuelle.
52:32 Sophie Nowakowicz, journaliste au Nouveau Détective.
52:36 Il est un homme qui a été fait un peu fou.
52:39 Il a été fait un peu fou pour se faire passer pour fou.
52:42 Et avoir pour conséquence d'être déclaré irresponsable pénalement.
52:45 Une éventualité que le jury va tout simplement balayer.
52:51 D'autant qu'après avoir tué Chantal, Dankwan a tout fait pour ne jamais attirer l'attention sur lui.
52:57 Et s'il ne s'était pas débarrassé de son téléphone, il aurait pu commettre le crime parfait.
53:03 La peine maximale. En un temps record, sans l'ombre d'un doute, les jurés ont rendu un verdict implacable.
53:09 Perpétuité, 22 ans de sûreté pour Jean-Paul Dankwan.
53:13 Dans le quartier Saint-Achel, à Amiens, bien des années se sont écoulées.
53:23 Les circonstances épouvantables de la mort de Chantal Croisé hantent toujours les habitants.
53:30 En particulier Alexandra, qui était si proche de Jean-Paul Dankwan.
53:36 Je ressens un peu ce qu'elle a dû ressentir Chantal.
53:41 La mort arrivée, les violences, elle a dû crier.
53:46 En tant que femme, je me dis que c'est juste horrible.
53:48 Alexandra Leroux, amie de Jean-Paul Dankwan.
53:51 Elle est morte dans des souffrances atroces.
53:55 Personne n'a pu la défendre.
53:58 Je ressens ce qu'elle a pu ressentir. C'est horrible.
54:02 Quant à Jonathan, le fils de Chantal, sans qui la vérité n'aurait jamais éclaté,
54:09 il n'a plus que le souvenir de sa mère, auquel se raccrocher.
54:14 Et pour le reste de sa famille, pour son frère Philippe, rien ne pourra faire oublier cette tragédie.
54:23 Vous savez, on a été élevés dans la même famille. On était proches.
54:32 J'essaye de me reconstruire.
54:38 Mais c'est quand même dur.
54:44 [Musique]
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