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L'aquaculture devient une filière de plus en plus responsable

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00:00 Aujourd'hui on parle d'une étude qui démontre que les Français sont prêts à payer plus
00:10 cher pour les produits de la mer. On détaille cette enquête avec Bertrand Charon, directeur
00:15 recherche et prospective à l'ASC, l'Aquaculture Stewardship Council. Bonjour.
00:20 Bonjour. Alors pour commencer Bertrand Charon, est-ce
00:22 que vous pourriez nous présenter l'ASC ? D'accord. L'ASC est une ONG internationale
00:28 qui a été créée en 2010 par deux autres ONG, le WWF qu'on ne présente pas et une
00:35 autre ONG néerlandaise qui est dans le commerce durable aussi et le développement durable,
00:42 IDH. Et donc ça fait 12 ans qu'on s'attaque aux problématiques de l'aquaculture. Depuis
00:49 les années 1990, la croissance de l'aquaculture, je pourrais développer un petit peu la définition
00:55 de ce terme, mais de l'élevage des poissons et de la conchiculture etc. a augmenté de
01:02 60% depuis les années 2000 de 30% alors que les pêches et la production des pêches a
01:08 plus ou moins stagné. Mais avec cette croissance il y a eu beaucoup d'impact, des fois positif,
01:13 économique mais aussi négatif, environnementaux, sociaux etc. Et c'est pour ça que l'ASC
01:19 a été fondée avec une théorie de la transformation pour changer l'industrie et la faire devenir
01:27 plus durable environnementalement et aussi socialement responsable.
01:32 Donc vous parliez d'aquaculture, est-ce qu'on pourrait redéfinir un petit peu ce terme ?
01:36 C'est quoi l'aquaculture ?
01:37 Alors l'aquaculture c'est l'élevage d'animaux aquatiques et de plantes et d'algues dans
01:45 le milieu aquatique. Donc communément on parle de poissons d'élevage, on parle aussi
01:52 d'élevage d'huîtres, d'élevage de crustacés, de crevettes, de homards, tout ça sont des
01:58 termes qui rentrent et aussi d'algues. Et historiquement on a fait de l'aquaculture
02:03 sur des plantes aussi. Les égyptiens il y a 5000 ans faisaient de la châtaigne d'eau,
02:08 donc ils cultivaient dans de l'eau. Donc tout ce qui est cultivé dans de l'eau c'est de
02:11 l'aquaculture.
02:12 D'accord, donc vous avez réalisé une enquête auprès de 12 000 consommateurs dans 12 pays
02:19 différents dont la France sur les français et les produits de la mer. Alors on va parler
02:25 dans un instant des grands enseignements de cette étude. J'ai lu que pour 80% des français
02:32 il est important ou très important d'inclure du poisson et des fruits de mer dans leurs
02:38 achats quotidiens. Qu'est-ce que ça veut dire ça ?
02:39 Ça veut dire que depuis une bonne dizaine d'années on est tous là à regarder les
02:43 infos, on se rend compte qu'il y a le changement climatique, qu'on a des problématiques environnementales
02:49 etc. et que l'une d'entre elles c'est l'empreinte carbone mais pour ne citer qu'une d'entre
02:55 elles, il y a aussi l'acidification des océans, la pollution des mers etc. Et toutes ces problématiques
03:01 en fait font que les consommateurs deviennent de plus en plus susceptibles à ce qu'ils
03:05 mangent. On est ce qu'on mange du niveau nutritionnel mais aussi on a un impact par
03:10 notre consommation. Donc de plus en plus de gens sont susceptibles à ces problématiques
03:16 et dans le domaine des produits de la mer, il y a beaucoup de gens qui commencent à
03:23 vouloir consommer plus de produits de la mer pour consommer moins de viande, de produits
03:29 carnés qui ont une empreinte carbone par exemple beaucoup plus importante. Et pas qu'une
03:34 empreinte carbone, une empreinte en eau etc. Donc vous pensez que les problématiques principalement
03:39 d'empreintes carbone avec les autres problématiques que vous nous avez citées, c'est ce qui motive
03:43 les français à acheter plus de poissons etc ? Oui, notamment, ça en fait partie mais
03:49 certainement le poisson est une bonne image au niveau nutritionnel, les oméga 3 etc.
03:56 Donc c'est un produit sain et on en demande de plus en plus. L'ennui entre guillemets
04:02 c'est qu'une grosse partie de ces poissons et de ces produits de la mer doit être importé
04:07 et avec ces importations, ces productions qui se produisent partout dans le globe, on
04:12 a des enjeux environnementaux et sociaux auxquels il faut pouvoir répondre. Mais du coup est-ce
04:19 que cette filière selon vous est une filière responsable ? Alors, nous notre mission c'est
04:25 de faire en sorte qu'elle le soit mais de dire il y a d'énormes enjeux donc responsable,
04:31 en fait, être responsable c'est un but à atteindre et le constat est qu'elle ne l'est
04:36 pas toujours et donc c'est notre mission de s'atteler à faire en sorte qu'elle le devienne.
04:42 Donc comment le faire ? Il faut faire beaucoup de mesures, il faut avoir des performances,
04:46 il faut mettre des systèmes en place, il faut avoir un degré de transparence, il faut faire
04:51 des audits, il faut faire toutes ces choses que le programme de certification et de labellisation
04:56 de l'ASC, de l'Aquaculture sur le Chèque-Quince-Rouffet, il faut pouvoir les faire, il faut vérifier
05:01 et ce n'est pas parce qu'un jour on est certifié ou labellisé que le lendemain on le sera
05:05 toujours donc il faut continuellement s'améliorer. Donc vous pensez que par exemple les certifications
05:13 sont un moteur pour que cette filière devienne de plus en plus responsable, notamment, certification,
05:20 label ? Oui en fait pour nous un label, une certification
05:23 c'est un outil, c'est un outil pour transformer le marché, c'est un outil qui nous permet
05:28 de mesurer, c'est un outil qui nous permet d'assurer aussi parce qu'avec l'emploi du
05:33 label et puis la chaîne de garantie qui fait que quand on a un produit qui est certifié,
05:37 on peut garantir aux consommateurs à l'autre côté de la chaîne que pendant toute la chaîne
05:41 ce produit n'a pas été substitué, qu'il n'y a pas eu de fraude, etc. etc. on arrive
05:47 à donner confiance aux consommateurs. Mais sans tout ça, il y a beaucoup d'incertitudes.
05:52 C'est vrai que la notion de confiance est très importante, surtout aujourd'hui pour
05:56 le consommateur. Est-ce que vous pensez que justement les Français, les consommateurs,
06:00 ils se renseignent de plus en plus et plus précisément sur l'origine de ce qu'ils
06:05 mangent et notamment de l'aquaculture, d'où ça vient, etc.
06:08 Alors très bonne question, deux réponses, oui et non. Certainement pas assez mais de
06:14 plus en plus et c'est un petit peu aussi pour ça qu'on a commandité cette étude
06:19 IFOP pour essayer de comprendre l'état de la perception des Français, pas que des Français
06:23 parce qu'on a fait cette étude partout dans le monde, mais notamment des Français,
06:27 quelle est leur perception de l'aquaculture et quelle est leur perception de l'aquaculture
06:31 durable et après qu'est-ce qu'ils en font, comment réagissent-ils, que sont-ils prêts
06:36 à faire. Ainsi vous pouvez ajuster avec leurs réponses
06:41 pour aller vers une aquaculture encore plus durable selon leur perception ?
06:44 Éventuellement, parce qu'un système de certification on ne change pas du jour au
06:50 lendemain, c'est très compliqué, mais oui ça nous informe et en tout cas s'il y a
06:55 des problématiques qui émergent, par exemple on se rend compte que les gens dans l'hémisphère
07:00 nord aux Etats-Unis par exemple n'ont pas de problème à manger des OGM, c'est pas
07:05 un problème pour eux, par contre en Europe ça l'est, donc nos référentiels exigent
07:09 primo qu'il n'y ait pas de production d'organismes transgéniques, mais aussi que
07:14 s'il y a emploi d'OGM dans les aliments, ça soit transparent. En effet il n'y a aucun
07:22 OGM dans l'aliment des produits certifiés AEC en Europe, mais dans d'autres pays où
07:27 c'est pas un problème, donc les consommateurs ont différentes perceptions et différentes
07:31 demandes, donc le marché s'adapte à ces demandes, mais effectivement on en apprend
07:35 tous les jours, donc c'est très important pour nous de faire ce type d'études.
07:38 Pour aller plus loin, je me posais quand même une question parce qu'on est dans un contexte
07:43 inflationniste en ce moment, depuis quelques mois, depuis même plusieurs mois, vous ne
07:48 pensez pas que l'inflation pousse plutôt le consommateur à d'abord acheter des produits
07:52 moins chers que se tourner vers des produits plus chers dont la qualité est meilleure ?
07:57 Alors oui, effectivement, c'est ce qu'on aurait pu penser, et c'est pour ça que cette
08:03 étude nous a donné des éléments de réponse assez intéressants, parce qu'on ne s'attendait
08:07 pas à se rendre compte qu'à peu près 6 Français sur 10 sont prêts et veulent, même
08:13 dans ce contexte inflationniste, à vouloir payer plus cher pour avoir des produits qui
08:18 sont certifiés d'avoir été produits avec une attitude et une démarche responsable.
08:22 Donc ça a été non seulement une surprise, mais ça nous a rassurés, mais c'était
08:29 un petit peu étonnant de le savoir, et ça veut dire qu'on va dans le bon sens.
08:33 Les Français veulent acheter plus responsable et sont prêts à payer un peu plus pour ça.
08:37 Pour finir, quels sont selon vous les grands enjeux auxquels doivent faire face les industries
08:43 et les distributeurs pour les prochaines années dans ce contexte-là ?
08:46 Alors là, si vous aviez une heure, je pourrais vous développer.
08:50 Il y en a beaucoup, et il y en a des très intéressants.
08:52 Alors il y a bien sûr des tas de législations qui sont en train d'arriver au niveau européen
08:57 et national, mais d'une manière générale, on commence à vouloir suivre de plus en plus
09:03 l'origine des produits.
09:04 Et les impacts, les Français consomment le plus du saumon et de la crevette.
09:10 Ces deux espèces viennent de l'étranger, parce qu'on n'en produit pas en France.
09:15 Mais à l'étranger, que ce soit en Asie ou ailleurs, il peut y avoir des abus.
09:19 Donc il faut suivre dans sa chaîne, et le distributeur qui lui vend dans telle ou telle
09:25 chaîne du saumon peut être questionné sur "mais est-ce qu'il a été produit responsablement,
09:31 il y a eu des droits de l'homme dans cette chaîne alimentaire, etc.
09:34 Quelle est l'empreinte carbone ? " Donc toute cette traçabilité, ce devoir de vigilance,
09:39 ça va être un des gros challenges dans les années à venir.
09:43 Il va falloir avoir des outils techniques de traçabilité, de transparence, de responsabilité
09:48 qui feraient adapter à cette demande.
09:51 Donc c'est sur ce quoi on travaille, nous, en tout cas.
09:55 Merci beaucoup Bertrand Charon, directeur recherche et prospective à l'ASC, l'Aquaculture
10:02 Stewardship Council, d'avoir répondu à toutes ces questions.
10:06 Et quant à nous, on se retrouve tout de suite pour le débat.

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