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Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd’hui, il reçoit le journaliste Franz-Olivier Giesbert pour la sortie de son livre "Histoire intime de la Vème République, tragédie française" aux éditions Gallimard.

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Transcription
00:00 - Europe 1, 11h-13h, Pascal Praud et vous.
00:07 - Ça y est, les bienvenus sur Europe 1, 11h-13h, c'est Pascal Praud et vous.
00:10 Pascal Praud et vous, votre émission où vous réagissez, témoignez en appelant le 01 80 20 39 21, Pascal.
00:16 - Quelle joie de recevoir avec nous Franz-Olivier Gisbert. Bonjour.
00:21 - Bonjour, Pascal Praud.
00:23 - Vous publiez le troisième tome, "Histoire intime de la Ve République",
00:27 qui est une sorte de page-turner, comme on dit.
00:30 C'est-à-dire que lorsqu'on a commencé le livre, on ne peut pas l'arrêter.
00:33 Je connais des gens qui l'ont lu toute la nuit et qui ont des insomnies à cause de vous.
00:38 "Tragédie française", c'est chez Gallimard et c'est une galerie de portraits,
00:43 parfois d'anecdotes, d'analyses, qui sont absolument formidables.
00:48 Et pour donner le ton de ce que vous écrivez et surtout comment vous écrivez,
00:53 je voudrais lire ces quelques pages, ces quelques lignes que vous écrivez sur Laurent Fabius.
01:00 "Le pouvoir finit toujours par révéler la vérité des âmes.
01:03 Il a embelli les visages du général de Gaulle jusqu'à Armitérant Chirac.
01:07 Je n'en dirais pas autant de celui de Laurent Fabius.
01:09 Où sont passées sa grâce, son insouciance ?
01:12 À la fin des années 70, c'était un Apollon armé de lumière qui envoûtait son monde.
01:17 Après avoir été si beau, il commence à tourner à la momie avec ses yeux morts.
01:21 Quand Fabius pense, on dirait que comme le baron de Nüssingen, il est en pleine digestion.
01:27 Il pense pauvre et parle plat.
01:30 Sans doute Fabius a-t-il beaucoup souffert en observant le petit Emmanuel, son jeune clone,
01:34 avec ses propres méthodes à se faire élire deux fois de suite à la présidence de la République.
01:39 C'est terrible parce que... Pourquoi c'est terrible ? C'est cruel et c'est sans doute vrai.
01:44 - Oui c'est cruel et d'ailleurs quand on a écrit ça, on est toujours un peu gêné.
01:48 Non non mais c'est vrai !
01:50 - Oui, vous pouvez ne pas le publier !
01:53 - Et figurez-vous que ça a été un peu raturé, un peu corrigé.
01:57 Y compris par mon éditeur aussi qui me disait "tu enlèves ça et ça"
02:00 J'ai donc coupé des phrases.
02:01 Mais je pense que c'est aussi la réalité.
02:04 C'est-à-dire que quand vous écrivez un livre comme ça, vous vous engagez complètement.
02:07 Bon, "Histoire intime", c'est le titre aussi, "Histoire intime", la cinquième.
02:11 Ça veut dire évidemment que je parle aussi de moi, je parle de choses.
02:13 Par exemple, même j'étais gêné, j'ai écrit un chapitre sur la mort de ma mère.
02:16 Bon, c'est terriblement intime parce que, évidemment, la mort d'une mère pour un garçon,
02:22 j'étais encore très jeune,
02:23 ça... comment dire...
02:25 On se dit "mais est-ce qu'on va survivre à ça quand on voit le cancer qui commence ?
02:30 Et puis qu'on sait bien que tout ça va mal finir ?"
02:32 Bon, ben, je dis, j'ose écrire, mais c'est la vérité,
02:36 1989 pour moi c'est pas la chute du mur.
02:39 C'est la mort de maman. Voilà.
02:41 Et donc quand on fait un livre...
02:43 - Votre mère qui était militante et vous en parliez dans le deuxième tome,
02:46 qui était fan de fleurs.
02:48 - Oui, fleurs, jardins, potagers, surtout philosophes.
02:50 - En Normande, bien sûr.
02:52 - Toujours avec ses élèves au lycée de L'Elbeuf,
02:54 et puis en même temps, adjointe aux mères,
02:56 rocardienne, parce que c'était un peu la...
02:58 Oui, c'était un peu l'âme rocardienne
03:00 du courant de Michel Rocard à l'époque.
03:02 - Et donc une caution, parce que les rocardiens étaient une caution morale, intellectuelle.
03:07 - Oui, c'est ça, voilà. Elle était comme ça, elle était au planning familial,
03:10 enfin, c'était vraiment la militante,
03:12 et en même temps avec plein d'enfants, elle avait cinq enfants quand même.
03:14 Elle s'en occupait, elle s'occupait de tout le monde,
03:16 je sais pas comment elle faisait pour dormir, mais bon, elle était comme ça.
03:18 - Mais quand vous voyez ça, vous l'avez revu, Fabius, par exemple ?
03:21 Vous allez le croiser ? Parce que quand il va venir vers vous, c'est d'une cruauté, c'est terrible.
03:25 - Écoutez, moi j'ai jamais de haine, de toute façon,
03:28 donc j'ai pas écrit ça par ressentiment, j'ai aucune raison de le détester.
03:30 Je l'ai beaucoup défendu dans l'affaire du sang contaminé,
03:32 j'ai écrit beaucoup d'articles, à l'époque, dans le Figaro, dans le Figaro magazine,
03:36 pour le défendre, j'étais à l'époque dans ces journaux,
03:39 et je l'ai défendu.
03:41 Après, c'est vrai, c'est la réalité des choses.
03:43 Je me souviens avoir déjeuné il y a peu de temps,
03:46 quand j'étais encore ministre des Affaires étrangères de François Hollande,
03:49 et c'est l'impression que j'en ai retiré.
03:51 C'était comme ça.
03:52 Donc, si vous voulez, quand vous écrivez un livre, moi c'est...
03:55 Je travaille énormément, je suis presque un besogneux,
03:59 mais je fais toujours comme si c'était mon dernier livre, et donc je dis tout.
04:02 Je dis tout en respectant évidemment certaines règles,
04:05 c'est pour ça que là, ces lignes que vous avez lues,
04:09 elles me choquent un peu, je suis un peu gêné,
04:12 parce que c'est presque un peu intime,
04:14 parce que, vous voyez, comme si vous dévoiliez des choses
04:17 que je pensais, que je ne voulais pas dire.
04:20 Mais je les ai quand même écrites.
04:22 Et c'est ça.
04:23 - Et c'est vrai que le lecteur aime cela, disons-le,
04:27 parce que tous ceux qui ont lu votre livre, j'ai quelques amis,
04:30 la première chose qu'ils m'ont dit, "tu vas voir le portrait de Fabius !"
04:33 "Tu vas voir le portrait de Fabius !"
04:35 C'est ça qu'ils m'ont dit.
04:36 Et moi-même, quand j'ai eu le livre, je suis allé directement...
04:39 J'ai voulu voir et lire ce que vous aviez écrit.
04:43 - Bon, vous allez pouvoir être interrogé, pourquoi pas,
04:46 d'ailleurs, avec des auditeurs, parce qu'au fond,
04:49 "Tragédie française", si je voulais un sous-titre de votre livre,
04:52 ce serait "Comment on en est arrivé là ?"
04:55 - Oui, c'est incroyable ce que vous dites,
04:56 parce que cette phrase-là, c'est lui qui l'a prononcé.
04:58 L'idée de ce livre, ce n'est pas moi du tout,
05:00 c'est Rana Levy, qui me disait, "vous devriez écrire l'histoire de la cinquième".
05:04 Moi, je lui dis, ça ne m'intéresse pas beaucoup.
05:06 Vrai, j'ai une malle pleine de...
05:08 Je tenais mon journal pendant plus de dix ans,
05:11 j'ai tenu mon journal.
05:12 Ça fait des cahiers, des cahiers.
05:14 Et en plus, comme je gratte beaucoup,
05:16 vous voyez, les conversations, je note, etc.
05:18 C'est des cahiers aussi, qui sont empilés,
05:20 il y a les dates, vous voyez, il y a les jours.
05:22 Donc, j'ai ce petit côté greffier,
05:24 et ça m'embêtait d'ouvrir la malle et commencer à rentrer là-dedans.
05:28 Et je lui disais, "oui, je sais pas, oui,
05:30 oui, mais il faut faire un peu une histoire nouvelle,
05:33 c'est-à-dire parler de la société,
05:35 parler des chansons".
05:36 C'est vrai que je passe ma vie aussi à chantonner des chansons,
05:39 comme nous tous,
05:40 et ces chansons font partie de la vie.
05:42 Moi, j'écoute beaucoup de classiques, Brahms, Chopin,
05:45 tout ce que vous voulez, mais c'est vrai que le matin,
05:48 je sais pas comment vous dire...
05:50 - Vous aimez la variété populaire ?
05:52 - Oui, mais alors là, moi, je craque complètement.
05:55 - Alors vous êtes bienvenue chez nous.
05:56 - Véronique Sanson, Alain Bachung, tout ça,
05:58 mais c'est merveilleux.
06:00 - On va marquer une première pause.
06:01 Je salue notre petite équipe, évidemment, Géraldine,
06:03 que vous connaissez, Géraldine Hamon.
06:05 Fabrice Laffitte, qui est notre réalisateur,
06:08 mais qui est également le DJ de cette émission,
06:10 puisque son surnom, c'est "Dj-Fab",
06:12 et régulièrement, il nous passe des chansons.
06:17 Nous, notre playlist s'est arrêtée en 76-77, je vous préviens.
06:20 - Exactement, il y aura des petites surprises.
06:22 - Un petit peu. Et puis...
06:23 - "Est-ce que tu m'aimes toujours pour toujours ?"
06:25 Marc Lavoine, c'est joli ça.
06:26 - Ah, ça c'est bien ! "Est-ce que tu m'as bâti un baroin ?"
06:28 On va faire votre playlist.
06:29 - "Dj-Fab", ah oui !
06:30 - Vous avez fait une émission "Barbe Olivier" ?
06:32 - Ah oui, j'adore "Barbe Olivier".
06:34 - Mais vous avez fait son émission ?
06:35 - Le dimanche.
06:36 - Oui, bien sûr.
06:37 - Où vous avez donné les chansons ?
06:39 - Les mots bleus, ce genre de choses.
06:41 - Et puis, c'est intéressant,
06:42 parce qu'il y a un jeune journaliste qui est avec nous,
06:44 qui s'appelle Olivier Guenec,
06:46 nous l'appelons "Monsieur Boubouc".
06:47 - Ah bah oui, vous le connaissez, bien sûr.
06:49 - Et qu'est-ce qu'il a dit, François Olivier ?
06:51 - Attention, il est presque plus connu que vous.
06:53 - Mais ne le dise pas ça !
06:54 - Qu'est-ce qu'il a dit, François Olivier ?
06:55 Ça, c'est une leçon pour vous.
06:56 Qu'est-ce qu'il a dit ?
06:57 - Qu'est-ce qu'il a dit, là ?
06:58 - C'est important.
06:59 Qu'est-ce qu'il a dit, M. Gisbert ?
07:00 - Ah là, j'étais en train de travailler, mais...
07:02 - Il a dit "je travaille beaucoup".
07:04 - Ah !
07:05 - "Je travaille beaucoup".
07:06 - Ça fait une vraie différence avec vous, déjà.
07:07 - Oui, je comprenais.
07:08 Mais qu'est-ce qu'il a dit ?
07:10 "J'écris mon journal".
07:12 Est-ce que vous, vous écrivez votre journal ?
07:14 - Un journal intime ? Non ?
07:15 - Un journal pour raconter ce qui s'est passé dans votre journée.
07:17 - Non, non, je devrais, je devrais.
07:19 Oui, c'est important.
07:20 Vous l'écrivez, vous ?
07:21 - Bah, je l'écris, non.
07:22 - Non ? Je pense que vous mentez.
07:23 - Oui, parce que Louis XVI, le 14, paraît-il, le 14 juillet 89, il avait dit "rien" dans son journal intime.
07:28 - Rien ?
07:29 - Oui, il avait 14 juillet, rien.
07:30 - Je sais pas, on lui demandera.
07:31 - Mais c'est vrai.
07:32 Alors, on sait jamais si c'est une coquetterie de la part de François Olivier de dire "je travaille beaucoup" ou pas.
07:36 - Ah non, c'est pas une coqueterie.
07:38 - Quand vous lis, c'est pas besogneux.
07:39 Vous êtes brillant, vous êtes... c'est formidable.
07:42 Par exemple, la page que vous publiez, c'est la quantième page qui est écrite.
07:46 Jean-Noël Meusson disait que c'est la neuvième, celle qu'il publie, parce qu'il a tellement raturé, tellement tout changé de ça.
07:52 Vous, c'est d'un jet où vous travaillez beaucoup le texte une fois écrit.
07:55 Vous nous le direz après la pause.
07:56 A tout de suite.
07:57 - 11h à 13h, vous écoutez Pascal Praud et vous sur Europe 1.
08:00 - Appelez Pascal Praud au 01 80 20 39 21.
08:04 - Merci de nous rejoindre sur Europe 1.
08:06 Vous écoutez Pascal Praud et vous.
08:07 - Europe 1.
08:08 - Pascal Praud et vous.
08:09 - De 11h à 13h, vous réagissez au 01 80 30 9 21.
08:12 Vous pouvez aussi poser vos questions à notre invité, François-Olivier Gisbert,
08:16 qui est là pour nous parler de son livre "Histoire intime de la Ve République",
08:20 tome 3, "Tragédie française", paru la semaine dernière aux éditions Gallimard.
08:23 - Là, je vais quasiment, tout de suite, je fais un grand bond.
08:35 - Rouge à blanc.
08:36 - Voilà, je fais un grand bond dans le livre.
08:37 "Une autre histoire", écrivez-vous, sorti en 86.
08:39 C'est l'un des grands succès de cette fin de siècle.
08:42 Et souvent, il m'arrive, quand je conduis ma voiture, d'en tenir la chanson à tue-tête.
08:45 J'en deviens l'incarnation, j'oublie tout.
08:47 Et je démarre une autre histoire pour prendre un nouveau départ,
08:51 en laissant faire le hasard.
08:53 C'est ce que vous écrivez.
08:54 - Oui, ce sont les paroles.
08:56 C'est vrai que je trouve que notre vie est accompagnée de chansons.
08:59 Et c'est vrai que dans ce livre, j'ai mis tout ça.
09:02 Et puis j'ai mis aussi, évidemment, tout ce qui m'est arrivé,
09:06 toutes les petites histoires de la vie, avec la politique.
09:08 Tout ça va ensemble.
09:10 Et si vous voulez, quand je parle de ça avec Rana Levy,
09:15 c'est vrai que, brusquement, je dis "mais tout ça..."
09:19 Oui, oui, mais voilà, mais oui.
09:21 En fait, tout ça me passionne, parce que j'ai envie de savoir
09:24 comment on en est arrivé là.
09:26 Et au fond, ça pourrait être, cette phrase-là,
09:28 que vous prononciez tout à l'heure,
09:29 ça pourrait être le titre de tous ces livres.
09:31 Comment on en est arrivé là.
09:33 Parce que, franchement, tomber...
09:36 Souvenez-vous de 58, quand même.
09:38 La France est au plus bas.
09:40 On est au bord de la guerre civile.
09:42 Économiquement, c'est un désastre, des déficits partout,
09:45 de Gaulle à Rive, mais c'est réglé presque en trois coups de cuillère à pot.
09:48 En un an, et tout ça repart.
09:50 - Oui, mais personne n'y croit aujourd'hui.
09:52 - Oui, mais enfin, attendez.
09:53 - Personne n'y croit aujourd'hui.
09:54 - Après le plan... - Personne ne croit, on a le sentiment, justement, que c'est fichu.
09:57 - C'est pas vrai, regardez.
09:59 Il a tout ressuscité, avec une croissance de l'ordre de 5 à 6%,
10:04 dans les années 70.
10:07 Bon, évidemment, les chocs pétroliers de 1973 et de 1979 ont tout cassé,
10:13 mais après, comment dire...
10:15 C'est possible, c'est toujours possible.
10:17 Et c'est vrai, comment on en est arrivé là ?
10:19 C'est-à-dire, cette espèce de délitement général de l'autorité,
10:23 le jouement foutisme, et puis la désindustrialisation
10:26 avec l'idée débile qu'on a entendue, développée par des gens de droite,
10:30 comme par des gens de gauche.
10:31 C'est pas grave, mais non, on n'a pas besoin d'industrie,
10:34 le tertiaire c'est beaucoup mieux,
10:35 ces gens-là, ils n'ont qu'à aller voir ce qui se passe dans les villes moyennes,
10:38 là où l'usine est vide, et où tout est fermé,
10:41 les commerces, les rues principales sont complètes.
10:44 C'est ça aussi, la France.
10:45 Et tout ça a été fait par des gens qui, souvent, étaient pas mal.
10:51 Et qui, souvent, connaissaient bien la France.
10:53 Et c'est ça, l'histoire.
10:54 Comment on en est arrivé là ?
10:55 - Véronique est avec nous, parce que l'idée, c'est aussi que vous puissiez échanger
10:59 avec des auditeurs, auditrices.
11:01 Bonjour Véronique, est-ce que vous êtes fan de France Olivier ?
11:04 Est-ce que vous lisez cette trilogie qui est vraiment extraordinaire ?
11:07 Je dis, parmi tous les livres que j'ai lus cette année,
11:10 la lecture plaisir, la lecture intelligente,
11:13 la lecture d'anecdotes, comme je le disais tout à l'heure, de portraits,
11:18 et puis la vraie histoire aussi !
11:20 C'est-à-dire que La 5ème République, je trouve que c'est brillantissime,
11:25 ce que vous avez fait, France Olivier.
11:27 - Bah merci.
11:28 - Et puis, ces trois fois, ça s'empage !
11:30 Donc voilà, vous êtes quand même...
11:31 - En plus, vous êtes rendu avec un coffret, maintenant, c'est Gallimard qui a fait ça !
11:35 - Véronique, on va marquer une pause, vous restez avec nous,
11:38 vous allez pouvoir intervenir tout de suite après la pause
11:41 et poser une question à France Olivier, Gisbert,
11:45 avec une très belle jaquette, et c'est vrai que les beaux visages
11:49 de François Mitterrand et de Jacques Chirac étaient très beaux.
11:53 Chirac, quand il a 40 ans, il est vraiment...
11:55 - On n'aurait pu jamais ça !
11:57 - C'est un acteur !
11:58 - On dirait !
11:59 - C'est Grégory Peck en mieux !
12:01 - Mais vous savez que vous parlez de Grégory Peck, les gens qui nous écoutent...
12:04 - Ah, c'était le copain de Chirac, c'est pour ça !
12:06 - Oui, j'entends bien, mais ils ne savent même plus qui...
12:08 - Oui, vous avez raison !
12:09 - Par exemple, M. Boubouc, Grégory Peck !
12:11 - Oh non, j'ai pas eu le temps de taper sur Google !
12:13 - Non mais c'est fascinant, parce qu'en fait, le passé n'existe pas !
12:18 Grégory Peck, c'était un monstre, les canons de Navarone !
12:23 - Mais je me doute, je me doute, pardon, excusez-moi !
12:25 - Et en plus, il était marié à une Française, il était encore présent pour la finale de la Coupe du Monde en 1998,
12:30 il était à côté de Jacques Chirac !
12:32 - Les grands copains de Chirac !
12:33 - Et très beau mec !
12:34 - Le Chirac était plus beau, je pense !
12:35 - Allez, on revient tout de suite !
12:37 - Vous posez vos questions à François-Olivier Gisbert,
12:39 on te réinvite aujourd'hui dans Pascal Proévaut,
12:41 0180 29 21,
12:43 et il y a la page Facebook qui existe aussi !
12:45 - Pour réagir et donner votre avis sur Europe 1,
12:47 - Rendez-vous sur la page Facebook de Pascal Proévaut !
12:50 - Vous écoutez Pascal Proévaut de 11h à 13h
12:53 avec notre invité, Franz-Olivier Gisbert,
12:55 vous pouvez lui poser vos questions,
12:57 0180 29 21, comme Véronique,
12:59 qui est avec nous en ligne.
13:00 - Je vivais à l'écart
13:02 de la place publique,
13:04 serein contemplatif,
13:06 ténébreux bucolique...
13:08 - J'ai été très ému par la disparition le 29 octobre 1981,
13:11 dans une relative indifférence du héros de mon enfance,
13:14 Georges Brassens, grand anticonformiste national
13:17 et auteur-interprète de mon premier disque vinyle,
13:20 "Les trompettes de la renommée",
13:23 sorti en 1962, que nous écoutons à l'instant.
13:26 Véronique, bonjour !
13:27 - Bonjour Pascal, bonjour Franz.
13:29 - Bonjour !
13:30 - Que vous êtes bavard, Pascal,
13:32 mais que c'est intéressant, et que j'aime,
13:34 et je me régale de vous entendre,
13:36 tous les deux, depuis tout à l'heure.
13:37 Vous représentez exactement ce que j'aime,
13:39 c'est-à-dire l'intelligence,
13:42 pratiquée comme moi,
13:44 c'est-à-dire qu'en fait, quand vous êtes des gens que vous n'aimez pas,
13:46 Pascal, on l'entend, vous êtes capable, sur des gens que vous n'aimez pas,
13:48 de tirer quand les gens font des choses bien,
13:51 de dire "ah bah oui, je l'aime pas, mais ça c'est bien",
13:53 et puis l'inverse également,
13:55 et effectivement, Franz est gratiné et fabuleux,
13:58 mais comme il dit, je l'ai défendu,
14:00 au moins du problème du sang contaminé, etc.
14:03 Et j'aime cette intelligence, moi je suis pareil,
14:06 je ne jette pas le bébé avec l'eau du bain,
14:08 il y a des gens que je n'aime pas,
14:09 mais je suis capable de reconnaître quand ils font quelque chose de bien,
14:11 et de le dire.
14:12 Et quand vous dites "comment on en est arrivé là",
14:15 je réfléchissais pendant que j'étais en train d'attendre,
14:18 et je me disais "mais est-ce que c'est parce que tout se dégrade
14:21 que les politiques se sont également dégradées,
14:24 ou est-ce que c'est parce que les politiques qui sont en haut se dégradent
14:27 que de ce fait-là, par retombées, tout se dégrade ?"
14:30 J'étais en train de m'interroger là-dessus, en fait.
14:33 Parce que c'est vrai qu'on n'a plus l'intelligence qu'il y avait,
14:36 enfin moi, on parlait de De Gaulle hier,
14:39 quand il parlait, on était tous tétanisés,
14:42 on était tous happés par ce qu'il disait, c'était intelligent,
14:45 on se rendait compte qu'il aimait la France,
14:48 qu'il avait envie que la France s'en sorte, et vous l'avez dit tout à l'heure,
14:51 en un an il avait tout réglé.
14:53 Moi je suis désolée de le dire, mais aujourd'hui on n'a que des vôtres noms.
14:55 - Alors Franck Solier va répondre à ça,
14:58 mais c'est vrai que c'est ce sentiment qu'ont beaucoup de gens de la même génération,
15:01 nés dans les années 50-60, que l'âge d'heure est terminé,
15:04 que dans tous les domaines, pas dans tous les domaines d'ailleurs,
15:07 par exemple dans le domaine médical, il faut mieux être malade aujourd'hui qu'il y a 50 ans.
15:10 Il faut mieux être une femme aujourd'hui, sans doute,
15:13 que travailler dans l'univers professionnel, comme en 1974, pour une femme.
15:16 - Et le niveau de vie globalement a monté, même si,
15:19 en comparaison, quand on regarde par rapport aux autres pays,
15:22 évidemment on descend, il y a un sentiment de déclassement.
15:25 - Mais il y a ce sentiment effectivement,
15:28 d'une perte d'identité, une perte de qualité,
15:31 dans tous les domaines,
15:34 le prix Goncourt, le cinéma,
15:37 le niveau des politiques, le niveau des profs,
15:40 et je pourrais multiplier les exemples.
15:43 - Oui, et si on parle
15:46 de la responsabilité des politiques,
15:49 moi je dirais que, je répondrais à Véronique,
15:52 ils sont tous intelligents. Quand on regarde bien,
15:55 c'est pas vrai, il n'y a pas de con, on n'a pas élu des imbéciles,
15:58 après De Gaulle, Giscard,
16:01 bon, Giscard il n'est pas tellement dans l'histoire,
16:04 parce que finalement il a bien géré la France, mais je pense à
16:07 Mitterrand, Chirac, Sarkozy,
16:10 Hollande, et même aujourd'hui Macron,
16:13 qui est peut-être un peu trop narcisse pour avoir une intelligence
16:16 aussi libre que les autres, mais je crois que les autres
16:19 voyaient un peu les choses. Je pense que le vrai problème qu'on a eu,
16:22 c'est un problème de crise de la volonté politique.
16:25 C'est-à-dire qu'il n'y a pas de volonté politique, il y a une sorte
16:28 de peur du peuple, du pouvoir, ou de la populace même,
16:31 où, oui, dans ce sens-là,
16:34 les Français ont une responsabilité, quand vous pensez à cette grève
16:37 imbécile de 1995, où la France s'arrête pour défendre
16:40 les agents roulants de la SNCF qui prennent leur retraite à 50 ans,
16:43 donc les Français volent, qui continuent à prendre leur retraite à 50 ans,
16:46 c'est ça l'histoire, puisqu'ils ont repris le travail dès que cette
16:49 mesure a été retirée, la réforme de la Sécurité Sociale, elle,
16:52 tout est un rideau de fumée, elle a continué,
16:55 elle a été appliquée, mais c'est exactement
16:58 ce moment, c'est ça, et il y a eu d'autres choses avant, il y a aussi Mitterrand
17:01 qui a commencé à tout lâcher, c'est-à-dire qui fait comme
17:04 s'il y a beaucoup d'argent, c'est là que l'histoire
17:07 normalement commence, et tout le monde s'y est mis, les uns
17:10 après les autres, c'était facile, on fait des chèques sur l'avenir,
17:13 et ça c'est la crise de la volonté politique, et vous voyez,
17:16 Véronique, moi, ce qui me fascine, parce que je les ai bien connus,
17:19 j'ai bien connu Margrethe Thatcher,
17:22 enfin bien, oui, je l'ai interviewée, j'ai pu être dans des déjeuners
17:25 d'État, où j'étais assis à côté,
17:28 ou Mitterrand gentiment me plaçait à côté, par exemple,
17:31 et je voyais que c'était pas grand-chose,
17:34 femme un peu étriquée, qui a pas grand-chose à raconter,
17:37 mais volonté, c'est pour ça qu'on l'appelait la "dame de fer",
17:40 volonté de faire, elle voulait un truc, fallait que ce soit fait.
17:43 J'ai bien connu aussi un
17:46 personnage absolument charmant,
17:49 Gérard Schroder, qui était quelqu'un qui avait toujours un petit coup
17:52 dans le nez, il adorait le vin blanc, je l'imagine un verre à la main,
17:55 le champagne aussi, et il était
17:58 un peu euphorique, comme tous les gens qui aiment bien boire,
18:01 et on se disait qu'il valait pas grand-chose, c'était un social-démocrate,
18:04 alors lui c'était le contraire de Thatcher, c'était quelqu'un de gauche.
18:07 Bon, à un moment donné, il s'est réveillé en 2004,
18:10 et Merkel a vécu sur ses réformes, elle a rien eu à faire,
18:13 c'est-à-dire, on a besoin, je dirais pas
18:16 forcément de gens intelligents, comme on a eu, on a besoin
18:19 de gens qui ont de la volonté. - Mais Macron, c'est ce qu'il dit, qu'il a de la volonté,
18:22 c'est les réformes, mais lui, si vous l'écoutez,
18:25 il dit qu'il fait des réformes,
18:28 il va vous prendre la réforme de la retraite, il va dire "je le dépose".
18:31 - Mais vous avez vu cette réforme, c'est pas une réforme, déjà on est dans
18:34 l'eau rouge, enfin c'était ridicule, cette réforme
18:37 est ridicule, et puis... - Mais il dira le contraire,
18:40 il dira qu'il est réformiste. - Il continue à emprunter,
18:43 alors qu'on est déjà assez haut, et que contrairement à des pays
18:46 comme l'Italie et le Japon, c'est une dette qu'on doit à des étrangers,
18:49 c'est-à-dire nos créanciers, ça s'appelle la Chine
18:52 et le Qatar, ce sera difficile d'effacer cette dette,
18:55 alors que c'est plus facile quand c'est, pour les
18:58 Italiens ou les Japonais, quand c'est le peuple, parce qu'à ce moment-là, un peu d'inflation
19:01 suffit à rattraper les choses. - La pause,
19:04 la pause à 11h28, DJ Fab,
19:07 on reviendra peut-être avec une petite chanson pour faire
19:10 plaisir à Franz Olivier Gisbert,
19:13 vous avez envie d'entendre quoi ? - Oh, la nuit, je mens !
19:16 - La nuit, je mens de Bachung, et bien écoutez...
19:19 - C'est déjà calé, ça arrivera juste après la pub ! - C'est magnifique en plus,
19:22 une chanson... - Véronique Sanson aussi, j'adore !
19:25 - À tout de suite ! - Franz Olivier Gisbert,
19:28 l'invité de Pascal Praud sur Europe 1, posez-lui vos questions en
19:31 composant ce numéro. - Appelez Pascal Praud au 01
19:34 80 20 39 21. - De 11h à 13h sur
19:37 Europe 1, et nous recevons ce matin Pascal, Franz
19:40 Olivier Gisbert.
19:43 La nuit, je mens, je prends des trains à travers la plaine
19:46 La nuit, je mens,
19:49 je m'en lave les mains
19:52 - C'est sans doute une des plus belles chansons de Bachung,
19:55 d'abord dans... - Et de la chanson française. - Oui, d'abord la mélodie,
19:58 l'arrangement, les paroles, je sais pas
20:01 si vous avez écrit des paroles
20:04 de chansons. - Non, non, mais ces paroles-là,
20:07 c'est vrai que c'est sublime, il y a d'autres paroles, même parfois ça peut être des paroles
20:10 un peu simplettes, je pense à, par exemple,
20:13 certaines chansons de Christophe, qui sont très étranges, même, on a l'impression
20:16 que, comment il a pu trouver ça, et c'est merveilleux aussi.
20:19 "Ballet mon bleu"
20:22 C'est pas lui qui a fait les paroles, c'est Jean-Michel Faure.
20:25 - Et "Petite fille du soleil", c'est Didier Barbelé qui avait fait les paroles.
20:28 - Ah oui, oui, bien sûr. - Mais il y a une poésie, alors,
20:31 chez Bachung, il y a une sorte de poésie, évidemment,
20:34 et c'est difficile d'ailleurs d'écrire des chansons pour cela,
20:37 parce que c'est une technique, forcément, une poésie,
20:40 mais vous qui écrivez,
20:43 et qui avez tout fait, des livres, des articles,
20:46 le nombre de pages que vous avez écrites
20:49 depuis que vous êtes... - Ah oui, ça, j'ose pas compter,
20:52 surtout celles qu'on a jetées, parce que, derrière tout ça,
20:55 je vous disais, il y a aussi du travail, c'est-à-dire qu'on jette énormément,
20:58 on écrit, on jette. - Nicolas est là, parce que l'important, c'est effectivement
21:01 d'échanger avec les auditeurs. Bonjour Nicolas ! - Bonjour M. Prot,
21:04 bonjour M. Gisbert. - Bonjour, bonjour. Quel âge vous avez, Nicolas ?
21:07 - Moi, je vais avoir 30 ans bientôt. - Ah, donc c'est un monde que vous n'avez
21:10 pas connu, le monde de la Ve République, depuis
21:13 son origine. - Non, mais après, je l'enseigne
21:16 à mes élèves, parce que je suis enseignant d'histoire-géographie,
21:19 et j'ai fait partie aussi des jeunes UMP du temps de Sarkozy,
21:22 donc j'ai pu côtoyer de près un petit peu
21:25 cet univers-là. - Et est-ce que vous avez
21:28 lu le dernier, François-Olivier Gisbert,
21:31 il est sorti quand d'ailleurs, celui-là ? - La semaine dernière.
21:34 - Donc la semaine dernière, mais vous avez peut-être lu en tout cas les deux premiers, puisque c'est une histoire
21:37 de la Ve République en trois volumes, là c'est terminé après. - Ah, c'est terminé.
21:40 Bon, il y aura sûrement autre chose après, parce que je vais sûrement
21:43 continuer à écrire là-dessus, parce qu'on vit des heures historiques,
21:46 des heures, des journées, des années historiques.
21:49 - Une question peut-être, Nicolas, ou une analyse sur cette période de la Ve République.
21:52 - Oui, moi je suis vraiment ému de pouvoir échanger avec M. Gisbert,
21:55 que je considère comme un des géants du journalisme politique,
21:58 et vraiment ses analyses à chaque fois m'intéressent au plus grand point,
22:01 et je les trouve vraiment justes. J'avais une question concernant M. Mitterrand,
22:04 moi j'ai énormément de mal à essayer d'avoir une vision claire
22:07 et à en enseigner à mes élèves sur ce personnage que je trouve d'une complexité
22:10 assez extrême, entre
22:13 l'écrivain passionné qui envoie des lettres à Anne Pinjot
22:16 et le maquiavèle politique,
22:19 que retenir vraiment de la personnalité de Mitterrand ?
22:22 - Je pense qu'il y avait deux Mitterrands.
22:25 Il y avait le Mitterrand politique,
22:28 il faut imaginer quelqu'un d'extrêmement sensible,
22:31 Mitterrand est quelqu'un de très sensible, c'est-à-dire vous les gratigner avec une petite phrase
22:34 "si vous aimez bien", il en fait toute une histoire,
22:37 il en fait un fromage même.
22:40 Donc il y a le personnage sensible
22:43 qui travaille dans un univers très dur et très violent à la politique,
22:46 parce que la politique c'est quoi ? On meurt tout le temps,
22:49 on ressuscite mais on meurt, et c'est très violent.
22:52 Quand je vois, c'est un métier, c'est pour ça que j'admire les politiques,
22:55 je ne veux pas partir de ceux qui crachent dessus, parce qu'en plus ils sont mal payés,
22:58 tout le monde pense qu'ils sont pourris, c'est un métier très dur.
23:01 Et Mitterrand au fond était très sensible
23:04 et donc qu'est-ce qu'il se protégeait ?
23:07 Il était, oui, je dirais une sorte de crapule et de canaille en politique,
23:10 menteur, de temps en temps il disait les choses,
23:13 c'est assez beau quand il prend le parti socialiste à Guimaulet,
23:16 il fut vraiment le patron en 1971,
23:19 avant le célèbre congrès des Pinets,
23:22 il invite Mollet à déjeuner et il lui dit,
23:25 même si ce n'est pas tout à fait Mollet qui est le patron du parti à l'époque,
23:28 c'est Savary, mais il dit à Mollet
23:31 "bon maintenant c'est fini, je vais tout prendre".
23:34 Il le prévient. Il y a ça aussi, c'est-à-dire il y a une forme de...
23:37 bon, je dirais presque un petit côté chevaleresque,
23:40 mais je dirais l'homme privé,
23:43 vous avez raison tout à fait sur la complexité,
23:46 l'homme privé était craquant, pourquoi ? Parce que
23:49 culture énorme, culture et partagé,
23:52 il aimait partager, c'est-à-dire que ce n'était pas du pipo,
23:55 il adorait les livres, d'ailleurs il m'en a fait lire tellement,
23:58 il se passionnait, il se mettait en colère quand vous
24:01 n'aviez pas aimé le livre qu'il vous avait donné,
24:04 qui était des livres de poche, évidemment, parce qu'il
24:07 le disait, que des livres de poche, il adorait les livres de poche.
24:10 Et puis surtout, je l'écris
24:13 d'ailleurs dans le troisième tome, c'est qu'il parlait comme un écrivain,
24:16 bon, il me dissuadait, moi je voulais être écrivain,
24:19 je trouvais ce métier passionnant, mais il me disait
24:22 "mais c'est un métier, c'est horrible, on est en robe de chambre
24:25 toute la journée pour travailler, en chaussons c'est normal,
24:28 j'irais pas presque en s'en rappeler, quel métier, c'est affreux".
24:31 - C'est vrai que la qualité de français
24:34 de l'itérant, voilà, exceptionnel. - Mais quand il parlait,
24:37 il parlait des notes, ça pouvait servir, il y avait
24:40 une culture, quelle intelligence. - Mais quelle intelligence.
24:43 - Il a cassé tout avec le programme économique
24:46 de 1981, entouré d'une bande
24:49 de courtisans débiles,
24:52 qui ont vraiment massacré l'économie française,
24:55 mais derrière, il y avait quelqu'un d'abord
24:58 qui aimait la France, qui sentait la France,
25:01 et qui avait une culture. Donc vous voyez, vous avez raison
25:04 quand vous dites Nicolas, c'est un personnage très complexe.
25:07 Et c'est peut-être pour ça d'ailleurs, moi il m'a toujours passionné,
25:10 parce qu'il est complexe. Chirac
25:13 est passionnant aussi, mais d'une autre façon, parce que Mitterrand
25:16 est ouvert, Chirac il est caché,
25:19 il est masqué. - Et notamment dans le deuxième
25:22 tome, il y avait une réhabilitation très importante d'ailleurs, de Pierre
25:25 Moroy, qui m'avait frappé, parce que Moroy
25:28 effectivement est oublié aujourd'hui, et puis de la même manière, vous réhabilitiez
25:31 justement Valéry Giscard d'Estaing. Sur François Mitterrand,
25:34 dans ce livre-là, vous écrivez "il aura été le premier connaîtable
25:37 du déclin dans l'ordre chronologique, le père fondateur
25:40 sinon spirituel, du système de pensée qui a mené à la
25:43 catastrophe dans laquelle le pays se trouve aujourd'hui, et que l'on
25:46 peut résumer ainsi, dépensons et tout ira bien.
25:49 Macron, Chirac, Balladur, Jospin et les autres sont
25:52 plus ou moins ses enfants. C'est quand même d'une sévérité très
25:55 grande. Et vous dites également, le 22 novembre
25:58 1994, lors d'une conversation empreinte de mélancolie,
26:01 Mitterrand tente, comme au début des années 70,
26:04 de me convaincre de me lancer en politique, en me proposant
26:07 non plus une circonscription dans les airs, mais une place
26:10 de numéro un du parti. Le PS est à prendre, et vous êtes
26:13 fait pour ce métier. J'étais convaincu que Mitterrand cherchait
26:16 à m'embobiner, où en fin de règne, il se sentait
26:19 seul, abandonné, et recherche des soutiens.
26:22 - Oui, et là qu'est-ce qu'il répond ?
26:25 - Il dit "c'est impossible, c'est ridicule, j'ai quand même une
26:28 grosse partie de mon cerveau qui pense à droite,
26:31 et de l'autre côté, en plus je travaille au Figaro, à l'époque j'étais
26:34 au Figaro, où je suis bien, je suis pas du tout
26:37 marginal, mais c'est ridicule". Et il me dit "et moi
26:40 alors ?" Et ça c'était Mitterrand avec l'humour,
26:43 c'est-à-dire il avait beaucoup d'humour par rapport à lui-même.
26:46 - Ah non, pas de voix, c'est 94, pardon.
26:49 - Il meurt en 96, c'est un an et
26:52 trois mois avant sa mort. - Mais je me suis demandé
26:55 si c'était pas aussi un projet pour être gentil,
26:58 c'était pas que j'ai jamais... En pensant peut-être que ça m'intéresserait
27:01 ou que ça me plairait, mais enfin, de toute façon c'est ridicule, en plus j'étais pas
27:04 fait pour faire de la politique, parce que je suis quelqu'un qui dit toujours ce qu'il pense,
27:07 et en politique, vous savez quoi ? Il faut pas dire ce qu'on pense.
27:10 - Oui, et puis vous serez ennuyé dans les réunions... - Ah non, mais attendez, comme je répondais,
27:13 je lui avais répondu une fois, mais moi je serais peut-être élu
27:16 une fois, mais je serais jamais réélu, puisque quand on me dit des conneries,
27:19 je dis "bah non, attendez, et c'est quoi la politique ? C'est écouter
27:22 des connards, parfois jusqu'à plus d'heures, en dire "oui, oui, c'est très intéressant,
27:25 c'est très intéressant, et en prenant même des notes,
27:28 en faisant semblant d'être passionné." - La pause ! - Vous écoutez Pascal
27:31 Fraud et vous de 11h à 13h sur Europe 1, Franz-Olivier Gisberg
27:34 est notre invité, vous lui posez vos questions bien sûr en
27:37 composant le 01-80-20-39-21.
27:40 A tout de suite sur Europe 1.
27:43 Merci de nous rejoindre sur Europe 1 de 11h à 13h, c'est Pascal Fraud
27:46 et vous Pascal, on est avec votre invité, Franz-Olivier Gisberg
27:49 qui a sorti son dernier tome, tome 3,
27:52 "Histoire intime de la Ve République", la semaine dernière,
27:55 "Tragédie française", aux éditions Gallimard.
27:58 - Sous le ciel de Paris s'envole une chanson
28:01 - Hé, hé, hé, Galinette !
28:04 - Non, non, c'est reparti !
28:07 On a réveillé la bête ?
28:10 - Non ! - Émerveillement
28:13 à l'instant de Franz-Olivier Gisberg quand Olivier Guenet
28:16 qui est rentré dans le studio, il lui a dit
28:19 "M. Boubouc, c'est vous ? C'est vous ?
28:22 Je vous voyais un peu plus vieux à l'époque."
28:25 - Je pensais qu'il avait 40-50 ans.
28:28 - Ah oui ? - Non !
28:31 - Il est un sens de la répartie. - Le double !
28:34 - Merci beaucoup. - Exceptionnel.
28:37 - Ça s'appelle les fulgurances. - J'espère que je ne serai plus seul à 40-45 ans
28:40 si je peux me permettre. - Oui, parce qu'il est seul.
28:43 Demain, c'est la journée des célibataires. Je ne sais pas si vous êtes concernés ou pas
28:46 mais lui, en revanche, c'est un célibataire. - C'est ma fête.
28:49 - C'est tous les jours sa fête. C'est un célibataire parce qu'il a
28:52 un souci malgré ce physique quand même avantageux.
28:55 - Merci. - Et puis cette gaieté,
28:58 cette fantaisie qui est la vôtre, malheureusement, dans le dernier
29:01 moment, il y a
29:04 un arrêt sur image. - Oui, exactement.
29:07 - Montant ce que vous disiez sur Montant.
29:10 - Je peux faire un petit point ? - Oui, allez-y.
29:13 - Je vais vite. Henri nous écrit "Je n'avais pas prévu d'acheter le livre
29:16 mais à l'écouter, je vais le faire, c'est certain."
29:19 Thibault également sur un autre page, "On dirait que Pascal et
29:22 France Olivier pourraient parler des heures comme ça sans s'arrêter."
29:25 Et on termine avec Elisabeth, "Des hommes comme France Olivier,
29:28 ce sont des puits de connaissances et je dois dire que c'est très séduisant."
29:31 Voilà, vous avez une touche avec Elisabeth. - Ce qu'on aime, effectivement,
29:34 c'est les portraits, c'est ce côté Saint-Simon, c'est ce côté
29:37 Sfeg, parce que c'est de la lecture aussi plaisir et puis c'est des gens qu'on connaît.
29:40 En 90 décède à Yves Montant, pendant
29:43 un tournage, immigré italien de Marseille, il incarnait l'esprit français
29:46 comme personne, roublard, bridé d'amour,
29:49 le roi de l'oeil à l'œil des yeux. - On était très potes.
29:52 - C'était le dragueur le plus rassé que j'ai rencontré,
29:55 virtuose de la révérence, pour avoir pas mal
29:58 circulé avec lui, je crois qu'il a peuplé la France de beaucoup
30:01 de petites et petits montants.
30:04 Je savais pas que vous étiez potes à ce point avec lui.
30:07 - Pas très potes, mais c'est vrai qu'on a fait quelques petites virées
30:10 comme ça ensemble et moi j'étais très étonné par sa
30:13 vitalité, sa vigueur.
30:16 - Et puis c'est vrai que ses portraits, ils sont formidables.
30:19 Pierre Bérégovoy vous dit "Il ne savait pas que derrière
30:22 son dos, tout le monde y compris, peut-être Mitterrand, le surnommait
30:25 "gratte-couille" à cause d'une étrange habitude
30:28 glissant régulièrement sa main dans la poche de son pantalon,
30:31 il remettait à l'intérieur de son caleçon
30:34 son engin qui avait tendance à se balader".
30:37 C'est terrible. - Non mais c'est la vérité.
30:40 - Mais oui je suis d'accord avec vous, mais on l'appelait vraiment "gratte-couille".
30:43 - Oui, oui, elle est lisée, pas à l'extérieur.
30:46 - Oui, bien sûr. - Elle est lisée à l'intérieur de ses collaborateurs, quand il était secrétaire
30:49 général et même après, de temps en temps, j'entendais
30:52 - C'est un personnage, c'est terrible d'ailleurs.
30:55 - Un peu fat. - Ah oui ?
30:58 - Oui, Bérigouvoir, très très vaniteux, assez comique même.
31:01 Oui, ça donnait vraiment une idée
31:04 de l'infini, mais ça arrive de temps en temps chez les politiques,
31:07 chez certains politiques. - Oui mais c'est pas son image, au contraire, son image
31:10 chez le petit ouvrier qui arrive premier ministre et qui est
31:13 lâché par Mitterrand, qui ne l'appelle même plus après les
31:16 élections législatives de 93. - Oui mais Mitterrand n'avait pas
31:19 une grande passion pour lui, parce qu'il avait trahi tout le monde, donc il y avait tout se passer.
31:22 C'est pour ça que c'est bien d'être vieil quand vous êtes dans les coulisses,
31:25 à l'intérieur, vous connaissez la vérité des gens
31:28 et d'une certaine manière, on connaît jamais tout à fait la vérité des gens.
31:31 Mais enfin, vous la connaissez mieux que vu de l'extérieur
31:34 et la vérité, c'est par exemple Mitterrand
31:37 était toujours un peu gêné, il avait rejoint Mitterrand
31:40 mais il avait quand même trahi Savary, il avait trahi tout le monde,
31:43 il avait trahi Moroy, il avait tout ça pour rejoindre à la fin Mitterrand,
31:46 mais il avait trahi beaucoup de monde. Et puis
31:49 en plus, il avait participé vraiment
31:52 en première ligne
31:55 à toutes les bêtises économiques de 1981.
31:58 Alors après, si vous voulez, c'était devenu la coqueluche
32:01 du patronat, la coqueluche des médias
32:04 parce qu'il était soudain devenu libéral.
32:07 En même temps, il a planté la France, quand vous regardez le bilan économique
32:10 de Bérégovoy Premier ministre, c'est une catastrophe.
32:13 Et si vous voulez, moi, c'est une leçon
32:16 aussi, c'est quand un type est très bien vu par le patronat
32:19 et par les médias, comme l'a été Bérégovoy, en général c'est une catastrophe.
32:22 - Et dans les portraits aussi, Jack Lang est un mélange
32:25 de lion, pieuvre, mille pattes et un chien de chasse
32:28 sans oublier le célèbre sparadrap du capitaine Haddock
32:31 impossible de s'en débarrasser avec
32:34 tous ses défauts. Il aura été le meilleur ministre de la culture
32:37 de la Ve République avec André Malraux.
32:40 Que me dites-vous, M. Olivier Guenec ?
32:43 - Oui, M. Gisbert a le taxi qui est là.
32:46 J'aimerais pas le déranger, mais le taxi l'attend.
32:49 - Ecoutez, lisez ce livre.
32:52 Mon ami Michel Charas me l'appelle un jour
32:55 de l'Elysée pour m'apprendre que Mitterrand vient de lui demander à mon sujet
32:58 comment fait-il pour plaire ? Vous connaissez son secret ?
33:01 Tu lui diras, répondis-je ou réponds-je,
33:04 que j'ai toujours suivi le concept de Saint-Augustin
33:07 la mesure de l'amour, c'est d'aimer son
33:10 mesure. Mieux que le pouvoir et l'argent, il n'y a que
33:13 l'amour pour féconder l'amour. La mesure de l'amour, c'est d'aimer
33:16 son mesure. - Son mesure et toujours plus.
33:19 Oui, ça, je crois que ça a toujours été
33:22 ma conception de l'amour. Et j'adore l'amour.
33:25 - Oui, mais tout le monde aime l'amour.
33:28 - Oui, mais il faut pas être chiche, il faut pas compter.
33:31 Il y a de la variïce en amour. - Faut être généreux.
33:34 - Non, c'est pas un problème de générosité. - Faut s'engager.
33:37 - Oui, faut être prêt à tout.
33:40 Chaque fois que je suis tombé amoureux, par exemple, j'ai
33:43 une espèce de réflexe un peu idiot, d'ailleurs, je le fais pas.
33:46 Mais je suis prêt à mourir pour elle.
33:49 Ça m'est toujours arrivé, c'est idiot. - Bah non, mais je pense
33:52 que les femmes doivent aimer, je pense que vous avez du succès.
33:55 - C'est peut-être juste ça, d'ailleurs, mais c'est vrai
33:58 que quand j'aime, j'aime. Et j'aime toujours plus.
34:01 - Je m'endors avec lui.
34:04 - C'est trop beau, ça.
34:07 - J'adore.
34:10 - C'est merveilleux.
34:13 - Vous êtes un temple.
34:16 - Le taxi doit repartir. - Oui, j'ai compris
34:19 que le taxi attend, il peut attendre deux minutes.
34:22 - Mais c'est Florian Carasou-Mayoc.
34:25 - Florian Carasou-Mayoc, et là ils sont tous avec vos affaires de taxi.
34:28 On parle d'amour, vous êtes en train de nous parler de taxi.
34:31 - Franchement, vous êtes...
34:34 Soyez chevaleresques, ça m'étonne pas que ça marche pas.
34:37 - Doucement, doucement.
34:40 - Soyez troubadours. - Mais c'est reféré sur son salaire, après.
34:43 - Je me dis que c'est son salaire.
34:46 - On applaudit.
34:49 - Bravo, bravo.
34:52 - On rappelle le nom de l'ouvrage du livre
34:55 "Histoire intime de la Ve République", le tome 3, "Tragédie française".
34:58 Et vous me disiez, François-Olivier, que le coffret
35:01 pour Noël, pour un beau cadeau,
35:04 je l'offrirai à mon père.
35:07 - On laisse partir François-Olivier avec la chanson de Véronique Sanson, "Tellement elle est belle".
35:10 - Magnifique.
35:13 - Quelle voix.
35:16 Quelle voix Véronique Sanson.
35:19 - François-Olivier, mon père est en train de s'habiller,
35:22 il va quitter le studio dans une seconde.
35:25 - Avec la musique de Véronique Sanson.
35:28 Nous lui disons au revoir, madame Monsieur Bonsouel.
35:31 - C'est émouvant.
35:34 - Nous vous embrassons, Monsieur Franck. C'était un plaisir. Vraiment que c'est émouvant.

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